Archive dans août 2020

Tousser en entreprise, faute grave en temps de Covid ?

Le non-respect des gestes barrières dans l’entreprise pendant l’épidémie de Covid-19 constitue-t-il une faute grave pouvant justifier un licenciement ? Le conseil des prud’hommes de Macon (Saône-et-Loire) va devoir se prononcer sur cette question, saisi par Matthieu Favre, 41 ans. Cet ouvrier viticole des grands crus de Bourgogne, qui travaillait depuis 10 ans en contrat à durée indéterminée dans l’entreprise de Florian Ducote, vigneron à Prissé (Saône-et-Loire), a été licencié pour faute grave.

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Dans la lettre de licenciement datée du 17 avril, la direction lui reproche de s’être « mis à tousser sur l’un de (ses) collègues » le 16 mars, alors que M. Ducote expliquait devant les salariés les gestes barrières. L’employeur indique lui avoir fait remarquer que « ce type d’agissements (..) pouvait avoir un impact sur la santé des autres salariés », peut-on lire dans la lettre. Pourtant, « vous avez réitéré ce comportement », écrit l’employeur, ajoutant que des salariés lui « ont fait remonter leur inquiétude sur leur possible contamination ».

Sans aucune indemnité

Quelques jours plus tard, une infirmière du CHU de Mâcon est intervenue « pour expliquer de nouveau les gestes barrières » au personnel. M. Favre se serait alors « retourné » vers un salarié et aurait « toussé dans sa direction manifestement volontairement ». Pour l’employeur, « la parfaite insubordination » de M. Favre nécessite alors un avertissement. Le 23 mars, M. Favre aurait « à nouveau toussé sur » M. Ducote. La direction décide de le mettre à pied à titre conservatoire, sans salaire avant de le licencier « pour faute grave », avec effet immédiat, sans aucune indemnité, donc.

M. Favre souligne qu’à cette période, l’entreprise ne fournissait « que des gants, pas de masques ni de gel hydroalcoolique » et nie avoir eu le comportement qu’on lui reproche : « Quand on a une crise d’éternuements, ça vient d’un coup, mais je n’éternue pas sur les gens ! » De même, quand il a toussé alors qu’il conduisait la voiture de l’entreprise avec un travailleur saisonnier comme passager, « je n’ai pas toussé sur lui, j’ai toussé en regardant la route », assure-t-il.

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« L’employeur rappelle les gestes barrières aux salariés, relève Stéphane Teyssier, l’avocat de M. Favre, mais lui-même ne respecte pas la législation sur la santé et la sécurité au travail en ne mettant pas de masques à disposition ni un second véhicule », puisqu’il n’y a pas un mètre entre le conducteur et le passager.

Pour l’avocat de l’employé, la direction a inventé une faute pour se débarrasser de son ouvrier « à cause de son état de santé »

Pour justifier la faute grave, l’avocat de l’employeur, Jean-François Merienne, indique disposer d’« attestations de deux salariés saisonniers : l’un déclare que M. Favre n’a pas respecté les gestes barrière à trois reprises, l’autre, qu’il a manifestement toussé volontairement vers lui et n’a pas toussé dans son coude ».

Pour M. Teyssier, la direction a inventé une faute pour se débarrasser de son employé « à cause de son état de santé ». En 2017 et 2018, M. Favre a eu plusieurs arrêts pour maladies professionnelles et pour un accident du travail durant presque une année. « On s’entendait bien jusqu’à ce que je tombe malade », souligne M. Favre.

Le numérique crée « deux mondes du travail opposés : les surmenés et les surnuméraires »

Tribune. Je suis un acteur du numérique, totalement convaincu des progrès que permet la technologie. Mais souvent, j’ai l’impression d’être dans une bulle, où les start-up, les technologies et l’innovation ne rencontrent pas la réalité sociale de notre pays.

Dans le monde numérique, ce qui saute au visage est « l’automatisation généralisée », pour reprendre l’expression du philosophe Bernard Stiegler décédé le 6 août. Chacun pensera au receveur de péage qui a disparu ou à l’hôte de caisse (150 000 emplois en équivalents temps plein) sur la sellette, malgré le Covid-19.

Le besoin de qualification explose

Mais au-delà des robots-machines, l’automatisation, ce sont aussi les robots-logiciels, à travers les algorithmes, les objets communicants, les capteurs, les réseaux sociaux et l’ensemble de l’appareil de calcul intensif sur données massives (« big data »). Ainsi, l’agent de change qui criait ses ordres boursiers jusqu’en 1998 n’a pas été remplacé par des machines physiques mais par des algorithmes et des serveurs.

On pourrait dire que ce mouvement est normal, que des métiers deviennent obsolètes avec le progrès technique depuis toujours. L’industrie financière n’a-t-elle d’ailleurs pas créé 70 000 emplois entre 2009 et 2015, selon les statistiques du ministère du travail ?

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Mais ce qui est propre au moment que nous vivons est que les emplois créés et les emplois détruits n’ont rien à voir en termes de qualification. L’ouvrier agricole qui quittait sa campagne pour rejoindre les usines Renault de Billancourt au début du XXe siècle était formé rapidement à une tâche simple et répétée. Or, dans notre cas, le besoin de qualification explose et fait que ceux dont l’emploi est en trop et ceux dont on aura besoin ne sont pas du tout les mêmes. Ou, pour le dire autrement, transformer une caissière en datascientist ne se fera pas.

Au contraire, ce qui se joue est une réalité plus fracturée, la création de deux mondes du travail très opposés : les surmenés et les surnuméraires.

Fracture grandissante

Les surmenés ont pris le train de l’automatisation, des opportunités qu’elle crée et du mouvement permanent qu’ils apprécient. Mais ils croulent face à l’immensité (passionnante) de la tâche.

Les surnuméraires, eux, ont compris que le processus productif n’a plus besoin d’eux. Pris dans l’accélération, ils vont résister avec l’énergie du désespoir pour conserver ce qui peut l’être. Ils savent que le combat est perdu, mais que faire d’autre que mourir les armes à la main ?

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2 800 recrutements à Pôle emploi pour accompagner les jeunes et les chômeurs face à la crise sociale

Des forces vives étaient réclamées par les agents face à la déferlante de nouveaux chômeurs qui s’annonce dans les mois à venir, conséquence de la crise sociale provoquée par l’épidémie de Covid-19. Pôle emploi va renforcer ses effectifs avec 2 800 recrutements « pour accompagner les jeunes » et faire face à cette hausse inexorable du chômage, a annoncé dimanche 30 août la ministre du travail, Elisabeth Borne.

« On a prévu 1 300 emplois supplémentaires à Pôle emploi pour accompagner les jeunes, (…) 650 dès le mois de septembre », a-t-elle indiqué sur BFM-TV. En outre, il y aura 1 500 embauches, « dès le mois de septembre également, pour faire face à l’augmentation du nombre des demandeurs d’emploi », a poursuivi la ministre.

Ces 2 800 recrutements (en équivalent temps plein) se feront soit en CDI, soit en CDD, a-t-elle précisé.

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Le Monde avec AFP

« Les accords de performance collective s’inscrivent dans une logique de mieux-disant social »

Tribune. La crise économique actuelle, conséquence de la crise sanitaire du Covid-19, aboutit inévitablement à une situation de stress intense pour de nombreuses entreprises, et donc à de fortes menaces sur l’emploi. Dans ce contexte, les accords de performance collective (APC) signés dans un nombre croissant d’entreprises, qui associent sur des périodes définies des garanties d’emploi à des baisses de rémunération, présentent un réel intérêt.

Certains y voient le risque d’un « moins-disant social », notamment de pertes d’avantages acquis. Cette critique reflète une vision passéiste de l’articulation de l’économique et du social. Une vision où les intérêts du capital et du travail sont inévitablement antagonistes et où tout compromis entre ces deux parties ne peut être qu’un marché de dupes.

Dans une telle vision, les normes édictées par le droit positif, dont le code du travail, seraient les plus à même de définir un cadre protecteur au travailleur. Pourtant, dans de nombreux pays, par exemple les pays nordiques ou scandinaves qui étaient au plein-emploi avant la crise sanitaire, il est le plus souvent considéré que le rôle du droit positif est de constituer un socle sur lequel les normes élaborées par la négociation collective assurent la meilleure conciliation entre protection du travailleur et efficacité économique.

L’APC a été créé par les ordonnances travail de septembre 2017 et confirmé par la loi Pénicaud de mars 2018. Il succède à l’accord de maintien de l’emploi (AME) créé par la loi de juin 2013 qui transposait l’accord national interprofessionnel signé par les partenaires sociaux en janvier de la même année.

Trop verrouillé, malgré quelques réformes, l’AME n’a connu qu’un très faible succès.

L’intérêt du collectif

L’APC, en revanche, permet d’introduire de nombreux changements organisationnels dans l’entreprise, ainsi qu’une éventuelle baisse des salaires. Le refus d’un salarié d’un des éléments de l’APC affectant son contrat peut constituer une cause réelle et sérieuse de son licenciement. L’APC peut donc mordre de façon sécurisée sur des éléments essentiels du contrat de travail. Dans certaines limites, il permet de faire primer l’intérêt de la collectivité de travail sur celui du travailleur individuel.

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Quand des représentants syndicaux (nécessairement majoritaires) signent un accord de performance collective prévoyant une baisse temporaire des rémunérations, c’est qu’ils considèrent que le compromis porté par un tel accord comporte d’autres éléments qui compensent cette perte. Ce compromis est un ensemble de dispositions, dont certaines considérées isolément peuvent sembler défavorables et d’autres au contraire favorables à chacune des deux parties signataires.

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Sept organisations syndicales appellent à une journée de grève le 17 septembre

Lors d’une manifestation de la CGT en juillet à Bouguenais (Loire-Atlantique), où sont situés les bureaux régionaux de la filiale d’Air France HOP!.

Près de deux mois après l’appel de la CGT à une journée de grèves et de manifestations le 17 septembre, la Fédération syndicale unitaire (FSU), Solidaires et des organisations de jeunesse (FIDL, MNL, UNEF, UNL) ont rejoint l’appel dans un communiqué commun, publié jeudi 27 août.

« La question de l’emploi est centrale » pour les sept organisations, qui énumèrent leurs revendications : « lutte contre la précarité et la pauvreté, hausse des salaires, développement des services publics, abandon définitif de la réforme des retraites ». Elles appellent à « une première journée d’action » le 17 septembre, « selon des modalités à définir dans les secteurs professionnels et les territoires (grèves, manifestations, rassemblements, etc.) ». La fédération CGT des cheminots a annoncé vendredi avoir déposé un préavis pour une grève du mercredi 16 septembre, à 20 heures, jusqu’au vendredi 18 septembre à 7 h 55.

Le 9 juillet, juste après avoir été reçu par Jean Castex, alors fraîchement nommé premier ministre, Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, avait appelé à une journée de grèves et de manifestations le 17 septembre. « Après la rencontre avec le premier ministre, toujours rien de concret pour l’emploi et les salaires. Il faut passer des paroles aux actes », avait expliqué la CGT.

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Des aides aux « multinationales sans contrepartie et contrôle d’utilisation »

Les sept organisations exigent la gratuité des masques pour les collégiens, les lycéens et les étudiants. « La réduction du temps d’exposition également nécessaire induit de discuter de l’organisation, des conditions de travail et [de] réduction du temps de travail », ajoutent-elles, réclamant une baisse horaire « sans perte de salaire », au lendemain de l’appel de Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, à « rouvrir le débat » sur le temps de travail.

« Il est également temps d’en finir avec les aides publiques de toute nature dont bénéficient de grandes multinationales sans contrepartie et contrôle d’utilisation », ajoutent les syndicats. Force ouvrière, qui a bataillé cet hiver avec la CGT contre la réforme des retraites, ne s’associe pas à cet appel mais rejoint une large partie de leurs positions, dans un communiqué séparé réagissant à la conférence de presse de Jean Castex consacrée à l’épidémie.

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FO « conteste » le fait que la prise en charge des masques ne soit pas systématique pour les élèves. Elle « réitère sa revendication que les aides publiques soient (…) évaluées quant à leur efficacité sur l’emploi, conditionnées systématiquement à l’interdiction des licenciements et du versement de dividendes et contrôlées en conséquence ».

La confédération estime « indispensable » que le plan de relance « conduise au maintien et à la relocalisation d’industries et de services et s’accompagne d’une action résolue contre la spéculation boursière improductive et l’évasion fiscale, ainsi que de la responsabilisation des donneurs d’ordres sur les sous-traitants ».

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Le Monde avec AFP

« Cela fait deux mois que j’attends cette annonce ! » : salariés et patrons face à la généralisation du masque en entreprise

A Paris, le 27 mai 2020.

Il n’y a pas que le petit dernier qui appréhende la rentrée. Alors que, depuis le 16 juillet, selon les données de Santé publique France, les entreprises comptent davantage de foyers épidémiques que les établissements de santé, salariés et patrons regardaient l’horizon de septembre s’approcher avec anxiété.

A l’heure du retour des vacances, l’annonce faite mardi 18 août par la ministre du travail, Elisabeth Borne, concernant l’obligation du port du masque en entreprise dans « tous les espaces clos et partagés », « salles de réunion, couloirs, vestiaires, open spaces » compris, à partir de la « fin août », a donc été accueillie avec un mélange de soulagement, d’espoir mais aussi de résignation par les salariés ayant répondu à l’appel à témoignages publié sur le site du Monde.

Les chefs d’entreprise interrogés, eux, approuvent dans l’ensemble la mesure, mais pour des raisons davantage économiques que sanitaires, tout en attendant des précisions sur ses modalités concrètes d’application – une circulaire doit être publiée d’ici au 1er septembre.

Le masque, « équipement individuel de sécurité »

« Toutes les mesures de protection dans les entreprises sont très positives, car le risque le plus important est de revenir à un reconfinement global, qui serait catastrophique », souligne Olivier Schiller, président de Septodont, leader mondial de l’anesthésie dentaire. Au deuxième trimestre 2020, le produit intérieur brut français a en effet reculé de 13,8 %. Le retour d’un confinement, tel qu’instauré entre le 17 mars et le 11 mai, est désormais devenu le pire cauchemar des chefs d’entreprise.

Reste que cette mesure a un coût : désormais considéré comme un « équipement individuel de sécurité », le masque sera à la charge de l’employeur. Une nouvelle source d’inquiétude, notamment pour les petites structures. « L’Etat doit prendre ses responsabilités et financer l’achat de masques pour les entreprises, qui sont aujourd’hui dans l’incapacité d’ajouter ce coût supplémentaire à leurs dettes », a déclaré auprès du Monde Marc Sanchez, président du Syndicat des indépendants.

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Pour l’heure, cette demande, restée lettre morte, préoccupe d’autant plus les chefs d’entreprise qu’« il y a un risque de perte de productivité importante dans des activités comme la production ou la logistique », souligne Frédéric Coirier, coprésident du Mouvement des entreprises de taille intermédiaire et président du groupe Poujoulat, spécialisé dans la fabrication de cheminées.

« Avec les chaleurs actuelles, le port d’un masque est proche du calvaire », note Antoine, manutentionnaire dans un centre de tri postal

Sur les chantiers, dans des usines ou dans des entrepôts, certaines activités, très exigeantes physiquement, ou certaines conditions de travail, notamment dans des lieux surchauffés, se prêtent en effet difficilement au port permanent du masque.

« Je considère le port du masque comme important en toutes circonstances dans la lutte contre le coronavirus et dans ce sens, son obligation au travail est un point positif. Toutefois, comme je fais un métier physique, et avec les chaleurs actuelles, le port d’un masque est proche du calvaire », note Antoine (tous les prénoms des salariés ont été modifiés), manutentionnaire dans un centre de tri postal. Chaque heure, ce sont quelque 1 300 colis, « qui peuvent peser jusqu’à plusieurs centaines de kilos », qui passent entre ses mains et celles de ses collègues.

Ces gestes, harassants et cadencés, « occasionnent un souffle court et rapide », couplé à une importante sudation, explique le jeune homme. Résultat : l’humidité s’accumule dans le masque et rend la respiration de plus en plus difficile. Pour l’heure, Antoine porte son masque lors de ses déplacements dans le centre de tri, mais le retire lorsqu’il s’agit de charger les colis. « En contrepartie, j’évite au maximum le travail en binôme », poursuit-il.

Les souhaits d’aménagement de l’obligation du port du masque ont, eux, été entendus. « Il y aura la place pour des solutions pragmatiques », a déclaré le premier ministre, Jean Castex, mercredi devant les chefs d’entreprise réunis à l’université d’été du Medef, ouvrant la voie à de possibles accords de branche concernant les métiers physiques.

Parades

Dans les open spaces, où l’effort est avant tout cérébral, le soulagement prédomine. « Cela fait deux mois que j’attends cette annonce !, s’exclame Pauline, qui travaille dans la publicité. Depuis notre retour au bureau, je suis la seule masquée parmi une centaine de salariés, dans des open spaces de 30 personnes, toutes les unes sur les autres. »

D’autant qu’il est parfois difficile de rappeler les gestes barrières à ses collègues… voire à ses supérieurs. « Jusqu’ici, nos chefs se sentaient libres de ne pas le porter en salle de réunion [contrairement au protocole sanitaire en vigueur cet été]. Maintenant, tout le monde devra faire de même », souffle Elisabeth, architecte.

Certains soulèvent le caractère désagréable du port du masque, la buée sur les lunettes, les maux de tête après une longue journée… sans en faire un argument contre la généralisation du port du masque en entreprise, mais plutôt pour le retour du travail à domicile, démasqué.

« Pendant le confinement, on a expérimenté le télétravail. Quand est venu le déconfinement, on a cru que les habitudes allaient changer, mais ça n’a pas été le cas, regrette Leïla, consultante en stratégie. Les manageurs ont continué à vouloir voir leurs équipes physiquement au bureau, au quotidien, alors que l’ensemble de nos réunions sont effectuées à distance, car le client, également présent à ces réunions, n’accepte pas les prestataires dans ses bureaux. Pourquoi porter le masque toute la journée dans un open space, alors que nous pouvons télétravailler ? »

Selon la Dares, le service statistique du ministère du travail, le déconfinement a effectivement sonné la fin du télétravail pour de nombreux salariés. En mars, 25 % d’entre eux travaillaient depuis chez eux et 27 % sur site. En juillet, ils n’étaient plus que 10 % à être en télétravail, contre 57 % dans leurs locaux professionnels.

En l’absence d’accords de télétravail, vivement encouragé par Mme Borne lors de son annonce du 18 août, certains ont déjà trouvé des parades, comme Emmanuelle, fonctionnaire : « Pour éviter la cohue dans les transports publics, j’envisage la voiture. » Et au bureau ? « Aller aux toilettes très régulièrement. Toutes les heures. Pour respirer. »

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Vous êtes au chômage partiel ? Racontez-nous

Depuis le début de la crise liée à la pandémie, l’Etat a mis en place des mesures d’activité et de chômage partiels pour aider les entreprises à affronter la baisse d’activité.

Vous êtes entrés dans l’un de ces dispositifs : comment, dans quelles conditions ? Quel est votre nouveau rythme de travail ? Vivez-vous cette période avec sérénité, car le chômage partiel permet de préserver les emplois, ou avec inquiétude face à l’avenir et la sortie du dispositif ? Craignez-vous de perdre votre poste malgré tout ? Comment occupez-vous votre temps libre ? En profitez-vous pour vous former ? Racontez-nous.

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Coût de la garde d’enfant : le grand écart d’un département à l’autre

Outre le salaire net de l’assistant(e) maternel(le), une indemnité d’entretien est notamment à verser.

Avec 1,04 million de familles y ayant recours, et malgré un nombre qui s’érode au fil des années, les assistant(e)s maternel(le)s demeurent le premier mode de garde des jeunes enfants, en dehors des parents eux-mêmes. A quel coût pour les familles ?

Au dernier trimestre 2019, le salaire horaire net moyen de ces professionnels s’élevait à 3,59 euros par enfant accueilli, hors congés payés, selon le baromètre de l’Observatoire des emplois de la famille, publié le 24 août. Soit une augmentation de 1,9 % sur un an.

2,90 euros dans l’Orne, 4,60 euros en Haute-Corse

« Ce montant moyen recouvre toutefois d’importantes disparités territoriales », souligne Isabelle Puech, directrice de cet observatoire, qui relève de la Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem). Ces tarifs reflétant l’offre et la demande, les taux horaires les plus élevés coïncident, sans surprise, avec les départements où le nombre de places proposées par enfant chez les assistant(e)s maternel(le)s est moins élevé qu’ailleurs, note l’étude.

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Le salaire net moyen va de 2,90 euros dans l’Orne et la Sarthe à 4,60 euros en Haute-Corse, soit un écart de presque 60 %. Il dépasse les 4 euros dans quinze départements : la Haute-Corse, La Réunion, la Corse-du-Sud, la Guyane, les Bouches-du-Rhône, les Hauts-de-Seine, le Var, etc.

Ce salaire net par enfant accueilli se négocie entre les deux parties. Il ne peut toutefois être inférieur à un minimum : 0,281 fois le smic brut, soit 2,23 euros net (2,19 euros pour le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle) depuis le 1er janvier.

Comment évaluer le coût final

Attention, ce salaire net de l’assistant(e) maternel(le) ne représente, pour le parent, qu’une part du coût de la garde. S’il ne règle, dans le cas général, pas de cotisations sociales pour son salarié, il lui verse en revanche obligatoirement une indemnité d’entretien (minimum 3,11 euros par enfant pour une journée de neuf heures), d’éventuels frais de repas et une indemnité kilométrique. Ainsi que ses congés payés.

Pour calculer le coût de revient de la garde d’un enfant de moins de 6 ans, il convient en outre de déduire les aides financières accordées – le complément de libre choix du mode de garde (CMG, dont le montant varie selon les ressources du foyer et l’âge de l’enfant, et qui est touché pour chaque enfant éligible) et un crédit d’impôt égal à la moitié du reste à charge, jusqu’à 1 150 euros par enfant par an.

De plus en plus de gardes à domicile

Les tarifs des gardes d’enfants à domicile varient aussi en fonction des territoires, mais de façon moins marquée que pour les assistant(e)s maternel(le)s – le département le plus cher, la Guyane (10 euros net de l’heure, hors congés payés), l’étant environ 18 % plus que le moins onéreux, la Haute-Saône (8,50 euros). La moyenne nationale au 4e trimestre 2019 s’élève à 9,30 euros, en hausse de 1,8 % sur un an, tandis qu’à Paris, le tarif moyen est de 9,50 euros.

S’il reste un mode bien moins courant que l’assistant(e) maternel(le) ou la crèche, le recours aux gardes d’enfants à domicile (chez les parents, donc) tend à se développer au fil des années, avec « 128 400 parents employeurs [45 % en Ile-de-France] employant 117 400 » salariés, indique le baromètre.

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L’emploi d’une garde à domicile répond à une logique financière différente de celle de l’assistant(e) maternel(le). Le salaire horaire ne s’entend pas par enfant mais par employé (il peut tout de même être partagé entre deux familles dans une « garde partagée »).

Le versement du salaire net est complété par la prise en charge d’une partie des frais de transports de l’employé (par exemple 50 % de son abonnement aux transports en commun). Et il faut payer les cotisations et contributions sociales sur son salaire (une exonération de 50 % s’appliquant toutefois dans le cas général ainsi qu’une déduction de 2 euros par heure).

Comme pour l’assistant(e) maternel(le), le coût final peut être allégé par la perception du CMG (mais un seul peut être touché par famille, même si la nounou garde plusieurs de ses enfants) et par un crédit d’impôt de la moitié des dépenses, avec un plafond plus généreux : 6 000 euros pour un enfant à charge et jusqu’à 7 500 euros avec deux enfants ou plus.

L’impact de la crise liée au Covid-19

Quant à prévoir l’évolution de ces coûts pour l’année qui s’amorce en septembre, c’est pour l’heure impossible, répond Isabelle Puech, qui rappelle que les prix dépendent fortement de l’offre et de la demande, et que l’évolution de la demande est perturbée par le contexte sanitaire et économique.

« Les difficultés financières des familles et les pertes d’activité professionnelle pourraient jouer sur la demande de garde », indique-t-elle.

D’un autre côté, poursuit-elle, les modes de gardes individuels que constituent les assistant(e)s maternel(le)s et les nounous à domicile pourraient rassurer davantage les parents, dans le contexte, que les modes collectifs (crèches) – le risque de transmission du virus étant plus limité par le plus faible nombre d’enfants gardés ensemble, tout comme le risque de « fermeture » du mode de garde en cas d’aggravation de la situation sanitaire.

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Mme Puech souligne que pour les gardes à domicile, comme pour les autres salariés exerçant chez l’employeur, le salaire minimal conventionnel, négocié annuellement par les représentants des salariés et employés du secteur, devrait être revu à la hausse dans les mois à venir. Pour sa part, le salaire minimal des assistant(s) maternel(le)s est augmenté automatiquement chaque année au 1er janvier car il suit le smic. La formule de calcul, fixée par décret en 2006, fait toutefois l’objet de revendications syndicales.

Au Technocentre Renault dans les Yvelines, 10 000 ingénieurs dans la tourmente

C’est le plus grand complexe de recherche et développement (R&D) de France mais, avec ses faux airs de vaisseau spatial géant égaré dans les Yvelines, le lieu sonne vide depuis cinq mois. « En juillet, j’étais seule sur un plateau de 100 personnes, c’était impressionnant et un peu glaçant », raconte Alexandra (les noms des ingénieurs ont tous été modifiés à leur demande), manageuse au Technocentre Renault de Guyancourt, le site tertiaire de tous les superlatifs : 10 500 salariés (sans compter les sous-traitants), 400 000 mètres carrés, 900 salles de réunion, 19 cantines…

Bien malgré elle, cette cité des ingénieurs automobiles symbolise les mois incertains qui s’annoncent pour les cols blancs. Dans le cadre de son plan de restructuration, le constructeur prévoit un plan de réduction des coûts dans l’ingénierie (800 millions d’euros économisés, 1 500 postes supprimés en France, sur trois ans), le Technocentre est un condensé des périls qui s’amoncellent pour les cadres et techniciens de haut niveau du groupe au losange en cette fin de 2020.

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C’est d’abord la crise du Covid-19 qui a fait taire le vrombissement de « la Ruche » – c’est ainsi qu’est baptisé le bâtiment central où tous les projets sur les véhicules sont menés. Lors du confinement, le Technocentre s’est mis au télétravail, à l’exception de quelques salariés. Le 15 mars, on ne comptait plus que 500 personnes dans les coursives du bâtiment. Le 10 juillet, la jauge est remontée à 60 %. Du coup, l’entreprise en profiterait volontiers pour accentuer le virage du télétravail dans ses activités tertiaires. La direction et les syndicats sont en train de finaliser un accord qui devrait, à partir du 7 septembre, organiser une obligation de travail à distance de trois jours par semaine.

Angoisses

Or, à cette révolution des habitudes vient s’additionner une couche d’incertitudes voire d’angoisses. L’ingénierie de Renault est pointée comme trop dispendieuse pour une entreprise qui a perdu 7 milliards d’euros au premier semestre 2020. C’est en tout cas le diagnostic du nouveau directeur de l’ingénierie, Gilles Le Borgne, arrivé de PSA en janvier. « Nous devons améliorer la performance de notre ingénierie, tranche-t-il. Les coûts de validation de nos projets, par exemple, sont trop élevés. Les maquettes, les avant-séries, les prototypes sont trop nombreux et trop chers. »

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Au programme : diminution des voyages, de l’expatriation, des mètres carrés utilisés. Et une baisse drastique du recours à des prestataires extérieurs. « Il y a, depuis janvier, une très forte réduction des contrats de sous-traitance », constate Valérie Sonnefraud, responsable syndicale CFE-CGC de l’établissement. Habituellement, ce sont plus de 2 000 ingénieurs et techniciens extérieurs à Renault qui ont accès au Technocentre.

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Covid-19 : pour l’exécutif, faillites et suppressions d’emplois « commencent maintenant »

Des employés d’Airbus protestent contre les futures suppressions de postes au sein de l’avionneur, à l’aéroport de Toulouse-Blagnac, le 8 juillet.

Pour l’exécutif, c’est un fait acquis. L’automne sera « désastreux » en matière d’emploi. Les plans sociaux, qui se sont déjà multipliés cet été, vont connaître un boom sans précédent au cours des semaines à venir et des prochains mois.

« On n’a encore rien vu. C’est maintenant que les entreprises font le bilan de leur année et préparent leur prochain exercice. Beaucoup vont se dire qu’elles doivent licencier pour survivre. Les faillites et les suppressions d’emplois commencent maintenant ! », s’alarme un ministre de poids, qui surveille les statistiques des différents secteurs comme le lait sur le feu.

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De fait, le chômage ne s’est pas envolé durant l’été. Le nombre de demandeurs d’emploi a même diminué de 4,1 % en juillet, avec 174 300 personnes de moins inscrites en catégorie A – qui n’ont pas travaillé du tout pendant le mois –, après une envolée lors du confinement (+ 7 % en mars, + 22 % en avril), selon les statistiques de la Dares (la direction des études du ministère du travail), publiées mercredi 26 août.

« Les entreprises sont en train de faire leurs comptes »

Mais cette baisse est en trompe-l’œil : il s’agit essentiellement de personnes qui avaient perdu leur emploi pendant le confinement et ont retrouvé une activité réduite (intérim, temps partiel) avec le déconfinement, engagé le 11 mai. « Les entreprises sont en train de faire leurs comptes. Nous allons avoir des centaines de milliers de chômeurs en plus », assure ce membre du gouvernement.

L’opinion ne s’y trompe pas, qui a placé la lutte contre le chômage en tête de ses préoccupations. Selon un sondage Viavoice publié mercredi par Libération, l’emploi est, pour les Français, l’enjeu prioritaire de cette rentrée (48 %), devant la santé (46 %), l’environnement (40 %) et le pouvoir d’achat (40 %). La sécurité n’arrive qu’en cinquième position (33 %). « C’est pour ça que le président a mis la pression sur les patrons pendant le confinement, pour leur dire de garder les emplois le plus possible », souffle un proche d’Emmanuel Macron.

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Afin de limiter les dégâts, l’exécutif multiplie les annonces depuis le printemps. Les mesures de chômage partiel, décidées lors du confinement et estimées à 24 milliards d’euros, seront prolongées jusqu’au 1er novembre, a annoncé mercredi le premier ministre, Jean Castex, à l’université d’été du Medef.

De même, le dispositif d’« activité partielle de longue durée » – qui permet à une entreprise de faire prendre en charge par l’Etat une partie du salaire de ses employés pour une période allant jusqu’à deux ans – va être développé. « J’encourage toutes les branches dont l’activité va être en dessous de ce qu’elle était avant la crise à se saisir de cet outil », a plaidé la ministre du travail, Elisabeth Borne.

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