Vers une énième réforme de l’assurance-chômage ?

Gabriel Attal à l’Assemblée nationale le 08 juillet 2025.

Simple ballon d’essai pour tâter le terrain ou scénario réellement à l’étude ? L’idée de durcir, pour la énième fois, les règles de l’assurance-chômage circule de nouveau, à quelques jours de la présentation par le gouvernement de sa stratégie budgétaire. Elle a été évoquée, mercredi 9 juillet, par le quotidien Les Echos. A ce stade, l’exécutif s’est borné à répondre que rien n’était arbitré tout en donnant rendez-vous mardi, le jour où le premier ministre, François Bayrou, doit divulguer un plan de redressement des comptes publics. De tels éléments de langage peuvent être vus comme une manière de reconnaître que la solution est bel et bien étudiée.

Le fait que cette hypothèse remonte à la surface n’est pas totalement étonnant. Elle avait déjà été mentionnée le 3 avril à l’Elysée, lors d’une réunion à laquelle participaient le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, et plusieurs membres du gouvernement pour aborder l’agenda des réformes à venir. Depuis, des figures qui soutiennent l’équipe au pouvoir se sont évertuées à entretenir la flamme. Parmi elles, Gabriel Attal, président du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale. A plusieurs reprises, ces dernières semaines, il a affirmé la nécessité de revoir les dispositions sur l’indemnisation des demandeurs d’emploi en rappelant qu’il avait porté un projet en ce sens, en 2024, lorsqu’il était premier ministre.

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Le détail du plan du gouvernement pour lutter contre les accidents du travail

La ministre chargée du travail, Astrid Panosyan-Bouvet, à l’Assemblée nationale, le 8 juillet 2025.

Un plan ambitieux mais dont la mise en œuvre est loin d’être effective. La ministre chargée du travail, Astrid Panosyan-Bouvet, dévoile, vendredi 11 juillet, dans Le Monde, sa stratégie pour lutter contre les accidents du travail graves et mortels. Des orientations qu’elle a présentées au patronat et aux syndicats, le même jour, lors d’un comité national de prévention et de santé au travail, avec pour objectif de les rendre opérationnelles à partir de 2026.

Astrid Panosyan-Bouvet, devenue au fil des mois une sorte de caution sociale du gouvernement de François Bayrou, affirme, depuis son arrivée rue de Grenelle, vouloir lutter contre les accidents du travail. Son premier déplacement en tant que ministre, en octobre 2024, s’était d’ailleurs fait en toute discrétion sur un chantier, à Paris, où un ouvrier avait trouvé la mort quelques jours plus tôt. Mais, jusque-là, les actes forts manquaient.

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Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail : « Lutter contre les accidents du travail est un devoir moral »

La ministre chargée du travail er de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, à l’Assemblée nationale, le 3 juillet 2025.

Alors que le nombre d’accidents du travail graves et mortels ne baisse plus depuis plusieurs années, la ministre chargée du travail et de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, présente au Monde sa stratégie pour lutter contre le phénomène.

Comment expliquez-vous qu’il y ait eu encore au moins 810 morts au travail en 2023, selon les derniers chiffres disponibles ?

On voit encore cela comme des faits divers, alors que nous sommes face à un phénomène de société qui ne doit pas être une fatalité. La réponse des pouvoirs publics ne commence pas aujourd’hui. Les entreprises sont également mobilisées depuis longtemps sur la prévention. Mais je souhaite vraiment accélérer sur le sujet, car je vois ça comme un devoir moral.

Quelles mesures comptez-vous prendre ?

On souhaite d’abord fusionner le plan pour la prévention des accidents du travail avec le plan santé au travail pour qu’il n’y ait plus qu’un seul outil avec deux sujets de la même importance. Ce nouveau plan est en préparation et sera mis en pratique en 2026. Sur la partie accidents, je fixe des points d’arrivée et je souhaite que les partenaires sociaux discutent de mesures fortes pour y arriver autour de cinq axes : responsabiliser davantage les entreprises et les donneurs d’ordre, en limitant, par exemple, les rangs de sous-traitance, améliorer la prévention pour les publics les plus exposés (jeunes, intérimaires, BTP), renforcer la culture de la prévention, renforcer les outils et les sanctions dont dispose l’Etat, notamment le pouvoir des inspecteurs du travail et, enfin, mieux accompagner les victimes.

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Le recrutement, un jeu de séduction, d’exagérations et de frustrations

Dans le quartier d’affaires de La Défense (Hauts-de-Seine), le 7 avril 2025.

Dans la parade de séduction qui se joue à chaque poste à pourvoir entre un candidat, un manageur et un recruteur, les uns et les autres se laissent aller à des exagérations et omissions pour mieux « habiller la mariée » et atteindre leurs objectifs. D’où des déceptions et tensions entre ces trois acteurs du processus d’embauche, que l’école de commerce EM Normandie a entrepris d’analyser. Cette étude qualitative a été réalisée en partenariat avec des entreprises spécialistes des ressources humaines à partir de quelque 70 entretiens conduits avec des candidats, des manageurs et des recruteurs.

Les résultats, publiés le 2 juillet, identifient six irritants qui émaillent le processus de recrutement. Les tensions tiennent pour beaucoup au fait que les trois parties prenantes divergent sur ce qu’est une pratique acceptable, légitime, éthique ou juste en la matière.

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Aux origines du concept de « qualité de vie au travail »

Dans les années 1930, le sociologue australien Elton Mayo souligne l’« importance des facteurs d’ambiance et relationnels sur le rendement ». Il « introdui[t] ainsi une détermination de l’efficience productive par des facteurs sociaux qualitatifs et plus ou moins subjectifs », explique Sylvain Leduc, maître de conférences en ergonomie et en psychologie du travail. C’est là l’un des actes de naissance du concept de qualité de vie au travail (qui n’en a alors pas encore le nom), auquel l’universitaire vient de consacrer un ouvrage (La Qualité de vie au travail, PUF, 128 pages, 10 euros).

La recherche autour de la qualité de vie au travail (QVT) se développe ainsi à la faveur d’un constat : conditions de travail des salariés et performances économiques de l’entreprise sont liées. Un impact qui sera confirmé par de nombreuses études à travers le temps, assure M. Leduc. Au fil des travaux menés, les scientifiques mettront également en évidence d’autres incidences positives de la QVT, en particulier la « satisfaction des travailleurs et [leur] santé ».

Qu’est-ce qui a suscité l’intérêt pour la notion de qualité de vie au travail ? Quelles mutations économiques et sociétales en ont favorisé l’émergence ? Comment a-t-elle pris place dans la recherche, puis dans la réglementation et, finalement, au sein des organisations ? A travers son ouvrage, dans lequel il dresse un panorama complet de la QVT (repères contextuels, fond théorique, méthodologies déployées en entreprise…), M. Leduc propose d’en explorer les fondements. Manière, également, de comprendre sa complexité et la diversité des champs qu’elle peut couvrir (participation à la prise de décision, autonomie, diversité des tâches, avantages sociaux…).

Se tenir à distance des « actions périphériques »

Son ouvrage met notamment en évidence un élément contextuel majeur : la montée des risques professionnels à partir des années 1970. En cause, une multitude de facteurs : « nouvelles pénibilités » (développement des horaires atypiques…), intensification du travail, qui « réduit les marges de manœuvre nécessaires à chacun pour trouver “sa” façon de travailler efficacement », « accentuation des contraintes temporelles » favorisant les risques psychosociaux (RPS)…

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Emploi des seniors, reconversion : trois accords entre syndicats et patronat traduits dans la loi

Au Sénat, à Paris, le 26 novembre 2024.

La démocratie sociale a eu le dernier mot. Mardi 8 juillet, les sept députés et sept sénateurs réunis en commission mixte paritaire (CMP) ont trouvé un compromis en une demi-heure sur le projet de loi transposant dans le code du travail trois accords que les syndicats et le patronat avaient conclus sur l’emploi des seniors, les reconversions professionnelles et les élus du personnel. Le texte sur lequel les parlementaires se sont entendus respecte, en définitive, ce qui avait été mis au point par les organisations de salariés et d’employeurs, mais celles-ci ont dû hausser le ton pour que leur copie ne soit pas dénaturée.

A l’issue de son examen par les députés, le 3 juillet, le projet de loi s’était un peu éloigné des orientations tracées par les acteurs sociaux. Une situation liée à des divergences de vues entre eux et l’exécutif. Deux points nourrissaient le dissensus. Les représentants des travailleurs et des chefs d’entreprise voulaient créer un « espace stratégique de concertation » réservé à la formation et à l’orientation. Mais Matignon n’était pas séduit par cette idée, y voyant un « comité Théodule » supplémentaire puisque des instances existent déjà en la matière. L’autre source de divergence avait trait à des financements pour un dispositif de reconversion sur lesquels les acteurs sociaux souhaitaient prendre la main.

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Les RH cherchent à encadrer l’usage de l’IA par leurs salariés, entre surveillance et éducation

Au salon VivaTech, qui s’est tenu à Paris à la mi-juin, l’intelligence artificielle (IA) a mis des étoiles plein les yeux aux chercheurs, aux recruteurs et aux ingénieurs, enthousiasmés par les dernières innovations. A l’aide de l’IA générative, bien loin des Alpes, L’Oréal cultive des edelweiss et des plantes asiatiques menacées de disparition ; la RATP gère ses machines autolavantes ; Bouygues construit toujours plus vite grâce à l’analyse accélérée des données par l’IA.

Mais ce fut aussi l’occasion pour les entreprises de rappeler, tel un mantra, que l’accompagnement des salariés est essentiel, d’autant plus que la prise en main des outils est plus rapide que la formation des salariés. Seul un cadre sur quatre a déjà bénéficié d’une formation à l’IA, indique l’Association pour l’emploi des cadres.

S’agit-il de surveillance, de contrôle ou d’encadrement ? « On n’en est pas au flicage, parce que les entreprises n’ont pas encore conscience de tout ce que les salariés peuvent faire avec l’IA », remarque Mickaël Vandepitte, directeur produit RH de la PME Septeo. Mais le manque de culture IA et de maîtrise des outils est une nouvelle source de risques. « L’IA s’est démocratisée brutalement, avec une crainte légitime des entreprises de fuite d’informations, voire d’espionnage économique », remarque Benoît Serre, ancien vice-président de l’Association nationale des DRH.

« Les chargés de clientèle, constatant que ça leur facilite la vie, n’attendent pas d’être formés. On a eu au début des fuites de données de type “manuel d’utilisation”, reconnaît Nourdine Bihmane, DG de Konecta, une multinationale spécialisée dans l’expérience client. Elles ont été réglées par la mise en place de contrôles techniques et par de l’éducation au fonctionnement des outils. » Pour encadrer l’usage, les responsables des ressources humaines élaborent des règles, des chartes, des modes de contrôle et des politiques de sensibilisation consacrées à l’« éducation » des effectifs.

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Morts au travail : l’hécatombe chez les jeunes touche même les mineurs

Un apprenti maçon de 15 ans, mort après avoir été percuté par un engin de chantier, le 30 avril, dans les Alpes-Maritimes. Un lycéen en bac pro de 17 ans, écrasé sous une poutre métallique de 500 kilos, le 16 mai, dans une usine de Saône-et-Loire. Un élève de 2de, en stage dans un magasin Gifi à Saint-Lô pour quelques jours, tué, le 17 juin, par la chute d’une palette. Un stagiaire de 16 ans percuté mortellement par un engin dans un établissement agricole, le 4 juillet, dans le Maine-et-Loire…

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Morts au travail : une prise de conscience timide et tardive

Les récits dramatiques d’accidents du travail mortels s’accumulent ces derniers mois chez les mineurs. Ces drames s’ajoutent aux accidents subis par les moins de 25 ans. La fréquence des accidents du travail est deux fois et demi plus élevée dans cette population que dans le reste des salariés, selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). En 2023 – derniers chiffres officiels –, 33 travailleurs de moins de 25 ans sont décédés sur leur lieu de travail.

Pourtant, le code du travail est censé protéger les mineurs : les moins de 18 ans ont l’interdiction d’exercer certaines tâches, comme celles pouvant exposer à une température extrême, d’autres, comme le travail en hauteur ou la manipulation d’engins de levage, souvent à l’origine d’accidents graves, sont réglementées et soumises à dérogation.

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Morts au travail : une prise de conscience timide et tardive

Le 26 juillet 2023, Jules Pertet quitte son domicile aux aurores. Depuis six mois, il est employé sur le site nîmois de Paprec, leader français du recyclage. Quelques jours plus tôt, le jeune ouvrier de 21 ans, en CDI depuis quelques semaines, avait confié à sa mère, Sylvie, son intention de démissionner, se sentant en insécurité et insuffisamment écouté. En début d’après-midi, alors qu’il procède au nettoyage d’une machine à l’arrêt, comme c’est toujours le cas lors des changements d’équipe, l’appareil redémarre brutalement. Sa tête est happée, son crâne sectionné. Il meurt sur le coup.

Un épisode funeste qui n’a malheureusement rien d’exceptionnel au sein des usines Paprec. Un peu plus d’un an auparavant, le 8 avril 2022, Paul, 23 ans, avait eu le même accident sur la même machine, à Lansargues, dans l’Hérault. Même s’il a survécu miraculeusement, le jeune intérimaire en a gardé des séquelles dramatiques : après de multiples fractures aux bras et à la main et une partie du cuir chevelu scalpée, Paul est aujourd’hui handicapé à plus de 40 %. Après son accident, l’enquête a révélé de nombreuses non-conformités sur la machine. Cela n’a pourtant entraîné aucune vérification sur les autres sites du groupe.

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« Plus le management a gagné du terrain, moins il est compris et même toléré »

A la suite d’une mission d’enquête européenne menée par leurs soins, trois hauts fonctionnaires de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) ont acquis la conviction que le management à la française était de médiocre qualité et en retard sur les pratiques de ses voisins, ce qui justifierait, à leurs yeux, une nécessaire « inflexion ». En effet, l’impact de ce « mauvais » management ne se limiterait pas seulement à la qualité de vie au travail ou aux conditions de travail des salariés, il aurait aussi un effet sur les politiques sociales – comprendre, le taux d’emploi, les arrêts maladie, l’absentéisme, le sentiment de perte de sens au travail et in fine le risque de désengagement des salariés. De quoi justifier l’intervention de la puissance publique pour redresser la barre.

Constatant que le management français serait plus encadré par la réglementation que ses voisins, mais de manière indirecte, les trois hauts fonctionnaires suggèrent une intervention plus directe pour remédier à ce qu’ils considèrent comme un paradoxe : « Modifier une ou plusieurs dispositions législatives dans l’objectif d’infléchir effectivement et durablement les pratiques managériales en France ; inscrire les pratiques managériales dans les thèmes du dialogue social obligatoire de la qualité de vie et des conditions de travail ; inscrire les pratiques managériales parmi les orientations stratégiques faisant l’objet de la procédure d’information-consultation avec le comité social et économique (CSE) ; étendre les pouvoirs du CSE en matière d’organisation du travail… » Rien que ça !

S’il faut bien reconnaître que le management toxique est malheureusement une réalité avérée et qu’il crée effectivement des dégâts destructeurs et peu réparables pour les victimes comme pour la collectivité, est-ce une raison suffisante pour que l’Etat s’en mêle, au-delà de la pénalisation de telles pratiques déviantes déjà en place ? On peut très sérieusement en douter.

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