Archive dans mai 2021

La RATP condamnée à réintégrer un ancien salarié

La RATP vient de subir une déconvenue dans un conflit du travail atypique. Les magistrats de la cour d’appel de Paris lui ont ordonné de réintégrer un salarié qu’elle avait licencié au motif qu’il constituerait un danger potentiel pour ses collègues et les usagers. Rendue le 6 mai, la décision s’inscrit dans une série de litiges où l’entreprise publique se voit reprocher d’avoir détourné les règles, au nom d’une application expéditive du principe de précaution.

Le différend concerne Adil, un homme de 41 ans dont le prénom est modifié afin de préserver son anonymat. Recruté en août 2007 comme conducteur de bus, il rejoint, six ans et demi plus tard, le Groupe de protection et de sécurité des réseaux (GPSR) de la RATP. En août 2018, la Préfecture de police de Paris lui retire son autorisation de port d’arme. Ne pouvant plus être vigile, il demande à redevenir chauffeur.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Beaucoup d’agents voient leur avenir se dérober sous leurs pieds » : à la RATP, une transformation à marche forcée

La direction décide alors de solliciter le Service national des enquêtes administratives de sécurité (Sneas), rattaché au ministère de l’intérieur, pour vérifier si son collaborateur est susceptible d’être dangereux. Promulguée quelques mois après les attentats, à Paris, contre Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes et le Bataclan, la loi du 22 mars 2016 offre, en effet, la faculté aux sociétés de transports de réclamer de telles investigations sur des candidats à l’embauche et sur des salariés déjà en poste, qui souhaitent changer d’affectation ou dont l’attitude inquiète. Ces opérations dites de « criblage » ne sont admises que pour certains métiers sensibles.

Procédure « dévoyée »

Fin octobre 2018, le Sneas livre un « avis », non motivé et transmis uniquement à l’employeur, dans lequel il considère que le comportement d’Adil n’est « pas compatible » avec l’activité convoitée, sans fournir la moindre explication. Un mois et demi après, la RATP le licencie en se prévalant des appréciations émises par les policiers.

S’ensuit une longue bataille devant plusieurs juridictions. Tout d’abord, le tribunal administratif de Paris, saisi par Adil, invalide l’abrogation du permis de port d’arme ainsi que l’avis du Sneas. L’ex-agent de la RATP se tourne ensuite vers le conseil de prud’hommes pour dénoncer la rupture du contrat de travail. Engagée en référé, sa requête est rejetée, mais le quadragénaire conteste la décision. Avec succès, puisque la cour d’appel vient donc de lui donner gain de cause, en infirmant « l’ordonnance » prud’homale.

Il vous reste 31.48% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Rencontres RH : l’agacement est plus difficile à résoudre que le conflit

« Les règles de politesse sont d’autant plus importantes que les salariés sont privés de la communication non verbale qui, en présentiel, permet de corriger immédiatement une maladresse. »

Le rendez-vous mensuel de l’actualité RH organisé par Le Monde en partenariat avec ManpowerGroup a réuni, mardi 4 mai à Paris, une quinzaine de responsables des ressources humaines (RH) pour parler des conséquences du télétravail sur les conflits en entreprise et de leur résolution.

« A en croire les études, les tensions entre collègues ont doublé depuis la crise sanitaire, indique Cécile Dejoux, professeure en sciences de gestion au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). Il y a des sources de conflits spécifiques à la distance : la surinterprétation des propos écrits, l’évitement en fermant la caméra par exemple, et la redistribution des pouvoirs liée à la maîtrise des outils ou à la personnalité des intervenants. A distance, un manageur peut rapidement se faire imposer la parole. »

L’enjeu du sujet est à la hauteur des craintes exprimées : « Aujourd’hui, 35 % des manageurs sont inquiets à l’idée que le télétravail devienne pérenne deux ou trois jours par semaine », affirme Dominique Brard, la directrice générale de Talent Solutions, de ManpowerGroup.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les beaux jours de la médiation en entreprise

Quel que soit leur secteur d’activité, les DRH constatent une « évolution de la typologie des conflits » ou plutôt des tensions, une forte montée des agacements, plus difficiles à résoudre que les conflits, et la hausse des non-résolutions des problèmes. « La communication virtuelle exige une concentration au quotidien qui exacerbe les énervements et épuise tout le monde. Résultat : beaucoup de conflits restent larvés », explique M. Postel-Vinay, le DRH du groupe Crédit agricole Consumer Finance.

Les sources de tensions diversifiées

En télétravail, un simple échange de courriels peut vite tourner à l’incivilité. « T’as vu comment il m’a parlé ! », « C’est inadmissible », sont quelques réactions courantes qui suivent la lecture d’un courriel de salarié qui n’a pas su mettre les formes. « Et on se retrouve tout seul, chez soi, à ne pouvoir consulter que son entourage familial », raconte Alexis Berthel, DRH de Panthera, une PME de sécurité.

La surinterprétation des propos, courante en distanciel, « est favorisée par les conversations qui se poursuivent en dehors du contexte », note Juliette Couaillier, « chief talent officer » chez Havas. Les règles de politesse sont d’autant plus importantes que les salariés sont privés de la communication non verbale qui, en présentiel, permet de corriger immédiatement une maladresse. « La multitude des outils, utilisés en même temps, génère elle aussi de l’agacement », ajoute Régis Mulot, DRH du groupe Ipsen.

Lire aussi Rencontres RH : la crise due au Covid-19 aura-t-elle été source d’innovations ?

Le rôle de la communication a pris une place essentielle depuis la généralisation du télétravail et la mise en place d’organisations hybrides de travail, mi-présentiel, mi-distanciel. Les sources de tensions se sont diversifiées et déplacées. « Il y a une méconnaissance de l’autre, de ce que fait l’autre. D’une part, certains manageurs qui sont dans le contrôle vont envoyer en série un mail, un SMS, un WhatsApp ; d’autre part, la demande de reconnaissance à distance est plus forte. Un petit mail ne suffit pas. On a dû intensifier les échanges avec les manageurs et en particulier les tête-à-tête », témoigne Marion Azuelos, DRH monde de BNP Paribas AM.

Au Crédit agricole Consumer Finance, la filiale du crédit à la consommation du Crédit agricole, les difficultés sont apparues là où on les attendait le moins : dans les métiers de la production, bien que le travail produit y soit plus facile à contrôler que dans les métiers du conseil. « La relance quotidienne, le rapport charnel créé de longue date avec les équipes qui enchaînent les dossiers n’était plus possible. Les manageurs se sont demandé en quoi ils étaient encore utiles », témoigne Cédric Postel-Vinay.

« Pas un magicien »

Chez Fujifilm, la DRH Lila Haouache n’a pas le sentiment qu’il y ait davantage de conflits, « mais il y en a de nouveaux, car le télétravail a généré une perte de sentiment d’appartenance à l’entreprise. “Je n’ai plus les informations que j’avais sur site” ; “Je me sens isolé, nous disent les salariés. Pour y remédier, on a mis en place des ateliers, des points de communication pour parler des projets de l’entreprise, puis on a travaillé sur les informations à diffuser, sur qui doit les donner et sur le rôle du président ».

Les entreprises sont contraintes de se réinventer « pour organiser la réflexivité et insuffler la culture de l’acceptation. En télétravail, il faut prendre en compte l’individualité de chacun », estime Cécile Dejoux. Mais tous les responsables de ressources humaines réunis aux Rencontres RH du 4 mai convergent pour dire qu’on ne peut pas tout attendre du manageur : « Le manageur n’est pas un magicien », « ce n’est pas un super-héros ».

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Très chers risques psychosociaux

Certains ont fait le choix de déléguer la gestion des conflits à un collaborateur tiers. C’est le cas chez Havas qui a mis en place une formule de coaching à disposition du salarié. « Celui qui se sent en conflit contacte ce tiers indépendant. Le simple fait de s’exprimer a désamorcé bien des situations », témoigne Juliette Couaillier. « Analyser une situation avec un autre regard est important dans un contexte où on n’a pas le temps », renchérit Laetitia Ghassemi, la DRH d’Artefact qui a également lancé une initiative dite de « codéveloppement ».

Le manageur ne peut pas tout faire « mais reste la courroie de transmission », a conclu la professeure des universités. « Pour diminuer la source de conflit, il faut changer les modes de management pour plus de confiance, d’autonomie, sortir de la culture du présentiel et gérer l’incertitude en responsabilisant les salariés dans leur propre rôle », suggère Dominique Brard.

Les invités du 4 mai

Ont participé aux Rencontres RH du 4 mai : Marion Azuelos, DRH monde de BNP Paribas Asset Management ; Yuseli Balmaseda, DRH de Delsey ; Jennifer Barnoin Ostan, RH France du groupe La Perla ; Alexis Berthel, DRH de Panthera ; Dominique Brard, directrice générale Talent Solutions de ManpowerGroup ; Emilie Conte, DRH Groupe Le Monde ; Juliette Couaillier, Chief Talent Officer de Havas ; Cécile Dejoux, professeure des universités au Conservatoire national des arts et métiers ; Laetitia Ghassemi, DRH d’Artefact ; Leila Haouache, DRH France de Fujifilm ; Sylvain Lecomte, DRH du groupe Beaumanoir ; Régis Mulot, DRH du groupe Ipsen ; Hélène Pauvert, directrice marketing Manpower ; Stéphanie Pechberty, DRH groupe d’ITS ; Cédric Postel-Vinay, DRH Group Crédit Agricole Consumer Finance ; Anne Rodier, journaliste, Le Monde ; Gilles van Kote, directeur délégué, Le Monde.

Face à la souffrance mentale, les PME en ordre dispersé

« Certaines entreprises ont pu prendre le temps de se pencher sur la souffrance mentale des équipes, portées par une culture d’entreprise sensible aux problématiques de santé, ou bénéficiant d’une situation économique favorable. »

« C’est une épreuve. » Assistante de direction dans le secteur du bâtiment, Christelle (le prénom a été modifié) est en télétravail depuis mars 2020. Les débuts ont été laborieux, reconnaît-elle, avec la prise en main délicate de logiciels qu’elle ne maîtrisait pas. « Les tâches quotidiennes sont par ailleurs bien plus difficiles à réaliser. Des dossiers sont restés au bureau. Et, pour certaines questions, il faut contacter des collaborateurs qui ne sont pas toujours réactifs. » C’est, en conséquence, « beaucoup de stress, sans bénéficier de réels appuis dans l’entreprise », explique Christelle, qui se dit « épuisée nerveusement ».

Son cas n’est pas isolé. Car si certaines PME ont démontré de réelles capacités d’adaptation durant la crise sanitaire, beaucoup ont rencontré d’importantes difficultés organisationnelles, avec un déploiement du télétravail à marche forcée, bien souvent vecteur de risques psychosociaux. « Elles n’avaient souvent pas d’expérience de la gestion à distance, explique Jérôme Chemin, secrétaire général adjoint CFDT Cadres. Des salariés se sont donc retrouvés seuls devant leur écran, à la manière des autoentrepreneurs. A charge pour eux de tout gérer, la technique comme l’opérationnel. » Olivier Coldefy, psychologue expert, relève pour sa part que « l’incivilité numérique, la pression par mail ont connu une augmentation et n’ont pas réellement été pris en compte ».

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Le Salaire de la peine » : la souffrance au travail se porte bien

Cette situation conjoncturelle délicate se surimpose à un état de fait plus structurel : « Il existe dans les petites entreprises un déficit de prévention des risques psychosociaux, notamment en raison d’un manque de temps ou de ressources », explique Loïc Lerouge, du Centre de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, qui a dirigé l’ouvrage Les petites Entreprises face aux risques psychosociaux au travail (Octares Editions). L’organisation même des PME y contribue : « Si une structure RH existe, elle sera surtout concentrée sur les questions administratives ou le recrutement », note M. Chemin. Autre point faible des PME, à ses yeux : « Beaucoup de leurs dirigeants ne sont pas formés au sujet. »

Un élan brisé

Des dirigeants que les fortes turbulences nées de la crise due au Covid-19 ont éloigné un peu plus du dossier de la santé psychique. « Nous sommes concentrés sur la sauvegarde économique de l’entreprise, explique un cadre supérieur d’une chaîne de magasins. Notre priorité n’est donc pas aujourd’hui la question du bien-être des salariés. »

Il vous reste 59.76% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

« La réforme de l’assurance-chômage est injuste, absurde et indécente »

Tribune. Nous, associations et organisations syndicales de salariés, avions vigoureusement réagi contre la réforme de l’assurance-chômage, lorsqu’elle avait été annoncée en juin 2019 par le gouvernement. Du fait de la crise sanitaire, certains points de cette réforme avaient été opportunément mis en sommeil et les plus optimistes d’entre nous pouvaient les croire abandonnés. Le gouvernement vient pourtant d’annoncer sa mise en œuvre au 1er juillet 2021. Cette entrée en vigueur, alors même que la crise sanitaire est loin d’être terminée et que ses conséquences sociales, déjà lourdes, ne vont aller qu’en s’accentuant, est à la fois injuste, absurde et indécente.

Injuste, parce qu’elle va frapper des personnes déjà fragilisées, qui comptent parmi celles qui ont été les plus touchées par la crise sanitaire et sociale. Selon les chiffres de l’Unédic, dès le 1er juillet 2021, 1,15 million de personnes vont voir leurs droits baisser drastiquement, en moyenne de 17 %, et jusqu’à 40 % pour les 400 000 les plus précaires. Les plus touchés seront justement celles et ceux qui ont des contrats courts ou espacés.

A une date encore non précisée, d’autres mesures devraient durcir l’accès aux droits, notamment par un relèvement du seuil d’accès à l’indemnisation, en exigeant une période de six mois travaillés, contre quatre aujourd’hui. Là encore, les plus touchés seront les travailleurs précaires, en particulier les jeunes de moins de 26 ans.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi La réforme de l’assurance-chômage va accentuer les inégalités de traitement, selon l’Unédic

Absurde, notamment parce qu’elle intervient au pire moment. Les analyses du conseil scientifique du Conseil national de lutte contre l’exclusion sont éloquentes : elles montrent, d’une part, que les personnes les plus pauvres − notamment les personnes au chômage − ont été les plus durement touchées par les conséquences sociales de la crise sanitaire ; d’autre part, que de multiples couches de la société ont basculé ou vont basculer dans la pauvreté, la crise agissant comme un « descenseur social » ; enfin, que la force de notre système de protection sociale a évité une catastrophe pire encore.

Et c’est à ce moment, alors que nous sommes encore au cœur de la troisième vague de l’épidémie, que le gouvernement va, par son action même, accentuer les effets de la crise et faire plonger dans la pauvreté des personnes qui auraient pu rester la tête hors de l’eau si l’on avait maintenu le dispositif d’assurance-chômage.

Processus de stigmatisation

Indécente, enfin. Avant même la crise sanitaire, le pouvoir d’achat des ménages les plus pauvres avait déjà diminué, du fait notamment du gel des allocations-logement, des prestations familiales et du RSA ; les inégalités sociales s’étaient sensiblement creusées. La crise a accentué ce phénomène, les ménages les plus aisés pouvant épargner, quand les 10 % les plus pauvres ont dû le plus souvent s’endetter.

Il vous reste 45.29% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Covid-19 : les restaurateurs se préparent plutôt à la réouverture globale du 9 juin

La terrasse du « Café du Trocadéro », à Paris, le 11 mai 2021.

Les Français, où qu’ils soient sur le territoire national, pourront bien s’attabler en terrasse, mercredi 19 mai. Le premier ministre, Jean Castex, l’a confirmé dans un entretien accordé au journal Le Parisien, mardi 11 mai. Il a également corroboré les grandes lignes de la réouverture, en trois temps, des bars et restaurants.

Les patrons de bars et restaurants connaissent désormais toutes les règles du jeu. Dans un premier temps, ils pourront accueillir leurs clients en terrasse, à condition toutefois de limiter le nombre de convives à six par table. Et de respecter une jauge fixée à 50 % du nombre de places assises potentielles. Sans oublier que le service devra s’arrêter avant 21 heures, nouvel horaire du couvre-feu. La salle intérieure devra rester fermée.

Lire aussi Covid-19 : réouverture des bars et restaurants en trois temps à partir du 19 mai

Une véritable soupape pour les consommateurs pressés de renouer avec leurs bars et restaurants de prédilection. La profession, quant à elle, demeure prudente. D’abord parce que seulement un quart des établissements possèdent une terrasse. La météo est aussi une donnée très aléatoire pour cette réouverture en plein air. Enfin, elle privilégie l’offre de bar, plus simple à mettre en place que la restauration.

Feuille de route clairement dessinée

« La terrasse avec une jauge à 50 % n’est pas un modèle économique. Nous savions que l’ouverture du 19 mai allait être compliquée. Nous allons réfléchir avant de faire revenir le personnel en chômage partiel. Pour ma part, je ferai revenir mon équipe le 9 juin, avec l’ouverture du restaurant », réagit Hubert Jan, président du syndicat UMIH-Restauration et propriétaire du restaurant Chez Hubert à Fouesnant, dans le Finistère.

Le 30 juin, couvre-feu et jauges seront levés. Seul le service au bar restera interdit

En effet, le 9 juin marquera le deuxième temps de la réouverture. A cette date, les terrasses ne seront plus soumises à une jauge et les salles de restaurant pourront s’ouvrir avec une capacité limitée à 50 %. Le nombre de convives restera limité à six par table. Et le couvre-feu reculera encore, passant à 23 heures. De quoi assurer le service du dîner et donner le véritable coup d’envoi d’une reprise graduelle de la restauration.

Enfin, trois semaines plus tard, le 30 juin, couvre-feu et jauges seront levés, marquant alors le troisième temps de la réouverture des bars et restaurants. Seul le service au bar restera interdit. Dans cette épure, confirmée par M. Castex, il n’est plus question d’éventuelles restrictions par zones géographiques en fonction de la situation sanitaire.

Avec cette feuille de route clairement dessinée, chaque établissement va maintenant peaufiner sa vitesse de reprise et de rappel des troupes. Certains pourraient même attendre septembre pour rouvrir. En particulier à Paris, si le retour des touristes étrangers s’avère trop timoré cet été.

Vers des quotas de dirigeantes dans les grandes entreprises

La députée du parti République en mouvement (LREM), Marie-Pierre Rixain, s’exprime lors d’une séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale à Paris le 6 mars 2019.

Un pas de plus en faveur de la parité dans les entreprises. Mardi 11 mai, les députés devaient engager l’examen en première lecture de la proposition de loi (PPL) pour « accélérer l’égalité économique et professionnelle ». Porté par la députée (LRM, Essonne) Marie-Pierre Rixain, le texte a notamment pour objet d’introduire des quotas de femmes pour les postes à hautes responsabilités dans les sociétés d’au moins 1 000 personnes. Avec une telle disposition, « nous allons dans le sens de l’histoire », confie la parlementaire macroniste, en affirmant sa volonté de briser le « plafond de verre » qui bloque encore trop souvent la carrière de travailleuses.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Egalité salariale entre les femmes et les hommes : les lents progrès des entreprises

Le mécanisme mis au point par Mme Rixain repose sur l’instauration d’un seuil, appelé à évoluer dans le temps. En 2027, la proportion de femmes parmi les « cadres dirigeants et les cadres membres des instances dirigeantes » ne pourra pas être inférieure à 30 %. Ce ratio sera porté à 40 %, trois ans après. Les employeurs concernés qui restent en dessous de ce taux s’exposeront à une « pénalité financière » susceptible d’aller jusqu’à 1 % de la masse salariale. Le montant sera fixé par l’administration, en prenant en considération l’état de santé de l’entreprise, les efforts que celle-ci a déployés pour se conformer à ses obligations et les « motifs de sa défaillance ».

Une nouvelle étape

Lors des débats en commission des affaires sociales, le 5 mai, Mme Rixain avait réécrit sa copie. La précédente version de sa proposition de loi prévoyait des quotas sur les « 10 % de postes à plus forte responsabilité ». Mais cette formulation présentait l’inconvénient d’être « sujette à interprétation » et de « ne pas donner de mode d’emploi » précis pour atteindre la cible visée, explique la députée LRM. C’est la raison pour laquelle elle a redécoupé « le périmètre » de la mesure en donnant une définition des instances dirigeantes, le but étant de construire un dispositif « simple et opérationnel ».

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Belén Garijo, chez Merck, devient la première femme à diriger un groupe du DAX, l’équivalent allemand du CAC 40

L’élue macroniste se place clairement dans la filiation de la loi dite « Copé-Zimmermann » de janvier 2011, qui a contribué à féminiser les conseils d’administration et les conseils de surveillance. Il s’agit, aujourd’hui, de franchir une nouvelle étape, en s’attaquant aux fonctions managériales les plus élevées. A l’heure actuelle, « les femmes ne représentent que 17,5 % des membres des comités exécutifs », selon l’exposé des motifs de la PPL.

Il vous reste 62% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Amazon met un pied dans le Territoire de Belfort

Cela ressemble à un jeu du chat et de la souris. Voire une partie de poker menteur. Après des mois de spéculation et de polémiques sur la possible arrivée d’Amazon dans le Territoire de Belfort, l’entreprise américaine va officialiser l’ouverture d’un site, à l’Aéroparc de Fontaine, mardi 11 mai ou mercredi 12 mai, a appris Le Monde. Toutefois, il ne s’agit « que » d’une agence de livraison du « dernier kilomètre », où les chauffeurs viennent chercher les colis pour les acheminer jusqu’aux clients. Ce genre de bâtiment de 10 000 mètres carrés environ est beaucoup plus petit que le type de grand entrepôt de stockage également prévu sur l’Aéroparc… Un projet qu’Amazon refuse toujours de confirmer ou de démentir.

« Je me félicite de l’ouverture de cette agence du dernier kilomètre à Fontaine : elle va créer 300 emplois, soit 80 CDI pour gérer le site (chez Amazon) et 230 chauffeurs (chez des prestataires) », se réjouit Damien Meslot, le maire (Les Républicains) de Belfort. Pour l’élu, l’arrivée d’Amazon marque une étape supplémentaire dans la stratégie de diversification de la région de Belfort, tournée vers l’industrie. L’agglomération d’un peu plus de 100 000 habitants reste marquée par la suppression, mi-2019, de plusieurs centaines d’emplois par General Electric. Le plan social, qui touche à sa fin, a contribué au déclin démographique de la ville.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi A Belfort, l’avenir de General Electric passe par la case tribunal

Mais l’officialisation de l’arrivée d’Amazon à l’Aéroparc n’est-elle pas un gros indice confirmant que l’entreprise américaine sera bien l’opérateur du grand entrepôt en projet sur le même site ? Pourquoi, alors, M. Meslot a-t-il affirmé plusieurs fois qu’il n’y avait pas de projet de ce type avec l’entreprise américaine ? « J’ai toujours dit qu’il n’y avait pas de projet à Belfort, je n’ai pas parlé de Fontaine », sourit M. Meslot. L’élu joue clairement sur les mots. Voire réécrit l’histoire, puisqu’il avait déclaré en novembre à France 3 qu’il n’y avait pas « d’implantation prévue à ce jour sur le Territoire de Belfort ».

Débat récurrent

Contacté, Amazon officialise l’agence de livraison mais pas un projet de grand centre de distribution. « Nous venons d’ouvrir un entrepôt à Metz et avons confirmé plusieurs agences de livraisons en 2021. Nous restons dans le rythme annoncé d’un grand site et 8 à 10 agences par an. On nous prête souvent de nombreux projets mais ces bâtiments complexes sont souvent portés par des développeurs, qui les proposent ou les louent à différentes entreprises. »

Il vous reste 32.25% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Dans le Nord, la promesse d’une usine de confection de jeans bon marché

Le Denim Center pourrait ainsi assurer environ 6 % des jeans vendus par l’enseigne Pimkie.

Des jeans fabriqués en France en vitrine de Jules et de Pimkie pour un prix allant de 40 à 60 euros ? Fashion Cube espère être en mesure de le proposer dès 2022. Le pôle d’enseignes d’habillement détenu par l’Association familiale Mulliez (2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires) a annoncé lundi 10 mai vouloir inaugurer une usine de confection de jeans, le Fashion Cube Denim Center, au quatrième trimestre de l’année 2021, à Neuville-en-Ferrrain, près de Tourcoing (Nord).

Cette usine, qui mobilisera 3,5 millions d’euros d’investissement, dont 800 000 apportés par la région Hauts-de-France et Métropole européenne de Lille, devrait produire 180 000 unités au cours de sa première année d’exploitation et 400 000 par an, à terme.

Production marginale mais « significative »

Aux enseignes Pimkie, Jules, Orsay, Grain de malice et Bizzbee (environ 2 000 magasins), elle fournira des modèles plus chers que ceux qui proviennent habituellement d’Asie ou de Turquie. Sans toutefois les forcer à pratiquer le prix de vente de 100 à 150 euros des marques de jeans fabriqués en France par 1083 et Atelier Tuffery, pionniers de la relocalisation de la production de jeans dans l’Hexagone.

Le Denim Center pourrait ainsi assurer environ 6 % des jeans vendus par l’enseigne Pimkie. Bien que marginale, cette production est toutefois « significative », prétend Christian Kinnen, responsable du projet, car « cela démontre qu’il est possible de fabriquer un jean en France pour un prix de revient accessible ». Pour comprimer ses coûts, l’usine aura recours à l’automatisation de certaines tâches, dont la confection des poches, les coutures de décor et la pose de la ceinture et des passants, en sus des phases de coupes, assurées elles aussi par des machines. Initialement, Fashion Cube espérait produire des tee-shirts. « Mais les technologies ne sont pas encore suffisamment mûres », rapporte M. Kinnen.

D’ici à 2030, l’usine pourrait créer ses vêtements en ne faisant appel qu’à des matières recyclées ou réutilisées

Le distributeur s’est donc rabattu sur le denim, autre pièce-clé du vestiaire des Français. En outre, il a choisi la production d’un vêtement dont beaucoup pourfendent l’impact environnemental : le jean fait appel à des toiles de coton tissées à l’étranger, et les délavages et traitements qu’il subit sont gourmands en eau. Le Fashion Cube Denim Center aura recours « au laser et à l’ozone pour délaver » les pantalons, précise M. Kinnen, qui assure que la consommation en eau sera de « quarante fois » inférieure à celle d’autres usines de production de jeans.

Il vous reste 18.39% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

« Télérama » condamné pour le licenciement abusif d’un journaliste accusé de harcèlement sexuel

Le magazine Télérama a été condamné en avril pour avoir licencié « sans cause réelle et sérieuse » le journaliste Emmanuel Tellier, renvoyé en 2019 à la suite d’accusations de harcèlement sexuel, qu’il a toujours contestées, a appris, mercredi 5 mai, l’Agence France-Presse, confirmant une information du Canard enchaîné.

« Bien que la bonne foi des salariées victimes ne peut être mise en doute, la véracité et la réalité des propos reconstitués des années plus tard ne reposent sur rien d’objectif et de certain », a estimé le conseil de prud’hommes de Paris dans son jugement.

Emmanuel Tellier avait été licencié en mai 2019 pour faute simple, en même temps que son collègue Aurélien Ferenczi, renvoyé lui pour faute lourde, au terme d’une enquête menée par la direction des ressources humaines du groupe Le Monde, maison mère de l’hebdomadaire.

Lire aussi « Télérama » licencie deux journalistes accusés de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes

Elle faisait suite à des signalements visant les deux journalistes, pour des faits pouvant être assimilés à des agissements sexistes et du harcèlement sexuel, recueillis par une cellule d’écoute mise en place après l’affaire Weinstein. Les deux hommes avaient contesté vigoureusement les faits qui leur étaient reprochés et saisi tous deux les prud’hommes.

« Indicible sentiment d’injustice »

L’avocate de M. Tellier, Lucile Brandi Sommerer, s’est félicitée dans un communiqué de ce jugement qui « vient rappeler opportunément que nul ne peut être déclaré coupable sans preuve et que cela s’applique également aux employeurs dans l’exercice de leur pouvoir de sanction ». Emmanuel Tellier a, lui, souligné sur Twitter que cette décision n’effaçait pas « le chagrin et l’indicible sentiment d’injustice » qu’il ressentait.

De son côté, la direction de Télérama a rappelé dans un communiqué qu’elle avait « pris la décision de licencier Emmanuel Tellier en mai 2019 pour des faits de harcèlement sexuel », à l’issue d’une « enquête rigoureuse et contradictoire », car « l’obligation de sécurité de l’employeur vis-à-vis des salariés nécessite que ce type de comportement soit sanctionné et les victimes absolument protégées ».

« Le conseil de prud’hommes, s’il a estimé que les faits rapportés par les salariés étaient sérieux, a néanmoins considéré que l’enquête réalisée et les témoignages des salariés ne constituaient pas “un commencement indirect de preuve” » et a donc jugé le licenciement abusif, mais « cette motivation étant juridiquement très discutable, la direction de Télérama a décidé de faire appel », ajoute la direction de l’hebdomadaire.

Par ailleurs, les prud’hommes ont rejeté plusieurs griefs soulevés par M. Tellier, qui demandait notamment la « nullité » du licenciement, et ne lui ont accordé qu’une partie des indemnités réclamées.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Ligue du LOL : pourquoi la parole se libère dix ans après

Le Monde avec AFP

Liberty Steel envisage de vendre ses sites de Saint-Saulve et Hayange

Ce sont les suites prévisibles de l’histoire qui s’écrit depuis le 8 mars et la faillite de Greensill, principal partenaire financier du britannique Gupta Family Group Alliance (GFG Alliance) : l’argent commence à manquer pour faire fonctionner les sites français du groupe. En cessation de paiements, trois fonderies d’Alvance, branche aluminium de GFG, situées dans l’Indre et la Vienne, ont été placées en redressement judiciaire le 23 avril. Elles comptent quelque 850 salariés.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les déboires de Greensill fragilisent Gupta, « colosse aux pieds d’argile » très présent dans la sidérurgie française

A son tour, Liberty Steel, la branche acier du conglomérat, a confirmé, samedi 8 mai, s’être mise en quête de repreneurs pour l’aciérie Ascoval de Saint-Saulve (Nord) et pour Liberty Rail (ex-France Rail Industry) à Hayange (Moselle), respectivement 270 et 430 salariés. Le Monde évoquait déjà, le 28 avril, la possibilité qu’Ascoval change d’actionnaire. Une première alerte avait retenti un mois plus tôt pour l’aciérie, lorsque le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, avait annoncé le déblocage d’un prêt de 20 millions d’euros « pour payer les salaires, la fourniture nécessaire pour faire tourner l’usine et garantir qu’il n’y ait pas de rupture d’activité », promettant aux salariés de ne « jamais les laisser tomber ».

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Un possible changement d’actionnariat en vue chez Ascoval

Mais, en échange, l’Etat a exigé de GFG Alliance de mettre également 20 millions d’euros sur la table avant le 31 mai pour financer la croissance du besoin en fonds de roulement. Or, il y a peu de chance que GFG et Liberty, en grande fragilité financière, trouvent l’argent d’ici là. La vente est désormais une option examinée au grand jour. « Liberty Steel France, qui comprend Liberty Ascoval et Liberty Rail Hayange, a connu une réduction significative du soutien à son fonds de roulement depuis l’effondrement de Greensill Capital », explique la société Liberty Steel Group dans une déclaration transmise au Monde. Tout en se disant confiante pour trouver de nouveaux financements, Liberty Steel indique « par prudence » se mettre « à explorer des options de vente pour ces entreprises ».

Trouver de nouveaux clients

Un énième rebondissement dans la vie des deux sites que les salariés accueillent avec lassitude, huit mois seulement après leur rachat par Liberty Steel à la barre du tribunal de commerce. Ceux d’Ascoval sortaient alors d’une interminable quête d’un repreneur fiable, depuis la mise en vente du site par Vallourec en 2015. Pour ceux d’Hayange, si la cession se concrétise, ce sera le quatrième changement d’actionnaire en onze ans.

Il vous reste 43.11% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.