Les obligations familiales s’exhortent au bureau aux USA

En France, l’offre de loi sur l’exploration des proches aidants en vote au Sénat mercredi 13 mars a assimilé le sujet à la contestation collective, de l’autre côté de l’Atlantique, les entreprises n’ont pas captivé leur prise de conscience. Or près de trois travailleurs sur quatre ont des inculpations d’« aidants » d’un proche, selon une recherche de la Harvard Business School.
Rui Soares, 45 ans, consultant du cabinet d’audit américain Deloitte, n’a pas voulu prendre tous ses permissions à la naissance de sa fille, Fedelina. Il s’est rassuré de deux semaines. Mais quand quelques années plus tard, est né son fils, Christiano, la politique familiale de Deloitte avait transformé.
Depuis septembre 2016, les travailleurs du groupe ont le droit d’avoir seize semaines de congés payés pour se consacrer de leurs proches: faire connaissance avec leur nouvel enfant, aider une épouse malade, soutenir un parent âgé… M. Soares en a parlé avec un collègue, lui aussi père de famille. « Ne pense même pas à ne pas prendre l’ensemble de tes congés » lui a-t-il persuadé. M. Soares est parti pendant seize semaines, quatre mois durant lesquels il a mis au lit son bébé, changé les couches, aller avec sa fille à l’école, coupé des sandwichs en forme d’étoiles pour Fedelina. Puis il est revenu au bureau, plein d’énergie, et reconnaissant envers Deloitte.
Cet épisode heureux dans la vie d’un salarié américain, est plutôt rare. Car peu d’entreprises proposent à leurs troupes ce type d’arrangements. Et pire encore, elles ne savent même pas que leurs employés en ont besoin. C’est ce qu’explique l’étude « L’entreprise aidante [The Caring Company]», réalisée par deux professeurs de la Harvard Business School, Joseph Fuller et Manjari Raman, à partir d’une étude mené auprès de 1500 salariés et une enquête engageant 300 services de ressources humaines et des patrons de PME. « Les entreprises sont confrontées à une crise de l’aide. Et elles refusent de le reconnaître », terminent les deux chercheurs.
Un accroissement du turn-over
Malgré cela, les besoins méconnus présentent vraiment: 72% des salariés questionnés ont été en situation d’« aidants » d’un proche à un instant ou un autre de leur vie professionnelle. Une enfant malade, une grand-mère qui perd la tête… et c’est tout le contrebalance entre vie au bureau et vie particulière qui s’écroule. Trente-deux pour cent des sondés ont ainsi écarté leur emploi pour tenir un proche. Et pour ceux qui n’ont pas atteindre ces extrémités, leur travail en a été affecté : 80% des salariés aidants avouent ne pas s’accomplir totalement au bureau et 28% sont persuadés que leur carrière en a pâti. Les intéressés n’ont pas eu les promotions engagées (50%) et leur chef ne leur a pas donné les missions les plus captivantes (54%).
Ce fait touche tout le monde. Les femmes, qui bloquent leur carrière pour se servir de leurs jeunes enfants, mais aussi les hommes, les plus anciens comme les plus jeunes. Dans cette condition, les 26-35 ans ont plus tendance à quitter leur emploi, accentuent les professeurs de la Harvard Business School.
Le conseil de prud’hommes de Lyon observe, mardi 12 mars, les sollicites de 1 208 salariés et ex-salariés de Renault Trucks qui réclament la reconnaissance de leur « préjudice d’anxiété » après le classement « amiante » du site de construction de camions de Vénissieux (Rhône). L’audience – hors normes au vu du nombre de plaignants –, a été délocalisée dans une salle polyvalente de Rillieux-la-Pape, dans la banlieue lyonnaise.
Le site de Renault Trucks (ex-RVI), immédiatement filiale de Volvo, à Vénissieux, a été reconnu « site amiante » par arrêté publié au Journal officiel à l’automne 2016, permettant ainsi aux salariés en poste jusqu’en 1996 d’avoir droit au dispositif de retraite anticipée des travailleurs de l’amiante. Cette inscription intéresse la période allant de 1964 à 1996.
« A l’époque, personne n’était averti, on divisait l’amiante à la scie. Il n’y avait aucune souhait, on utilisait des soufflettes pour nettoyer les postes de travail », témoigne le président de l’Association prévenir et réparer (APER), Jean-Paul Carret. La « prise de conscience », dit-il, a eu lieu à la fin des années 1990, « après les premiers décès ». L’APER a dénombré au moins une « vingtaine » de morts liées à l’amiante depuis 2000 et une « quarantaine » de cas convenus comme maladies professionnelles.
Epée de Damoclès
Actuellement, les plaignants, principalement des retraités et quelques salariés en fin de carrière, vivent « toujours avec une épée de Damoclès ». « Ça trotte dans les têtes à chaque fois qu’ils enseignent qu’un ancien collègue est mort », dit M. Carret, qui définit que ces 1 200 dossiers étaient « une première vague », « 200 autres doivent être examinés ultérieurement ».
Contacté par l’Agence France-Presse, Renault Trucks n’a pas souhaité faire de « commentaires sur les actions de justice en cours le concernant ». Le groupe a simplement ajouté que l’entreprise « n’avait jamais affiché ses salariés à des risques connus », garantissant que « plus aucun produit amianté » n’était utilisée « dans ses processus depuis le 1er janvier 1997 ».
Le protecteur des plaignants, Me Cédric de Romanet, réclame 15 000 euros pour chacun d’eux, attendu que « les études épidémiologiques montrent, inopportunément, que le temps d’exposition est sans effet » sur le risque de déployer une maladie liée à l’amiante.
Le secrétaire de l’APER, Patrick Gérard, a pour sa part regretté que, « sur le plan pénal, la bataille n’avance pas ». « Aujourd’hui, on sait faire condamner l’entreprise, mais on n’arrive pas à faire condamner les patrons, les donneurs d’ordre », a-t-il affirmé.