« Les partenaires sociaux doivent négocier un meilleur partage de la valeur »

Thibault Lanxade et François Perret, « ambassadeurs à l’intéressement et la participation » auprès du gouvernement, appellent dans une tribune au « Monde » patronat et syndicats à utiliser les nouveaux leviers de l’épargne salariale

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 2 min.

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Tribune. Favoriser le partage de la valeur est l’un des objectifs de la loi « relative à la croissance et la transformation des entreprises », dite loi PACTE, promulguée le 22 mai. Dans ce nouvel environnement législatif, les partenaires sociaux doivent pouvoir jouer tout leur rôle pour accompagner la transformation visée.

Au cours des derniers mois, patronat et syndicats se sont retrouvés sur une ligne commune : moins d’accords nationaux interprofessionnels (ANI) à l’avenir, et plus d’accords de branche. La loi PACTE, dont tous les décrets seront bientôt publiés, leur donne une belle opportunité de transformer l’essai sur un levier essentiel de la performance collective : l’épargne salariale.

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Sans attendre, il est aujourd’hui possible aux branches professionnelles de négocier des accords simplifiés d’intéressement et de participation pour les rendre d’application directe dans les TPE et PME et accélérer ainsi le partage de la valeur au profit des salariés.

C’est une belle occasion de démontrer l’utilité de sa branche, sa spécificité, à l’heure où il est question d’en réduire drastiquement le nombre. C’est aussi une belle opportunité pour simplifier la vie dans nos entreprises, qui n’est pas que du ressort de l’Etat ! Les partenaires sociaux doivent saisir la balle au bond et s’engager à leur tour pour une croissance durable et inclusive.

Un objectif de trois millions de salariés

A ce jour, seules douze branches sur une centaine sont dotées d’un accord d’intéressement et de participation, alors que de tels accords faciliteraient une déclinaison opérationnelle dans les entreprises des différents dispositifs d’épargne salariale ! D’autant plus que la prochaine prime exceptionnelle de fin d’année sera conditionnée à la signature d’un accord d’intéressement avant le 30 juin 2020.

Le rythme de signature des accords devra impérativement connaître dans les prochains mois une accélération. Surtout si l’on veut atteindre l’objectif que s’est fixé le gouvernement de trois millions de salariés (contre 1,4 million aujourd’hui) couverts par un dispositif de partage de la valeur.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2020 ouvre encore de nouvelles voies pour inciter les entreprises, y compris de très petite taille, à s’emparer des différents dispositifs existants en matière d’épargne salariale.

La troisième voie inventée par de Gaulle

Le projet de loi ratifiant diverses ordonnances de la « loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et portant diverses mesures d’ordre social » prévoira également la conclusion d’accords d’intéressement pour une durée comprise entre un et trois ans. Ce qui devrait encore simplifier la donne pour les nouvelles entreprises et celles qui ont moins de 250 salariés.

La loi mobilités, qui entend améliorer les déplacements des Français, adoptée au Parlement

Fin de vente des véhicules à carburant fossiles, forfait mobilités, socle d’obligations pour les VTC. Le Parlement a adopté définitivement ce texte touffu qui entend améliorer les déplacements au quotidien des Français, tout en intégrant l’enjeu environnemental.

Le Monde avec AFP Publié hier à 21h13, mis à jour à 15h41

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Le texte avait été présenté il y a un an en conseil des ministres alors qu’émergeait tout juste le mouvement des « gilets jaunes ». Le Parlement a adopté définitivement, mardi 19 novembre, par un ultime vote de l’Assemblée, la loi d’orientation des mobilités (LOM), qui entend améliorer les déplacements au quotidien des Français, tout en intégrant l’enjeu environnemental. Le texte a été approuvé par 116 voix (49 contre et 9 abstentions) avec l’appui des députés LRM-MoDem et des élus UDI-Agir, les autres groupes votant essentiellement contre, avec quelques abstentions.

Ce projet, vanté comme « très attendu » par des élus de la majorité, se veut notamment une réponse au « sentiment d’abandon » dans certains territoires. Mais il n’a pas obtenu l’assentiment des oppositions, critiqué notamment par Les Républicains (LR), pour qui « le financement continue à faire défaut », tandis qu’à gauche, le Parti socialiste a déploré « un rendez-vous manqué » et La France insoumise une « loi d’affichage » et « sans ambition » pour les Français qui ne se déplacent « ni en Uber ni en trottinette ».

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La ministre de la transition écologique et solidaire, Elisabeth Borne, et le secrétaire d’Etat aux transports, Jean-Baptiste Djebbari, qui ont porté le texte, ont salué après le vote une « réponse forte aux fractures sociales ». Le projet de loi part du constat d’une mobilité « en panne » et vise à « des transports du quotidien à la fois plus faciles, moins coûteux et plus propres ».

Une enveloppe de 13,4 milliards d’euros doit être affectée pour la période 2018-2022 au développement des infrastructures, essentiellement pour les « déplacements du quotidien ». Priorité est notamment donnée à l’entretien des réseaux existants, l’effondrement meurtrier lundi d’un pont près de Toulouse n’ayant pas été évoqué dans les ultimes échanges.

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Forfait mobilités

Parmi les mesures phares du texte en matière de « verdissement », figure notamment l’objectif d’une fin de la vente d’ici 2040 des véhicules « à carburants fossiles », c’est-à-dire essence ou diesel, d’ici 2040. Est prévue aussi la mise en place d’un forfait mobilités, qui doit permettre aux employeurs de verser jusqu’à 400 euros par an à leurs salariés se rendant au travail en covoiturage ou en vélo. Ce forfait pourra être versé via « un titre mobilité », à l’instar des titres-restaurants. La limitation à 80 km/h sur les routes secondaires depuis juillet 2018, qui avait été un des détonateurs de la crise des « gilets jaunes », a également occupé une large place dans les débats.

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Après l’aval du premier ministre Edouard Philippe, l’Assemblée avait voté en juin en première lecture un assouplissement de la mesure : les patrons de département pourront relever la vitesse à 90 km/h sur certaines routes secondaires, mais aussi les maires pour les routes relevant de leur compétence. Les élus LR ont regretté l’exclusion des routes nationales (sous autorité de l’Etat), Valérie Lacroute accusant à nouveau mardi le gouvernement d’avoir « dupé les Français ».

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Socle d’obligations pour les VTC

Le texte prévoit d’autres mesures pour encourager l’usage du vélo (notamment un marquage pour lutter contre le vol) et des voitures électriques. Trottinettes, vélos et autres gyropodes en libre-service seront aussi davantage régulés.

Pour les plates-formes employant des chauffeurs VTC et coursiers, le texte met également en place un socle d’obligations (droit à la déconnexion et transparence au niveau du prix des courses). Des chartes sociales complémentaires pourront être mises en place par les plates-formes. Les parlementaires socialistes envisagent de saisir le Conseil constitutionnel sur ce volet du texte. Peu avant le vote, 14 plates-formes, dont Deliveroo et Frichti, ont annoncé lancer une Association des plateformes d’indépendants (API) et se doter d’une « charte de bonnes pratiques » censée améliorer conditions de travail et rémunérations.

Le gouvernement espérait une adoption définitive du projet de loi avant l’été, mais il a subi un coup de frein en juillet lorsque députés et sénateurs ont échoué à s’accorder sur une version commune. Les discussions avaient achoppé sur la question du financement d’une nouvelle compétence attribuée aux intercommunalités, qui doivent devenir des « autorités organisatrices de la mobilité » avec pour mission de coordonner les modes de déplacement.

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Obligées de s’inscrire sur Internet, des assistantes maternelles en grève

L’objet de leur colère est un article du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020, qui vise à améliorer, pour les parents, l’accès aux places de garde disponibles.

Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 10h43

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Elles protestent contre une réforme qui s’apparente à leurs yeux à du « flicage ». Les quelque 318 000 « nounous » de France sont appelées à faire grève, mardi 19 novembre, pour protester contre une réforme qui les oblige désormais à se référencer sur le site de la Caisse d’allocations familiales.

« Le gouvernement a fait le choix d’une méthode coercitive qui, sous prétexte de faciliter la mise en relation avec des parents employeurs, consiste en réalité en un véritable flicage » de l’activité des assistants maternels, ont dénoncé vendredi dans un communiqué le collectif des Assistants maternels en colère-« gilets roses » et les fédérations CGT et FO.

L’objet de leur colère est un article du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020, qui vise à améliorer, pour les parents, l’accès aux places de garde disponibles. Pour ce faire, les assistants maternels devront désormais se référencer sur le site monenfant.fr, et y actualiser régulièrement leurs disponibilités, sous peine de perdre leur agrément.

« Nivellement par le bas » des rémunérations

« Il faudrait que cela soit facultatif », a déclaré Emilie Ferbos, l’une des porte-parole du collectif. Selon elle, beaucoup d’assistantes maternelles sont réticentes à publier leurs coordonnées complètes, et notamment leur adresse, sur un site Web accessible à tous – par crainte notamment de subir du démarchage commercial intempestif.

En outre, les assistantes maternelles devront désormais donner leurs tarifs, ce qui va entraîner selon Mme Ferbos une « concurrence » et un « nivellement par le bas » des rémunérations.

Chaque « nounou » qui souhaiterait se joindre à ce mouvement de protestation pourra opter pour une grève totale, ou éventuellement pour un « service minimal » afin de ne pas trop pénaliser les familles, a encore précisé la porte-parole.

Au début de l’année, les assistantes maternelles s’étaient déjà mobilisées contre un projet de réforme de l’assurance-chômage qui leur aurait fait perdre leur système spécifique d’indemnisation – réforme qui a finalement été abandonnée.

Accusé d’inciter ses commerciaux à boire, Pernod Ricard dénonce des « allégations individuelles »

Deux ex-salariés et une troisième personne toujours en poste affirment dans « Le Parisien » avoir sombré dans l’alcoolisme, incités par leurs supérieurs à boire pour favoriser les ventes.

Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 17h38

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« Si je refusais un verre, mon chef me disait : “T’aimes pas les produits que tu vends ?” », témoigne un ancien commercial interrogé par « Le Parisien ».
« Si je refusais un verre, mon chef me disait : “T’aimes pas les produits que tu vends ?” », témoigne un ancien commercial interrogé par « Le Parisien ». PHILIPPE HUGUEN / AFP

Des salariés incités par leur direction à boire de l’alcool au travail. L’information sera peut-être reprise comme une blague par certains, mais elle fera moins rire les commerciaux de Pernod Ricard devenus dépendants. Dans Le Parisien, deux ex-commerciaux du groupe spécialisé dans les vins et spiritueux, ainsi qu’une commerciale toujours en poste, affirment avoir sombré dans l’alcoolisme, incités par leurs supérieurs à boire pour « donner l’exemple » et favoriser les ventes.

« Dans les bars, discothèques, fêtes de mon secteur, on a un budget pour offrir des pastis aux clients et on consomme avec eux, encouragés par notre hiérarchie », déclare au Parisien Julien, commercial du groupe, en litige devant les prud’hommes. Tombé un jour ivre mort lors d’une foire où il officiait en tant que commercial, un autre ex-employé explique avoir bu jusqu’à « 40 Ricard par jour » sur certains événements. « Les commerciaux choisis étaient les plus résistants à l’alcool », témoigne-t-il. « Si je refusais un verre, mon chef me disait : T’aimes pas les produits que tu vends ? », se souvient encore celui qui a récemment quitté l’entreprise après vingt ans d’ancienneté.

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Mise en place d’un numéro vert anonyme

Réagissant à la publication de l’article, le groupe Pernod Ricard a réfuté lundi 18 novembre « fermement l’existence d’une politique d’incitation à la consommation d’alcool parmi ses salariés ». Le numéro deux mondial des vins et spiritueux a assuré dans un communiqué qu’il n’existe « pas de directive ou de consignes internes données aux forces de vente pour les enjoindre à boire de l’alcool dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions ». Pour le PDG de Ricard SA et de Pernod SA, Philippe Coutin, « Ces allégations individuelles jettent aujourd’hui l’opprobre sur tous nos commerciaux, de Ricard à Pernod, dont nous saluons ici l’engagement responsable, tous unis par le même devoir d’exemplarité. »

Le groupe a, par ailleurs, annoncé avoir mis en place un numéro vert anonyme pour recueillir les témoignages de collaborateurs, en cas de dérapage, et y donner, le cas échéant, les suites nécessaires. Cette polémique intervient quelques semaines après l’annonce d’un plan de départs volontaires dans le département commercial du groupe, dans le cadre de la fusion des deux filiales Pernod et Ricard. Le groupe espère 190 départs nets parmi les 1 300 salariés des deux entités.

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Donald Trump amplifie la crise structurelle de la sidérurgie européenne

Le secteur est déjà malmené par le ralentissement de l’industrie manufacturière, notamment l’automobile, et d’importantes surcapacités de production.

Par Publié aujourd’hui à 09h41

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L’usine British Steel de Scunthorpe, dans le nord-est de l’Angleterre, en septembre 2016.
L’usine British Steel de Scunthorpe, dans le nord-est de l’Angleterre, en septembre 2016. LINDSEY PARNABY / AFP

Après une relative accalmie en 2017-2018, en partie liée au dynamisme d’une industrie automobile très gourmande en acier, la sidérurgie européenne est de nouveau entrée dans une période de fortes turbulences. A quelques jours d’intervalle, deux événements ont confirmé que la restructuration du secteur, difficile et chaotique, était loin d’être achevée dans une Europe souffrant à la fois d’une baisse de la demande et de surcapacités de production : l’annonce du rachat de British Steel en faillite par le conglomérat chinois Jingye Steel et l’abandon par ArcelorMittal de son projet de reprise de l’aciériste italien Ilva.

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Si la demande globale d’acier devrait progresser de 3,9 % cette année dans le monde, notamment tirée par la Chine, la consommation européenne va baisser de 1,2 %. Or l’Europe reste très exposée au commerce mondial de l’acier en raison de l’ouverture de son marché au nom de la concurrence défendue par la Commission. Celle-ci a bien pris des mesures pour plafonner les importations, mais le lobby Eurofer (Association européenne de l’acier) les juge insuffisantes et fait pression sur Bruxelles pour qu’elles soient « adaptées aux conditions du marché actuel ».

« La Chine, la Russie et la Turquie ont vu le marché américain se fermer et exportent leurs surplus vers l’Europe », constate un important industriel

Car les industriels ne prévoient pas de rebond en 2020. « Le ralentissement actuel du secteur manufacturier dans l’Union européenne [UE] ne devrait pas se terminer rapidement », prévenait, fin octobre, le directeur général d’Eurofer, Axel Eggert. A cela s’ajoutent les différends commerciaux entre les Etats-Unis et leurs partenaires, et les incertitudes entourant le Brexit.

La situation s’est en effet dégradée depuis que Donald Trump a augmenté de 25 % les droits de douane sur les importations d’acier étranger en 2018. « Nous sommes à la peine en raison du désordre qu’il a mis sur le marché mondial », dénonce un important industriel. « La Chine, la Russie et la Turquie ont vu le marché américain se fermer et exportent leurs surplus vers l’Europe », constate-t-il. Les importations y ont crû de 12 % en 2018, entraînant la baisse des prix de vente et obligeant les aciéristes européens à réduire leur offre, notamment par l’arrêt de hauts-fourneaux.

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C’est dans ce contexte que les groupes opérant sur le Vieux Continent doivent poursuivre la restructuration de leurs activités. Leur part dans la production mondiale d’acier brut (1,8 milliard de tonnes) est tombée en dix ans de 15 % à 9,3 %. Les experts évaluent les surcapacités globales à environ 500 millions de tonnes, dont les deux tiers imputables à la Chine. « Pour l’Europe, qui produit 170 millions de tonnes, elles se situent entre 30 et 50 millions de tonnes », note Marcel Genet, spécialiste du secteur et PDG du cabinet Laplace Conseil, en rappelant que c’est le rouleau compresseur chinois qui a changé la donne, passant d’une modeste production en 2000 à 54 % du marché aujourd’hui.

Handicap : « Une expérimentation a été mise en place pour que les apprentis puissent intégrer la fonction publique »

Françoise Descamps-Crosnier, présidente du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), revient pour « Le Monde » sur l’insertion et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés dans le public.

Propos recueillis par Publié aujourd’hui à 06h00

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Quelle est la situation des travailleurs handicapés dans la fonction publique ?

Françoise Descamps-Crosnier.- Le taux des bénéficiaires de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH) se rapproche de l’objectif des 6 % fixé par la loi [il a atteint 5,61 % en 2018, contre 5,49 % en 2017]. Cela traduit une évolution positive. Certes, une partie de cette augmentation est due au vieillissement des effectifs. Mais cette progression s’explique également par les efforts qui ont été faits pour sensibiliser des employeurs et maintenir les agents dans l’emploi, au niveau des aménagements de poste notamment.

Il existe aussi de grandes disparités entre les trois versants de la fonction publique : avec 6,76 % de travailleurs handicapés, la fonction publique territoriale dépasse le seul des 6 %, contre 5,67 % dans la fonction publique hospitalière et 4,65 % dans la fonction publique d’Etat.

Comment s’expliquent ces disparités ?

Les personnels de la fonction publique territoriale viennent en majorité des catégories B et C, catégories où l’on voit survenir plus souvent des situations d’usure professionnelle et donc de handicap. Les métiers techniques ou en lien avec des enfants, par exemple, peuvent occasionner des postures inadaptées. C’est aussi vrai dans la fonction publique hospitalière. Au demeurant, c’est aussi dans ces secteurs que l’on rencontre le plus d’absentéisme.

Les travailleurs handicapés dans la fonction publique rencontrent-ils des problèmes spécifiques ?

Toutes les personnes en situation de handicap rencontrent des difficultés semblables pour trouver ou conserver leur emploi : les préjugés des recruteurs, les postes inadaptés… Il est vrai que les agents titulaires intègrent la fonction publique par la voie du concours, ce qui semble limiter le risque de discrimination. Mais ce n’est pas le cas des agents non titulaires : les CDD, les contrats aidés…

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Par ailleurs, même si des aménagements peuvent être mis en place pour les candidats en situation de handicap qui passent des concours d’entrée dans la fonction publique [un temps d’épreuve supplémentaire, par exemple], ils ne sont pas toujours suffisants.

Quel bilan faites-vous de la loi de transformation de la fonction publique, adoptée cet été, qui comprend un certain nombre de dispositions concernant les travailleurs handicapés ?

Plusieurs sont positives, comme le fait que les agents puissent conserver leur aménagement de poste en cas de changement d’employeur. Auparavant, il fallait refaire toutes les demandes ! Il est aussi prévu d’expérimenter un mécanisme de détachement et d’intégration directe pour la promotion des fonctionnaires en situation de handicap. Cela nous semble important de favoriser le maintien dans l’emploi, mais aussi l’évolution professionnelle et tout ce qui permet à la personne de se former.

Harcèlement sexuel au travail : « Au-delà de la sanction, la prévention est aujourd’hui indispensable »

Le professeur à l’Essec Arnaud Gilberton évoque la démission du directeur général de McDonald’s pour expliquer, dans une tribune au « Monde », pourquoi il faut intervenir en amont par la formation et l’information des managers dans les cas de harcèlement sexuel au travail.

Publié aujourd’hui à 11h00 Temps de Lecture 3 min.

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« Dans la plupart des cas, les directions des ressources humaines réagissent promptement par des sanctions internes, allant du simple avertissement disciplinaire au licenciement pour faute grave. »
« Dans la plupart des cas, les directions des ressources humaines réagissent promptement par des sanctions internes, allant du simple avertissement disciplinaire au licenciement pour faute grave. » Michaela Begsteiger/ImageBroker / Photononstop

Tribune. Le récent licenciement de Steve Easterbrook, directeur général de McDonald’s, au motif d’avoir eu une relation avec l’une de ses employées, a connu un retentissement mondial. Au même moment, Katie Hill, élue démocrate de la Chambre des Représentants annonçait à son tour sa démission pour des raisons similaires. Depuis l’affaire Weinstein, les entreprises américaines ont pour la plupart élevé le niveau de vigilance et adopté des mesures draconiennes pour prévenir tout risque de sexisme et d’agressions sexuelles, allant même jusqu’à bannir certaines relations pourtant consenties.

Si ses répercussions n’ont été aussi importantes au sein des entreprises françaises, le mouvement Metoo a permis – et c’est heureux – de libérer la parole au sujet du harcèlement sexuel au travail, déchirant le voile d’opacité sur l’ampleur du problème. Pour cause, 32 % des femmes ont déjà été confrontées à au moins une situation de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail, selon une étude réalisée par l’institut IFOP en février 2018.

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Derrière ce terme se cachent en réalité des situations très diverses qu’il faut rappeler : agressions sexuelles, chantages à la promotion, agissements sexistes répétés, ou encore tentatives de séduction inappropriées sur le lieu de travail. Elles touchent toutes les entreprises, avec une prédominance notable dans des organisations peu féminisées au sein desquelles une culture sexiste a gagné les esprits. Par ailleurs, contrairement à une idée répandue, le harcèlement vient moins de supérieurs hiérarchiques que de collègues, de clients ou de fournisseurs, ce qui le rend d’autant plus difficile à détecter.

Crainte de la médiatisation

Dans la plupart des cas, les directions des ressources humaines réagissent promptement par des sanctions internes, allant du simple avertissement disciplinaire au licenciement pour faute grave. La crainte de la médiatisation et des risques pour la réputation de l’entreprise a sans aucun doute durci les réactions des organisations concernées.

Cependant, les cas de harcèlement restent trop souvent identifiés tardivement, alors que les préjudices sont déjà réels. En cause d’abord, la crainte des répercussions pour certaines victimes qui tendent à minimiser les faits ou espérer que la situation rentre dans l’ordre. Ainsi, Marie, cadre d’une grande entreprise rencontrée lors d’une enquête, nous confiait récemment : « Pendant longtemps, j’ai passé sous silence des propos déplacés, en minimisant leur portée, de peur également que cela ait des impacts trop importants sur ma réputation professionnelle ».

« La nature de l’autorité au sein des entreprises est en train de changer »

Les salariés en quête de sens et d’autonomie ne peuvent plus légitimer des dirigeants d’entreprises parés de leur seule position hiérarchique et ignorant la réalité du travail, observe, dans une tribune au « Monde », Thibaut Champey, lui-même directeur général d’un site de stockage et de partage de fichiers.

Publié aujourd’hui à 06h30 Temps de Lecture 3 min.

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« Il existe bien un ras-le-bol des salariés face à une certaine forme d’autorité, une autorité aveugle, sans connaissance du métier du salarié sur laquelle elle s’exerce, focalisée sur les objectifs plutôt que sur les solutions. »
« Il existe bien un ras-le-bol des salariés face à une certaine forme d’autorité, une autorité aveugle, sans connaissance du métier du salarié sur laquelle elle s’exerce, focalisée sur les objectifs plutôt que sur les solutions. » Image Source G / Photononstop

Tribune. L’ambiance au sein des entreprises serait-elle devenue quasi insurrectionnelle ? 88 % des Français jugent qu’il y a trop de « petits chefs abusant de leur autorité » dans les entreprises, selon une étude d’OpinionWay pour Dropbox réalisée en mai ; 54 % des salariés estiment qu’il y a trop de chefs, selon une autre étude d’Opinion Way pour Lumio.

Les salariés sont-ils pour autant en révolte ouverte ? Non. Selon ces études, huit Français sur dix estiment que l’autorité en entreprise est respectée, et les deux tiers des salariés ressentent même le besoin de davantage d’autorité dans l’entreprise. Face à cette contradiction apparente, les directions restent perplexes.

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Pourtant, le message est on ne peut plus clair pour qui veut bien l’entendre : il existe bien un ras-le-bol des salariés face à une certaine forme d’autorité – une autorité aveugle, sans connaissance du métier du salarié sur laquelle elle s’exerce, focalisée sur les objectifs plutôt que sur les solutions. Ce manager-là, presque tous les Français en ont connu un et il a souvent été caricaturé. Impulsif, autoritaire, on l’imagine volontiers se gargariser de ses titres et des signes extérieurs de sa fonction. C’est précisément ce que les salariés dénoncent.

Compétence

La nature même de l’autorité au sein des entreprises est en train de changer. Les fondements traditionnels de la légitimité, tels que le titre, la détention du capital, ou l’âge, sont proches de ne plus valoir un kopeck. Un rapport de force s’est subrepticement inversé : il faut désormais faire preuve de sa compétence auprès des salariés, et d’une capacité à mobiliser les ressources suffisante pour qu’ils suivent le mouvement.

Un mouvement que confirme la sociologue Danièle Linhart, qui estime dans une interview au Monde (« Les responsables du bonheur en entreprise ne soignent pas la souffrance au travail à sa source », Le Monde du 23 mars) que « les salariés, et notamment les plus jeunes, demandent à leur hiérarchie de l’expertise et de la compétence, d’avoir une connaissance réelle des métiers de leurs subordonnés et de pouvoir les aider à trouver des solutions quand se posent des problèmes professionnels ». Le supérieur n’est plus seulement suivi parce qu’il est le chef ; il l’est parce que ses salariés le reconnaissent comme étant le meilleur à cette place, tout simplement. Position inconfortable pour celui qui s’était habitué à ce que seuls les autres aient à faire leurs preuves…

Formation : le gouvernement lance une application qui sera « une vraie révolution » selon Muriel Pénicaud

La ministre du travail et le premier ministre Edouard Philippe présenteront jeudi l’application « Moncompteformation » qui permettra d’avoir immédiatement accès à au moins 100 000 sessions de formation professionnelle.

Le Monde avec AFP Publié aujourd’hui à 01h13

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La ministre du travail Muriel Pénicaud (ici à gauche, à l’Elysée, le 30 octobre 2019) présentera jeudi 21 novembre l’application mobile et le site internet « Moncompteformation ».
La ministre du travail Muriel Pénicaud (ici à gauche, à l’Elysée, le 30 octobre 2019) présentera jeudi 21 novembre l’application mobile et le site internet « Moncompteformation ». LUDOVIC MARIN / AFP

Le gouvernement présentera, jeudi 21 novembre au forum des Halles à Paris, un site internet et une application pour smartphone dédiés à la formation tout au long de la vie professionnelle.

« L’application mobile Moncompteformation et le site internet qui l’accompagne sont une vraie révolution », assure, dans une interview au Journal du dimanche du 17 novembre, la ministre du travail Muriel Pénicaud, pour qui ces deux outils « vont permettre à notre pays d’entrer dans une société des compétences » et qui rappelle qu’« un métier sur deux évoluera profondément d’ici dix ans ».

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Le compte personnel de formation (CPF) « existait depuis 2015, mais il était virtuel : à peine 2 millions de Français l’ont utilisé », souligne Mme Pénicaud, expliquant que « dès jeudi, ce droit devient réel pour 25 millions de salariés ».

« Nous construisons un nouveau service public qui crée un droit attaché à la personne. Un peu comme un Livret A de la formation », explique-t-elle encore, soulignant qu’« au moins 100 000 sessions de formation seront immédiatement disponibles sur l’application, pour plus de 40 000 formations » différentes.

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« Une nécessité économique et sociale »

Pour éviter les formations « bidon », « seuls les organismes agréés préparant à un titre professionnel ou à un diplôme peuvent être référencés », explique encore Mme Pénicaud : « on ne trouvera donc que des formations ayant une valeur sur un CV ».

La ministre du travail rappelle que « le premier marqueur du chômage, c’est l’absence de formation », qui touche « 6,5 % des personnes qualifiées contre 18 % des non-qualifiés ».

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Si les cadres des grands groupes en bénéficient, « les autres, beaucoup moins », souligne-t-elle. « Or l’absence de formation continue accroît les écarts de qualification qui préexistaient, ce qui contribue à bloquer l’ascenseur social ».

« En 1971, quand Jacques Delors lançait l’idée de la formation tout au long de la vie, elle était humaniste. Désormais, elle devient une nécessité économique et sociale », résume Mme Pénicaud.

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Intelligence artificielle : « Les humains sont loin d’avoir perdu leur place en entreprise »

Selon Cyril Le Mat, chef de données IA dans une société spécialisée en ressources humaines, l’intelligence artificielle sert à humaniser le travail et non à le remplacer, dit-il dans une tribune au « Monde ».

Publié aujourd’hui à 11h22 Temps de Lecture 2 min.

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« L’intelligence artificielle doit être abordée comme une opportunité technologique qui permet de dégager du temps au salarié et de l’aider à prendre des décisions. »
« L’intelligence artificielle doit être abordée comme une opportunité technologique qui permet de dégager du temps au salarié et de l’aider à prendre des décisions. » Luciano Lozano/Ikon Images / Photononstop

Tribune. Nous sommes aujourd’hui submergés d’articles, d’entretiens et de tweets sur l’intelligence artificielle (IA) émanant de personnes déconnectées de la réalité technique, mais qui puisent sans vergogne dans un imaginaire de concurrence et de soumission afin de générer toujours plus d’émotion et de clics.

En tant qu’expert et praticien de l’IA en entreprise, ma volonté est ici d’éclairer sur les enjeux du développement de ces nouveaux outils qui se révèlent plus humains qu’on ne pourrait le penser. Car la réalité est là : ce qu’on appelle l’intelligence artificielle n’est qu’une succession d’outils spécialisés, chacun consacré à l’optimisation d’une unique tâche répétitive. Exemple classique : l’imagerie médicale où un algorithme va analyser pour un cancer précis des centaines d’images afin de proposer au médecin un diagnostic. Œuvre de l’humain, l’IA n’est rien de plus que ce que l’on décide d’y mettre.

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L’IA permet avant tout d’automatiser des actions souvent répétitives, parfois ingrates, jusque-là opérées par des collaborateurs. Il faut en finir avec l’idée reçue qui remettrait aux mains des machines la majorité de l’activité humaine de l’entreprise. L’IA doit être abordée comme une opportunité technologique qui permet de dégager du temps au salarié et de l’aider à prendre des décisions.

Du sens au travail

Le collaborateur va donc pouvoir se concentrer sur d’autres missions plus « humaines », où il aura plus de valeur ajoutée. Il pourra d’un côté se focaliser sur sa créativité, son innovation et son analyse ; de l’autre, se consacrer aux relations humaines, qu’elles soient internes ou externes à l’entreprise : par exemple, une infirmière pourra consacrer plus de temps à ses patients. En cela, l’IA redonne du sens au travail, quête essentielle pour les jeunes générations.

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Opaque dans son fonctionnement, l’IA est un outil qui nécessite une interaction, par certains aspects, similaire à celle entre humains. Sur ce point, les solutions connues du grand public sont encore loin de la maturité. En effet, les GAFA [Google, Apple, Facebook et Amazon] ont pour principal but de garder captifs leurs utilisateurs en ne leur fournissant ni outils de pilotage ni justification. Il faut pourtant s’assurer qu’humain et IA se comprennent tant sur les questions que sur les réponses ! La collaboration avec l’humain est un enjeu-phare pour les solutions d’entreprise dont la progression va affecter positivement la réalité du travail.

Ne soyons pas naïfs, des suppressions d’emplois causés par l’IA auront lieu. Mais la réalité sera loin des nombreuses prédictions de certains groupes de réflexion ou d’essayistes hors sol annonçant selon les cas la suppression de 30 % à 90 % des emplois actuels. Les humains sont loin d’avoir perdu leur place en entreprise. Avec le développement des solutions IA au travail, les salariés se tourneront vers des missions plus enrichissantes pour des carrières plus épanouissantes.