« Les ouvriers ne sont plus dans les usines »

S’appuyant sur l’analyse de l’activiste américaine Tamara Draut, le capital-risqueur Nicolas Colin explique, dans sa chronique au « Monde », que les ouvriers occupent désormais majoritairement des emplois de service. Un bas salaire, peu syndiqués, ils sont invisibles pour les pouvoirs publics.

Chronique « Transformations ». Que fait un ministre quand il veut évoquer l’emploi ? Il se rend dans une usine et enfile un casque de chantier. Non que la majorité des ouvriers soient à l’usine : les ouvriers dans l’industrie représentent à peine deux emplois sur dix en France. Réciproquement, l’image de la chaîne d’assemblage continue de dominer notre représentation du monde du travail. Et cette nostalgie des « cols-bleus » est un problème tant elle nous empêche de comprendre l’économie d’aujourd’hui.

Dans son livre Sleeping Giant : How the New Working Class Will Transform America (Doubleday, 2016, non traduit), l’activiste américaine Tamara Draut nous appel à faire un voyage passionnant dans le monde des nouveaux travailleurs – qui ne travaillent plus à l’usine, mais dans les secteurs de service de proximité. Comme elle l’explique, la fonction des travailleurs hier était le plus souvent de « fabriquer des choses ». Aujourd’hui, c’est plutôt de « prendre soin des gens et de les servir ».

Le passage numérique explique cette mutation. Les emplois industriels disparaissent car ils sont faciles à délocaliser ou à automatiser. Leur raréfaction, accélérée par le numérique, est la conséquence ultime de l’organisation scientifique du travail – celle-là même qui a longtemps rendu les ouvriers plus productifs et a permis d’améliorer leur condition pendant les Trente Glorieuses. Les travailleurs des services de proximité, quant à eux, ne sont pas menacés par la transition numérique car le cœur de leur métier, c’est d’interférer avec d’autres personnes. Et il est quasiment impossible de délocaliser ou d’automatiser ces innombrables interactions humaines du quotidien.

Des emplois de mauvaise qualité

Pourquoi cette nouvelle classe de travailleurs, celle des services de proximité, n’est-elle pas pour autant reconnue et valorisée ? S’ils avaient lu Tamara Draut, nos ministres, au lieu de hanter les usines, iraient parler d’emploi là où se trouvent les travailleurs aujourd’hui : dans les crèches et les hôpitaux, derrière les comptoirs des magasins, dans les cuisines des restaurants ou au centre de formation des chauffeurs Uber à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) – bref, dans tous ces secteurs de service, plutôt urbains, où se concentrent les emplois. Mais il y a trois problèmes.

Le premier, c’est que les emplois dans ces secteurs sont encore de mauvaise qualité. Les salaires y sont bas, le management est rétrograde, les horaires sont décalés et les conventions collectives protègent peu les travailleurs. Il y a donc une réticence, de la part de nos dirigeants, à chanter les louanges des services de proximité. Personne ne souhaite assumer la façon, souvent très mauvaise, dont les entreprises traitent leurs employés dans des secteurs comme la restauration ou les services à la personne.

Copropriété : comment retirer (ou garder) le poste de concierge ?

© Jacques Loic / Photononstop

Ce n’est pas parce que la copropriété retire le poste de concierge, qu’elle peut licencier ce salarié : il risque par conséquence de saisir la juridiction prud’homale, afin d’obtenir d’importants dommages et intérêts pour rupture abusive de contrat.

Une grande partie de juges considèrent en effet que le syndicat de copropriétaires, comme une entreprise privée, doit appliquer les règles du code du travail et surtout l’article L 1233-3, selon lequel le licenciement économique doit être consécutif à « des difficultés économiques ». La Cour de cassation l’a d’ailleurs admis dans un arrêt du 29 avril 2009, qui rejetait le pourvoi d’un ouvrier d’entretien, les difficultés économiques de la copropriété étant selon elle « caractérisées ». Elle a confirmé, dans un arrêt du  20 janvier 2010, que les concierges relèvent, sur les points non réglés par leur statut, des dispositions de droit commun du code du travail.

En quoi consistent les « difficultés économiques » ? Une grande partie de juges considèrent que’elles ne peuvent se limiter à la simple volonté de rationaliser la gestion de l’immeuble et de réduire les charges. On ne compte donc que très peu de jugements favorables aux syndicats de copropriété, selon l’étude qu’a publiée Me Laurence Guégan-Gélinet dans la revue Administrer.

Vétusté de l’immeuble

En voici l’un des rares : le 21 février 2013, la cour d’appel d’Aix-en-Provence admet que le licenciement économique de la gardienne de la résidence Le Longbeach à Grasse (Alpes-Maritimes), le 5 mars 2010,  suite au vote de la suppression de son poste par l’assemblée générale du 13 novembre 2009, est fondé sur une cause réelle et sérieuse. Elle entend le syndicat des copropriétaires, qui fait valoir que « l’immeuble construit en 1978 n’a jamais été entretenu et qu’il est nécessaire aujourd’hui de réaliser de nombreux travaux importants, que les copropriétaires qui sont surtout des retraités, dont les revenus n’évoluent plus à la hausse, sont dans l’incapacité de répondre à des appels de fonds plus élevés, que les bilans du Syndicat des copropriétaires établis pour les années 2007, 2008 et 2009 confirment le déséquilibre économique au sein de la copropriété, que l’état des dettes et des dépenses établi le 10 septembre 2010 démontre que la trésorerie de la copropriété s’élève à 14 681,75 euros pour un débit de 17 980,70 euros, que la suppression du poste de concierge était le seul moyen de financer les travaux nuisibles que la copropriété doit réaliser ».

La cour d’appel constate par conséquence, au vu des nombreux documents comptables qui lui sont fournis, que le syndicat des copropriétaires doit faire face à une élévation importante des charges obligatoires. Elle constate aussi que le remplacement de la gardienne par un service de nettoyage permet une économie des deux-tiers des dépenses de gardiennage. Elle déboute la gardienne de sa demande de paiement de quelque 20 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et défaut de reclassement.

40 000 euros d’indemnité

Mais la majorité du temps, les juges refusent d’admettre que le licenciement soit fondé sur une cause réelle et sérieuse, comme le montrent les trois affaires suivantes.

1)Mme X est engagée en 1984 en qualité de concierge au 80 rue de Lauriston à Paris. En 2006, les copropriétaires décident de retirer son poste et de confier l’entretien des parties communes ainsi que le service de sortie des poubelles à une entreprise spécialisée. Le syndic notifie à Mme X son licenciement pour motif économique, en mars 2007. Sa lettre de licenciement évoque « un souci de maîtrise des coûts financiers et de rationalisation du gardiennage de l’immeuble ».

La cour d’appel de Paris, que Mme X saisit après avoir été déboutée par le conseil des prud’hommes, juge, le 31 janvier 2013, que  « les dispositions du code du travail relatives au licenciement pour motif économique sont applicables aux gardiens d’immeubles soumis à la convention collective nationale de travail des gardiens, concierges et employés d’immeubles ». Elle se réfère ainsi à l’arrêt de cassation du 20 janvier 2010. Elle considère qu’en l’occurrence, « l’employeur ne rapporte pas la preuve des motifs d’ordre économique qui ont nécessité la suppression du poste ». Elle alloue à l’ancienne gardienne quelque 40 000 euros d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (39 597 euros).

30 000 euros d’indemnit

2) M. Y, engagé en 1995 en qualité de gardien, est licencié en août 2009, l’assemblée générale des copropriétaires ayant déterminé de supprimer son poste. Sa lettre de licenciement évoque la décision de « réorganiser l’entretien et la maintenance des parties communes ». M. Y saisit le conseil des prud’hommes de Paris, qui, le 7 juillet 2011, le déboute, en considérant qu’un syndicat de copropriétaires n’est pas une entreprise.

La cour d’appel de Paris, qu’il saisit, infirme, le 5 juin 2013, en se référant elle aussi à  l’arrêt de cassation du 20 janvier 2010. « Il […] résulte que, inversement à ce qu’a affirmé le conseil de prud’hommes, le licenciement de M. Y devait être régi par les dispositions générales du code du travail, notamment celles prévues aux articles L 1232-1 et suivants (licenciement pour motif personnel) ou L 1233-1 et suivants (licenciement pour motif économique) de ce code et être fondé sur une cause réelle et sérieuse, suffisamment précise pour être vérifiable par la cour. »

Or, constate la cour d’appel, « la formulation de la lettre de licenciement, totalement imprécise, et qui empêche toute vérification par la cour, équivaut en réalité à une absence de motifs. » Elle juge que la rupture abusive du contrat de travail ouvre droit pour M. Y à une indemnité de 30 000 euros.

Régularisation du paiement des charges

3) Mme Z, engagée en 1984 comme concierge par le syndicat des copropriétaires du 11 boulevard Flandrin, Paris 16e, est licenciée le 1er décembre 2010, l’assemblée générale ayant décidé de supprimer son poste. Sa lettre de licenciement invoque le fait que les copropriétaires ne règlent pas leurs charges, et que la trésorerie est déficitaire : « Vous n’ignorez pas que cette copropriété rencontre de très importants problèmes financiers et que sa trésorerie est déficitaire. Ces difficultés économiques sont constituées, d’une part, par des difficultés de trésorerie, et, d’autre part, par la nécessité absolue d’engager des travaux de sauvegarde de l’immeuble dont le coût aggrave les finances déjà obérées de la copropriété. La trésorerie sur l’exercice 2009 est en effet déficitaire de 24.840, 46 € et la situation ne s’améliore pas de manière substantielle sur l’exercice 2010 en cours…»

La cour d’appel de Paris, que la gardienne saisit après avoir été renvoyée par le conseil de prud’hommes, refuse, le 8 avril 2014, de valider le licenciement car « le syndicat des copropriétaires ne justifie pas, ni même allègue, avoir mis les copropriétaires défaillants en demeure de régulariser le paiement de leurs charges ou avoir tenté, les concernant, une procédure de recouvrement (injonction de payer par exemple)».  Or, « cette carence de la copropriété ne saurait préjudicier à Mme Z et ne peut, en tous cas, caractériser un motif économique justifiant son licenciement». La cour condamne le syndicat à lui verser 40 000 euros d’indemnités pour licenciement abusif.

Revirement de jurisprudence ?

Inversement à tout ce qui vient d’être présenté, la Cour de cassation juge soudain, le 1er février 2017, que le syndicat des copropriétaires n’est pas une entreprise, et que le licenciement du concierge n’est pas soumis aux dispositions du code du travail. Elle repousse le pourvoi (15-26 853) de la concierge du 4 rue Guiglia à Nice, qui protestait contre son licenciement, après 35 années de service.

La lettre de licenciement que lui a envoyée la Sarl Groupe Foch immobilier, syndic de la copropriété, lui indiquait uniquement que l’assemblée générale avait décidé à l’unanimité de supprimer son poste; elle n’invoquait aucun motif économique pour justifier cette suppression. En validant le licenciement, la Cour de cassation semble juger que la décision de supprimer le poste de concierge constitue en elle-même une cause réelle et sérieuse de rupture du contrat de travail.

Selon certains témoins, cet arrêt serait à manier avec précaution: Me Laurence Guégan-Gélinet pense que « la Cour a entendu appliquer au syndicat de copropriété la jurisprudence qui concerne les concierges employés par un particulier, et qui sont assimilés aux employés de maison »: l’article 12 de la Convention collective du particulier employeur exclut en effet l’application des règles spécifiques au licenciement économique. Mais, observe Me Guégan-Gélinet, les règles du licenciement économique redeviennent applicables à l’employé de maison, lorsqu’il est employé une personne morale, notamment une société civile immobilière (SCI).

Il ne lui semble « pas concevable de créer, au regard des règle du droit du travail actuellement en vigueur, un motif de licenciement sui generis: cela n’est conforme ni aux dispositions des articles L 7211-1 à L 7215-1 du code du travail fixant le statut dérogatoire des gardiens d’immeuble, ni à l’article 14 de la Convention collective nationale des gardiens, concierges et employés d’immeubles, ni à l’article L 1233-1 du code du travail ». Elle demande une « clarification » de la Cour de cassation.

Devant ces incertitudes, ceux qui veulent se passer des services du concierge auront intérêt à attendre le départ à la retraite de celui-ci, plutôt qu’à procéder à son licenciement.

 

Retraites complémentaires : la CFDT conteste le malus

La CFDT est-elle en train de réétudier sa position sur un dispositif-clé relatif aux retraites complémentaires ? La question vient d’émerger, à la faveur de déclarations de Jean-Claude Barboul, représentant de la centrale syndicale et président du conseil d’administration de l’Agirc-Arrco, le régime qui verse une pension complémentaire à quelque 12,6 millions d’ex-salariés du privé. Dans un article dernièrement publié sur le site Internet de L’Express, ce responsable cédétiste demande le report à 2020 du système de malus entré en vigueur le 1er janvier, en invoquant des motifs techniques. Mais d’autres raisons, plus politiques celles-là, semblent aussi à l’œuvre : selon nos informations, la CFDT aimerait, en effet, que le mécanisme incriminé, très décrié lors de sa création, soit remis en cause.

Pour comprendre cette ombreuse affaire, il faut aller à octobre 2015. A l’époque, le patronat et trois organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, CFTC) signent à l’arraché un accord pour redresser les comptes, très dégradés, de l’Agirc et de l’Arrco. L’une des mesures retenues dans ce « deal » prédit des abattements et des bonifications, afin d’encourager les personnes à travailler plus longtemps. Ainsi, sauf exception, celui qui cesse sa vie professionnelle dès l’instant où il a droit à une pension de base à taux plein (par exemple 62 ans pour un individu né en 1957 qui a cotisé 41,5 ans) subit une décote temporaire de 10 % sur sa retraite complémentaire ; en revanche, s’il décale son départ d’un an, il n’est pas pénalisé, et s’il prolonge sa carrière de deux ans ou plus, sa pension Agirc-Arrco est majorée.

« Un malus intermédiaire »

Les trois signataires principaux de l’accord acceptent, à contrecœur, un dispositif auquel le Medef tient par-dessus tout car il encourage les actifs à rester dans le monde du travail. « Un tabou est tombé », se réjouit alors le chef de file de la délégation patronale. La CGT et FO, de leur côté, refusent d’entériner un tel compromis, estimant qu’il porte atteinte à la règle des 62 ans pour pouvoir réclamer le versement de sa pension.

Précision importante : le malus ne concerne pas les retraités exonérés de CSG (c’est-à-dire ceux qui ont de faibles ressources). Pour ceux qui sont assujettis au taux réduit de CSG (3,8 %), la décote est deux fois moins élevée que pour ceux soumis au taux normal de CSG (8,3 %). Mais qu’en est-il pour ceux qui se voient appliquer le tout nouveau taux de CSG (6,6 %), instauré par les mesures d’urgence de la fin décembre 2018 ? Faut-il leur prescrire un abattement de 10 % ou de 5 % ?

le modèle d’Uber averti par une décision de la justice française

A Paris, 11 mars 2016.
A Paris, 11 mars 2016. Charles Platiau / REUTERS

C’est un tremblement de terre pour Uber, qui devrait avoir de nombreuses polémiques pour les plates-formes numériques de services. La société américaine de mise en relation entre chauffeurs (VTC) et passagers a été condamnée, jeudi 10 janvier, à requalifier en contrat de travail le contrat commercial l’ayant lié à un chauffeur indépendant entre octobre 2016 et avril 2017. Ce dernier, Maximilien Petrovic, avait été débouté en premier instance en juin 2018 par le tribunal des prud’hommes de Paris.

Ce jugement en faveur d’un chauffeur indépendant est une première en France. « Il découle de l’arrêt de la Cour de cassation à l’encontre de Take Eat Easy de fin novembre », déclare Jean-Emmanuel Ray, professeur de droit du travail l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne. « Pour la cour d’appel de Paris, c’est un véritablement basculement, car jusqu’à présent, elle s’était toujours refusée à requalifier ces chauffeurs a priori indépendants. Cela concerne toutes les plates-formes, mais aussi G7, qui emploie des taxis locataires ou artisans. »

Le 3 décembre dernier, la Cour de cassation requalifiait en contrat de travail un contrat entre un livreur et la plate-forme, aujourd’hui fermée, Take Eat Easy. À cette occasion, elle définissait que « le lien de subordination entre la plate-forme et le livreur est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné », au moyen d’un système de géolocalisation et d’un régime de sanctions.

Depuis sa création, Uber défend son rôle de simple intermédiaire

Dans leur déclaration, les trois juges de la cour d’appel de Paris mentionne que « la qualification de contrat de travail étant d’ordre public (…), il ne peut y être dérogé par convention. Ainsi, l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité. » En somme, quel que soit le contrat signé, ce qui compte, c’est « le faisceau d’indices » qui caractérise « le lien de subordination » liant le chauffeur à la plate-forme, et donc l’existence d’un contrat de travail de fait.

Depuis sa création, Uber défend son rôle de simple intermédiaire. Dans son argumentation, la société assure que « les chauffeurs sont libres de se connecter à l’application Uber en temps réel et unilatéralement s’ils veulent, où ils veulent, quand ils veulent et pour la durée qu’ils veulent. » De même, assure-t-on dans l’entourage de la société, « aucun contrôle d’horaire n’est effectué par Uber envers les chauffeurs. Cette liberté totale dans l’organisation du travail fait obstacle à toute reconnaissance de contrat de travail. » Et aussi, « il n’y a aucune condition d’exclusivité. Les

Les talents des réfugiés et le travail

On peut se plaindre d’assister à l’arrivée de réfugiés sans ressources, après avoir laissé leurs biens dans leur fuite d’un pays en guerre. On peut aussi faire le vœu que ces tragédies se raréfient. En cette période de nouvelle année, c’est le moment ! Mais on peut aussi agir. En entreprise, particulièrement. N’entend-on pas dire qu’en cette période de plein-emploi pour les cadres en France il devient particulièrement difficile de recruter des personnes qualifiées dans un nombre de plus en plus grand de métiers « en tension » ? Or les réfugiés ont des talents. C’est très dur de l’imaginer, tant l’habitude est grande d’associer niveau intellectuel, compétences et apparence ; quand on a réchappé d’un périple extrêmement dangereux, on est rarement tiré à quatre épingles.

« Les réfugiés ont des talents invisibles, une richesse culturelle et une vision du monde différente, qui sont de vrais atouts pour l’entreprise »

Centreprises pionnières ont saisi tout l’intérêt de ce vivier de main-d’œuvre insoupçonné. D’ici à l’été, le service informatique du Réseau de transport d’électricité (RTE) devrait ainsi avoir reçu une dizaine de réfugiés. Deux dirigeants du groupe sont à l’origine du projet : Nathalie Devulder, directrice du développement durable, et Olivier Grabette, membre du directoire. « Les réfugiés ont des talents invisibles, une richesse culturelle et une vision du monde différente, qui sont de vrais atouts pour l’entreprise. Or nous avions des problèmes pour trouver des compétences dans le domaine du numérique. La convergence entre ces deux éléments s’est imposée », explique Nathalie Devulder. « Une entreprise doit être connectée aux enjeux de la société », ajoute Olivier Grabette.

Sur les conseils de Singa, association d’aide aux réfugiés, RTE se fait aider par Tilt & Co, un cabinet de conseil en innovation sociale. Tous, ils ont mené quatre ateliers avec des salariés volontaires de RTE pour définir les profils souhaités. « On les a trouvés très facilement malgré des agendas super-contraints », indique Nathalie Devulder. « Le projet répondait à une envie d’engagement de collaborateurs désireux de donner plus de sens et de valeur humaine à leur vie professionnelle », analyse Olivier Grabette.

« La crainte d’une concurrence déloyale »

Dans un tout autre domaine, L’Oréal a embauché 20 % des 19 réfugiés qu’il a accueillis en stage depuis la mi-2017. L’association Wintegreat avait sélectionné les stagiaires parmi 800 diplômés du supérieur, avant de les accompagner et de les former dans l’une des dix grandes écoles (ESCP Europe, Essec, Mines de Paris…) avec lesquelles elle est en collaboration. « Nous les avons évalués comme tous les autres stagiaires. La diversité de leur parcours, leur vision différente de la beauté apportent beaucoup de richesse en interne », explique Tony Cocoual, directeur du recrutement des divisions sélectives de L’Oréal.

 

La présence au travail ou les stakhanovistes de la balance

Dans les bureaux, entre 17h et 21h: Photo extraite da la série « alvéoles »
Dans les bureaux, entre 17h et 21h: Photo extraite da la série « alvéoles » JEAN-PIERRE ATTAL / COURTESY GALERIE OLIVIER WALTMAN

Dernièrement interviewé au micro de France Inter sur ses gestes « pour la planète », François Hollande a raconté que, durant son quinquennat, le soir, il éteignait lui-même les bureaux de ses collaborateurs pour éviter le gaspillage électrique. ­« Certains voulaient peut-être montrer qu’ils travaillaient la nuit et laissaient la lumière », a précisé, avec humour, l’économe corrézien. Cette anecdote élyséenne illustre jusqu’à l’absurde la ­culture du présentéisme qui règne en maître au pays des 35 heures.

Alors qu’on imagine simplement la France comme un repaire de tire-au-flanc vindicatifs, c’est au contraire le pays qui a le plus fort taux de présentéisme en Europe. D’après une étude Loudhouse pour Fellowes, 62 % des salariés vont au travail même lorsqu’ils sont malades. « C’est en partie pour lutter contre cette caricature du Français absentéiste que les gens veulent se montrer présents au ­bureau », explique le sociologue Denis Monneuse, auteur de l’ouvrage Le Surprésentéisme. Travailler malgré la maladie (De Boeck, 2015).

Fakirs d’open space

En 2018, 23 % des salariés ont lâché à prendre l’arrêt de travail prescrit par leur médecin, alors qu’ils n’étaient que 19 % en 2016 (étude Malakoff Médéric, 2018). « Dans l’enseignement, quand tu restes chez toi, c’est souvent tes collègues qui doivent reprendre ta classe. Comme je ne souhaitais pas les surcharger, il m’est arrivé d’aller travailler avec plus de 39 °C de fièvre et la tête qui martèle, mentionne ­Renée Cluzeau, institutrice. Même lorsque j’ai été opérée d’un sein, j’ai fait une convalescence minimum. Par contre, la minorité qui s’arrête pour un oui ou pour un non est souvent mal vue par les confrères. »

Au-delà de cette dimension solidaire, comment expliquer, au pays d’Alexandre le Bienheureux, cette incroyable pulsion qui pousse les grippés à bouder leur couette ?

« En période de crise, la peur du chômage avive le désir de se faire bien voir en se montrant présent, explique Denis Monneuse. C’est un phénomène qui touche tout le monde, du ­patron qui veut se croire irremplaçable au travailleur en intérim, qui espère décrocher un CDI en multipliant les heures. »

Cette forme démonstrative de relation au travail repose sur un lien supposé ­entre implication professionnelle et ­occupation physique de l’espace. L’inconvénient, c’est qu’elle met dans le même panier les stakhanovistes et les fakirs de bureau, capables de rester assis durant huit heures sans se lever de leur siège.

 

 

L’e-santé française est présent au foire CES de Las Vegas

Le stand Withings, lors de l’édition 2015 du CES de Las Vegas.
Le stand Withings, lors de l’édition 2015 du CES de Las Vegas. ROBYN BECK / AFP
Au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas (Nevada), qui se déroule jusqu’au vendredi 11 janvier, l’innovation n’est, pas seulement au service du divertissement, de télévisions toujours plus grandes ou de casques audio plus performants. Les progrès de la technologie s’y révèlent également en faveur de causes plus utiles telles que l’e-santé. Dans cette catégorie, plusieurs start-up françaises ont pu y présenter des solutions intéressantes de prévention ou de suivi des pathologies.Entre les acteurs les plus connus, le fabricant de montres connectées Withings a particulièrement dévoilé le BPM Core, un brassard associant tensiomètre, électrocardiogramme et stéthoscope électronique. L’entreprise française, qui était, un temps, passé dans le giron de Nokia, a également présenté une montre permettant de réaliser des électrocardiogrammes, dont la précision est censée admettre de détecter les épisodes de troubles du rythme cardiaque.

Derrière cette société déjà bien établie de la santé connectée, des start-up tricolores sont venues tenter leur chance : Healsy avec une solution de prédiction de glycémie pour les diabétiques, WitMonki, qui développe un outil de suivi des troubles du rythme cardiaque de la taille d’une carte de crédit, Devinnova, qui propose un pack de monitoring des systèmes vitaux à partir d’un dispositif appliqué pendant une semaine sur le plexus, et bien d’autres encore…

 « La certification, le nerf de la guerre »

Les technologies employées sont parfois surprenantes, comme chez Rx-Blood, qui utilise la caméra d’un iPhone pour accomplir des analyses de sang. Mais toutes profitent de l’intelligence artificielle pour augmenter les capacités d’analyses des données de santé.

Que viennent chercher ces entreprises au CES ? On penserait volontiers qu’elles souhaitent venir à l’assaut d’un marché américain séduisant. « C’est le plus grand marché pour les maladies cardiovasculaires », convient Stéphane Delliaux, de WitMonki. « Un marché où il est plus facile de faire de gros volumes », abonde Nicolas Caleca, de Healsy, alors que le marché européen est beaucoup plus divisé – ne serait-ce que pour proposer des modes d’emploi dans chaque langue, sans parler des législations, qui varient d’un Etat à l’autre.

Comme le montionne Stéphane Delliaux, « la certification, c’est le nerf de la guerre ». Or, aujourd’hui, la plupart des solutions proposées en France n’ont pas l’agrément qui leur permettrait de se revendiquer comme outils médicaux à proprement parler, et de réclamer, à ce titre, un remboursement par la Sécurité sociale… un vrai boost pour leur activité. « Il faut réussir à démontrer un vrai bénéfice pour la société », souligne ce Marseillais, qui partage son temps entre sa start-up et son métier de médecin physiologiste, et espère réussir ce graal d’ici au troisième trimestre.

 « Convaincre les médecins »

De ce point de vue, l’exemple américain semble attirant, qui promeut, par le biais des assureurs, les mutuelles et, parfois, les entreprises, l’utilisation d’outils de l’e-santé (montres ou balances connectées, par exemple) pour prévenir les maladies. Un modèle que bon nombre de ces entreprises aimeraient voir répliqué en France, arguant que « prévenir est toujours mieux que de guérir », autant pour le patient qu’en termes de coût pour la société. La RATP serait notamment intéressée par la solution d’Healsy, qui permettrait de réduire les arrêts de travail liés aux ennuis de santé des personnes atteintes de diabète, une pathologie qui toucherait environ 10 % de la population adulte dans le monde.

Pour faire bouger les lignes, ces entreprises, qui aimeraient bien souvent s’adresser directement au client final – le patient –, savent qu’il leur faut d’abord convaincre les praticiens médicaux. « En France, certains ont peur que les dispositifs de l’e-santé fassent de l’ombre aux médecins. C’est pour cela que c’est une population [les médecins] qu’on veut absolument convaincre », témoigne Nicolas Caleca. « Nous souhaitons nous ancrer dans la pratique médicale d’aujourd’hui, pour la transformer de l’intérieur », plaide, pour sa part, M. Delliaux, en insistant sur le fait que sa solution n’a absolument pas vocation à contourner les praticiens.

Des problèmes de financements

S’inspirant de l’exemple américain, certains veulent également s’appuyer sur l’influence des associations de patients pour réussir leur percée. Le sentiment est toutefois que les autorités françaises prennent progressivement conscience des bénéfices que pourrait apporter l’e-santé. « En France, il y a aujourd’hui une vraie volonté de pousser l’innovation, notamment en réduisant le coût d’entrée pour permettre des essais, en toute sécurité », estime ainsi M. Caleca.

Mais une autre épreuve reste à lever. Plusieurs de ces start-up de l’e-santé rencontrées à Las Vegas ont d’abord fait le voyage dans le Nevada pour accélérer leurs levées de fonds. Dans le cadre réglementaire actuel, certaines peinent à se financer en France : « Les investisseurs vous disent : “revenez quand vous aurez la certification”, mais, ce jour-là, on n’aura plus besoin d’eux pour entrer sur le marché », déclare M. Delliaux.

 

Ford et Jaguar Land Rover se préparent à éliminer des milliers de postes de travail en Europe

L’usine Ford de Blanquefort (Gironde), près de Bordeaux, en février 2018.
L’usine Ford de Blanquefort (Gironde), près de Bordeaux, en février 2018. NICOLAS TUCAT / AFP
C’est un jour obscur pour le secteur automobile européen. Cinq ans après d’importantes vagues de restructurations touchant essentiellement Renault, PSA, Fiat ou General Motors, Ford et Jaguar Land Rover ont annoncé de concert, jeudi 10 janvier, leur intention de suspendre des milliers de postes.Dans le rouge en 2018 en Europe, après une année 2017 tout juste à l’équilibre, Ford a décidé de recourir aux grands moyens. Après la fermeture, confirmée pour août, de l’usine de transmission de Blanquefort (Gironde) et l’arrêt de la fabrication de certains modèles à l’usine allemande de Sarrelouis (Sarre), le groupe, qui détient 24 sites de production sur le Vieux Continent, pourrait encore diminuer son implantation industrielle.

« Nous ne pouvons pas donner plus de détails tant que nous négocions avec les différentes organisations syndicales concernées par ces restructurations, a déclaré Steven Armstrong, le patron de Ford pour l’Europe, lors d’une conférence téléphonique. Cependant, nous pouvons indiquer qu’un nombre significatif d’emplois sera supprimé. » La firme à l’ovale bleu emploie 53 000 personnes.

Le fabricant de Dearborn (Michigan) n’entend cependant pas se retirer du marché européen. « Nous sommes la première marque sur le marché des véhi­cules utilitaires, commente M. Armstrong, et nous pouvons encore faire mieux dans ce domaine. De même, si nous allons revoir à la baisse notre offre de modèles de véhicule, nous entendons vendre davantage de véhicules haut de gamme. » Par ailleurs, l’américain va également lancer officiellement, mardi 15 janvier, une alliance avec le groupe Volkswagen qui pourrait l’aider à baisser ses coûts en Europe.

Ces décisions doivent permettre au constructeur de retrouver une marge de 6 % sur la zone, au lieu du 1 % difficilement atteint ces dernières années. Il y a cinq ans, tant Renault que PSA, au bord du gouffre, peinaient à atteindre la rentabilité. Au premier semestre 2018, les deux sociétés ont affiché des marges de plus de 6 %, après avoir procédé à de profondes restructurations.

« Décisions énergiques »

Si Ford paie ses problèmes en Europe, avec le ralentissement des immatriculations, notamment sur ses marchés principaux – le Royaume-Uni et l’Allemagne –, Jaguar Land Rover (JLR), de son côté, se restructure en partie pour faire face à ses difficultés en Chine.

Le premier fabricant automobile britannique a annoncé jeudi la suppression de 4 500 postes (soit un peu plus de 10 % de ses effectifs), essentiellement au Royaume-Uni, dans le cadre d’un plan d’économie de 2,5 milliards de livres (2,8 milliards d’euros). La filiale de Tata Motors souhaite faire partir particulièrement des cadres. Elle a perdu 354 millions de livres entre avril et septembre 2018, et a déjà supprimé un millier de postes en Grande-Bretagne.

Gilbert Cette : « Il est probable d’assister et faire une suivie les mobilités des travailleurs »

Une mobilité ratée des actifs, à la fois géographique et professionnelle, peut augmenter le chômage structurel. En France, les obstacles à la mobilité sont nombreux et les réponses inévitablement complexes. Ce thème faisait l’objet du  Séminaire Emploi co-organisé par les ministères de l’économie et du travail, qui s’est déroulé le 30 novembre 2018 et lors duquel sont intervenus le juriste Christophe Radé, l’économiste Francis Kramarz et la syndicaliste Véronique Descacq, ancienne secrétaire générale adjointe de la CFDT.

Les analyses de la direction de la recherche et des statistiques du ministère du travail (Dares) montrent que des zones d’emplois à forts ou faibles taux de chômage relatifs se côtoient sur le territoire, ce qui atteste d’une faible mobilité géographique. Cette faible mobilité est structurelle : plusieurs sont les départements, parmi les quinze à plus fort ou à plus faible taux de chômage relatif en 2017, qui connaissaient déjà la même situation en 1982. Une étude des économistes allemands Ronald Bachmann, Peggy Bechara et Christina Vonnahme (« Occupational mobility in Europe », Ruhr Economic Papers n° 732, universités de Dortmund, Bochum et Duisbourg) montre également que, parmi les pays de l’Union européenne, seuls trois pâtissent d’une mobilité professionnelle significativement inférieure à celle observée en France, et quatre – l’Allemagnela Suède, l’Irlande et le Royaume-Uni – bénéficient d’une mobilité professionnelle plus forte.

Problèmes juridiques et culturels

Les résultats de la vaste enquête « Parlons travail » réalisée fin 2016 par la CFDT auprès de salariés indiquent qu’une majorité d’entre eux n’auraient pas peur de la mobilité, leur principale crainte étant le chômage. Mais les obstacles à la mobilité sont nombreux. Dans le domaine économique, évoquons en vrac : un système de relations sociales qui attache des droits au travailleur en emploi dans une entreprise donnée plutôt qu’à la personne – c’est ainsi qu’un salarié qui bouge peut perdre ses indemnités de fin de carrière ; l’insuffisance de la formation professionnelle – que la réforme en cours vise à affaiblir ; les politiques du logement, qui entravent la mobilité car elles incitent à devenir propriétaire ou font craindre de perdre un logement social difficilement obtenu – le plan du bailleur social Action Logement annoncé le 9 janvier vise précisément à réduire ces obstacles. Mais aussi la fiscalité élevée sur les droits de changement et sur les revenus locatifs et, enfin, le permis de conduire, cher et long à obtenir…

Le lien assemblant un chauffeur et Uber est officiellement « contrat de travail »

La cour d’appel estime que le contrat « ayant lié » un ancien chauffeur à « la société de droit néerlandais Uber BV est un contrat de travail ».
La cour d’appel estime que le contrat « ayant lié » un ancien chauffeur à « la société de droit néerlandais Uber BV est un contrat de travail ». THOMAS OLIVA / AFP
Le lien qui assemblait un ancien chauffeur indépendant à la plateforme de réservation en ligne Uber est bien un « contrat de travail », a estimé la cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu jeudi 10 janvier, une « première » concernant le géant américain en France.Dans cette conclusion, consultée par l’AFP, la cour d’appel estime que le contrat « ayant lié » un ancien chauffeur à « la société de droit néerlandais Uber BV est un contrat de travail ». Elle détaille « un faisceau suffisant d’indices » qui caractérise selon elle « le lien de subordination » liant le chauffeur à la plate-forme et renvoie donc le dossier aux prud’hommes, qui s’étaient déclarés incompétents en juin dernier au profit du tribunal de commerce de Paris.Ce chauffeur avait saisi la justice en juin 2017, deux mois après qu’Uber avait « désactivé son compte », le « privant de la possibilité de recevoir de nouvelles demandes de réservation », rappelle la cour. A l’époque, il lui avait été expliqué que la décision avait été « prise après une étude approfondie de son cas ».

Il s’agit de la « première fois » que la cour d’appel de Paris juge que la relation de travail entre un chauffeur VTC et Uber est un contrat de travail, a souligné Me Fabien Masson, du cabinet BNR, défenseur du plaignant.

En décembre 2017, la cour d’appel de Paris avait déjà requalifié le partenariat entre un chauffeur VTC indépendant et la plateforme LeCab en salariat, relevant que l’application « avait le pouvoir de donner des ordres et des directives (au chauffeur), d’en contrôler la bonne exécution ».

Dans la décision rendue jeudi, la cour explique particulièrement qu’« une condition essentielle de l’entreprise individuelle indépendante est le libre choix que son auteur fait de la créer (…), la maîtrise de l’organisation de ses tâches, sa recherche de clientèle et de fournisseurs ». Elle rappelle que le conducteur s’est engagé auprès d’Uber en signant un « “formulaire d’enregistrement de partenariat” », mais aussi en obtenant « sa carte professionnelle de conducteur de voiture de transport avec chauffeur » et en s’inscrivant « au registre Sirene, en tant qu’indépendant ». Or, le plaignant n’a pu se « constituer aucune clientèle propre », possibilité interdite par Uber, et ne fixait « pas librement ses tarifs ni les conditions d’exercice de sa prestation de transport », relève la cour.

D’ailleurs, argumente-t-elle, Uber exerçait bien un « contrôle » sur lui puisque « au bout de trois refus de sollicitations, (le chauffeur reçoit) le message : “Êtes-vous encore là ?” ».

Constamment à disposition

Si un chauffeur veut de se déconnecter, la plate-forme « se réserve le droit de désactiver ou autrement restreindre l’accès ou l’utilisation » de l’application. Cette pratique a « pour effet d’inciter les chauffeurs à rester connectés pour espérer effectuer une course et, ainsi, à se tenir constamment, pendant la durée de la connexion, à la disposition de la société Uber BV, sans pouvoir réellement choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui leur convient ou non », détaille la cour.

A ce titre, elle rappelle que le fait de choisir les horaires et jours de connexion « n’exclut pas en soi une relation de travail subordonnée, dès lors qu’il est démontré que lorsqu’un chauffeur se connecte (…) il intègre un service organisé par la société Uber BV, qui lui donne des directives, en contrôle la réalisation et exerce un pouvoir de sanction à son endroit ».

La Cour de cassation a établi fin novembre pour la première fois un lien de dépendance entre la défunte société de livraison de repas Take Eat Easy et l’un de ses coursiers à vélo.