Archive dans juillet 2020

A Belfort, l’espoir d’un nouvel avenir pour General Electric prend corps

Il ne faut pas s’y tromper : si le quatrième comité paritaire de suivi de l’accord du 21 octobre 2019, qui s’est tenu mardi 30 juin au ministère de l’économie et des finances en présence de représentants de l’Etat, de General Electric (GE) et des syndicats (hormis la CGT), n’a débouché sur aucune annonce ferme, il a enfin posé les bases d’un futur pour le site de Belfort et de sa filière turbines à gaz ébranlés, l’an passé, par un plan social (485 suppressions de postes sur 1 760). « Il offre la possibilité de sortir du tunnel, résume Philippe Petitcolin, délégué syndical CFE-CGC. Rien n’est encore acquis, mais l’espoir renaît. »

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La direction du conglomérat américain de l’énergie a, en effet, accepté d’intégrer huit axes de diversification du site dans ses orientations stratégiques et dans son processus budgétaire (année 2021) qui doit débuter courant juillet. Ils ont été élaborés, ces derniers mois, au sein de groupes de travail composés notamment de membres du personnel. « Il y aura deux nouvelles réunions à Bercy, l’une fin août-début septembre, l’autre en décembre, afin d’évaluer la consistance des axes du nouveau projet industriel et d’analyser les budgets qui y seront associés », précise le syndicaliste.

« Être plus compétitifs »

L’un de ces axes, c’est l’utilisation de l’hydrogène dans le fonctionnement des turbines à gaz alors qu’un écosystème autour de cette énergie verte est en gestation dans le pôle métropolitain Nord – Franche-Comté. Il y a tout juste un an, l’équipementier automobile Faurecia a choisi de localiser son centre d’expertise mondial pour le stockage de l’hydrogène à Bavans, dans le Doubs, à une trentaine de kilomètres de Belfort. « GE investirait 50 millions d’euros, avance M. Petitcolin. Le plus difficile consiste à trouver un partenaire alors que tous nos concurrents ont déjà franchi cette étape. Siemens s’est, par exemple, associé à Engie. »

Il y a aussi l’énergie à la demande (« power on demand »). « Il s’agit ici de rendre les centrales plus flexibles, explique Alexis Sesmat, délégué syndical SUD. C’est un enjeu crucial lié à deux phénomènes : la déréglementation des réseaux électriques et le développement des énergies renouvelables, instables par essence. » GE a encore accepté de travailler sur le montage d’une ligne d’arbre standardisée (turbine à gaz et alternateur). « On veut en faire un dénominateur commun à toutes les centrales que nous vendons, tout en laissant la possibilité à nos clients de les customiser, poursuit M. Sesmat. L’objectif, c’est de baisser les coûts, de diminuer les délais entre la commande et la livraison, et donc d’être plus compétitifs. »

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La cohésion d’équipe dans les entreprises à l’épreuve du Covid

Depuis quelques semaines, Jean-Claude (qui témoigne sous le couvert de l’anonymat), directeur financier dans une grande entreprise, reçoit des messages de salariés impatients. « Nous faisons revenir très progressivement nos équipes sur site et beaucoup aimeraient que les choses s’accélèrent, constate-t-il. Ils voudraient quitter le 100 % télétravail et retrouver pour au moins quelques jours la vie de bureau, comme avant. » Problème, à ses yeux : « Tout a changé. Un grand nombre de collègues ne sont plus là en même temps que vous, les mails ont remplacé les discussions autour d’un café… Les collaborateurs n’ont pas forcément conscience que, protocole sanitaire allégé ou pas, une partie de la convivialité a disparu. »

De fait, les mesures de distanciation ont complexifié les relations entre salariés. « Durant les premières semaines de déconfinement, ils n’ont par exemple pas pu retrouver sur les plateaux cette fluidité des échanges qui permet de s’entraider de manière informelle », expose Elisabeth Pélegrin-Genel, architecte et psychologue du travail. Qu’en sera-t-il avec l’allégement des dispositifs sanitaires ? « On ne reviendra pas directement à la situation d’avant-crise, estime-t-elle. Beaucoup de salariés se montrent très prudents dans leur rapport aux autres et ne souhaitent pas perdre, par un relâchement, le bénéfice de plusieurs mois d’efforts. »

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A l’heure du déconfinement, le vivre-ensemble est fragilisé. Affaibli par les règles de distanciation, il est aussi mis à l’épreuve par plusieurs mois de télétravail massif et porteur de nombreux défis. Comment préserver la cohésion de l’entreprise avec un effectif dispersé façon puzzle ? Comment s’assurer également qu’une fracture n’apparaisse pas entre les salariés ayant accès au télétravail et ceux qui poursuivent l’activité sur site ?

De nouveaux dispositifs

La capacité à mener des projets collectifs est questionnée, alors qu’un roulement permanent a lieu dans les équipes entre salariés en distanciel et en présentiel. « Le travail implique une dimension relationnelle et collaborative qui a été fortement impactée durant cette période, note Maurice Thévenet, professeur à l’Essec. Une conférence Zoom n’est pas forcément suffisante pour développer la créativité ou pour concevoir collectivement des solutions face à des situations difficiles. »

Ces menaces qui pèsent sur le collectif de travail sont aujourd’hui au cœur des réflexions des services des ressources humaines. « C’est “la” préoccupation, confirme Benoît Serre, vice-président de l’Association nationale des DRH. Nous devons nous concentrer sur un défi de taille : parvenir à reconstituer l’unité de l’entreprise. » Le sujet est d’autant plus sensible dans le contexte actuel de crise économique, estime M. Thévenet : « Les entreprises vont se retrouver face à un impératif de productivité. Ce qui implique de disposer, en interne, d’une cohésion et d’un fort engagement dans le travail. »

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Coronavirus : Les salariés décrocheurs

Carnet de bureau. « Il n’y a pas qu’à l’école qu’il y a des décrocheurs. Des salariés ne veulent pas revenir », confie Régis Mulot, le DRH du groupe biopharmaceutique Ipsen. Les responsables d’entreprises comme les enquêtes réalisées auprès des salariés le confirment, ces derniers sont nombreux à ne pas souhaiter rejoindre leur lieu de travail.

Plus d’un sur deux (56 %) s’inquiète du retour en entreprise, indique l’étude Malakoff Humanis, publiée le 25 juin et réalisée du 6 au 20 mai auprès de 2 970 salariés du secteur privé. Ils mettent en avant une sécurité sanitaire insuffisante, les contraintes de l’open space, les changements d’organisation. Mais quelle que soit l’origine des réticences, la reprise, organisée jusqu’alors sur la base du volontariat, devient progressivement obligatoire.

« Les DRH ont constaté que le volontariat ne permettait pas de faire revenir les salariés. Au tout début du déconfinement, très peu de salariés revenaient, ce qui n’était pas surprenant. Mais ça s’est prolongé », explique Frédéric Guzy, directeur général d’Entreprise & Personnel. Les responsables des ressources humaines ont donc changé les consignes. « Aujourd’hui, on est moins sur la gestion du risque Covid que sur celle de l’appréhension du retour sur site. On essaie un jour de retour obligatoire sur site, puis ce sera deux, etc. jusqu’en septembre », témoigne Jérôme Friteau, le DRH de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse.

Le sens de leur travail

Parmi les réticents, il y a les salariés en activité partielle et ceux dont le travail n’a pas été qualifié d’« essentiel ». Pendant des semaines, les manageurs étaient au four et au moulin et leur priorité allait aux collaborateurs qui avaient une forte activité. Ceux qui n’avaient plus l’obligation de se rendre au bureau ont été isolés du collectif. « Il n’y a pas plus de décrocheurs que d’habitude, mais le confinement a zoomé sur des situations particulières qu’il a amplifiées, relativise Frédéric Guzy. Ainsi, la personne qui est en chômage partiel à 80 % de son temps quand son voisin l’est à 20 % sur une même activité révèle une différence de performance et d’implication », illustre-t-il.

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Mais le faible retour s’explique davantage par la perte du collectif que par un manque d’investissement. Le réseau Entreprise & Personnel constate ainsi auprès des grandes entreprises que plus les mesures de sécurité sanitaires (roulement d’équipes, contacts directs interdits) limitent les interactions entre collaborateurs et la cohésion du collectif, moins les salariés reviennent durablement. Ils passent au bureau une fois ou deux pour, finalement, se réinstaller chez eux. « Ces mesures sanitaires très restrictives qui accompagnent l’obligation de retour empêchent le collectif de fonctionner », alerte M. Guzy.

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Après la crise, plus de télétravail, l’équité mieux maîtrisée et l’emploi en pointillé

Les entreprises sortent d’une période inédite : outre le télétravail largement expérimenté et débattu depuis le 16 mars, les pratiques RH ont été bousculées avec la gestion du Covid-19. Une quinzaine de responsables des ressources humaines se sont retrouvés mardi 23 juin, aux Jardins de Saint-Dominique à Paris, pour échanger sur leurs expériences de la crise, à l’occasion des Rencontres RH, un rendez-vous mensuel de réflexion sur l’actualité du management, organisé par Le Monde en partenariat avec Leboncoin.

Leurs leçons de cette période particulière ont révélé quelques surprises sur des sujets qu’ils n’avaient pas anticipés : l’égalité de traitement des salariés, l’apparition de nouveaux clivages cols bleus-cols blancs et la disparition d’anciens clivages entre RH et salariés.

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Les DRH présents ont évidemment témoigné de la « formidable capacité d’adaptation de leurs équipes », pour se mobiliser, s’organiser, communiquer, avant de revenir sur la généralisation du télétravail imposée par le Covid. « Les renégociations sur les accords télétravail sont au cœur des sujets des DRH », affirme Christine Caldeira, la secrétaire générale de l’Association nationale des DRH (ANDRH). « On va tous renégocier ces accords », confirme Frédérique Durand, la DRH de l’imprimerie nationale. Veolia, par exemple, est déjà passé à un jour de télétravail par semaine depuis la réouverture des écoles, et « on verra en septembre si on le maintient », précise Jean-Marie Lambert, le DRH du groupe. Les débats sont ouverts et l’avenir s’annonce hybride pour beaucoup de salariés, partagés entre le travail sur site et à domicile.

« Une cohésion dans l’émotion »

« Mais quel que soit le poids du télétravail demain, en management, on a beaucoup parlé de prise de décision plus rapide et d’aplatissement de la hiérarchie. La question est comment rebondir là-dessus », s’interroge Marion Azuelos, la DRH de BNP Paribas Asset Management. La crise a accéléré les prises de décision, a renforcé la cohésion des dirigeants et la solidarité au sein de l’entreprise, bien que des cols bleus aux cols blancs, des travailleurs dits « essentiels » aux autres, de nouveaux clivages soient apparus liés aux situations de travail incomparables.

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Le contexte du Covid a également accéléré les process. « Carrefour, qui auparavant exigeait qu’on voie les intérimaires en présentiel avant de les embaucher, y a renoncé », illustre Pascal Lorne, le PDG fondateur de la plate-forme d’intérim Gojob.

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« Comment l’université exsangue va-t-elle pouvoir absorber la vague qui se profile ? »

« Le gouvernement devra probablement ouvrir les vannes d’un « revenu étudiant », sur critères sociaux ou non » (Paris-Dauphine university).

Chronique. L’impact des récessions sur les effectifs étudiants est largement exploré en économie. Les prédictions théoriques sont ambiguës.

D’un côté, la dégradation de la situation économique des jeunes et de leur famille réduit les capacités à financer la poursuite d’études.

D’un autre, la balance des coûts d’opportunité entre prolonger sa formation et entrer sur le marché du travail ou créer son entreprise dans une économie dégradée penche en faveur d’une accumulation de « capital humain ».

Les travaux empiriques sur les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) montrent que, lors des récessions des dernières décennies, le mécanisme en faveur du « capital humain » tend à dominer.

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Ainsi, l’enseignement supérieur français a connu à la rentrée 2009, après la crise de 2008, la plus forte hausse de ses effectifs depuis 1993, qui était également une année de récession. L’université est en première ligne pour absorber les fluctuations d’effectifs. Après une hausse à deux chiffres entre 1992 et 1995, le nombre d’inscrits a diminué jusqu’en 2008. Depuis, le rebond est spectaculaire, avec une progression cumulée de près de 20 % en une décennie.

Une vague se profile

Dans le même temps, les universités avaient été mises à la diète budgétaire. Avant la crise sanitaire, comme à l’hôpital, de nombreuses filières étaient en tension, malgré la répartition forcée des entrants par Parcoursup.

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Comment cette université exsangue va-t-elle pouvoir absorber la vague qui se profile ?

Y aura-t-il 4 % d’étudiants en sus, comme en 2009, ou bien encore plus ? Du premier choc pétrolier (1973) à la chute de Lehman Brothers (2008), la plupart des grandes crises récentes ont débuté à l’automne, alors que les choix éducatifs pour l’année avaient déjà été faits. Cette fois, l’effondrement de l’emploi dès le printemps pourrait pousser les jeunes à prolonger leur formation. D’autant que cette dernière a été amputée par les contraintes sanitaires depuis mars, exposant les diplômés à une moindre employabilité aux yeux des recruteurs.

L’ampleur de la hausse du chômage pourrait même enclencher un phénomène qui demeurait jusqu’ici mineur en France : le retour d’actifs à l’université. A l’opposé, la France perdra une part des étudiants étrangers. Surtout, les secteurs économiques les plus touchés comme l’hôtellerie-restauration étaient des sources de revenus pour les étudiants qui travaillent pour financer une part de leurs études, soit la moitié d’entre eux.

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