Victoire éclair des sans-papiers sur le chantier du futur siège du « Monde »

Victoire éclair des sans-papiers sur le chantier du futur siège du « Monde »

Des ouvriers travaillent dans le hall d’entrée du futur siège du Groupe Le Monde, à Paris.
Des ouvriers travaillent dans le hall d’entrée du futur siège du Groupe Le Monde, à Paris. LAURENT THION/Pour Le Monde

Une journée de mobilisation et cinq heures de négociation : c’est le temps qu’il a fallu pour obtenir gain de cause aux 35 travailleurs sans-papiers qui occupaient, jeudi 27 février, depuis 6 heures du matin, le chantier du nouveau siège du Monde. En présence de Louis Dreyfus, président du directoire du Groupe Le Monde, de l’inspection du travail et du syndicat CNT-Solidarité ouvrière (SO), un accord a été conclu entre Golden Clean, société de nettoyage employant ces salariés, dont 12 sur le site du Monde, et un représentant des salariés.

Selon la CNT-SO, l’accord prévoit la remise des bulletins de paie dont ils n’avaient jamais vu la couleur, la mise en conformité des salaires avec la convention collective des entreprises de propreté, la réintégration sur le site de tous les salariés. Golden Clean, en outre, « s’engage à la remise des documents Cerfa » en vue de leur régularisation et à les accompagner dans cette démarche, ajoute le syndicat.

« Tout était en règle »

Alerté de l’intrusion par un gardien, Louis Dreyfus s’est rendu immédiatement sur place. En tant que donneur d’ordre, « on avait vérifié les documents de Golden Clean, on avait fait faire des contrôles inopinés et tout était en règle ».

Sous-traitante du groupe de BTP Eiffage durant la construction, Golden Clean avait recruté ces travailleurs mi-2019 pour nettoyer les bases-vie des ouvriers du chantier. Le contrat de sous-traitance s’étendait « de novembre 2017 à novembre 2019 », indique Eiffage. Quand ce contrat s’est achevé, le bâtiment n’étant pas terminé, ils sont restés pour nettoyer le parvis chaque jour, durant les derniers travaux.

« On travaille 7 jours sur 7, pour 40 euros par jour. Parfois, on travaille la nuit, pour le même prix », dénonce Mohamed-Lamine, 26 ans, venu de Conakry, en Guinée. On a dû acheter nous-mêmes des chaussures de sécurité et des gilets ». « Parfois, le salaire est réglé avec un chèque sans ordre, parfois en espèces », ajoute un autre travailleur. Sans ordre, car ils ont été embauchés en présentant les pièces d’identité d’un proche en règle, un « alias ».

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Mais, vendredi 14 février, c’en était trop. « En plus de leur nuit travaillée, on leur a demandé de faire des heures supplémentaires rémunérées 5 euros de l’heure, indique Etienne Deschamps, juriste du syndicat CNT-SO. Ils ont refusé, alors on leur a dit de ne plus revenir sur le chantier. » « On a ciblé le chantier du Monde », précise M. Deschamps, non pas contre le journal, « mais pour être sûr que cette lutte serait visible ». Les syndicats du quotidien ont apporté leur soutien à cette action, qualifiant de « scandaleuses » les « pratiques » de la société de nettoyage.

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LJD

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