Archive dans avril 2019

La 5ème version du langage Swift d’Apple

L’ultime version de Swift, le langage de programmation de MacOS et iOS, admet de créer des apps plus légères et offre une interopérabilité optimum.

Apple a édité son langage de programmation Swift 5 avec une Application Binary Interface (ABI ou interface binaire-programme) et une compatibilité binaire qui, selon lui, admettront de développer des applications de plus petite taille. Cette version progresse aussi l’interopérabilité avec d’autres langages. Avec cette mise à niveau, l’ABI est fixe sur les plates-formes Apple, de sorte que les bibliothèques Swift sont aussitôt intégrées à toutes les futures versions de MacOS, iOS, WatchOS et TVOS. Comme les développeurs n’auront plus à inclure ces bibliothèques, les apps seront désormais plus légères et plus faciles à engendrer.

Parmi les autres innovations de Swift 5, les types appelables dynamiquement sont pris en charge pour améliorer l’interopérabilité avec des langages comme JavaScript, Python et Ruby. Par défaut, cette version 5 impose l’accès exclusif à la mémoire pour les builds de version et de débogage afin de progresser la sécurité du langage. Swift 5 offre une réimplémentation de String, de nouveaux types de données et un accès exclusif à la mémoire durant l’exécution. Dans la bibliothèque standard, String a été remis en oeuvre avec l’encodage UTF-8 au lieu de l’UTF-16, ce qui peut empresser le code. L’interopérabilité Objective-C est préservée.

Éventualité de créer des chaînes brutes

Swift 5 progresse les délimiteurs littéraux de chaînes de caractères pour prendre en charge le texte brut. Les chaînes de caractères multilignes et à ligne unique sont appuyées et peuvent contenir n’importe quel contenu. Dans un billet, le développeur Paul Hudson, qui anime le site Hacking with Swift, souligne l’intérêt de créer ainsi des chaînes brutes (raw strings) où les barres obliques inverses et les guillemets sont interprétés comme des symboles littéraux plutôt que comme des caractères d’échappement ou terminant une chaîne. « Cela facilite un certain nombre de cas d’utilisation, mais ce sont les expressions uniformes qui en bénéficieront », estime-t-il. Par ailleurs, les propriétés Unicode pour prendre en charge les traitements de texte courants et avancés sont ajoutées au type Unicode.Scalar. Pour les vecteurs SIMD (instruction unique, données multiples), la bibliothèque expose un sous-ensemble d’opérations sur les types SIMD consolidés par la plupart des processeurs de la bibliothèque.

Des progrès de performance ont été apportés au Dictionnaire et au Set. On trouve aussi l’ajout d’un type Result, pour progresser la gestion des erreurs. Le gestionnaire de paquets Swift Package Manager possède des paramètres de construction spécifiques à la cible, la mise en miroir des dépendances, des cibles de déploiement personnalisées et la possibilité d’engendrer des données de couverture de code. Enfin, la commande swift run admet d’importer des bibliothèques dans une boucle read Eval – print (REPL) sans avoir à bâtir un exécutable. Les binaires Swift pour Linux sont téléchargeables sur Swift.org. Le langage fait également partie de l’IDE Apple Xcode 10.2, accessible sur Mac App Store d’Apple.

Les pistes de réforme retraite font polémiques

Le Président de la République désire un accroissement de la durée de cotisation. Pour faire des économies, certains défendent pour le faire avant 2025.

Sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron a levé une requête de taille, le 25 avril, lors de sa déclaration de presse à l’Elysée. Le président de la République a affirmé que, dans le futur système universel en cours de construction, les assurés pourront poursuivre la demande du versement (ou la liquidation) de leur pension à partir de 62 ans – tout comme actuellement, donc. Une précision qui met au rebut l’idée d’un report de cette borne d’âge, appuyée par plusieurs membres du gouvernement.

Mais alors qu’il venait de trancher sur ce sujet sensible, à l’origine d’un bruit de plusieurs semaines au sommet de l’Etat, M. Macron a fait surgir d’autres questionnements, en déclarant le souhait d’allonger la période durant laquelle les personnes cotisent pour leurs retraites. « Je n’ai pas trouvé ça clair, j’attends d’en savoir plus », déclare Frédéric Sève (CFDT). « Veut-il le faire dans le régime actuel ? On n’en sait rien », renchérit Pascale Coton (CFTC).

Plusieurs hypothèses sont, en réalité, sur la table. Selon nos informations, deux d’entre elles consisteraient à prendre des mesures avant le big-bang promis par le Président de la République: elles passeraient à court terme par un accroissement de la durée de cotisation pour certaines générations et l’instauration d’un âge-pivot, venant s’ajouter à l’âge minimum de départ, de manière à inciter les assurés à rester en activité, au-delà de 62 ans.

Abattement durant trois ans

Actuellement, la règle de droit commun prédit que la pension peut être soldée à 62 ans. Pour que celle-ci accède le taux plein, l’assuré doit avoir payé des contributions durant une période minimale, qui varie en fonction des reproductions (par exemple 167 trimestres pour celui qui est né entre début 1958 et fin 1960). S’il n’occupe pas cette condition, consignée dans la loi Touraine de janvier 2014, sa retraite est diminuée, par le biais d’une décote ; à l’inverse, une majoration (ou surcote) lui est accordée dans le cas où il reste en emploi au-delà de la période « de référence » sollicitée pour avoir droit au taux plein.

Un mécanisme un peu similaire existe dans le régime Agirc-Arrco de retraites complémentaires des salariés du privé, mais avec des différentes solutions et un système de bonus-malus temporaire : ainsi, le niveau de la pension supplémentaire fait l’objet d’un accablement durant trois ans si la personne part à la retraite avant un certain âge – qualifié d’âge-pivot (qui oscille entre 63 et 67 ans, selon les cas).

« L’Europe que nous voulons » 

Des ordonnances syndicales et patronales, dont la CFDT et le Medef, appellent simultanément les citoyens à se surnommer à l’occasion des élections européennes, le 26 mai, pour une Europe « indépendante, compétitive et solidaire ».

Parce que les élections européennes peignent un moment égalitariste clé pour l’avenir du projet européen et pour chacun des pays, nous, associés sociaux, nommons les citoyens à s’appeler et à voter pour supporter les valeurs fondamentales de l’Union européenne.

L’Europe que nous voulons indépendante, compétitive et solidaire doit engager des politiques ambitieuses qui ne se limitent pas à réparer les conséquences liées à la mondialisation, mais qui anticipent et conduisent les mutations technologiques et environnementales avec un budget à la hauteur des participations. Des politiques qui développent les droits sociaux, le dialogue social et la protection de l’environnement ; qui réunissent plus les régions à la mise en œuvre des investissements stratégiques (infrastructures, recherche et développement, compétences…) ; qui affirment un environnement économique loyal et stable, surtout  ajusté aux TPE-PME (très petites entreprises, petites et moyennes entreprises).

Oui, l’Europe que nous ordonnons est un atout pour la France dans le monde. Elle se doit de combattre contre le dumping social, économique et environnemental afin de demeurer le continent offrant les systèmes sociaux les plus développés

L’Europe a besoin de politiques coordonnées pour bâtir une véritable stratégie économique et technologique, dans les domaines de l’énergie, des matières premières, de l’ouvrage, etc., et pour garantir son indépendance et protéger ses citoyens. Elle doit mener des politiques équitables, soucieuses des conditions de concurrence loyale sur le plan européen et international en matière de fiscalité, de droit du travail, ou de politique commerciale. L’Europe doit aussi conduire des politiques équilibrées, c’est-à-dire vigilantes quant à l’attachement des mesures sectorielles et à leurs suites, qui fassent la promotion des normes sociales et environnementales internationales (normes internationales du travail, Accord de Paris sur le climat, principes directeurs de l’OCDE, Objectifs du développement durable…).

Oui, l’Europe que nous voulons est un atout pour la France dans le monde. Elle se doit de lutter contre des adoptes déloyales et le dumping social, économique et environnemental afin de demeurer le continent offrant les systèmes sociaux les plus développés. Elle doit progresser sa productivité, sa croissance et l’emploi dans le but de raffermir son attractivité en tant que lieu d’investissement et d’embauche.

L’esprit des lois

Yann Legendre

Le juriste, bâtisseur de l’Institut d’études avancées de Nantes, érige le droit en « clé de voûte » de la société.

Depuis la terrasse qui donne sur la Loire, Alain Supiot fait avec enchantement le tour du propriétaire. Au centre du foyer de l’Institut d’études avancées de Nantes, il expose avec fierté « une vraie cheminée ». « On y fait des flambées, l’hiver », déclare-il. Cet institut, c’est son « bébé » – peut-être plus que ses six livres majeurs et ses leçons au Collège de France, qui ont marqué le droit du travail, la philosophie du droit et les sciences humaines. Alain Supiot voulait un lieu où puisse se déployer « le travail de la pensée » – un bon résumé de son approche intellectuel qui, abandonnant du droit du travail, a fini par consulter ce qui fait une société humaine et ce qui lui permet de le rester.

Lorsque, en 1998, le gouvernement de Lionel Jospin lui révèle la présidence du Conseil sur l’avenir de la recherche en sciences sociales, il présente la création d’un institut sur le modèle du Wissenschaftskolleg de Berlin, où il a été en résidence l’année précédente. Le principe comporte à faire vivre conjointement, durant un an, des chercheurs de différentes disciplines et de discipline et de pays différents qui parviennent avec un projet de recherche librement choisi dont le seul « frottement » fait charger l’étincelle des idées nouvelles. C’est, pour Alain Supiot, le fondement même du travail intellectuel, mais aussi du travail tout court : la mise en présence des capacités de chacun dans l’objectif d’améliorer la compréhension et le bonheur des hommes.

En cette fin des années 1990, le projet, au début prévu à Paris, suscite l’hostilité des grands établissements sur l’air de « on le fait déjà ». Mais il revient en 2002, quand Jean-Marc Ayrault, maire (PS) de Nantes, appel Alain Supiot à concrétiser son idée dans un magnifique bâtiment ultramoderne construit à cet effet. Lancée en 2008, la fondation est actuellement financée par des collectivités locales, des sociétés, le ministère de la recherche et le gouvernement suisse. En 2015, sept ans après sa création, Nantes était classée dans le top 10 mondial des Instituts d’études avancées.

« Gouvernance par les nombres »

Avec la naissance du centre, 300 chercheurs de 34 disciplines et de 52 pays s’y sont succédé – la moitié viennent d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine. « Ici, c’est tout le contraire de l’université, souligne Alain Supiot. Pas d’organisation de la recherche, pas d’enfermement disciplinaire, pas d’évaluation quantifiée. » Les seules contraintes comportent à demeurer sur place – l’institut dispose d’appartements pour ses 20 à 30 résidents –, de collaborer chaque lundi à un séminaire où chacun, tour à tour, présente ses travaux, et de prendre un repas tous ensemble trois fois par semaine.

Ouverture d’une enquête à l’université de Lorraine après des échanges racistes entre étudiants

Echanges de propos racistes entre des étudiants : l’université de Lorraine ouvre une enquête
Un signalement auprès du procureur de la République a été effectué, après la découverte de propos racistes sur un groupe de messagerie privée d’étudiants.
L’université de Lorraine a ouvert, lundi 29 avril, une enquête administrative, à la suite de divers signalements concernant des échanges de propos et de vidéos racistes entre des étudiants sur le campus de Metz. Une commission d’enquête interne va « convoquer les auteurs des faits, entendre les différentes victimes et témoins des agissements racistes qui ont été révélés ces derniers jours », a indiqué dimanche l’établissement.

« Nous avons été alertés par les réseaux sociaux sur le fait qu’un groupe privé Messenger [la messagerie de Facebook] d’étudiants en sociologie à Metz était apparemment un déversoir de propos et de vidéos racistes se moquant des étudiants et d’enseignants noirs », avait expliqué samedi le directeur de la communication de l’université, David Diné, à l’Agence France-Presse (AFP).

Un signalement au procureur de la République de Metz a été effectué durant le week-end par l’université, qui a condamné « la gravité des actes racistes dont elle a pris connaissance ». Elle a également annoncé la mise en place d’un dispositif d’accompagnement et d’écoute en direction des personnes victimes et de la communauté universitaire.

Une marche contre le racisme
L’affaire a été révélée lors d’une sortie pédagogique, jeudi, quand une jeune fille a pris des captures d’écran des conversations de ce groupe de messagerie électronique, et les a postées sur les réseaux sociaux. « Ces étudiants prenaient des photos et des vidéos des étudiants noirs, qu’ils publiaient dans le groupe en les traitant de “singes”, “bonobos”, qui se “bouffent le cul”, c’est absolument exécrable », décrit Ousmane Gueye, étudiant en communication et ami des victimes.

Le syndicat étudiant UNEF Lorraine a appelé, dans un communiqué, la communauté universitaire « à prendre toutes les mesures nécessaires pour que de telles agressions ne puissent plus se reproduire », notamment en renforçant les « moyens alloués au chargé de l’égalité de l’université ».

Dans une lettre adressée à la ministre de l’enseignement supérieur, dimanche, l’association SOS-Racisme s’inquiète elle aussi de ces événements d’une « particulière gravité », qui révèlent « des visions racistes sur fond de dynamiques identitaires qui ont produit, ces derniers mois, des actes racistes à Metz ou des actes antisémites sur plusieurs campus ». Elle demande la mise en place, dans chaque établissement, de dispositifs d’écoute et d’accompagnement pérennes, que pourraient saisir des étudiants et enseignants s’ils sont victimes de racisme, d’antisémitisme ou de discrimination.

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Covoiturage et vélo : est-ce fiscalement captivant ?

Des avantages fiscaux sont prévus pour le covoiturage et les déplacements à vélo
Des avantages fiscaux sont prévus pour le covoiturage et les déplacements à vélo Jacques Loic / Photononstop

L’embaucheur peut décider de prendre en charge les frais embauchés par ses travailleurs pour leurs voyages à vélo suivant certaines règles, et cette éventualité sera prochainement étendue au covoiturage.

Existe t-il des encouragements fiscaux au covoiturage et au déplacement à vélo ?

Oui, des privilèges fiscaux sont espérés pour le covoiturage et les déplacements à vélo. Ils peuvent faire économiser… quelques poignées d’euros.

Selon l’administration fiscale, les revenus du covoiturage fuient à l’impôt s’il s’agit d’un partage de frais, donc d’un voyage effectué pour votre compte, pour lequel vous acquittez vous aussi une part du carburant et du péage. Et le prix du voyage ne doit pas excéder la quote-part, par voyageur, du coût consécutif du barème kilométrique pour les frais réels. Sinon il s’agirait de revenus d’une entreprise, à exiger selon le régime micro ou réel.

Par ailleurs, l’employeur peut retenir de prendre en charge les frais engagés par ses salariés pour leurs excursions à vélo entre leur résidence et leur lieu de travail (dans la limite de 0,25 euro/km), et cette éventualité sera bientôt étendue au covoiturage. Pour le covoiturage, le prix par kilomètre doit être fixé par un décret.

Attention nonobstant, s’il est possible de profiter d’une exonération – cotisations sociales, contribution sociale généralisée (CSG), participation au rétribution de la dette sociale (CRDS) et impôt sur le revenu –, une limite globale de 200 euros par an et par salarié est prévue pour les compensations vélo, covoiturage et prise en charge par l’employeur des frais de carburant (ou pour l’alimentation de véhicules électriques).

La société à trois vitesses

« Souhaite-t-on, aujourd’hui en France, déléguer à des entreprises britanniques (Deliveroo) ou américaines (Uber) le soin de déterminer de quelle protection sociale doivent bénéficier des travailleurs français ? »
« Souhaite-t-on, aujourd’hui en France, déléguer à des entreprises britanniques (Deliveroo) ou américaines (Uber) le soin de déterminer de quelle protection sociale doivent bénéficier des travailleurs français ? » SHANNON STAPLETON / REUTERS

Le Conseil national du numérique, dirigé par Salwa Toko, sollicite qu’un coup d’arrêt soit donné aux chartes unilatérales d’implication sociale pour les laborieux des plates-formes.

Le Conseil national du numérique (CNNum) se conteste à la mise en place des chartes arbitraires  d’implication sociale des plates-formes espérées par la loi d’orientation des mobilités (LOM) et appelle plutôt à la constitution d’un vrai dialogue social sur les nouvelles formes de travail issues de l’économie numérique.

L’article 20 de la loi d’orientation des mobilités envisage la possibilité pour les plates-formes de choisir une charte essentiel leurs droits et engagements vis-à-vis des travailleurs, notamment en matière de conditions de travail et de protection sociale. Les chartes unilatérales, initialement offertes dans le cadre de la loi « avenir professionnel », ont été repoussées par le Conseil constitutionnel en septembre 2018 puis par le Sénat au tout début du mois d’avril 2019.

Cette idée revient actuellement sur le devant de la scène, mise en avant par les responsables de la plate-forme britannique d’arrivage de plats cuisinés Deliveroo. Plutôt que de créer un cadre juridique plus clair et plus juste pour ces travailleurs – qui ont, pour la plupart, le statut de micro-entrepreneurs –, cette idée avance sans le dire vers la découverte du statut d’indépendant. Statut qui, rappelons-le, profite en premier lieu aux plates-formes, en ce qu’il les libère des charges et engagements (cotisations sociales et autres) liées au travail salarié.

Possibles dérives pour notre modèle social

En effet, l’origine de la cooptation d’une charte inscrit le rapport qui lie les travailleurs à leur(s) plate(s)-forme(s) en droit commercial, et non en droit du travail. Cela aurait pour conséquence d’abandonner les plates-formes décidé seules des conditions de travail et de rétribution, ainsi que de la protection sociale de ces travailleurs.

Les chartes attendues, unilatérales, ne comportent pas de socle minimum de protection. Souhaite-t-on, actuellement en France, déléguer à des entreprises britanniques (Deliveroo) ou américaines (Uber) le soin de déterminer de quelle protection sociale doivent jouir des travailleurs français ? Souhaite-t-on créer une société à trois vitesses, constituée de salariés, d’indépendants et de travailleurs au statut hybride, dont les conditions sont ultérieurement résolues par les juges au cas par cas, conséquence de facto à la création d’un nouveau précariat ?

La réforme de l’ENA

Le Président de la République désire en finir avec l’Ecole nationale d’administration dans sa forme récente. Cette réforme, si elle aboutit, doit permettre de renouer avec une méritocratie ouverte à tous.

Quand Emmanuel Macron s’engage de mouvoir la fonction publique pour la rendre plus proche des citoyens, l’expérience de force qui se joue autour de l’Ecole nationale d’administration (ENA) en dira long sur sa capacité ou non à s’émanciper des grands corps, dont il est lui-même issu et qui ont fini par dessiner une véritable forteresse au sein de l’Etat. Emmanuel Macron a réaffirmé, lors de sa conférence de presse du 25 avril, qu’il voulait en finir avec l’ENA dans sa forme contemporaine.

Les élévations du grand débat national l’ont convaincu qu’il pouvait réaliser avec hardiesse : dans l’opinion, les énarques sont aussi dévalorisés que les élus. Loin d’être perçus comme des serviteurs zélés de l’intérêt général, ils sont vus comme les représentants d’une oligarchie qui a égaré le sens des réalités. Pourtant, le chef de l’Etat s’est bien gardé de trancher dans le vif. Il a préféré confier à l’un des anciens élèves de l’école, Frédéric Thiriez, avocat auprès du Conseil d’Etat et de la Cour des comptes, le soin d’offrir une réforme de son recrutement, des formations qu’elle délivre et de la carrière qu’elle offre.

Rien n’est donc acté ; or ce qui s’est joué ces dernières années encourage à la réticence. En 1995, déjà, l’un de ses anciens élèves, Jacques Chirac, avait prévu d’en finir avec l’ENA, y voyant le symbole « d’une élite qui a failli, d’une caste qui se coopte ». Il n’y était pas arrivé. Nicolas Sarkozy non plus, qui, douze ans plus tard, s’était montré choqué de constater que, à 26 ans, un certain nombre de jeunes gens frais émoulus de l’école, la tête bien faite, mais en manque flagrant de terrain, étaient assurés d’une carrière à vie dans les hautes sphères de l’Etat ou à la tête de grandes entreprises. Il leur suffisait pour cela de sortir dans la botte, cette quinzaine de places que le Conseil d’Etat, l’inspection générale des finances et la Cour des comptes conservent chaque année aux mieux classés du concours de sortie.

Péril d’endogamie

L’idée de vouloir produire une élite administrative formée sur la méritocratie n’était pas mauvaise au moment où l’ENA a été créée, en 1945. Il s’agissait alors de rétablir le pays en luttant contre le népotisme qui régnait avant guerre dans les différents ministères. A son apogée, l’école, fruit d’un consensus entre le général de Gaulle et le communiste Maurice Thorez, a fourni à l’Etat ses meilleurs modernisateurs, mais, au fil du temps, l’ambition principale s’est affadie.

L’Etat a perdu en force et en prestige, l’enseignement s’est banalisé, l’embauche s’est rétrécie. En dépit de trois voies de vestibule différentes et d’un nombre important de boursiers, l’école ne garantit plus la démocratisation de la haute fonction publique : les enfants de cadres supérieurs y sont surreprésentés, les fils ou filles d’ouvrier quasiment absents. Il en résulte un risque d’endogamie renforcé par le classement de sortie, qui admet à une élite de fructifier dans l’entre-soi, avec, qui plus est, la certitude de durer bien plus longtemps que les ministres qu’elle est censée servir.

Il faut rattacher avec l’esprit de 1945, celui d’une méritocratie ouverte à tous et véritablement au service de l’Etat. Une réforme est bel et bien urgente, mais, une fois dit cela, le plus dur reste à faire, car, outre la résistance des grands corps, une inquiétude, réelle, est à lever : et si le service public n’était plus capable de captiver les meilleurs ?

L’enseignement de l’italien en France

Il y a cinq cents ans décédait Léonard de Vinci. Mais la célébration que la France prépare avec l’Italie survient alors que le transformation Blanquer assène un dur coup à l’enseignement de l’italien, déplore un collectif d’universitaires dans une tribune au « Monde ».

Tribune. On nous annonce que le 2 mai le président de la République française recevra à Amboise M. Sergio Mattarella, président de la République italienne, pour commémorer le cinquième centenaire de la mort de Léonard de Vinci (1452-1519). On peut certes voir là un geste d’apaisement entre France et Italie, après ces derniers mois tumultueux. Si ce n’est que, en même temps que s’annoncent ces festivités, le ministre de l’éducation nationale aménage de son côté l’asphyxie de l’enseignement de l’italien en France.

En deux ans, M. Blanquer a partagé par deux le nombre de postes à l’agrégation externe d’italien avec, en 2019, un nombre insignifiant, sinon humiliant, de cinq postes, tandis que le capes passe amplement sous la barre des vingt postes (contre vingt-huit en 2018 et trente-cinq ou plus les années précédentes), alors même que non uniquement la demande dans l’enseignement secondaire ne décroît pas mais que des cohortes d’étudiants commencent l’italien à l’université (plus de mille à Aix-Marseille, Montpellier, Paris-I, Toulouse, etc.) faute de n’avoir pu l’adopter au collège ou au lycée !

La réforme Blanquer, qui détruit le coefficient de la LV3 (désormais LVC) pour nos très nombreux élèves, assène un coup mortel à l’enseignement de l’italien en France alors que l’Italie reste le deuxième partenaire commercial de la France, offrant de vraies visions sur le marché de l’emploi.

Claude Hagège, Thomas Dutronc, Julie Gayet

Geste d’atténuation ou mascarade politique ? Plusieurs personnalités du monde de l’art et de la culture, comédiens, écrivains, journalistes et intellectuels, comme Jeanne Balibar, Andrea Camilleri, Luciano Canfora, Emma Dante, Gérard Darmon, Thomas Dutronc, Julie Gayet, Stéphane Guillon, Claude Hagège, Michel Pastoureau, Ernest Pignon-Ernest, etc. ont signé notre appel en ligne pour que l’amitié franco-italienne soit une réalité politique, pour que le nombre de postes aux concours retrouve sa dignité nationale, et pour que l’enseignement de l’italien soit appuyé comme enseignement de spécialité avec des moyens spécifiques.

Dira-t-on, le 2 mai, qu’il existe des départements français entiers où aucun établissement public du secondaire n’offre pas l’enseignement de l’italien ? Célébrera-t-on Léonard de Vinci au mépris de la langue de Dante, de Machiavel, de Galilée, de Verdi ou d’Umberto Eco ? Se recueillera-t-on sur la tombe du « génie » en songeant que l’on tente d’effacer subrepticement dans les couloirs d’un ministère une partie de notre richesse et de notre histoire communes ? Chantera-t-on l’amitié fraternelle de nos deux nations quoique que M. Blanquer concocte son sinistre fratricide ?

pollution au bureau !

« Dans les espaces de travail, les composés organiques volatils (COV) et autres molécules nocives se diffusent en toute liberté. Or, les Français passent 85 % de leur temps en moyenne dans des environnements clos. »
« Dans les espaces de travail, les composés organiques volatils (COV) et autres molécules nocives se diffusent en toute liberté. Or, les Français passent 85 % de leur temps en moyenne dans des environnements clos. » Katarina Sundelin/PhotoAlto / Photononstop

Produits ménagers, moquettes, imprimantes… Les lieux d’ouvrage dissimulent un bon nombre d’équipages qui distribuent des particules aux effets nuisibles sur la santé.

Il y a une obligation à nettoyer nos entourages de travail ! C’est l’information déclenché par la docteure en génétique et biologie moléculaire, cofondatrice d’Habitat Santé Environnement (HSEN) Bordeaux, Isabelle Farbos.

Collaborée le 17 avril lors d’une conférence structurée par l’Association des directeurs de l’entourage de travail (Arseg) sur le salon Workspace Expo, cette chercheuse s’est inclinée sur les substances nocives côtoyées chaque jour par les salariés sur leurs lieux de travail. Et ses conclusions sont sans appel : produits ménagers, moquettes, imprimantes… « Faute de réglementation, des molécules dangereuses sont utilisées dans plein de produits », menace Isabelle Farbos.

Et la chercheuse d’égrener une grande liste: du formaldéhyde, utilisé dans les produits d’entretien et classé cancérigène avéré par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), aux phtalates dans les sols en PVC – perturbateurs endocriniens notoires – en passant par les particules fines émises par les ordinateurs et les photocopieurs et qui participent à irriter les voies respiratoires…

Le diable se cache jusque dans le petit café du matin, pris dans des gobelets en plastique, ou dans la fontaine à eau, purifiée à l’acide sulfurique. Certaines de ces substances sont d’ailleurs publiquement reconnues comme pouvant être à l’origine de maladies professionnelles.

Action sur les gènes

C’est l’entassement et « l’effet cocktail » – le contact avec plusieurs de ces substances – qui rend imprudente l’exposition à ces polluants. « Le salarié va respirer ces molécules pendant dix ans », souligne la chercheuse. Leurs effets délétères sur la santé étaient assez peu connus jusqu’à une période récente, ce qui développe la relative inaction des pouvoirs publics – surtout l’action de ces principes sur les gènes.

« Durant longtemps, on a seulement étudié ces substances sous l’angle de la toxicologie et pas de la génétique », déclare la chercheuse. Cela fait moins d’une dizaine d’années que les chercheurs ont débuté à s’intéresser à l’action des molécules présentes dans l’environnement sur nos gènes. « En vérité, il n’y a que très peu de fatalité ADN, affirme Isabelle Farbos. Si un patient commence à avoir du diabète, par exemple, c’est que son gène insuline est passé en mode “off” du fait de son environnement ». Même chose pour les tumeurs cancéreuses.