Archive dans novembre 2020

Télétravail : le point sur les principales mesures du texte validé par les partenaires sociaux, à l’exception de la CGT

Une femme travaille depuis chez elle à Vertou, près de Nantes, le 14 mai.

Définition, éligibilité des postes, double volontariat, remboursement des frais, comité de suivi… quelles sont les principales mesures du projet d’« accord interprofessionnel pour une mise en œuvre réussie du télétravail », qui a obtenu l’avis favorable de la CFDT, de Force ouvrière, de la CFE-CGC et de FO – mais pas de la CGT ?

Lire aussi Un accord est en bonne voie sur le télétravail
  • Le cadre légal

Un accord national interprofessionnel (ANI) est traditionnellement formalisé par une loi. Plusieurs années peuvent s’écouler : le précédent ANI de 2005, que l’accord doit compléter, a été transposé très partiellement dans une loi sept ans plus tard. Un ANI s’impose à l’employeur membre d’un syndicat patronal signataire (Medef, CPME et l’U2P sont à la table de la négociation).

Dès le début, le patronat a prévenu que ce texte ne serait « ni normatif » « ni prescriptif », mais il souligne qu’un ANI « est un accord qui s’installe dans le paysage juridique des entreprises et du pays ». Par exemple, ce projet impose des obligations en matière de prise en charge des frais ou de mise en place du télétravail en situation de crise, mais se limite à des incitations en ce qui concerne le handicap, la prise en compte des alternants et nouveaux salariés, ou encore les aidants familiaux et l’égalité femmes-hommes.

  • Définition du télétravail

C’est « toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux, de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication ».

Il peut s’exercer sur le lieu d’habitation du salarié ou dans un tiers lieu, de façon régulière, occasionnelle ou en cas de circonstances exceptionnelles ou de force majeure. Par ailleurs, « la mise en œuvre du télétravail doit être compatible avec les objectifs de performance économique et sociale de l’entreprise ».

  • Eligibilité des postes au télétravail

Ce sujet a sensiblement bougé en faveur des syndicats. Alors que le patronat considérait que l’éligibilité relevait uniquement de la responsabilité de l’employeur, la version finale accorde une place aux syndicats : « La définition des critères d’éligibilité peut utilement alimenter le dialogue social ». Le comité social et économique (CSE) « est consulté sur les décisions de l’employeur ».

  • Volontariat, réversibilité

Les articles 2 (volontariat) et 3 (réversibilité) de l’ANI 2005 sont remplacés. Le texte reprend la notion du double volontariat (salarié et employeur), dit que le télétravail peut être institué dès l’embauche et que l’employeur peut accepter ou refuser, par écrit.

Le refus du salarié de télétravailler n’est pas un motif de rupture du contrat de travail. La réversibilité est garantie au salarié sur son poste ou à qualification égale.

  • Prise en charge des frais

Les frais « doivent être supportés » par l’employeur et ce « peut être » le sujet d’un dialogue social en entreprise. Une éventuelle allocation forfaitaire doit être exonérée de cotisations sociales.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les frais du télétravail, un cheval de bataille pour les syndicats
  • Télétravail en temps de crise

La mise en place du télétravail en cas de circonstances exceptionnelles ou de « force majeure » (pandémie, catastrophe naturelle, destruction des locaux d’une entreprise) doit être anticipée dans le cadre d’« un accord ou, à défaut, d’une charte » relatifs au télétravail. Le repérage « en amont » des activités télétravaillables est recommandé.

Dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux et de CSE, l’accord « encourage les employeurs à organiser des concertations avec les salariés ». Le principe de double volontariat ne s’applique pas. Le manager « a un rôle-clé dans la fixation des objectifs et la priorisation des activités ».

Une vigilance est portée sur la prévention de « l’isolement que peuvent ressentir certains salariés », en télétravail ou en entreprise. Les frais sont pris en charge par l’employeur comme dans le cas du télétravail classique.

  • Les accords salariés-employeurs

Le texte prévoit la mise en place, toujours par un accord collectif, d’une charte ou d’un accord de gré à gré entre l’employeur et le salarié. La fréquence est déterminée par accord entre l’employeur et le salarié.

En dehors de circonstances exceptionnelles, l’« importance d’équilibrer le temps de télétravail et le temps de travail sur site », « pour garantir la préservation du lien social » et « limiter l’émergence de difficultés organisationnelles » est mentionnée.

  • Droit à la déconnexion, vie privée

Il est rappelé que l’employeur doit contrôler la durée du travail du salarié, fixer, en concertation avec le salarié, les plages horaires durant lesquelles il peut le contacter.

Si un moyen de contrôle de l’activité du salarié et du temps de travail est mis en place, il doit être « justifié » et « proportionné au but recherché », « et le salarié doit en être informé ». Une consultation préalable du CSE est nécessaire.

Le droit à la déconnexion doit faire l’objet d’un accord ou d’une charte. L’employeur organise chaque année un entretien qui porte notamment sur les conditions d’activité et la charge de travail du salarié en télétravail.

  • Accidents du travail

Les accidents du travail sont imputables à l’employeur.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le 100 % télétravail, un modèle d’exception

Le Monde avec AFP

Chez les jeunes diplômés, la recherche délicate d’un emploi aligné avec ses valeurs

Danielle, 27 ans, avait un parcours de « première de la classe ». Diplômée de CentraleSupélec et de l’Essec, elle a commencé sa carrière dans un prestigieux cabinet de conseil parisien. Mais l’expérience, difficile, tourne court. Elle ne se reconnaît pas dans ce travail. Sa dernière mission auprès du ministère de l’éducation belge agit comme un déclencheur : il existe des secteurs, comme l’éducation, qui permettent de changer les choses positivement, et découvre que c’est dans ce domaine qu’elle souhaite œuvrer. Elle songe d’abord à devenir enseignante, et même à monter son école, avant de postuler dans une start-up de l’économie sociale et solidaire (ESS), qui met en lien des jeunes avec des associations pour qu’ils effectuent des missions pro bono.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Difficile de se plaindre, la cause est trop belle ! » : dans l’économie sociale, quand la quête d’idéaux vire au burn out

Prise de conscience écologique et sociale, nouveau sentiment de responsabilité, nombreux sont les jeunes diplômés de grandes écoles ou d’universités qui souhaitent avant tout exercer un travail qui a du sens ou qui a un impact, avec une utilité sociale ou une influence jugée positive sur la société. Quitte à rogner sur ses prétentions salariales ou renoncer prestige d’une entreprise reconnue. Selon le dernier baromètre BCG-CGE-Ipsos qui date de janvier « Talents : ce qu’ils attendent de leur emploi », sept jeunes interrogés sur dix aimeraient travailler ou faire un stage dans l’ESS.

La crise sanitaire et économique, qui n’épargne ni le secteur de l’ESS ni les emplois des jeunes, va-t-elle exacerber cette tendance ? Elle semble accélérer l’envie de s’engager dans cette direction. En témoigne l’explosion du nombre de visiteurs sur le site d’emplois de Makesense, association qui rassemble notamment des offres d’emplois dans l’économie sociale. Au sortir du premier confinement, 90 % des salariés jugeaient important, voire essentiel que leur entreprise « donne un sens à leur travail », selon le 14Observatoire social de l’entreprise (CESI-Ipsos-Les Echos).

Métiers porteurs de sens

« Le déclic, c’était pendant ma dernière année de prépa, raconte Dinh-Long, 26 ans, diplômé d’HEC en 2019. Je venais d’atterrir dans un lycée très élitiste, totalement étranger à mon univers et à celui de mes parents qui connaissent à peine les écoles de commerce. C’est là que j’ai découvert l’ampleur de l’inégalité des chances et de l’accès à l’éducation. Une fois à HEC, je me suis dit que c’était dans ce domaine que je voulais agir. » En poste au bureau régional du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) à Bangkok, il assure la coordination d’un projet de lutte contre le chômage et le sous-emploi des jeunes, et accompagne des entrepreneurs sociaux. « Ce que j’aime, c’est que je vois mon impact, que je me sens aligné avec mes valeurs. »

Il vous reste 62.35% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Une aide pour garantir 900 euros par mois aux travailleurs précaires

Le premier ministre, Jean Castex et la ministre du travail, Elisabeth Borne, en conférence de presse, le 26 novembre à Paris.

L’Etat vient à la rescousse d’une catégorie d’actifs durement frappés par la crise : les « permittents » – c’est-à-dire ces salariés qui, en temps ordinaire, enchaînent en permanence contrats courts et périodes de chômage (indemnisé ou non).

Jeudi 26 novembre, lors d’une conférence de presse sur la situation économique et sanitaire, le chef du gouvernement, Jean Castex, et la ministre du travail, Elisabeth Borne, ont dévoilé les contours d’une aide temporaire garantissant à ces travailleurs précaires un revenu de 900 euros net par mois. Le dispositif est ciblé sur des personnes qui, depuis la mi-mars, sont tombées dans un « trou d’air » et n’ont plus ou presque plus d’activité : employés en « extra » dans la restauration ou l’événementiel, saisonniers, intérimaires…

Lire aussi Jean Castex détaille « l’allégement » du confinement : des restrictions jusqu’à la fin de l’année et des dispositifs de soutien renforcés

Cette décision confirme une annonce faite huit jours plus tôt par Mme Borne et dont Emmanuel Macron avait parlé, mardi soir, durant son allocution télévisée.

Pour être éligible au dispositif, il faut remplir deux conditions : avoir travaillé au moins 60 % du temps en 2019 et se situer, aujourd’hui, sous un niveau de ressources de 900 euros par mois (qu’il s’agisse d’un salaire, d’une prestation sociale, etc.).

« Personne ne sera laissé au bord de la route »

C’est une aide différentielle, versée pour la période allant de novembre à février 2021 : elle atteindra, par exemple, 900 euros pour la personne n’ayant rien perçu ou 100 euros pour celle qui a touché 800 euros. La mesure cherche également à soutenir ceux qui reprennent un emploi : dans ce cas de figure, elle est calculée en comptabilisant 60 % de la rémunération issue de l’activité. Ainsi, une personne payée 1 000 euros par mois sera considérée comme ayant reçu 600 euros et aura donc droit à 300 euros d’aide.

Le nombre de bénéficiaires potentiels « est difficile à évaluer », a indiqué, jeudi, l’entourage de Mme Borne, lors d’une conférence de presse téléphonique, mais il pourrait se situer entre 300 000 et 400 0000. « Personne ne sera laissé au bord de la route », a-t-on ajouté au ministère du travail, précisant que l’enveloppe budgétaire sera « ouverte » – autrement dit, son montant s’adaptera aux demandes.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les jeunes de plus en plus menacés par la pauvreté

Secrétaire nationale de la CFDT, Inès Minin a salué, jeudi, dans un communiqué, cette annonce qui « répond en partie à une situation d’urgence ». « C’est plutôt une bonne initiative », confie au Monde Cyril Chabanier, le président de la CFTC.

Il vous reste 51.02% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Sur le télétravail, un accord est en bonne voie

Le texte « définitif » remis par le patronat jeudi ajoute des précisions sur la mise en place du télétravail en situations de crise (pandémie, catastrophes naturelles, destruction des locaux d’une entreprise) ou encore sur la prise en charge des frais.

Le Medef a réussi à arracher, jeudi 26 novembre, l’« avis favorable » de la CFDT, de Force ouvrière, de la CFE-CGC et de la CFTC, pour son projet d’accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail. Seule la CGT ne l’a pas validé.

« Cette négociation s’achève positivement », a estimé Hubert Mongon, le négociateur social du Medef, à l’issue d’une ultime réunion de près de trois heures, qui a mis fin à quatre journées de tractations intenses et trois semaines de négociations.

Le texte « définitif » remis par le patronat jeudi ajoute des précisions sur la mise en place du télétravail en situations de crise (pandémie, catastrophe naturelle, destruction des locaux d’une entreprise) ou encore sur la prise en charge des frais. Portant aussi sur le télétravail classique, il est censé compléter le précédent ANI, signé en 2005.

Les organisations syndicales favorables, mais aussi la CGT, doivent encore recueillir le blanc-seing de leurs instances respectives et ont jusqu’au 23 décembre pour parapher le document.

Le texte est-il contraignant ?

Louant « un texte opérationnel », M. Mongon a listé quelques « points importants », comme le double volontariat (de l’employeur et du salarié) ou la réversibilité – qui permet à un salarié de revenir sur son lieu de travail si le télétravail ne lui convient pas –, qui existaient pourtant déjà dans l’ANI 2005. Il a toutefois refusé de répondre à une question qui fâche : ce texte est-il contraignant ? Le patronat s’était fixé l’objectif, contesté par les syndicats, de rendre ce texte « ni normatif ni prescriptif ».

Un ANI « par définition, lorsqu’il est signé par une majorité d’organisations professionnelles et patronales, est un accord qui s’installe dans le paysage juridique des entreprises et du pays », a-t-il souligné. « A ce titre, ça devient un accord de référence et qui a vocation à être étendu » par la loi, a-t-il ajouté. Or c’est sur ce point que la CGT continue de focaliser ses critiques, alors que les autres organisations n’en font plus un casus belli.

Mercredi, Fabrice Angéi, le négociateur de la CGT, avait prévenu qu’il voyait mal comment signer un accord non contraignant. « Tout ce qui est écrit dedans peut être contourné. C’est un gros souci », avait-il regretté.

Lire aussi Télétravail : les partenaires sociaux se retrouvent jeudi pour une nouvelle séance de négociation

Texte revu quatre fois

Le patronat a revu sa copie quatre fois en moins d’une semaine, pour arriver à convaincre les syndicats qui voyaient dans le projet surtout « des reculs » pour les salariés. Mais faute d’accord, le gouvernement se serait chargé de légiférer, certains voyant cette reprise en main comme « un échec ».

Dès mercredi, la CFDT et la CFTC s’étaient dites prêtes à signer la précédente version du texte, qui faisait une série de concessions, tout en considérant que le projet n’était « pas révolutionnaire » en matière de droits des salariés.

L’accord proposé « n’est pas normatif, pas contraignant, mais il donne un cadre, ça servira de guide dans certaines entreprises », avait estimé mercredi Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT.

Cet accord « fera la part belle au dialogue social, ce qui est crucial quand on voit la diversité des situations de travail. Chaque entreprise pourra désormais se servir de ce cadre pour mettre en place de manière durable le télétravail », a estimé la ministre du travail, Elisabeth Borne, dans un communiqué.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le 100 % télétravail, un modèle d’exception

Quelques nouveautés

Le document rappelle le cadre juridique existant, notamment que la mise en place du télétravail passe par un accord collectif, une charte ou un accord de gré à gré entre l’employeur et le salarié.

Parmi les nouveautés, les syndicats ont réussi à obtenir que l’éligibilité des postes télétravaillables ne soit pas du ressort unique de l’employeur mais fasse l’objet d’un dialogue social en entreprise. En ce qui concerne le télétravail en temps de crise, les conditions de sa mise en place passeront par « un accord » ou « une charte ».

En revanche, pas de prise en charge des frais d’Internet, de chauffage ou d’électricité, comme réclamé par la CGT, mais rappel que les frais « doivent être supportés » par l’employeur et que ce « peut être » le sujet d’un dialogue social en entreprise.

Depuis fin octobre, le télétravail est « la règle » dans les entreprises qui le peuvent. Le premier ministre, Jean Castex, a souligné jeudi qu’il devait rester « le plus massif possible » dans les prochaines semaines.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le télétravail est-il bon pour l’économie ?

Le Monde avec AFP

Les hommes « souffrent quand ils gagnent moins que leurs épouses », selon une étude britannique

C’est l’une des inquiétudes des économistes : en fragilisant l’emploi des femmes, la crise due à la pandémie du Covid-19 pourrait, comme le télétravail prolongé, creuser un peu plus les écarts de revenus entre les deux sexes.

Selon Eurostat, le salaire horaire brut moyen des femmes était déjà, avant la crise, en 2018, de 14,1 % inférieur à celui des hommes dans l’Union européenne. Un fossé en partie alimenté par la surreprésentation des premières dans les métiers moins bien payés, par les interruptions de carrière liées aux maternités, ou encore par le poids des normes dans les entreprises.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Je suis une femme quota » : 40 personnalités allemandes défendent l’accès des femmes aux postes à responsabilités

Des sociologues de la City University of London viennent de publier une surprenante étude confirmant à quel point ces normes sont particulièrement dures à faire bouger, et ce au sein même des couples. Les auteurs tentent d’y mesurer « les implications de l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes sur le bien-être psychologique de ces derniers ».

Pour ce faire, ils ont analysé les données de l’« étude longitudinale sur les ménages britanniques » (« UK Household Longitudinal Study »), une vaste enquête menée auprès de 40 000 ménages britanniques depuis 2009, financée par le gouvernement.

Effet dopant

Résultat : la plupart des hommes « souffrent quand ils gagnent moins que leurs épouses », résume la sociologue Vanessa Gash, principale autrice de l’étude. Ils déclarent en effet « une satisfaction dans la vie moindre que les hommes ayant un revenu plus élevé ou égal à celui de leurs épouses », « tandis que le bien-être subjectif des femmes ne semble pas être affecté par le fait d’être moins bien rémunérées ».

Une augmentation permettant de creuser l’écart avec le salaire de leur compagne a un effet dopant sur le moral des hommes, mais l’inverse n’est pas vrai : les femmes ne sont pas plus satisfaites lorsqu’elles gagnent plus que leur conjoint. « Ces résultats suggèrent que l’écart de rémunération entre les partenaires est renforcé par les normes du modèle traditionnel où l’homme est le principal apporteur de revenus du ménage », écrit Vanessa Gash.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le diktat de la tablette de chocolat draine les hommes vers les salles de fitness

Et pour cause, explique-t-elle : les hommes heureux car mieux payés sont, consciemment ou non, réticents à donner la priorité à l’emploi de leur femme ou à mieux partager les tâches parentales si cela peut nuire à leur carrière… et donc à leur bien-être.

Une enquête du même genre menée de l’autre côté de la Manche offrirait-elle des résultats similaires ? Sans doute. Car si les écarts salariaux entre les sexes sont un peu moins élevés en France (15,8 %, contre 19, 8 % au Royaume-Uni, selon Eurostat), ils restent supérieurs à la moyenne européenne, et au score des vertueux Suédois (12,6 %).

« La tendance dans la rémunération des patrons est claire : de moins en moins de part fixe, de plus en plus de performances »

Façade de l’ancienne bourse de Paris, le 18 mai 2020.

Pertes et profits. Bernard Charlès reste le patron le mieux payé de France. Le directeur général de la pépite Dassault Systèmes, numéro un mondial des logiciels 3D, a perçu 24,7 millions d’euros pour 2019, dont 21,7 millions en actions de performance, indique le rapport annuel du cabinet de conseil aux actionnaires Proxinvest, publié mercredi 25 novembre.

A l’inverse, on ne peut pas parler de performance pour le patron du parapétrolier TechnipFMC, deuxième du classement, mais la fusion ratée entre Technip et l’américain FMC, la perte de 2,4 milliards d’euros et l’éviction du CAC 40 n’ont pas empêché Douglas Pferdehirt de toucher 13,7 millions. Daniel Julien, de Teleperformance, arrive en troisième position, avec 13,2 millions d’euros.

Lire aussi Bourse : « La dynamique des prochains mois est plus difficile à cerner qu’il n’y paraît »

La rémunération moyenne globale des patrons du CAC 40 a baissé de 10 %, notamment en raison d’un recul de 8 % des bonus, tout en restant « la deuxième moyenne la plus élevée sur dix ans » avec 5,18 millions d’euros – contre 5,77 millions en 2018 (+ 12 %). Huit dirigeants l’ont vue baisser, tandis que ceux d’Atos, EssilorLuxottica et Sanofi ont dû renoncer à leur bonus pour diverses raisons. Le départ de Carlos Ghosn, PDG de Renault-Nissan, parmi les mieux lotis jusqu’alors, a aussi pesé, tout comme le recul de la rémunération en actions.

Actions à long terme

Proxinvest juge la hausse de 2,7 % de la part salariale fixe « beaucoup trop rapide par rapport à l’inflation moyenne de 2019 » (+ 1,1 %). Si l’on retient les 120 plus grandes sociétés françaises inscrites à l’indice SBF 120, la hausse moyenne est sensible, puisque la moitié des patrons a gagné plus de 3 millions d’euros, contre 2,7 millions un an plus tôt. La moyenne atteint 3,7 millions, proche du record de 3,8 millions deux ans auparavant.

Mais la tendance est claire : de moins en moins de part fixe, de plus en plus de performances, notamment d’actions à long terme. Elle représentait 35,8 % du total, soit 9 points de plus qu’en 2010, et 41,8 % pour le CAC 40. En dépit de progrès, la mesure de cette performance doit être améliorée, réclame Proxinvest. Par ailleurs, le cabinet indépendant note que la rémunération des salariés augmente (+ 5,8 %) pour la première fois depuis 2014, même si la hausse a été moins forte pour eux (+ 17 %) que pour leur patron (+ 28 %) sur les six dernières années.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Je suis une femme quota » : 40 personnalités allemandes défendent l’accès des femmes aux postes à responsabilités

Il scrute désormais le ratio d’équité, qui mesure l’écart de rémunérations entre dirigeants et salariés. Dans les sociétés du SBF 120, le dirigeant a perçu 73 fois le salaire moyen des employés et 43 fois le salaire médian. En cette période de crise, où des millions de salariés souffrent d’une perte de revenus, Proxinvest prévient qu’il sera vigilant sur les dividendes et la part variable, puisque les objectifs fixés avant la crise seront rarement atteints.

L’avenir des salariés d’IBM France s’assombrit

Invitée à l’Elysée le 28 mai 2018 à l’occasion du sommet Tech for Good, l’ancienne patronne d’IBM Virginia Rometty avait promis la création de 1800 emplois en France.

Les plans de départ chez IBM France, on en est coutumier. De mémoire de syndicalistes, pas une année n’a passé depuis au moins une décennie sans que ces épisodes douloureux se répètent. Mais cette fois-ci c’est le coup de bambou. Même si le chiffre définitif des coupes dans l’effectif n’a pas encore été arrêté, c’est entre 20 et 25 % des effectifs qui devraient prendre la porte en 2021, soit entre 1 200 et 1 400 emplois. Les arbitrages finaux de la direction doivent être communiqués d’ici la mi-décembre. Ces mesures s’inscrivent dans un plan qui doit condamner 10 000 emplois en Europe.

Loin des grandes heures qui l’ont vu se hisser comme un géant mondial de l’informatique, l’entreprise américaine cherche aujourd’hui à se réinventer. Elle a, ces dernières années, vendu ses activités de fabrication de PC et de serveurs au chinois Lenovo, faisant désormais le pari du cloud (informatique dématérialisée) pour trouver une nouvelle jeunesse, elle qui est née en 1911.

Amertume

Cette restructuration intervient après le départ en janvier de Virginia Rometty à la tête de la société, remplacée par Arvind Krishna, et par la décision, neuf mois plus tard, de scinder la compagnie en deux entités : l’une consacrée à ses activités traditionnelles (gestion, conseil et maintenance d’infrastructures), l’autre au cloud et à l’intelligence artificielle. Une partition pas forcément favorable à l’antenne française d’IBM, qui était encore très présente sur les « anciens » métiers d’IBM.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Arvind Krishna a la lourde tâche de tirer IBM du monde du sommeil profond »

L’amertume est d’autant plus forte au sein des équipes hexagonales qu’en mai 2018 Virginia Rometty avait promis de créer 1 800 emplois en France, à l’occasion de l’événement Tech for Good. Ce jour-là, à l’Elysée, dans sa robe jaune, au milieu d’hommes en costumes sombres, la patronne américaine prenait la lumière à la droite du président Macron, plus proche encore de lui que le puissant Mark Zuckerberg, de Facebook.

« Avec les plans qui se sont succédé et les annonces de ceux à venir, nous aurons largement dépassé les moins de 1 800 salariés chez IBM France d’ici à fin 2021 ! », déplore désormais la CFDT, qui relève dans un communiqué que, dans l’intervalle, l’entreprise a bénéficié de 130 millions d’euros de crédit d’impôts quand elle n’en a payé que 39 millions.

« Avant, on était précurseurs, aujourd’hui on est suiveurs », s’inquiète-t-on en interne

Cette coupe massive dans les effectifs a été « une grosse surprise », confie un représentant du syndicat, qui attribue cette décision à « une recherche de toujours plus de profit ». Le même observe que les prévisions de l’entité française prévoient toujours un résultat « loin d’être négligeable » de 80 millions d’euros pour 2020.

Il vous reste 27.95% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Confinement : le gouvernement promet une aide pour les travailleurs précaires

Une « aide exceptionnelle » pour les travailleurs précaires qui travaillaient « significativement » avant la crise du Covid-19 va être mise en place, annonce la ministre du travail, Elisabeth Borne, dans une interview à paraître jeudi 26 novembre dans Les Echos.

« J’ai proposé au premier ministre l’instauration d’une aide exceptionnelle, ciblée sur des personnes qui travaillaient significativement avant la crise même s’ils alternaient période de travail et de chômage, pour leur garantir un revenu de remplacement mensuel minimal. »

Cette aide individualisée et versée par Pôle emploi doit concerner « environ 300 000 personnes, dont 70 000 jeunes » et « son versement durera le temps que le marché du travail se stabilise », ajoute Mme Borne à la veille d’une conférence de presse où Jean Castex doit détailler les annonces du chef de l’Etat lors de son allocution de mardi.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Avec la crise, les réseaux d’anciens élèves au secours des étudiants et jeunes diplômés

Emmanuel Macron avait annoncé une « réponse exceptionnelle » pour « les saisonniers, les extras qui n’ont plus d’engagement depuis des mois, les précaires qui travaillaient les années précédentes mais ne retrouvent plus d’emplois ». Il avait aussi évoqué « les jeunes qui n’arrivent à trouver ni emploi étudiant ni premier emploi », affirmant que « le plan un jeune, une solution fera l’objet de moyens accrus ».

Des « trous dans la raquette » pour les jeunes

Sur ce point, le plan présenté en juillet « se déploie très bien », affirme la ministre, qui cite notamment « 128 000 » intentions de recours à la prime à l’embauche d’un jeune (jusqu’à 4 000 euros) et « 172 000 demandes » d’aide à l’embauche d’un apprenti (5 000 euros pour un apprenti de moins de 18 ans ou 8 000 euros pour un majeur), espérant « battre le record » de contrats signés en 2019.

Lire aussi Chômage partiel : 25 000 contrôles effectués, 1 400 « suspicions » de fraude

Pour autant, elle fait état de « trous dans la raquette ». « On veut en particulier s’assurer qu’il n’y ait pas de rupture dans les parcours parce qu’un jeune n’est plus éligible à une aide financière », dit-elle, proposant notamment un élargissement du bénéfice de la rémunération de stagiaire de la formation professionnelle.

Sur la prise en charge du chômage partiel, dont les règles doivent devenir moins favorables au 1er janvier, elle précise que « les entreprises fermées administrativement continueront de bénéficier d’une prise en charge totale, sans limitation de durée », et évoque d’autres « ajustements » possibles.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Confinement : le télétravail, partout où c’est possible, redevient une « obligation »

Quant au télétravail, qui depuis fin octobre est « la règle » dans les entreprises qui le peuvent, elle affirme que « le protocole sanitaire concernant les entreprises va continuer à s’appliquer dans ses termes actuels jusqu’aux vacances de Noël ». Pour la suite, elle note une « demande d’un peu plus de souplesse » et échangera lundi avec les partenaires sociaux sur ce point, évoquant « la possibilité de permettre aux salariés de revenir au moins un jour par semaine au bureau ».

Le Monde avec AFP

Le Conseil d’Etat annule deux points très contestés de la réforme de l’assurance-chômage

C’est une victoire partielle pour les syndicats et le patronat. Le Conseil d’Etat a annulé, mercredi 25 novembre, deux dispositions très contestées de la réforme de l’assurance-chômage, un nouveau casse-tête pour l’exécutif qui a déjà dû reporter plusieurs fois son entrée en vigueur.

Cette décision n’a cependant pas d’impact immédiat puisque, du fait de la crise économique, le gouvernement a suspendu l’application de la réforme, décidée par décret en juillet 2019, jusqu’au 1er avril 2021.

Lire aussi La réforme de l’assurance-chômage reportée jusqu’en avril 2021

Dans un communiqué, la ministre du travail, Elisabeth Borne, estime d’ailleurs que les concertations en cours avec les partenaires sociaux pour tenir compte de la crise « permettront de proposer des solutions conformes à la décision du juge ».

« Une première victoire » pour les syndicats

Dans sa décision, le Conseil d’Etat annule le point le plus contesté par les syndicats de la réforme rédigée par l’ex-ministre du travail Muriel Pénicaud : les modalités de calcul de l’allocation. Il estime que cela « porte atteinte » au principe d’égalité entre allocataires. Pour une raison de forme, il annule aussi l’instauration d’un bonus-malus sur la cotisation chômage de certaines entreprises, critiquée par le patronat.

La juridiction n’a, en revanche, pas remis en cause le durcissement des conditions d’affiliation ni l’introduction d’une dégressivité pour les hauts revenus, également critiqués par les syndicats.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’assurance-chômage doit s’adapter à la segmentation du marché du travail »

Les syndicats se sont unanimement félicités de « cette première victoire ». « Il faut amplifier la lutte pour obtenir l’annulation totale d’une réforme profondément injuste », a réagi la CGT ; pour la CFDT, le gouvernement « doit plus que jamais renoncer à sa réforme ».

Un système pénalisant les « permittents »

La disposition annulée est au cœur de la philosophie de la réforme voulue par Emmanuel Macron qui jugeait que le mode de calcul actuel n’incite à pas à la reprise d’un emploi stable.

La réforme prévoyait que le salaire journalier de référence, base de l’allocation mensuelle, soit calculé non plus sur le total des salaires divisé par les jours de travail des 24 derniers mois mais sur ce total divisé par l’ensemble des jours, y compris non travaillés, de la période.

Dans l’esprit du gouvernement, cette modification visait à corriger un système plus favorable, pour le même nombre d’heures de travail, à celui qui a des contrats fractionnés par rapport à celui qui a un temps partiel en continu. Mais cela pénalisait fortement les « permittents », ceux souvent précaires qui alternent chômage et contrats courts.

Lire aussi Assurance-chômage : la piste d’un bonus-malus généralisé

« Du fait des règles qui ont été retenues, le montant du salaire journalier de référence peut désormais, pour un même nombre d’heures de travail, varier du simple au quadruple, constate le Conseil d’Etat. Il en résulte (…) une différence de traitement manifestement disproportionnée au regard du motif d’intérêt général poursuivi. »

Selon l’Unedic, avec la réforme, 840 000 nouveaux entrants toucheraient une allocation plus faible qu’avec les règles actuelles. La baisse serait en moyenne de 24 % (de 902 à 689 euros net par mois). Leur indemnisation durerait en revanche 18 mois au lieu de 12.

Une réunion prévue en décembre pour de nouveaux ajustements

L’autre point annulé par le Conseil d’Etat est l’instauration d’un bonus-malus sur la cotisation d’assurance-chômage payée par les entreprises dans sept secteurs grands consommateurs de CDD courts et d’intérim (hébergement-restauration, agroalimentaire, transports, plasturgie…). Mais elle est annulée pour une raison mineure, le juge estimant que le dispositif de bonus-malus renvoyait, pour certaines modalités, à un arrêté là où il aurait fallu un décret.

La fédération de la plasturgie s’est dite cependant satisfaite de cette décision et demande au gouvernement de « renoncer au nom de la sauvegarde économique à une nouvelle mise en place pour les prochaines années ».

Dans les discussions en cours, le gouvernement a proposé de reporter d’un an l’entrée en vigueur du bonus-malus, qui ne s’appliquerait que sur la cotisation 2023.

Côté chômeurs, le ministère du travail a proposé de revenir sur le passage de 4 à 6 mois de travail (sur les 27 derniers) pour ouvrir des droits, mais uniquement pour les jeunes de moins de 26 ans. Le seuil de rechargement des droits passerait de six mois (prévus dans la réforme) à quatre.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Assurance-chômage : les syndicats s’estiment trompés par le gouvernement

Quant à la dégressivité pour les demandeurs d’emploi ayant eu auparavant un salaire de plus de 4 500 euros brut, celle-ci, d’un montant de 30 %, interviendrait au bout de 8 mois au lieu de 6. Ces aménagements n’ont pas du tout satisfait les syndicats, et une prochaine réunion est prévue début décembre.

Le Monde avec AFP