Chômage partiel : deux dispositifs pour aider les salariés et éviter les licenciements

Le premier ministre Jean Castex lors de la visite de l’usine Pavatex à Golbey (Vosges), le 3 septembre 2020.

Un peu moins de 15 % des salariés du privé (2,4 millions) ont été en activité partielle en juillet, selon le ministère du travail. Il existe aujourd’hui deux types de chômage partiel.

Un premier dispositif, dit d’« activité partielle » depuis la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurité de l’emploi, a été créé pour permettre aux entreprises de surmonter les baisses d’activité exceptionnelles, liées notamment à la conjoncture économique. Il a été adapté au contexte du Covid-19 par le décret du 25 mars 2020 pour aider les entreprises à passer le cap de la crise sanitaire sans licencier.

Ce dispositif, limité à six mois, peut concerner tous les salariés, quelle que soit leur ancienneté ou leur contrat (CDI, CDD, temps partiel, forfait jour), lorsque leur entreprise est fermée ou en baisse d’activité, ou lorsqu’elle ne peut pas assurer leur sécurité sanitaire sur site, et qu’ils ne peuvent pas télétravailler. Les salariés vulnérables y sont également éligibles, mais pas ceux qui vivent à leurs côtés. Ils en ont été exclus à partir du 1er septembre. En revanche, depuis le 9 septembre, ce même dispositif a été élargi aux parents contraints de garder les enfants que l’école n’accueille plus (à raison d’un parent par foyer).

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70 % de la rémunération brute, 8,03 euros minimum de l’heure

Les salariés sont indemnisés à hauteur de 70 % de leur rémunération horaire brute (près de 84 % du net), avec un minimum de 8,03 euros de l’heure. L’employeur peut majorer cette indemnisation. L’entreprise est remboursée par l’Etat et l’Unédic à hauteur de 85 % en général, et 100 % dans certains secteurs dont la liste est évolutive (hôtellerie-restauration, tourisme, événementiel, sports et culture), dans la limite de 4,5 fois le smic. C’est l’employeur qui fait la demande d’activité partielle, sur le site du ministère du travail.

Depuis le 6 août, les entreprises peuvent également déposer une demande d’« activité partielle de longue durée » (APLD), limitée à vingt-quatre mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de trente-six mois consécutifs. La persistance du Covid-19 a, en effet, amené le gouvernement à mettre en place un nouveau dispositif, toujours pour préserver l’emploi : l’APLD.

Le premier ministre a appelé les entreprises à s’en saisir « massivement ». Créée par la loi du 17 juin 2020, l’APLD s’adresse aux entreprises qui savent être engagées dans une baisse d’activité pour longtemps. Pour éviter que le dispositif ne serve à accompagner les faillites, il est soumis à des conditions : la réduction d’activité est plafonnée à 40 % de la durée légale, et un accord doit être signé avec les partenaires sociaux d’ici à juin 2022 pour en définir les modalités (diagnostic sur la situation économique, activité et salariés concernés, effort proportionné des dirigeants salariés, durée de l’accord, engagements en matière d’emplois et de formation). L’indemnisation des salariés est identique à celle du dispositif de droit commun, avec un reste à charge limité à 15 % pour l’employeur. Les deux dispositifs ne sont pas cumulables.

L’OCDE prévient que la reprise de l’économie mondiale sera lente

Au port de Yokohama, au sud de Tokyo, le 17 juin.

Les incertitudes liées à la propagation de la pandémie de Covid-19 vont peser durablement sur la croissance mondiale et compliquer la reprise. Dans ses prévisions publiées mercredi 16 septembre, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) revoit certes légèrement à la hausse ses prévisions pour 2020, mais s’inquiète des « coûts à long terme de la pandémie » et ne prévoit pas de retour à la normale au moins avant la fin 2021. Le produit intérieur brut (PIB) mondial devrait se contracter de 4,5 % en 2020, avant de rebondir de 5 % en 2021.

Après un redémarrage rapide suivant les périodes de confinement du début de l’année, « le rythme de la reprise mondiale a perdu de son élan pendant l’été », constate l’institution située à Paris, qui fonde son analyse sur plusieurs indicateurs, dont la production industrielle, les commandes passées aux entreprises ou le nombre d’heures travaillées. Les achats de services reprennent plus lentement en raison des mesures de restriction à la mobilité, à l’instar du tourisme ou du transport aérien, que ceux des biens. Aux Etats-Unis et au Japon, les dépenses de consommation sont encore inférieures d’environ 4 % à 5 % par rapport à leur niveau d’avant la pandémie. Les incertitudes autour du SARS-CoV-2 entament la confiance des ménages et incitent les entreprises à différer leurs investissements.

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La reprise prend des trajectoires différentes, selon les pays. Par rapport aux prévisions de juin, l’activité a été revue à la hausse en Chine, aux Etats-Unis et, dans une moindre mesure, en Europe. La Chine devrait être le seul pays de l’OCDE à enregistrer une croissance positive (1,8 %) en 2020, grâce au dynamisme de ses exportations et aux investissements publics. La pandémie s’y est aussi déclarée plus tôt, les mesures de restriction et de confinement ont été prises rapidement, et les plans de relance du gouvernement ont été massifs. La chute du PIB devrait être en revanche plus brutale qu’anticipée en Inde, en Afrique du Sud ou au Mexique, dépassant les 10 % en 2020.

« Les politiques de soutien des Etats doivent se poursuivre »

Les économies dépendantes du tourisme ou des services, à l’arrêt à cause des règles de distanciation physique, ou qui ont connu des confinements très stricts sont parmi les plus durement touchées. Sans les plans d’aide des gouvernements d’une ampleur sans précédent, l’OCDE affirme que la chute du PIB aurait été bien pire. Dans les pays développés, la dette publique pourrait bondir de 15 points de pourcentage.

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Covid-19 : quand Washington se montre généreux avec les Américains

A l’usine Ford d’Ypsilanti (Michigan), le 13 mai 2020.

On se rappelle le Tweet de l’ex-ministre française du travail Muriel Pénicaud, qui vantait, le 3 avril, la prétendue supériorité du modèle hexagonal sur celui des Etats-Unis : « Grâce au chômage partiel, 5 millions de salariés conservent leur emploi, soit 1/4 du secteur privé ; 473 000 entreprises gardent leurs compétences pour rebondir. Aux USA, en deux semaines : 10 millions de salariés licenciés. Fiers de notre modèle qui protège salariés et entreprises. »

Pourtant, l’Etat fédéral américain aura dépensé deux fois plus que ses recettes pour l’exercice clos le 30 septembre. Le plan de relance, voté au printemps par les démocrates et les républicains du Congrès, a pris à sa charge les salaires des entreprises (670 milliards de dollars, soit 565 milliards d’euros, de coût budgétaire), instauré une assurance chômage provisoire sans précédent (267 milliards de dollars), et envoyé un chèque de 1 200 dollars à chaque contribuable (292 milliards de dollars). « Le choc infligé à l’économie par le Covid-19 a été beaucoup plus fort que ceux ayant précipité les récessions précédentes [au début des années 1980 et lors de la crise financière de 2008], mais, dans le même temps, la réponse politique a été beaucoup plus forte que les fois précédentes, avec un stimulus fiscal cinq fois supérieur à l’ancien record », écrit Jason Furman, professeur à l’université Harvard et ancien conseiller économique du président Barack Obama.

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Dans le détail, le Congrès a adopté, au début de la crise, une assurance fédérale de 600 dollars par semaine, en complément des assurances versées par les Etats (qui vont de 101 dollars dans l’Oklahoma à 531 dollars dans le Massachusetts, pour une moyenne de 330 dollars). Les 600 dollars équivalaient à une semaine de quarante heures payée 15 dollars, soit deux fois le salaire minimal fédéral. Ils étaient très généreux, avec une indemnité moyenne mensuelle par chômeur supérieure à 3 700 dollars.

Un revenu disponible qui a bondi en avril

Ce montant devait durer jusqu’en juillet – le Congrès pensait à l’époque que l’épidémie serait maîtrisée d’ici là. Il n’a pas été prolongé, les républicains estimant qu’il n’incitait pas à travailler. Selon l’université de Chicago, 68 % des chômeurs touchaient plus en restant chez eux qu’en travaillant, mais les chercheurs n’ont pas trouvé d’exemple significatif de personnes restant volontairement au chômage.

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Les TPE se sont ruées sur le chômage partiel pour conserver leurs salariés

Petites structures à la trésorerie fragilisée par la conjoncture, les très petites entreprises (TPE) ont largement eu recours au chômage partiel : pendant le confinement, les salariés d’entreprises de moins de vingt salariés représentaient à eux seuls un tiers des demandes d’activité partielle, selon les statistiques du ministère du travail. « Les chefs d’entreprises à la tête de TPE se sont bien sûr emparés de cette mesure, ils sont proches de leurs collaborateurs et n’ont pas envie de les perdre », fait valoir Marc Sanchez, secrétaire général du Syndicat des indépendants (SDI), qui rassemble 25 000 dirigeants d’entreprises de moins de vingt salariés, commerçants, artisans et professions libérales.

Restaurateur, Michel Foraud salue la bouée de secours qu’a représenté pour lui et son équipe le dispositif d’activité partielle. La crise sanitaire et la désertion des touristes ont vidé la salle du Baan Boran, son restaurant thaïlandais situé en face du Théâtre du Palais-Royal, à Paris. Mais le patron a pu conserver ses six salariés à temps plein, en les mettant au chômage partiel. « En Pologne, où je m’étais rendu juste avant le début du confinement, j’en ai discuté avec un restaurateur, se souvient Michel Foraud. Eux ne bénéficient pas d’une telle mesure et doivent licencier. »

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Même son de cloche du côté de Christophe Jouvhomme, à la tête de la plate-forme d’organisation de voyages Booktrip.fr. Le chef d’entreprise a mis au chômage partiel total son unique collaboratrice salariée dès que cela a été possible. Employée depuis 2017 dans son entreprise, elle est devenue un pilier de cette TPE : « Il était hors de question de la licencier. On a pu la conserver grâce au chômage partiel. »

Si l’existence de ce filet de sécurité est accueillie avec gratitude, la période d’inactivité forcée est vécue avec ambivalence, aussi bien par le chef d’entreprise que par ses salariés. Au fil des mois, l’ennui pointe chez la collaboratrice de Christophe Jouvhomme : « Au début, cette situation lui permettait de faire l’école à la maison pour ses enfants, mais maintenant, elle est impatiente de reprendre le travail, constate le chef d’entreprise. Cette situation est démoralisante pour tout le monde. »

Transparence

« Si certains salariés n’étaient pas mécontents de rester chez eux, d’autres ont trouvé le temps long », relève Yohann Lavialle, directeur général de Natarom, une entreprise spécialisée en marketing olfactif dans l’événementiel. Dans sa TPE de neuf salariés, dont le chiffre d’affaires a été divisé par trois par la crise sanitaire, l’annonce de la mise au chômage partiel a été diversement accueillie par les collaborateurs.

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Mobilité : les cadres sont à l’arrêt

« Les cadres sont pourtant très optimistes (75 %) sur leur situation professionnelle. Ils le sont nettement moins sur le contexte économique et social (21 %). »

Carnet de bureau. Le Covid a mis les cadres à l’arrêt. Toujours en veille sur le marché du travail, les cadres consultent régulièrement les offres d’emploi, qu’ils soient en poste ou au chômage. De ce point de vue, pas de changement : 70 % déclarent avoir consulté les annonces pendant et avant le confinement. 38 % se disent ouverts aux opportunités. C’est un tout petit peu plus que l’année dernière, lorsqu’ils étaient 36 %.

Mais la nouveauté est que la majorité de ces mêmes cadres ne souhaitent pas quitter leur entreprise : 52 % n’ont pas l’intention de changer d’employeur contre 35 % en 2019, indique le baromètre IFOP-Cadremploi, réalisé auprès de 1 000 cadres du secteur privé au début de l’été, et publié en cette rentrée de septembre.

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La faible mobilité est une des caractéristiques du marché du travail français. « Il y a peu de transferts au sein d’un même bassin d’emploi », confirme Jean-Eudes du Mesnil, le secrétaire général de la CPME. Les freins sont connus et nombreux : difficile de transférer à la fois le logement, l’école et le travail du conjoint. Sur le sujet, jusqu’alors, les cadres se démarquaient du reste des salariés, au moins pour changer d’entreprise, si ce n’est de région. Ils passaient d’une société à l’autre d’autant plus librement qu’ils étaient quasiment au plein-emploi.

« Toutes les fonctions touchées »

Mais la crise liée au Covid-19 est passée par là. Le nombre d’offres a baissé et « toutes les fonctions cadres ont été touchées », indique l’Association pour l’emploi des cadres (APEC). « Si les activités financières et d’assurances ont été le seul secteur à ne pas connaître de baisse d’activité, les activités scientifiques et techniques ont, elles, accusé une chute de 44 % au premier semestre », précise l’APEC, qui prévoyait une baisse importante de la mobilité externe des cadres.

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En quelques mois, le climat a radicalement changé. Début 2020, près de sept cadres sur dix envisageaient une démarche pour modifier leur environnement de travail dans les trois prochaines années. La mobilité externe était alors la forme la plus souvent plébiscitée. Mais « l’intensité du choc comme les incertitudes planant toujours sur l’évolution de la crise sanitaire en termes de durée et d’ampleur incitent à la prudence », commente l’APEC. Et plus les salariés sont âgés, moins ils ont l’intention de bouger. Selon l’enquête d’opinion IFOP-Cadremploi : 70 % des plus de 50 ans déclarent vouloir rester dans leur entreprise (+ 18 points par rapport à 2019).

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Télétravail : réinventer la coopération

« Le collectif de travail est donc à reconsidérer et il ne rassemblera ni à une armée de télétravailleurs isolés, ni à des équipes rivées à leurs bureaux »

Gouvernance Après la sidération de la période de confinement, les entreprises s’interrogent sur l’aménagement durable du télétravail. Une chose, en effet, est d’assurer la poursuite des activités en mode dégradé, une autre est de pérenniser une politique de travail à distance quand le contexte redevient normal. Quelle est son efficacité ? Comment assurer la coordination entre la présence physique et à distance des collaborateurs ? Comment gérer les télétravailleurs et ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas travailler à distance ?

Ces questions ne se sont pas posées avec la crise sanitaire. Le travail à distance était déjà l’objet d’accords d’entreprise et il était attendu, notamment par les jeunes générations éduquées dans la mobilité digitale. Il apparaissait surtout comme un effet inévitable de la transformation de la production : elle rend moins nécessaire la présence de travailleurs reliés par des systèmes informatiques dans un lieu et un temps communs.

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De plus, le coût des loyers et des temps de transport dans les grandes villes étant souvent excessif, tant pour les entreprises que pour les salariés, il devenait indispensable de réformer une configuration des activités héritée d’organisations industrielles du siècle dernier centrées sur des machines-outils ou des instruments communs autour desquels gravitaient les travailleurs. La transformation en cours ne fut que précipitée par le Covid-19.

Harmoniser les outils

Alors que des entreprises saisissent cette opportunité pour se réformer plus vite, d’autres sont tentées de revenir au mode d’organisation antérieur qualifié de « normal ». Il leur est difficile de répondre à une accélération qui met en cause les habitudes de gestion et aussi ses zones de confort. Effectivement, coordonner des équipes éclatées dont les membres adoptent des rythmes différents exige de revoir les compétences managériales.

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Une des raisons avancées pour limiter le télétravail est son impact supposé négatif sur les collectifs de travail. Comment créer une culture commune si les collaborateurs ne se rencontrent pas suffisamment ? L’argument est sérieux, mais encore faut-il le préciser. D’une part, « se rencontrer » ne se réduit plus à une dimension spatiale : les outils digitaux permettent aussi de véritables échanges qui n’excluent pas mais qui complètent efficacement les indispensables contacts physiques.

D’autre part, trouver le degré de contacts physiques ou virtuels « suffisants » entre les collaborateurs est précisément l’enjeu de la nouvelle culture du travail. De fait, le collectif peut souffrir tant d’un manque que d’un excès de rencontres factices imposées par l’organisation : réunions superflues à répétition, grand-messes formelles, stages forcés de cohésion d’équipes, etc. L’inutilité de certaines pratiques de management pseudo-communautaire, déjà jugées pesantes, a clairement éclaté durant le confinement.

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Plan de relance : « Un plan de sauvegarde d’emplois et un patchwork de promesses présidentielles »

Chronique. Alors que l’incertitude sanitaire se prolonge, le gouvernement a annoncé son « plan de relance ». Un chiffre claque : 100 milliards d’euros, semblant confirmer la flexibilité de Bruxelles et une inflexion profonde pour une majorité qui n’avait cessé de louer la discipline budgétaire. Mais peut-on vraiment parler de plan de « relance » ?

En premier lieu, les 100 milliards doivent être relativisés. Il s’agit d’une somme pluriannuelle s’étendant au-delà du quinquennat. La lecture détaillée révèle, en outre, une longue liste d’investissements et de dépenses déjà partiellement ou totalement mobilisés, programmés ou inexorables : restauration du château de Villers-Cotterêts, projet-phare du candidat Macron en 2017 ; construction d’une usine de pales d’éolienne au Havre, déjà confirmée en 2019 ; plan protéines végétales, promis en 2019 ; projet de petit réacteur nucléaire Nuward, annoncé en 2019 ; création à Capesterre en Guadeloupe d’une station d’épuration « afin de répondre aux exigences de la réglementation » ; « reprise de désordres importants et visibles sur l’évacuateur de crues » du barrage du Gouffre d’Enfer dans la Loire ; aide à l’embauche d’apprentis « en substitution à l’aide unique »… déjà existante, etc.

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En deuxième lieu, le plan du gouvernement prolonge la stratégie de sauvetage de l’économie française mis en place au début de la crise sanitaire, qui a permis jusqu’à présent d’amortir l’impact de la crise, essentiellement pour les salariés en CDI. L’élément-clé du plan, calibré à plus de six milliards d’euros pour 2021, est l’activité partielle de droit commun ou de longue durée. S’y ajoute le renforcement d’une myriade de dispositifs existants (Garantie jeunes, Sésame vers l’emploi pour le sport et l’animation dans les métiers de l’encadrement…) pour accompagner les jeunes, premières victimes de la dégradation de l’emploi en cette rentrée.

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En troisième lieu, ce plan réalise la promesse faite en octobre 2019 par le président devant un parterre de patrons : une réduction drastique mais progressive des impôts de production. La crise offre une fenêtre d’opportunité pour accélérer la marche en s’affranchissant des résistances des collectivités locales bénéficiaires de ces impôts. Et c’est là que se loge l’effort financier permanent le plus important du plan : 10 milliards d’euros, par an !

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Les leçons de management profitent aux ONG

« Le Management des ONG »,de Bruno Cazenave, Emmanuelle Garbe et Jérémy Morales (La découverte, 128 pages, 10 euros).

Le Livre. Comment les méthodes issues de la gestion des entreprises entrent-elles progressivement dans les organisations non gouvernementales (ONG) ? S’opposent-elle à une vision fondée sur l’engagement, la vocation et le militantisme ? Les ONG sont très peu étudiées par les chercheurs en sciences de gestion, et la littérature croisant le thème des ONG et celui du management reste largement à écrire.

« Pourtant, ces deux champs académiques ont beaucoup à offrir l’un à l’autre : les sciences de gestion ont quelque chose à dire sur les ONG, mais aussi quelque chose à en apprendre. » C’est l’argument central de l’essai Le Management des ONG (La Découverte), de Bruno Cazenave, Emmanuelle Garbe et Jérémy Morales.

Depuis l’émergence des premières organisations, le monde des ONG a connu de profondes mutations. Longtemps mobilisées autour de causes plus que pour la rémunération, elles se sont montrées peu sensibilisées aux techniques de gestion utilisées dans les entreprises. Elles ont proposé des solutions originales aux questions de la gestion de ressources, de projets et de personnes à déployer dans l’urgence, dans des terrains distants et parfois mal connus.

La gestion du personnel, le financement, l’utilisation des techniques de communication ou les stratégies concurrentielles des ONG sont très spécifiques et soulèvent des questions que les sciences des gestions ont peu abordées. L’ouvrage pointe également les tensions entre une orientation croissante vers la performance et une vision fondée sur l’engagement, la vocation et le militantisme.

Proximité risquée

Pour faire face à la technicité croissante de leurs missions, les ONG cherchent à stabiliser leur main-d’œuvre et à recruter des personnels de plus en plus qualifiés. La salarisation exponentielle des personnels ne risque-t-elle pas de faire diminuer la motivation intrinsèque de leurs membres ou leur attachement à la cause ?

Le professeur à l’ESC International Business School Bruno Cazenave, la maîtresse de conférences en sciences de gestion à l’IAE de Paris Emmanuelle Garbe et le « reader » au King’s College London Jérémy Morales fournissent un panorama des pratiques de gestion et de management spécifiques au monde des ONG, organisé en quatre chapitres : gérer les compétences, financer et évaluer la performance, vendre de manière désintéressée, organiser et structurer. « Les “lunettes” des sciences de gestion offrent un regard inédit sur certaines pratiques à propos desquelles les ONG communiquent peu, alors même qu’elles deviennent omniprésentes et permettent souvent d’assurer la légitimité et la soutenabilité de ces organisations. »

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En Seine-Saint-Denis, « créer son emploi pour échapper au chômage »

A la boulangerie

A 4 h 30, chaque matin, Nasser Ihtahajja embarque à bord de sa berline, quitte Aubervilliers et file sur l’A1, direction Roissy-Charles-de-Gaulle, à la recherche de courses aux tarifs majorés sur l’application Uber. Pendant le confinement, le chauffeur VTC a vu son chiffre d’affaires fondre de 70 %. Pour compenser ces pertes, le père de quatre enfants passe encore plus de temps sur les routes. « Je ne voulais pas m’arrêter. Je devais gagner de l’argent pour continuer à faire vivre ma famille. » M. Ihtahajja est allé jusqu’à dormir sur le parking de l’aéroport pour embarquer les voyageurs rapatriés de l’étranger. Depuis le déconfinement, il arrive difficilement à gagner 1 000 euros par mois.

En Seine-Saint-Denis, en plus de faire bondir le taux de surmortalité de 130 % entre le 1er mars et le 27 avril par rapport à la même période de 2019, la crise sanitaire a plongé nombre d’habitants dans une détresse sociale aiguë.

A La Courneuve, où 27 % de la population est au chômage (les derniers chiffres datent de 2017) et 43 % vit sous le seuil de pauvreté (en 2015, selon l’Insee), la municipalité a déjà distribué 50 tonnes de nourriture à 5 500 familles depuis le début de la crise. « Des publics que l’on n’avait jamais vus auparavant sollicitent notre aide. Beaucoup de jeunes, souligne le maire communiste, Gilles Poux. Aujourd’hui, notre crainte est que la crise les éloigne encore plus durablement du marché de l’emploi. La situation des microentrepreneurs, qui sont peu protégés, m’inquiète aussi beaucoup. »

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Et pour cause. Si la simplicité des démarches administratives et la faible fiscalité font le succès de ce statut, celui-ci n’accorde pas de protection en cas de chômage. Or, dans la Seine-Saint-Denis, 49,2 % des entreprises sont créées sous ce régime contre 44 % en moyenne en France. « Venir d’un quartier populaire, c’est être plus pénalisé que les autres pour accéder à l’emploi, note Moudou Saadi, conseiller délégué à la reconquête de l’emploi à La Courneuve. Lorsqu’ils postulent, les banlieusards se heurtent à la discrimination sur leur adresse, leur origine ou leur culture. La solution est alors de créer son job et de devenir microentrepreneur. »

« Les grands oubliés du plan de relance »

Mais la pandémie a accentué la précarité de ces travailleurs peu protégés. Dans le pays, cinq microentrepreneurs sur six ont cessé leur activité pendant le confinement. « Ils sont les grands oubliés du plan de relance. L’aide proposée pendant le confinement n’excédait pas les 1 500 euros. C’est insuffisant », estime François Hurel, président de l’Union des autoentrepreneurs. « Je paie déjà 1 000 euros par mois pour rembourser ma voiture. Résultat, on doit passer toute notre vie à rouler pour survivre, soupire Nasser Ihtahajja. Je ne pensais pas en arriver là lorsque j’ai commencé. »

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Territoires zéro chômeur de longue durée : 50 nouvelles expérimentations bientôt autorisées

Des bénéficiaires de l’expérimentation « territoire zéro chômeur de longue durée » travaillent dans un jardin potager à Loos, près de Lille, en septembre 2018.

L’expérimentation « territoire zéro chômeur de longue durée », lancée début 2017, pourra être étendue à 50 nouveaux territoires dans les mois qui viennent, selon des amendements de la majorité et du gouvernement à une proposition de loi que l’Assemblée nationale doit voter mercredi 16 septembre.

Le texte proposait initialement d’étendre le dispositif à 30 nouveaux territoires volontaires : des communes ou des quartiers de 5 000 à 10 000 habitants. Mais des députés, dont la rapporteure LRM Marie-Christine Verdier-Jouclas, ont poussé pour aller au-delà, surtout dans un contexte de crise et de hausse du chômage.

« 50 nouveaux territoires », en plus des 10 existants, « c’est un nombre et une durée adaptés car le temps est aujourd’hui à l’évaluation et à l’optimisation », a estimé la ministre du travail, Elisabeth Borne, devant les députés. A gauche, plusieurs parlementaires ont regretté un texte qui « ne va pas assez loin » et réclamé d’enlever tout plafond.

Lire aussi (2019) : Querelle autour du dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée »

Déjà plus de 1000 bénéficiaires

Portée initialement par ATD Quart-Monde, puis par l’ex-député PS Laurent Grandguillaume, cette expérience est actuellement menée dans dix territoires, mêlant communes rurales et quartiers de la politique de la ville, de Colombelles (Calvados) à Villeurbanne (Rhône).

Depuis 2017, 1 112 personnes « sont sorties de la privation d’emploi, soit directement (770), soit de manière indirecte », selon la proposition de loi LRM. De nouvelles villes voudraient tenter l’expérience comme Bordeaux, pour le quartier Grand Parc, une zone de logements sociaux durement touchée par le chômage.

Pour comprendre : Les entreprises à but d’emploi : une alternative pour ceux qui n’en ont pas

La philosophie générale est d’affirmer que personne n’est inemployable et qu’en subventionnant la reprise d’emploi, l’Etat économisera autant en prestations sociales et coûts indirects du chômage. Ont ainsi été créées 13 entreprises à but d’emploi (EBE), qui embauchent, sur la base d’un smic en CDI et sans sélection, des personnes privées d’emploi depuis plus d’un an, pour des activités utiles à la société mais censées ne pas concurrencer le secteur privé.

L’Etat contribue à hauteur de 18 000 euros par an et par emploi, ce qui correspond aux économies attendues pour les finances publiques (arrêt du versement du RSA ou des indemnités chômage…). Le reste du budget doit venir de la croissance de leur chiffre d’affaires, de subventions ou de concours bancaires.

Mais le coût et le ciblage du dispositif font débat, la plupart des entreprises à but d’emploi restant déficitaires. En novembre 2019, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales et de celle des finances soulignait que le « modèle économique des EBE n’est pas stabilisé » et que les publics visés sont moins éloignés de l’emploi qu’attendu, puisque certains touchaient déjà auparavant un revenu d’activité.

Lire aussi la critique : Un documentaire de Marie-Monique Robin raconte l’une de ces expérimentations

Le Monde avec AFP