« Les “territoires zéro chômeur” ont fait des miracles, mais c’est insuffisant pour assurer leur viabilité à terme »

« Les “territoires zéro chômeur” ont fait des miracles, mais c’est insuffisant pour assurer leur viabilité à terme »

Tribune. En 2016 a été lancé le projet Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD). Ce projet partait d’une idée forte et simple : ce n’est pas le travail qui manque, et donc à coût égal, mieux vaut payer des chômeurs à effectuer des travaux utiles à la collectivité plutôt qu’à ne rien faire.

Dans ce but, ont été créées sur dix territoires expérimentaux des « entreprises à but d’emploi » (EBE), qui ont chacune recruté des dizaines de chômeurs en CDI à temps choisi. Avec l’idée d’arriver au plus vite à l’exhaustivité (recruter tous les chômeurs de longue durée volontaires du territoire), tout en respectant la non-concurrence avec les acteurs locaux.

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Si l’idée est simple, sa mise en œuvre s’avère un défi considérable : deux évaluations récentes montrent des résultats mitigés. Néanmoins, l’Assemblée nationale a voté, le 16 septembre, une loi prévoyant l’extension de l’expérimentation à 60 territoires, soit une échelle nettement plus réduite qu’initialement envisagée. Le Sénat doit se prononcer à son tour, le 7 octobre.

Absence d’étude méthodique du projet

Les partisans de ce dispositif plaident pour la poursuite de cette expérimentation au nom de son utilité écologique et sociale. Si celle-ci ne fait guère de doute, cela laisse intacte la question des résultats, tant économiques qu’humains, de cette expérimentation telle qu’elle a été menée jusqu’ici. Ses adversaires mettent au contraire l’accent sur des défauts majeurs de conception, qui expliquent le désarroi de nombreux salariés, et mettent en avant le coût plus élevé que prévu pour les finances publiques.

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Ayant participé au début de cette expérimentation sur l’un des dix terrains, il me semble que ce qui est en cause serait plutôt la manière dont la conduite de cette expérimentation a été pensée et mise en œuvre. Au-delà des défauts de conception relevés dans les évaluations, la réussite de ce projet suppose de relever deux défis majeurs : d’une part, le développement massif d’activités intensives en main-d’œuvre et génératrices de revenus ; d’autre part, le développement des personnes privées d’emploi afin que celles-ci puissent s’intégrer dans un collectif de travail et, si possible, évoluer vers des entreprises « normales ».

Or aucun de ces deux défis n’a fait l’objet d’une exploration méthodique et organisée un tant soit peu ambitieuse et innovante à l’échelle du projet. De sorte que les EBE sont aujourd’hui économiquement et humainement fragiles. Concernant les personnes, les questions que soulèvent les évaluations sont très réelles : les personnes recrutées sont des demandeurs d’emploi de longue durée, souvent cassés par des années de chômage, des carrières brisées, des accidents de vie…

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LJD

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