Après Volkswagen, Nissan a, à son tour, annoncé une restructuration massive. Le groupe japonais, dans lequel Renault détient encore une participation de 35,71 %, compte supprimer 9 000 postes sur un effectif de 133 580 à travers le monde. Insistant sur la gravité de la situation, son PDG, Makoto Uchida, qui a succédé à Carlos Ghosn en 2019, veut réduire de 20 % les capacités de production du groupe pour s’adapter à une nette dégradation des ventes. « Nous avons de quoi produire 5 millions d’unités, mais nous en vendons 3,4 millions par an », a-t-il expliqué. Le patron du troisième constructeur japonais et son comité exécutif réduiront leur rémunération mensuelle de moitié, avec effet dès maintenant.
Au dernier trimestre, le groupe accuse une perte de 9,3 milliards de yens (58 millions d’euros ) pour un chiffre d’affaires en recul de 5 % sur un an. Ses prévisions annuelles ont été fortement révisées à la baisse. Le PDG de Nissan veut « réduire ses coûts fixes de 300 milliards de yens [1,8 milliard d’euros] par rapport à l’exercice 2024-2025 et ses coûts variables de 100 milliards de yens », sans couper dans les dépenses de recherche et développement. Il a créé un nouveau poste de patron de la performance, confié au français Guillaume Cartier, jusqu’alors responsable de Nissan Europe.
Le constructeur est pris à revers sur deux grands marchés, qui pourraient être les premiers concernés par les restructurations : en Chine, où face aux constructeurs locaux en pointe sur l’électrique, ses ventes ont baissé de 13 % au dernier trimestre, et aux Etats-Unis, où il n’a pas anticipé la hausse de la demande de voitures hybrides ou hybrides rechargeables.
« Nous sommes trop lents »
Ni le Japon ni l’Europe, marché plus petit pour Nissan, ne permettent d’inverser la tendance. « Nous sommes trop lents pour répondre aux demandes du marché », a assumé Makoto Uchida. Les menaces de Donald Trump d’instaurer de nouveaux droits de douane créent par ailleurs une incertitude pour l’usine mexicaine.
Les déboires du groupe de Yokohama sont une mauvaise nouvelle pour Renault, qui cède progressivement sa participation. Depuis le début de l’année, l’action Nissan a perdu 27 % de sa valeur. Après la reconfiguration de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, en février 2023, le constructeur français a toutefois beaucoup desserré ses liens avec son partenaire japonais. Nissan s’est alors rapproché de Honda pour travailler sur la voiture électrique. Il va par ailleurs réduire sa participation dans Mitsubishi Motors de 34 % à 24 % pour dégager de la trésorerie.
Un CDI spécifique conçu pour les personnes très éloignées du marché du travail : un dispositif expérimental d’emploi à « temps partagé » a été prolongé mercredi 6 novembre par un vote du Parlement, malgré les craintes du secteur de l’intérim.
« Contrat de travail à temps partagé à des fins d’employabilité », plus communément appelé « CDI-FE ». Ce dispositif méconnu, lancé en 2018 à titre expérimental, a été prolongé pour quatre ans par un ultime vote du Sénat.
Dévolu à un public bien précis, en voie d’insertion ou de réinsertion (jeunes, seniors, chômeurs longue durée…), ce type de contrat permet à un salarié d’être embauché par une entreprise spécialisée dans le travail partagé, qui peut ensuite le mettre à disposition d’autres structures en vue de l’exécution de missions.
L’expérimentation du CDI-FE ayant pris fin en 2023, la proposition de loi du député MoDem Nicolas Turquois, adoptée à l’identique en janvier à l’Assemblée nationale, entend la relancer pour quatre ans, tout en réajustant son périmètre. « Proposer une pérennisation du CDI-FE en l’état aurait été imprudent. Abandonner l’expérimentation aurait été un gâchis », a résumé la ministre déléguée aux personnes handicapées, Charlotte Parmentier-Lecocq, favorable au texte.
« Vent debout »
Plusieurs parlementaires ont tout de même relevé la « controverse » entourant ce dispositif en raison des difficultés à l’évaluer : seuls 5 000 CDI-FE auraient été signés depuis 2018, selon un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) datant de 2023, mais publié seulement ces derniers jours.
Le secteur de l’intérim est vent debout contre ce contrat spécifique. Dans une lettre envoyée aux sénateurs mardi soir, consultée par l’Agence France-Presse, la plupart des syndicats du secteur ont ainsi épinglé les « avantages » du dispositif, qui « le rendent très attractif pour les entreprises utilisatrices et susceptible de déstabiliser » les salariés disposant d’un autre type de contrat, le CDI intérimaire (CDII).
La gauche, minoritaire au Sénat, a repris à son compte ces arguments, la socialiste Monique Lubin dénonçant « un coup de canif porté au droit du travail pour satisfaire à des politiques managériales discutables ».
La droite et les rangs centristes ont au contraire défendu ce modèle, qui « offre des souplesses aux entreprises dans un environnement économique incertain », selon la sénatrice Les Républicains Frédérique Puissat. Cette dernière s’est voulue rassurante sur le texte voté par le Parlement, qui resserre les critères d’éligibilité pour « mieux cibler » les publics concernés et renforce les droits des salariés par rapport à l’expérimentation initiale.
Le couperet est tombé. Le fabricant de pneumatiques Michelin a annoncé mardi 5 novembre à neuf heures aux salariés des usines de Cholet (Maine-et-Loire) et Vannes (Morbihan) l’arrêt de la production sur ces sites « au plus tard début 2026 ». Avant leur fermeture, l’entreprise s’engage à aider les 1 254 employés – 955 à Cholet, 299 à Vannes – à retrouver un emploi pérenne.
Compte tenu de l’âge des salariés, il n’y aura pas beaucoup de préretraites, indique la direction. Depuis le 16 octobre, l’intersyndicale de Michelin, agacée par le silence des dirigeants sur l’avenir de ces usines au ralenti, s’était retirée de toutes les réunions de travail du groupe.
Comment Florent Menegaux, le président de Michelin, en est-il arrivé à cette décision ? « Nous avons cherché, mais nous n’avons pas trouvé d’alternative pour ces deux sites, explique-t-il au Monde. Nous avons en revanche trouvé une possibilité pour viabiliser encore quelque temps l’activité à Joué-lès-Tours. » Le patron de Clermont-Ferrand ne s’engage pas à long terme. Depuis la pandémie de Covid-19, puis la guerre en Ukraine, « la seule ligne stable chez Michelin, c’est que ça bouge en permanence », prévient-il.
Marché atone
Les difficultés s’expliquent par un marché automobile atone mais aussi et surtout par la concurrence asiatique. Le site de Cholet, spécialisé dans les pneus pour camionnettes et SUV, a été un temps soutenu par les exportations, « mais en cinq ans, sa compétitivité s’est dégradée », estime le dirigeant. « Pour qu’il monte en gamme et produise des pneus plus larges, il aurait fallu changer tout l’outil de production, mais d’autres sites du groupe déjà équipés étaient sous-chargés », poursuit M. Menegaux. Sur ce segment des pneus pour camionnettes et poids lourds, Michelin a déjà annoncé, fin 2023, la fermeture de trois usines en Allemagne, une en Pologne et même deux en Chine.
« En 2019, nos coûts de production en Asie étaient de 100, tandis qu’ils étaient de 140 en Europe et 135 en Amérique, détaille le patron, toujours un peu technique. En 2024, ces mêmes coûts sont toujours de 100 en Asie, alors qu’ils sont passés à 195 en Europe et 190 en Amérique. Aujourd’hui l’Europe est deux fois plus chère que la Chine, au sein du groupe Michelin. Elle l’était même quatre fois avant la baisse du prix de l’électricité. Les gains de productivité ne permettent pas de compenser une telle différence. » Pour les constructeurs automobiles, le prix de l’énergie pèse assez peu dans le coût de revient, mais pour une société comme Michelin, qui transforme la matière en la chauffant, c’est essentiel.
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Il aura fallu plus de sept semaines de grève pour parvenir à un accord et mettre un terme à un conflit géant par sa durée et son coût. Les 33 000 ouvriers des deux usines historiques de Boeing autour de Seattle (Etat de Washington) ont voté, lundi 4 novembre, en faveur de l’accord proposé par leur organisation, l’IAM District 751, la branche locale du Syndicat des machinistes.
Les grévistes ont obtenu une hausse de 38 % de leurs rémunérations étalée sur quatre ans. Une augmentation très proche des 40 % qu’ils réclamaient depuis le démarrage du conflit ; une revendication exigée sans faiblir pour compenser les effets de l’inflation et calquée sur les revalorisations obtenues par les pilotes de plusieurs grandes compagnies américaines telles Delta Air Lines, United Airlines et American Airlines.
En revanche, les grévistes n’ont pas réussi à faire plier la direction de l’avionneur américain pour obtenir le rétablissement de leur système de retraite maison, abandonné depuis une dizaine d’années. Il a été remplacé, depuis 2014, par un dispositif de pension par capitalisation bien moins favorable pour les pensionnés et surtout beaucoup plus coûteux pour les cotisants. Pour obtenir le feu vert des salariés, la direction avait dû aussi consentir à une prime annuelle de 12 000 dollars (11 000 euros) et prendre l’engagement de construire son prochain avion dans les deux usines d’Everett et de Renton, dans la banlieue de Seattle.
« Retrouver l’excellence »
Le conflit a été très rude pour les salariés, qui ne percevaient que 250 dollars par semaine, certains même dépendaient des banques alimentaires pour survivre. « La grève va prendre fin et il nous appartient maintenant de reprendre le travail et de commencer à construire les avions, d’augmenter les tarifs et de ramener cette entreprise sur la voie de la réussite financière », s’est pourtant félicité Jon Holden, président de l’IAM District 751. Il n’empêche, le vote des 33 000 salariés sonne comme un désaveu pour le syndicat, qui avait, auparavant, validé deux précédentes moutures d’accord rejetées massivement par les grévistes.
Kelly Ortberg, le président-directeur général de Boeing, nommé en août, s’est dit « heureux » de mettre fin au conflit social. Une sortie de crise qui ne signifie toutefois pas la fin de tous les problèmes auxquels l’avionneur est confronté depuis plusieurs années maintenant. « Il y a beaucoup de travail à accomplir pour retrouver l’excellence qui a fait de Boeing une entreprise emblématique », a ainsi ajouté le nouveau patron du groupe.
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C’est un nouvel exemple des difficultés du secteur de l’industrie automobile et des équipementiers, confronté à des plans sociaux en cascade : l’équipementier allemand Schaeffler a annoncé, mardi 5 novembre, la suppression de 4 700 emplois en Europe, ainsi que la fermeture de deux sites.
« Il s’agit de la réponse de l’entreprise à l’environnement de marché difficile, à la concurrence mondiale croissante et à la transformation en cours, en particulier dans l’industrie des équipementiers automobiles », a expliqué, dans un communiqué, le groupe, spécialiste des roulements pour l’industrie automobile.
L’annonce survient un mois après sa fusion avec l’équipementier Vitesco, fabricant de transmissions, dont Schaeffler avait prévenu qu’elle entraînerait des suppressions d’emplois. Ce plan d’économies correspond à 3 % de la masse salariale du groupe, qui emploie 120 000 personnes depuis la fusion. Il devrait permettre de réduire les coûts d’environ 290 millions d’euros par an d’ici à la fin de 2029.
Le nouveau groupe, présent dans cinquante-cinq pays, compte aussi délocaliser une partie de sa production, a-t-il annoncé mardi. Les réductions d’effectifs toucheront principalement dix sites en Allemagne et cinq autres en Europe, entre 2025 et 2027.
Le secteur de l’industrie automobile et des équipementiers est en proie à une crise, déclenchée par la baisse des ventes de voitures – notamment en Europe et en Chine, le marché principal des fabricants européens –, et par l’affaiblissement des ventes de véhicules électriques, dont le développement a requis des investissements massifs de la part des industriels.
Après les plans sociaux des plus gros équipementiers Bosch, ZF et Continental, le groupe Volkswagen, numéro un en Europe des constructeurs automobiles, a créé le choc en annonçant au début de septembre des projet de suppressions massives d’emplois en Allemagne et en menaçant de fermer des usines.
« Du dépit et de la tristesse pour les familles touchées », pour Gilles Martin, délégué syndical central de la CFDT d’Auchan France. « Du dégoût, de la colère, de la surprise face à l’ampleur des annonces », pour Franck Martinaud, délégué Force ouvrière d’Auchan Retail France, qui s’attendait à des réductions d’effectifs, « mais pas à ce point-là ». Les représentants du personnel étaient sous le choc, mardi 5 novembre, lorsque la direction du cinquième acteur en France de la grande distribution leur a annoncé les contours du plus gros plan social de son histoire. Fermeture de magasins et d’entrepôts, réorganisation des hypermarchés, fusion des services d’appui… Le nouveau plan stratégique pour renouer avec la rentabilité d’Auchan, qui emploie 54 000 salariés en France, engendrera la suppression de 2 389 postes. Soit 2070 suppressions nettes, en comptant la création de 319 postes.
« C’était un peu écrit d’avance », persifle un distributeur concurrent au regard des points faibles du groupe nordiste : « Un modèle de l’hypermarché en déclin, source de charges élevées, et une place importante de la Russie, un marché extrêmement rentable. » Cet équilibre avait permis pendant des années d’éponger les pertes de l’activité en France. Mais la cession de ses activités en Russie étant engagée, il devenait urgent pour l’enseigne alimentaire de la famille Mulliez de s’attaquer au redressement de ses activités françaises, pour ne pas subir le même sort que son concurrent Casino. Car Auchan, présent dans 12 pays, n’a cessé de perdre des parts de marché en France, passant de 11,3 % à 9,1 % (en incluant les magasins Casino rachetés cette année) en dix ans, quand E.Leclerc grimpait de 19,9 % à 24,1 %.
Année après année, les comptes se sont enfoncés dans le rouge. Au premier semestre, la chute du chiffre d’affaires a atteint 4,7 % en France (après un recul de 2,7 % en 2023), et 3,3 % sur l’ensemble du groupe (hors pays en guerre). Fin juillet, l’entreprise justifiait ces chiffres par une concurrence « mieux positionnée en matière de prix et de formats » et par un « phénomène de déconsommation » qui touche davantage « les hypermarchés (– 5,2 %), plus exposés aux produits non alimentaires » que « les supermarchés (– 1,6 %) ». Des résultats qui ont débouché sur une perte de près de 1 milliard d’euros pour sa maison mère ELO. « Depuis quinze ans, Auchan n’a fait que des mauvais choix, résume Christophe Foucaut, délégué syndical CGT de l’hypermarché d’Englos (Nord). On a eu 20 directeurs en vingt-deux ans, qui n’ont même pas eu le temps de déployer leur stratégie. A chaque fois on espère et à chaque fois l’entreprise va de plus en plus mal. »
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L’interrogation critique du gouvernement revient comme un leitmotiv dès qu’une grande entreprise annonce un plan social : qu’avez-vous fait des aides de l’Etat ? Le premier ministre, Michel Barnier, l’a reprise, mardi 5 novembre, lors de la séance des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, quelques heures après les annonces de 2 389 licenciements par Auchan et de la fermeture par Michelin des usines de Cholet (Maine-et-Loire) et de Vannes, qui emploient 1 254 salariés.
« Je ne suis pas fier d’une politique qui détruirait des emplois, jamais, a lancé M. Barnier. J’ai le souci de savoir ce qu’on a fait dans ces groupes de l’argent public qu’on leur a donné (…). Et donc nous allons poser des questions et nous verrons si cet argent a été bien ou mal utilisé, pour en tirer les leçons. » Se disant « en désaccord » avec le plan de Michelin, il a précisé avoir rencontré son PDG, Florent Menegaux, qui justifie la décision par l’« effondrement de l’activité » sur le marché hyperconcurrentiel des pneumatiques.
Le gouvernement attend une mobilisation des deux entreprises, avec les élus locaux et les syndicats, pour trouver des solutions de reconversion. M. Menegaux a indiqué que « chacun [serait] accompagné individuellement jusqu’à ce qu’il retrouve un emploi ». Ce que le géant du pneumatique affirme avoir fait en Vendée, en 2019, lors de l’arrêt du site de La Roche-sur-Yon, où la quasi-totalité des salariés avait, selon lui, retrouvé un emploi. Même si Auchan (groupe Mulliez) n’a pas pris de tels engagements, il ne s’agit pas d’un « projet de décroissance », a assuré son directeur général, Guillaume Darrasse.
Avec Michelin, Michel Barnier se retrouve dans la situation de son lointain prédécesseur, le socialiste Lionel Jospin, en 1999. En réponse à l’annonce de 7 500 licenciements en Europe, le chef du gouvernement avait alors prévenu qu’«il ne [fallait] pas tout attendre de l’Etat ». Il ajoutait : « Je ne crois pas qu’on puisse administrer désormais l’économie. Ce n’est pas par la loi, les textes, qu’on la régule. » Une conviction qui était très mal passée à l’époque au sein de la gauche plurielle.
Atonie globale de la demande
L’efficacité des dirigeants politiques est régulièrement remise en question quand interviennent des plans sociaux d’une telle ampleur, et ces annonces concomitantes d’Auchan et de Michelin vont relancer l’inquiétude d’une détérioration du marché de l’emploi en France.
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Et si la célèbre aiguille du New York Times restait immobile ? Et si le compteur peaufiné depuis des mois en vue de ce 6 novembre pour permettre à ses millions de lecteurs de suivre le résultat de l’élection présidentielle américaine se trouvait grippé ? Mardi 5 novembre dans l’après-midi, en effet, la grève illimitée lancée la veille par les salariés des métiers technologiques du quotidien se poursuivait alors que l’actualité électorale s’apprêtait à s’accélérer.
The New York Times a mobilisé « plus de cent reporters, photographes, vidéastes et data journalistes » à travers le pays pour couvrir et analyser les résultats du scrutin, se félicite le journal sur son site Internet, qui ne laisse transparaître aucune perturbation.
« Nous savons que c’est un jour de grève difficile pour nos membres, déclarait le syndicat sur son compte X, mardi, à 13 heures (heure de Paris), mais nous voulons être clairs : nous sommes ici à cause des décisions de la direction du New York Times. » Celle-ci, affirme la New York Times Guild, le principal syndicat de travailleurs de la technologie du journal, refuse d’accéder aux demandes de revalorisations salariales et d’amélioration des conditions de travail posées par les grévistes.
Des négociations ont cependant été menées jusqu’à dimanche soir. « Les points d’achoppement de ces derniers jours concernaient la possibilité pour les travailleurs d’obtenir une clause de “juste cause” dans leur contrat (ce qui signifie qu’ils ne peuvent être licenciés que pour mauvaise conduite ou pour une autre raison de ce type) ; les augmentations de salaire et l’équité salariale ; et les politiques de retour au bureau », révèle un article paru sur le site du quotidien. Il y est également avancé que la direction a informé, par mail, l’ensemble des salariés de ses diverses propositions : « une augmentation salariale annuelle de 2,5 %, une augmentation minimale de 5 % pour les promotions et une primede 1 000 dollars ». Elle persiste à exiger deux jours de présence par semaine au bureau jusqu’en juin, et l’autorisation de « travailler entièrement à distance pendant trois semaines par an ».
Préavis déposé depuis plusieurs mois
Selon le syndicat, 95 % de ses adhérents (600 personnes – ingénieurs logiciels, chefs de produits, etc. – concourant au fonctionnement du site Internet et de l’application) ont voté la grève « pour un salaire équitable (…) et un travail flexible à distance », alors que le préavis déposé depuis plusieurs mois aurait pu permettre d’éviter cette situation de blocage.
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« J’ai une commune de 1 100 âmes et bientôt une friche industrielle de 10 000 mètres carrés. J’en fais quoi ? » Le 24 octobre, le groupe LDC (Le Gaulois, Loué, Marie et, depuis peu, Pierre Martinet) a annoncé à son comité social et économique (CSE) la fermeture de l’abattoir de dindes de Blancafort (Cher) le 31 mars 2025. Son maire, Pascal Margerin (sans étiquette), est furieux : « Ils ont pris les salariés pour des moins-que-rien en leur proposant des primes de licenciement méprisables ».
Une vingtaine d’entre eux sont installés dans la commune, la majorité dans un rayon de 25 kilomètres. Il leur faudra partir loin, avec leur famille, pour trouver du travail ailleurs tant le territoire s’enfonce rapidement dans la désindustrialisation. « Les deux autres usines de notre bassin fabriquent des pièces pour des chaudières à fioul dont le pays ne veut plus ou des pièces de moteurs de F1 pour un constructeur qui va quitter la compétition », résume l’édile.
Racheté en 2012 ans à la société Doux par le groupe sarthois LDC, l’abattoir de Blancafort a tué jusqu’à 70 000 dindes par semaine et employé 240 personnes. Puis la production a décliné, en partie à cause de la concurrence étrangère et de l’appétit croissant des Français pour le poulet. En 2023, il a ainsi représenté 80 % de la demande de volailles. « La consommation de dindes en France a reculé de 42 % en vingt ans, explique un porte-parole de LDC. En dépit d’un investissement de 14,5 millions d’euros depuis 2015, l’activité a entraîné des pertes de 31 millions d’euros, dont 9 millions sur la seule année [2023]. Malgré la recherche de solutions alternatives, la poursuite du travail est économiquement impossible. »
La cadence actuelle du site est de 20 000 dindes par semaine, traitées par 119 ouvriers. Un métier pénible, payé un peu au-dessus du smic grâce aux primes, de froid notamment. LDC a rejeté l’hypothèse d’une conversion de l’abattoir vers le poulet. « S’ils devaient se doter d’un abattoir à poulets, ils nous disent que ça serait pour pouvoir traiter 500 000, voire 1 million d’animaux par semaine, à l’image des abattoirs allemands ou néerlandais. C’est infaisable par ici », souligne un salarié membre du CSE. La crainte d’une délocalisation est perceptible, d’autant plus que, le 1er août 2024, LDC a officialisé le rachat d’Indykpol, leader du marché de la dinde en Pologne, propriétaire de fermes et d’usines de transformation et fort de 1 000 salariés.
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Les ouvriers grévistes de Boeing ont accepté, lundi soir 4 novembre, un nouveau projet d’accord social. Après avoir rejeté deux offres, l’IAM-District 751, branche de l’Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale (IAM), le syndicat des machinistes, a affirmé avoir approuvé à 59 % l’accord prévoyant une hausse salariale très proche de ses revendications, mais pas le rétablissement de l’ancien dispositif de retraite.
Cet accord met fin à un débrayage de plus de sept semaines, qui a coûté plus de 10 milliards de dollars à l’entreprise et ses fournisseurs, et offre un répit au nouveau directeur général de Boeing, Kelly Ortberg. Plus de 33 000 employés de la région de Seattle, dans le nord-ouest des Etats-Unis, vont ainsi retourner dans deux usines d’assemblage majeures.
« La grève va prendre fin et il nous appartient maintenant de reprendre le travail et de commencer à construire les avions, d’augmenter les tarifs et de ramener cette entreprise sur la voie de la réussite financière », a déclaré Jon Holden, le président de l’IAM-District 751, lors d’une conférence de presse. « Je suis fier de nos membres », a-t-il ajouté. « Ils ont accompli beaucoup de choses et nous sommes prêts à aller de l’avant. »
Les ouvriers affectés à la production de l’appareil phare de Boeing, le 737 MAX, ainsi qu’aux 767 et 777, étaient en grève depuis le 13 septembre.
Le projet annoncé comporte une hausse salariale de 38 % sur les quatre ans de l’accord social. Le syndicat réclamait 40 %. De nombreux employés espéraient aussi le rétablissement du dispositif avec pension de retraite à montant garanti − 42 % des syndiqués actuels en disposaient –, supprimé par un accord social en 2014 au profit d’un dispositif par capitalisation.
Joe Biden félicite le syndicat
« Je pense que Boeing peut faire mieux. Ils peuvent nous rendre notre retraite et faire davantage en termes d’équilibre entre travail et vie personnelle », réagissait ainsi vendredi Mike Corsetti, inspecteur qualité depuis treize ans. Mais pour Boeing, ce rétropédalage est inconcevable car « excessivement cher ». Kelly Ortberg, patron du groupe depuis août, s’est dit « heureux » qu’un accord ait été trouvé.
« Les mois écoulés ont été difficiles pour nous tous, mais nous faisons partie de la même équipe », a-t-il déclaré dans un message adressé aux employés. Il a évoqué « l’importance de ce moment pour notre histoire et pour les générations futures ». « Il y a beaucoup de travail à accomplir pour retrouver l’excellence qui a fait de Boeing une entreprise emblématique. »
D’après le cabinet Anderson Economic Group, il s’agit de la plus coûteuse grève de ce siècle aux Etats-Unis avec plus de 11,56 milliards de dollars d’impact direct depuis le 13 septembre, dont 6,5 milliards de manque à gagner pour Boeing et 2,87 milliards pour ses fournisseurs.
Le président des Etats-Unis, Joe Biden, a « félicité » le syndicat et la firme « d’être parvenus à un accord qui reflète le dur labeur et les sacrifices des 33 000 machinistes » et mentionné aussi le soutien de son équipe économique. « Au cours des quatre dernières années, nous avons démontré que la négociation collective fonctionne. Les bons accords profitent aux travailleurs, aux entreprises et aux consommateurs et sont essentiels à la croissance de l’économie américaine », a-t-il encore déclaré, à la veille de l’élection présidentielle.
Quatrième offre
Il s’agit de la quatrième offre de Boeing depuis le début de septembre, mais la troisième soumise au vote des membres. La première, rejetée le 12 septembre par près de 95 % des syndiqués, qui ont aussi voté une grève immédiate, prévoyait une hausse de 25 %. Boeing a ensuite proposé 30 %, puis 35 % et, finalement, 38 %. Le groupe a également rétabli une prime annuelle (4 % du salaire annuel), augmenté la prime de ratification (de 3 000 à 12 000 dollars, 2 750 à 13 000 euros) et accru la contribution au plan de retraite par capitalisation.
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Il a maintenu son engagement à fabriquer son prochain avion – attendu pour 2035 – dans la région de Seattle, berceau de Boeing, ce qui représente une garantie de dizaines de milliers d’emplois pour plusieurs décennies.
Les grévistes, sans assurance santé depuis la fin de septembre, percevaient 250 dollars par semaine du syndicat, depuis la quatrième semaine de grève, et certains dépendaient des banques alimentaires pour tenir le coup.
Les dirigeants syndicaux avaient recommandé la ratification de la première offre, arguant n’avoir aucune garantie d’obtenir davantage avec un débrayage, mais ils s’étaient abstenus pour le deuxième vote (rejet à 64 %).
La fin de la grève est cruciale pour Boeing, en grandes difficultés financières car le débrayage paralyse les deux usines produisant le 737 MAX – son avion vedette –, le 777, le 767 et plusieurs programmes militaires. Les clients de Boeing attendaient aussi la résolution du conflit social. Michael O’Leary, patron de Ryanair, a estimé sur CNBC que les retards de livraison et de certification (737 MAX 7 et 10) vont le priver de quinze millions de passagers en 2024 et 2025.
Plusieurs semaines devraient désormais être nécessaires pour relancer complètement les chaînes de production, dans un contexte délicat pour Boeing. Le syndicat a déclaré que les ouvriers pouvaient reprendre leurs activités dès mercredi et qu’ils seraient tous de retour en poste le 12 novembre au plus tard. Boeing a toutefois prévenu au préalable que certains employés devront à nouveau recevoir une formation, du fait du laps de temps qui s’est écoulé pendant la grève.
D’après des analystes, la grève a représenté pour Boeing un manque à gagner d’environ 100 millions de dollars par jour. La situation a poussé le groupe à procéder à une importante levée de fonds auprès d’investisseurs la semaine dernière.