Réforme des retraites : « Un changement radical du logiciel managérial »

Réforme des retraites : « Un changement radical du logiciel managérial »

Gouvernance Le nouveau quinquennat promet une réforme de l’âge de départ à la retraite. Le bon sens affirme que si la durée de vie a fortement augmenté, il est naturel que l’âge légal de départ soit retardé d’autant, par exemple jusqu’à 65 ans. Une telle approche néglige néanmoins que l’enjeu véritable est de replacer la retraite dans la manière globale de considérer le travail dans notre société. Prenons trois illustrations.

Les statisticiens Olivier Marchand et Claude Minni ont montré que, depuis des années, la France a fait un choix à l’égard du travail en concentrant l’activité économique sur une génération, celle des 25-54 ans (« Economie et statistique », 2019). La durée de carrière professionnelle a été écourtée non seulement par un âge légal de départ à la retraite plus précoce que dans d’autres pays, mais aussi par une entrée plus tardive des jeunes du fait de l’allongement des études.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Yves Veyrier (Force ouvrière) : « L’urgence est d’empêcher la réforme des retraites »

Cette dernière évolution est à mettre en relation avec la dégradation de l’image des métiers manuels et de l’apprentissage dans notre pays. Pour assurer la pérennité du système des retraites, il faudra donc s’interroger sur les deux bouts de la chaîne et se demander jusqu’à quel point il est soutenable pour l’ensemble de la collectivité que ses membres concentrent leur activité professionnelle sur trente années.

Evolutions de carrière plus lentes

Le choix français a conduit à une intensification du travail sur la tranche 25-54 ans pour obtenir une productivité relativement forte si on compare à d’autres pays développés. Il en a résulté une culture du jeunisme dans les entreprises, considérant qu’au-delà d’un certain âge un collaborateur est à la fois trop coûteux et trop peu adaptable. En 2020, la moitié des plus de 60 ans ne sont pas en activité mais pris en charge soit par l’assurance-chômage, soit par l’Assurance-maladie.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « Les réformes des retraites proposées par le gouvernement sont à haut risque politique, et les principales oppositions à haut risque économique »

L’allongement de l’âge de départ à la retraite obligera à revoir cette conception de la performance individuelle : d’une part, les entreprises devront maintenir et créer de nouveaux emplois pour les seniors ; d’autre part, il faudra reconsidérer les postes et les rythmes de travail pour les adapter à une population de collaborateurs plus âgés ; enfin, il faudra accepter que les évolutions de carrière soient plus lentes, les plus anciens quittant plus tard l’entreprise. Un changement radical du logiciel managérial va s’imposer.

Si on considère le rôle économique que jouent les retraités dans la société, on doit aussi anticiper ce que modifiera un décalage de l’âge de départ.

Il vous reste 29.41% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.