Trois librairies Gibert Joseph placées en liquidation judiciaire

Trois librairies Gibert Joseph placées en liquidation judiciaire

La librairie Gibert Joseph de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire) a été mise en liquidation judiciaire, jeudi 28 mai, par le tribunal de commerce de la ville avec maintien en activité afin de susciter des offres de reprise. Ces dernières devront être déposées le 22 juin au plus tard et une nouvelle audience se tiendra le 25 juin.

Deux autres magasins du groupe, qui a bâti sa réputation sur le livre d’occasion ainsi que sur les manuels scolaires et universitaires, doivent connaître le même sort : celui d’Aubergenville (Yvelines), dont le dossier devait être examiné jeudi après-midi, et celui de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), pour lequel l’audience doit avoir lieu mardi 2 juin.

« Ces magasins sont depuis longtemps en situation déficitaire et, aucune perspective de retour à une situation d’équilibre n’étant possible pour ces points de vente, la direction du groupe Gibert a sollicité la mise en liquidation judiciaire de ces trois librairies », explique au Monde la holding de l’enseigne.

« C’est très violent »

Fermées en raison de la crise sanitaire, les trois librairies n’ont pas rouvert leurs portes le 11 mai. « Nous avons vu le directeur des ressources humaines le 22 mai, témoigne Cécile Le Maire, de la librairie de Chalon-sur-Saône. En moins de deux heures, il nous a expliqué que le magasin allait être liquidé, et les huit salariés licenciés. C’est très violent. » Un scénario identique s’est reproduit à Clermont-Ferrand. « Cela a été un choc », avoue Jean-Philippe Baré, le représentant des quatorze salariés au conseil économique et social (CSE) de cette libraire ouverte en 1942, véritable institution auvergnate. Pour autant, la décision n’a pas été une surprise totale. « Il y a une érosion qui date de plus de dix ans. Les salariés en étaient conscients. »

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La situation du magasin clermontois illustre les mutations rapides du marché du livre d’occasion et de celui du livre scolaire et universitaire. « Le vrai sujet, c’est celui des marketplaces [plates-formes numériques] », explique au Monde Vincent Monadé, le président du Centre national du livre (CNL). Le secteur du livre d’occasion connaît une croissance importante – 15 % du marché du livre en volume, selon M. Monadé –, mais elle est en majorité captée par de grandes plates-formes, comme eBay ou Priceminister-Rakuten. « Faire reposer l’économie d’une librairie physique sur le livre d’occasion, c’est compliqué. Ce type d’activité ne peut être que complémentaire », juge le président du CNL.

« Un changement de modèle »

L’autre pilier du groupe est également attaqué. « Le marché du livre scolaire et universitaire a été très impacté ces dernières années, autant par la gratuité mise en place par vagues successives dans les régions que par la modification du rythme auquel les programmes changent », constate la direction. « L’essor des cours sur tablettes numériques est un facteur supplémentaire impactant de manière négative ce marché », souligne-t-elle encore.

Le sort réservé aux trois librairies de province inquiète la Confédération générale du travail (CGT) des magasins parisiens. « Nous entrons dans un processus qui va concerner tout le monde, y compris à Paris, où il y a des magasins qui coexistent en vivotant », redoute Rémy Frey, de la CGT-Gibert Joseph. « Au-delà des liquidations actuellement en cours se pose la question d’un changement de modèle, d’une réorientation du groupe. »

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LJD

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