Une action d’enchantement entre entrepreneurs et chercheurs dans le Forum BIOTechno

A l’accès, l’affiche annonce un atelier « jeux de rôle », qui peut paraître occasionnel dans un très sérieux Forum BIOTechno consacré à soutenir les étudiants en biologie à adopter une carrière. En poussant la porte, on aperçoit plusieurs jeunes gens, âgés de 25 à 30 ans, tous sur leur trente et un, exceptionnellement accumulés, maniant un langage pas forcément accessible pour le commun des mortels, où l’on capte qu’il est question de « paillasses », de « patents » ou de « biomarqueurs ». Ici ce ne sont pas des luttes ou des grands faits historiques que l’on simule, mais des entretiens d’embauche. Et c’est dans la peau de recruteurs et de candidats qu’on se glisse.

Ces jeunes font partie de l’embellissement de l’université française dans le domaine de la biologie. Ils sont doctorants (en cours de thèse), docteurs (titulaires d’un doctorat, bac + 8) ou postdocs (jeunes chercheurs diplômés, recrutés en CDD dans un laboratoire de recherche). Ils parviennent de consacrer trois années ou plus de leur vie à la recherche scientifique. Mais s’ils sont dans cette pièce en ce vendredi de juin, c’est qu’ils envisagent, comme disent certains, de « passer du côté obscur » : quitter le monde académique – parcours considéré comme classique, menant à des carrières de chercheur et d’enseignant – et entrer dans celui de l’entreprise.

Pour cela, ils doivent apprendre à « se vendre », et ce n’est pas une évidence. « Les doctorants et docteurs sont extrêmement capés, ce sont de vrais spécialistes de leurs thématiques de recherche, explique Charlène Planchenault, animatrice de cet atelier et consultante chez Kelly Scientifique, un cabinet de recrutement. En revanche, ils ne vont pas naturellement mettre en avant leurs compétences transversales, tout simplement parce qu’ils n’en sont absolument pas conscients. Alors qu’en trois ans ou plus de doctorat ils ont acquis d’énormes qualités, surtout en gestion de projet et en recherche de partenaires. On leur apprend à s’en prévaloir face aux recruteurs. »

« Les années de thèse sont actuellement considérées comme de réelles expériences professionnelles. » Charlène Planchenault, animatrice de cet atelier et consultante chez Kelly Scientifique

Perles rares

Depuis plusieurs années, la cote des bac + 8 a éclaté sur le marché du travail. Eux que les entreprises ont souvent vus comme des rats de laboratoire inadaptés aux contraintes du privé sont aujourd’hui de plus en plus recherchés. « Ce sont vraiment des profils très complets, très autonomes et très créatifs, assure Charlène Planchenault. Les années de thèse sont actuellement considérées comme de réelles expériences professionnelles. »

Les employeurs potentiels viennent donc complimenter les docteurs dans les événements qui leur sont simulés. Au Forum BIOTechno, entre les ateliers de CV et d’entretiens et les tables rondes sur les différents métiers abordables, une dizaine d’entreprises ont décidé d’investir dans des stands – payants – pour avoir accès à ces perles rares. Les deux cofondateurs de Neoplants, « jeune pousse » en biologie synthétique des plantes, attardent bien y recruter plusieurs de leurs futurs assistants. « Nous allons embaucher six personnes, dont quatre docteurs, explique Patrick Torbey, lui-même docteur de l’Ecole normale supérieure. C’est un vrai choix stratégique. Ils sont les meilleurs pour innover, pour résoudre des problèmes qui n’ont jamais été résolus jusque-là. Et ils sont très curieux, y compris dans les domaines qui ne sont pas les leurs. »

« Quand on crée une petite entreprise, on passe son temps à devoir dénouer des problèmes, augmente son associé Lionel Mora. Or 90 % du temps d’une thèse consiste à être apprécié à des embûches. Ça a une valeur inappréciable ! Mais tout le monde n’est pas adapté au monde de l’entreprise. Les expirations sont beaucoup plus agressives, ce n’est pas la même gestion du temps. Moi qui ne suis pas issu de ce milieu, ça m’a toujours fasciné de voir à quel point les chercheurs ont besoin de temps pour lire de la bibliographie et pour penser, tout simplement. Il faut juste réussir à combiner cela avec la réalité du privé. »

Nouvelle esprit

L’intérêt est mutuel. Ce jour-là, les jeunes chercheurs font la queue, CV en main, discours de motivation en tête, pour tenter de séduire ces employeurs potentiels. Maya (les prénoms ont été changés à la demande des intéressés), qui a effectué sa thèse sur le diagnostic des maladies infectieuses il y a cinq mois, s’en développe : « Je veux changer le monde, participer à l’innovation concrète, faire des découvertes qui vont agiter la vie des gens. Et je ne pense pas que ce soit dans l’académique que je peux y arriver. On perd trop de temps avec toutes les contraintes administratives et de publications. C’est dans le privé qu’on a effectivement les moyens et le contexte propices à la découverte. Mais, attention, pas n’importe quel privé ! Je suis très attachée à l’éthique, je ne veux pas être une machine à produire de l’argent. »

Pour Allan, spécialisé dans les prothèses, ce sont des attentions réalistes qui ont guidé son choix : « En poursuivant dans l’académique, je me préparais à quatre, dix, voire quinze ans de CDD, d’incertitude, de précarité et de pression avant, peut-être, d’obtenir un poste. Ce n’est pas ma conception de l’existence. J’adore la science et la recherche mais ce n’est pas toute ma vie. Je veux édifier une famille, profité et non m’imposer encore des années de sacrifices. Et je pense qu’on peut faire un travail tout aussi passionnant en entreprise. Evidemment, je ne vais pas me précipiter. Je choisirai le poste qui me fera vibrer. »

Parmi les ateliers les plus affectionnés, ceux de l’Association Bernard Gregory (ABG), qui conduit les docteurs dans leurs évolutions de carrière depuis près de quarante ans. Et a vu apparaître, ces dernières années, ce nouvel esprit. « Pendant longtemps, le renoncement à une carrière académique était considéré comme un échec, reconnaît Vincent Mignotte, directeur d’ABG. Actuellement, le privé n’est plus forcément un choix contraint. Certains débutent même leur thèse en sachant déjà qu’ils ne resteront pas dans la recherche fondamentale. Ils sont de plus en plus conscients des débouchés captivants qui peuvent exister dans le monde de l’entreprise. C’est évidemment le cas pour les sciences dures et naturelles, mais également pour les sciences humaines et sociales. Par exemple, pour le développement de la voiture autonome ou des objets connectés, on a besoin de sociologues et d’anthropologues pour travailler sur les réactions de la population. »

Sarah doit entretenir sa thèse d’immunologie à la fin de l’année et sait depuis plus d’un an qu’elle rejoindra ensuite le secteur privé. Mais elle redoute d’informer son directeur de thèse…

Reste à persuader les plus récalcitrants : les encadrants des jeunes chercheurs. Sarah doit entretenir sa thèse d’immunologie à la fin de l’année et sait depuis plus d’un an qu’elle rejoindra ensuite le secteur privé. Mais elle redoute de prévenir son directeur de thèse : « Deux de mes camarades ont été transparents avec leurs directeurs. Ceux-ci, bien plus âgés, avec une mentalité “à l’ancienne”, ont été rebutés par ce choix et se sont totalement désintéressés d’eux pour la fin de leur doctorat. Ça a été très violent. J’admire beaucoup mon encadrant et je ne veux vraiment pas le décevoir. L’informer va être une épreuve. Rien que d’y penser, j’ai une boule au ventre ! Mais je ne peux quand même pas choisir ma carrière en fonction de lui… »

Le changement de l’assurance-chômage va augmenter le sentiment d’inquiétude des travailleurs

Frédéric Guzy, professionnel des ressources humaines, développe que le retour des chômeurs à l’emploi tient plus à l’accès à la propriété qu’à la limitation des conditions d’allocation.

Le premier ministre et la ministre du travail ont montré, lei 18 juin, les fondements de la modification de l’assurance-chômage. C’est le troisième volet de la transformation de modèle social retenu en 2017 par le gouvernement après les ordonnances travail et la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ». L’objectif affiché est de admettre aux entreprises de s’ajuster aux évolutions de leurs marchés, et aux salariés de se préparer aux ruptures approches dans leur parcours professionnel simultanément un haut niveau d’employabilité.

De façon schématique, l’amélioration présentée par le gouvernement pressent qu’il sera plus complexe de rentrer dans le régime de rémunération et plus rapide d’en sortir. En clair, moins de personnes bénéficieront d’une indemnisation. Cette situation aura pour effet de renforcer, aux yeux des salariés, la sensation d’insécurité lié aux ruptures de carrière. Les mesures regardant les cadres ne vont pas non plus inciter à la mobilité professionnelle…

Une étude effectuée par Harris Interactive fin 2018 confirmait qu’une majorité des actifs de moins de 40 ans spécifieraient conserver le même employeur durant leur carrière. La mutation d’employeur et/ou de métier fait souvent peur. Une autre étude menée par BVA exposait que 89 % des salariés considéraient qu’il était difficile de se reconvertir après 45 ans.

L’équilibre comme un obstacle

Les DRH savent bien que l’envie légitime de stabilité est souvent un obstacle majeur aux politiques de reconduction des dynamismes. Dans un monde où un modèle de carrières à ruptures multiples se substitue à celui du métier unique dans la même entreprise, les instruments de rémunération prévus par le gouvernement éprouvent donc d’accroître le sentiment d’insécurité des salariés.

Le système de bonus-malus, quant à lui, a pour objectif de disputer contre la précarité. Bien sûr, si ce système encourage les entreprises à procéder en faveur de la qualification et de l’employabilité des salariés en contrats momentanés, alors il sera utile, nous sommes en droit de l’espérer. Néanmoins, empêcher les entreprises d’utiliser des contrats momentanés n’est pas une fin en soi.

Ces emplois admettent à des salariés peu ou pas qualifiés de subsister connectés du travail. Il serait paradoxal que cette mesure limite le nombre de contrats passagers sans admettre à leurs bénéficiaires d’atteindre à un emploi plus stable, c’est-à-dire souvent plus qualifié.

Parité femmes-hommes : La ministre du travail averti 200 entreprises de punitions

La ministre du travail a certifié dimanche que 200 entreprises nécessitent encore remplir leur devoir légale de proclamer un index sur l’égalité, faute de quoi elles seront punies.

Plus de 200 entreprises traînent des pieds face à leurs nouvelles obligations en matière d’égalité femmes-hommes. Alors que la loi contraint depuis le 1er mars les structures de plus de 1 000 salariés de publier un index de l’égalité professionnelle, « on a 1 130 entreprises sur les 1 340 concernées » qui n’ont pas respecté cette obligation, a témoigné dimanche, Muriel Pénicaud, lors du « Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro ».

« D’ores et déjà, pour ceux qui n’ont pas répondu, dans les entreprises de plus de 1 000 salariés, l’inspection du travail et la direction générale du travail sont en train de les contacter. S’ils ne se conforment pas très vite, ils vont être mis en demeure et ils pourront avoir des sanctions financières, même pour ne pas avoir répondu », a averti la ministre.

« Les sanctions peuvent aller jusqu’à 1 % de la masse salariale. Je dis souvent aux employeurs : “plutôt que de donner [cet argent] au Trésor public, donnez-le aux femmes !” », a-t-elle déclaré.

Une note sur 100 points en matière d’égalité femmes-hommes

L’index est une mention globale sur 100 points, décomposée en cinq critères : l’écart de rémunération femmes-hommes (noté sur 40 points), l’écart dans les aggravations annuelles (20 points), l’écart dans les promotions (15 points), les accroissements au retour de congé maternité (15 points) et, enfin, la présence de femmes parmi les plus gros salaires de l’entreprise (10 points).

« La grande majorité » des entreprises ayant publié leur index « a du travail à faire », a déclaré la ministre, et « 15 % sont en alerte rouge », c’est-à-dire sous la barre des 75 points. Ces mauvaises élèves, qui risquent des sanctions si elles n’amendent pas leur situation dans les trois ans, « ont des résultats vraiment mauvais » et « doivent tout de suite agir ».

A l’inverse, seule une « toute petite minorité » des entreprises examinées a obtenu la note maximale de 100 points, a défini la ministre.

Une fois confirmé par l’entreprise, l’index est « public », a par ailleurs accentué Mme Pénicaud. « Quand vous voulez postuler dans une entreprise, regardez s’ils sont bons ou nuls en égalité salariale », a-t-elle ajouté. Les entreprises de plus de 250 salariés seront, à leur tour, observées par l’obligation de publier cet index le 1er septembre, puis celles de plus de 50 salariés le 1er mars 2020.

 

Les pompiers alertent d’une grève

Un préavis de grève du 26 juin au 31 août a été posé par des syndicats.
Sept syndicats de pompiers, délégué 85 % de la profession, ont posé un préavis de grève du 26 juin au 31 août pour solliciter plus de moyens face à un accroissement de leurs interventions. « Le service public de secours est malade. On veut alerter les Français », a exposé à l’AFP André Goretti, président de l’organisation FA – SPP-PATS, premier syndicat chez les 40 000 pompiers professionnels.

Ces syndicats ont proclamé un courrier mercredi dernier au ministre de l’intérieur, dans lequel ils dénoncent « un déni de dialogue social » et « les politiques et projets néfastes du gouvernement ».

« Sur-sollicitation » et « violences verbales »

Ils sollicitent le retrait du projet de loi de modification de la fonction publique, la réévaluation de la prime de feu similaire aux autres métiers à risque, et « le recrutement massif d’emplois statutaires ». M. Goretti regrette un « profond malaise au sein de la profession » :

« Nous devons répondre à une sur-sollicitation avec de moins en moins d’effectifs et de moyens (…) Nous assumons de plus en plus de missions qui ne relèvent pas de nos compétences, à cause des manquements des services de l’Etat. »

A cela s’additionnent « de plus en plus de violences verbales et parfois physiques », suivant le responsable syndical.

Même s’ils se formulent en grève, les pompiers peuvent être astreints à un service minimum, en tant qu’« agents assurant le fonctionnement des services indispensables à la garantie de la sécurité physique des personnes ».

Assurance-chômage : un changement « mal reliée et trop craintif »

L’économiste François Fontaine regrette, que le cœur de la réforme – l’aboutissement des contrats courts – ait été contaminé par des termes annexes et « baroques ».

Il aura fallu deux  ans  au gouvernement pour faire achever la réforme de l’assurance-chômage. Il faut dire que le travail était infini. En détournement financière depuis le début des années 2000 et entassant plus de trente milliards d’euros de dette, elle était transformée délicat en cas de nouvelle crise économique et, dans le cadre des règles actuelles, la punition des comptes était illusoire.

Si nous en sommes arrivés là, c’est que les partenaires sociaux comme les pouvoirs publics n’ont longtemps pas compris que les règles de l’assurance-chômage ont un effet arrangeant sur le marché du travail. Ainsi, la rupture conventionnelle – départ sacrifié qui donne droit à indemnisation –, les modalités du cumul emploi-chômage, celles du rechargement des droits et, plus directement, celles du calcul du montant de l’allocation, ont été autant d’encouragements pour les entreprises à fractionner les contrats de travail.

Dans un même mouvement, elles ont rendu viable pour les travailleurs l’alternance rétablie entre emplois et courtes périodes de chômage et ont autorisé aux entreprises de soutenir une gestion irresponsable de leurs ressources humaines. Il y a bien eu quelques tentatives d’y atténuer, mais elles ont été tardives, timides et inopérants.

Revenu mensuel au chômage et en emploi

La réforme devait donc se concevoir autour d’une idée simple : puisque c’est l’envolée des contrats courts qui explique une part importante du déficit structurel de l’Unédic, il fallait mettre un coup d’arrêt à ce mouvement. Malheureusement, la réforme ne répond que partiellement à cet enjeu. Aux mesures utiles, elle en superpose d’autres, mal ficelées et un peu baroques. Enfin, quand il s’agit de responsabiliser les entreprises, elle se montre étrangement timide.

Certes, on y trouve bien de nouvelles solutions de calcul des droits. Le montant de l’allocation dépendra de la paye mensuelle et non du revenu journalier moyenne. C’est un point technique, mais c’est sans doute le plus important de la réforme : il évitera que le revenu mensuel au chômage ne dépasse le revenu en emploi. C’était le cas avant si, par exemple, le salarié n’avait travaillé qu’une semaine sur deux sur la période servant à calculer ses droits. Cette mutation devrait ainsi casser la principale incitation à fractionner les contrats.

C’est une mesure indispensable, mais elle aura des suites financières importantes pour les nouveaux solliciteurs d’emploi. Et pourquoi avoir allongé, dans un même mouvement, le nombre de jours besognés essentielles pour être éligibles ? Quel intérêt aussi d’introduire une dégressivité pour les allocations des cadres ? Elle ne touche pas au problème réel de l’assurance-chômage, tout en créant un régime à deux logiques de rémunération : allocations abaissantes pour les uns, constantes pour les autres.

Le géant du jeu vidéo américain convoité par un lourd plan social

Le stand d’Activision Blizzard à l’Electronic Entertainment Expo de Los Angeles, en janvier 2013.
Le stand d’Activision Blizzard à l’Electronic Entertainment Expo de Los Angeles, en janvier 2013. Jae C. Hong / AP

La maison-mère américaine veut suspendre 134 postes dans sa filiale française, où les arrangements sont ratés et le moral est au plus bas.

Sur une photo épinglée dans l’open space, 27 collaborateurs installent les uns à côté des autres. Sur le visage de la moitié d’entre eux, des petites gommettes ont été installées. Ce sont tous ceux qui, depuis le début de l’année, ont abandonné la « famille » Blizzard Entertainment, soit pour fuir sous des cieux plus cléments, soit parce qu’ils sont immobilisés pour burn-out ou dépression. Cette succursale européenne du géant du jeu vidéo Activision Blizzard, sise à Versailles, a abondamment été aperçue comme l’une des plus protégées et solidaires de l’industrie en France. Ses 450 travailleurs sont actuellement affectés par un plan de réduction de 30 % des effectifs annoncé le 12 février.

Ce jour-là, durant d’une réunion téléphonique avec ses actionnaires, Bobby Kotick, président d’Activision Blizzard, numéro un mondial de l’édition de jeux vidéo, établi aux Etats-Unis, annonce une réduction de 8 % des effectifs, soit approximativement 800 postes en moins dans le monde, principalement dans les métiers de l’édition, du support client et du marketing, pour s’ajuster sur la création. Avec 134 postes annulés, Blizzard Entertainment (nom de la structure versaillaise), filiale européenne polyglotte spécialisée dans l’animation de la communauté des joueurs, est le plus touché. Le lendemain, une réunion de crise est organisée. Depuis, plus rien ou presque.

« On travaille dans le noir »

Jeudi 20 juin, après quatre mois d’ambiguïté, les salariés de la principale antenne européenne de l’une des entreprises de jeu vidéo les plus mythiques (qui a créé World of Warcraft, Diablo, StarCraft, Hearthstone…) ont finalement été mis au courant par leur direction des contours du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) illégal mis en place par le « top management ». Dans les grandes lignes : un package de quatre à cinq semaines de salaire par année d’ancienneté et dix mois de congé de classement, un plan de départs volontaires ouvert cet été et des licenciements économiques à la rentrée. Mais ils ignorent encore qui, effectivement, est concerné par le plan.

Depuis, les syndicats peignent les employés comme « stressés », « fatigués », « inquiets », « démotivés ». « A Blizzard, on se connaît tous depuis longtemps, les collègues finissent par devenir des amis, et voir des amis craquer, c’est dur », affirme l’un d’entre eux, les yeux dans le vague. Tous révoquent l’opacité dans laquelle se terre la direction. « En tant que manageur d’équipe, je n’ai aucune information sur rien, on est entièrement aveugle, on travaille dans le noir », se décourage Romain, représentant de la CGT. « Il y a un énorme sentiment de peur et un stress intense », confirme un cadre de l’entreprise.

En France le secteur bancaire perd des emplois depuis 2011

La Société générale a annoncé en avril  la suppression de plus de 700 postes en France.
La Société générale a annoncé en avril  la suppression de plus de 700 postes en France. PIERRE VERDY / AFP

 

En 2018, les effectifs des banques françaises ont perdu 3 400 postes d’emploi, soit un repli de près de 1 %.

Le secteur bancaire, l’un des primordiaux embaucheurs privés en France, est-il encore en mesure d’engendrer une autre fois de l’emploi, comme ce fut le cas avant la crise financière ? La désagrégation poursuit du nombre de salariés depuis le tournant des années 2010 ne porte pas à l’optimisme. En 2018, pour la septième année produite, l’industrie bancaire française a, en effet, restreint une nouvelle fois ses effectifs, selon les chiffres diffusés jeudi 20 juin par la Fédération bancaire française (FBF). En 2018, 362 800 personnes œuvraient dans les banques en France, soit une diminution de 3 400 postes par rapport à 2017, et un recul de près de 1 % des effectifs.

Tandis, la profession recrute. Les établissements ont recruté, l’an dernier, 42 300 travailleurs dans l’Hexagone, « un chiffre en constante hausse depuis cinq ans », note la FBF. Le secteur offre, en outre, des emplois stables. Les banques dites « commerciales » (par opposition aux établissements mutualistes), qui éditent plus de données, disent avoir embauché 69 % de leurs nouveaux salariés en CDI. La durée moyenne de l’ancienneté atteint quinze années. Les postes sont aussi plus qualifiés, puisque les 63 % des recrutements en CDI concernent des Bac + 4 ou Bac + 5 (contre 52 % en 2014).

Des départs nombreux

Ces recrutements ne punissent toutefois pas les départs, plus nombreux. Les démissions indiquent « désormais le principal motif de départ, en lieu et place des départs à la retraite [largement majoritaires en 2014] », montrait l’Observatoire des métiers de la banque dans une étude diffusée en décembre 2018. La banque ne parvient plus, autant que par le passé, à fidéliser ses commerciaux. Selon cet observatoire, « pour la première fois en 2017 », les métiers de la force de vente ont évoqué moins de la moitié des effectifs des établissements, non pas à cause d’un recul des embauches, mais d’« une augmentation du turnover, notamment chez les jeunes générations ».

Mais au-delà des obstacles à fournir certains types de postes, les banques françaises cherchent principalement à borner leurs effectifs pour accomplir des économies. Bien moins rentables qu’avant la crise financière, en raison des taux d’intérêt très bas qui rognent leurs marges sur les crédits et de leurs efforts pour consolider leur capital, la plupart des établissements réduisent leurs réseaux d’agences, automatisent les tâches qui peuvent l’être et délocalisent certaines activités. En avril, la Société générale prévenait encore la rupture de plus de 700 postes en France. Le « douzième plan de réduction d’effectif de l’ère Oudéa [du nom du directeur général, Frédéric Oudéa] », selon un représentant syndical de la CGT.

Le Medef veut réviser ses ressources

Geoffroy Roux de Bézieux s’est autorisé une hyperbole en publiant son dernier projet : « C’est la réforme la plus importante depuis la création du Medef, il y a vingt ans », a-t-il exprimé, le 19 juin, lors d’une conférence de presse. Le président de la première organisation d’employeurs précisait, une série de mesures pour « transformer » son mouvement. L’une d’elles, correspondante au financement, fait d’ores et déjà débat, au sein du patronat mais aussi chez les syndicats.

D’ici à la fin de son pouvoir, en 2023, M. Roux de Bézieux veut, en conséquence, que le Medef se passe des ressources que lui accordent nombreuses institutions paritaires – soit 4,4 millions d’euros, au total, ressemblant à 11 % de son budget annuel. Les sommes en question sont attribuées pour couvrir des dépenses reliées à l’implication de représentants du Medef dans la progression de structures telles que l’Unédic (assurance-chômage) ou Action logement (dispositif en faveur de l’habitat des salariés). Les autres organisations patronales et les centrales syndicales perçoivent, elles aussi, de tels subsides.

Le déplacement de M. Roux de Bézieux se lance dans une forme de sevrage, en nombreuses étapes. Un premier pas a été accompli cette année « sans que ce soit officialisé », a déclaré Patrick Martin, le président délégué du Medef, peu de temps après la conférence de presse : l’organisation a lâché à 1,2 million d’euros, en provenance notamment de l’Unédic. Un effort qu’il convient de relativiser, car « ils n’arrivent pas à consommer l’intégralité de leur enveloppe », d’après des syndicalistes.

« Facile et un peu démagogique »

En se distribuant de ces flux financiers, le numéro un du Medef déclare vouloir mettre fin à un système qui « nuit à [l’]indépendance » de son mouvement et « n’est pas déontologique » car il est « voté par les partenaires sociaux pour les partenaires sociaux ». Il ne va néanmoins pas aussi loin que l’ambition postée durant sa campagne pour remplacer à Pierre Gattaz : faire en sorte « que le MEDEF soit capable, à terme, de vivre des seules cotisations volontaires de ses adhérents ». On n’en est plus là, actuellement, car son organisation va continuer d’empocher l’argent distribué par l’Association de gestion du fonds paritaire national (AGFPN) – une autre source de financement pour le patronat et les syndicats (alimentée, en grande partie, par une contribution des entreprises). Il s’agit là d’un dispositif « légal, transparent et audité », a défendu M. Roux de Bézieux.

Les changements que la réforme de l’assurance chômage va apporter aux chercheurs d’emploi

Montant des allocations, conditions d’accès … voici comment la réforme du gouvernement diminuera les droits des chercheurs d’emploi.

Le gouvernement a publié, mardi 18 juin, une réforme de l’assurance-chômage en deux volets : d’un côté, de nouveaux droits à la formation et à l’accompagnement seront accordés aux solliciteurs d’emploi, et l’assurance-chômage sera ouverte aux salariés démissionnaires qui désirent se lancer dans un nouveau projet professionnel ; de l’autre, le régime de rémunération sera significativement durci.

Ce dernier volet, supposé dégager 3,4 milliards d’euros d’économies en deux ans, a provoqué l’ire des syndicats, qui y voient un coup dur pour de nombreux solliciteurs d’emploi. Voici en quoi il admette.

Assurance-chômage : le gouvernement envisage des économies drastiques

Combien de temps besogner pour déclencher ses droits au chômage ?

Pour aspirer à une allocation-chômage, une personne doit réhabiliter d’une certaine période de travail au cours de laquelle elle a contribué. Avec cette réforme, il faudra avoir travaillé encore plus pour avoir droit à l’allocation.

Comment recharger et reporter ses droits au chômage ?

Un allocataire chômage qui recouvre le travail avant la fin de sa période d’indemnité peut non seulement reporter ses droits non utilisés pour plus tard, mais aussi assembler de nouveaux droits au chômage. Ce système, baptisé « droits rechargeables », ne lui est abordable que s’il atteint un seuil minimum d’heures travaillées. La réforme va, là encore, durcir significativement l’accès au dispositif.

Quel montant pour l’allocation-chômage ?

Pour les salariés précaires

Le niveau de l’allocation-chômage saisie par le solliciteur d’emploi est actuellement compté à partir du salaire moyen perçu lors des jours où il a travaillé au cours des 12 derniers mois.

Le montant sera aussitôt calculé à partir du salaire mensuel moyen, quel que soit le nombre de jours travaillés.

Cette transformation n’aura pas de suite pour la plupart des salariés, qui sont en CDI. Il désavantagera en revanche les salariés précaires qui reliaient les CDD et les périodes de chômage, qui saisiront donc des allocations plus faibles. Le gouvernement témoigne avoir pris cette décision pour empêcher les cas où, grâce à ce mode de calcul, un solliciteur d’emploi gagnait davantage en étant au chômage que lorsqu’il travaillait.

Pour les hauts salaires

Le niveau de l’allocation-chômage est actuellement constant durant toute la période d’indemnisation.

Il baissera aussitôt de 30 % à compter du 7e mois d’allocation, mais seulement pour les chômeurs de moins de 57 ans qui encaissaient plus de 4 500 € bruts lorsqu’ils travaillaient (les 10 % les plus aisés).

Les syndicats enragés contre la modification de l’assurance-chômage

Laurent Berger et Véronique Descacq (CFDT), en août 2013.
Laurent Berger et Véronique Descacq (CFDT), en août 2013. BERTRAND GUAY / AFP
C’est introuvable de voir Laurent Berger taper si fort. « La CFDT est extrêmement en colère », lâche le numéro un de la centrale cédétiste, devant un essaim de journalistes, assemblés dans la cour de l’hôtel Matignon. Pas d’emphase, juste quelques mots âpres formulés en deux minutes, à l’issue d’une entrevue avec le chef du gouvernement, Edouard Philippe, et la ministre du travail, Muriel Pénicaud.

Reçu, en ce mardi 18 juin, avec d’autres leaders syndicaux et patronaux pour prendre connaissance de la réforme de l’assurance-chômage, M. Berger se dit « abasourdi » devant un projet « profondément injuste ». La « politique qui est mise en place (…) n’est pas du tout à hauteur de femmes et d’hommes », explique-t-il : elle « ne prend pas en compte la réalité concrète des demandeurs aujourd’hui qui subissent la précarité ».

Les mesures qui l’agacent le plus portent sur les « conditions d’entrée » dans le régime d’indemnisation : elles vont être durcies, puisque, pour avoir droit à une allocation, il faudra travailler plus (six mois au lieu de quatre) sur un laps de temps moins long (deux ans, contre vingt-huit mois). Autre innovation, que le secrétaire général de la CFDT a du mal à avaler : la dégressivité des prestations, pour les personnes percevant des salaires élevés à l’époque où elles étaient en activité – ce qui va avoir un gros impact sur les cadres. C’est « totalement inefficace pour le retour à l’emploi », déclare M. Berger, qui avoue que, au final, « on a une réforme archi-perdante pour l’ensemble des [chômeurs] ».

« Inique et inefficace »

Le plan du gouvernement aurait pu admettre des avancées, aux yeux du responsable cédétiste, avec le bonus-malus pour borner les recours aux contrats courts, qui simplifiera les cotisations des entreprises où la main-d’œuvre est stable et élèvera celle des employeurs dont les effectifs dirigent beaucoup. Mais le dispositif mis au point par l’exécutif est peu ambitieux, selon M. Berger, car il s’appliquera « simplement [à] sept branches professionnelles », entre lesquelles l’hôtellerie-restauration et le secteur de la fabrication des denrées alimentaires. Il y a tout de même un élément « positif », mais c’est le « seul » : le « renforcement de l’accompagnement » des inscrits à Pôle emploi.

En Parlant après le dirigeant de la CFDT, les délégués des autres confédérations de salariés tiennent un discours de la même eau. Avec ces dispositions « iniques », « inefficaces », « économiquement irresponsables », « moins d’un [chômeur] sur trois sera indemnisé demain », pronostique Catherine Perret, la numéro deux de la CGT. « Il n’y a que des perdants et les premiers d’entre eux sont les demandeurs d’emploi », ajoute Yves Veyrier, secrétaire général de Force ouvrière, qui mentionne, par ailleurs, une autre victime : « la négociation collective », foulée aux pieds par un exécutif bien peu respectueux des partenaires sociaux.

« Jour funeste »

« C’est un jour funeste pour l’assurance-chômage », ajoute François Hommeril, le président de la CFE-CGC – la centrale de l’encadrement. Le syndicaliste s’en prend, sans surprise, à la dégressivité des contributions pour les travailleurs les mieux payés. Avec cette nouvelle règle, le gouvernement fait « un procès d’intention aux cadres qu’il considère être des glandouilleurs qui profitent de l’allocation-chômage pour ne pas trouver du travail ». « C’est grave. (…) C’est travestir la réalité scientifique des choses et c’est vraiment indigne de le faire au nom d’une forme de justice sociale », déclare-t-il. Prenant la parole en dernier, le représentant de la CFTC, Eric Courpotin, révoque une logique dans laquelle « les demandeurs d’emploi sont considérés comme une variable d’ajustement financière ».

Il y a aussi de la contrariété parmi les organisations d’employeurs, à cause du bonus-malus. Une « idée un peu saugrenue », qui n’admettra pas de « juguler les contrats courts », examine François Asselin, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises. « Ça sera soit inefficace, soit, au pire, ça découragera l’emploi », découvre Geoffroy Roux de Bézieux, le patron du Medef. Mais leurs critiques résonnent mollement – sans doute parce que les attachés pensent avoir limité la casse, avec un système de modulation des cotisations circonscrit à sept secteurs et dont sont exemptées les sociétés employant jusqu’à onze personnes. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles M. Veyrier pense que les efforts sont surtout sollicités aux demandeurs d’emploi : c’est sur leur dos, dénonce-t-il en substance, que reposeront les 3,4 milliards d’euros d’économies établies de novembre 2019 à la fin 2021, puisque celles-ci seront synonymes de droits réduits.

Les syndicats affirment mais agissent, comme très souvent, en ordre disséminé. La CFDT appelle à un rassemblement le 25 juin. La CGT, de son côté, organise une mobilisation le lendemain, à l’occasion d’un conseil d’administration de l’Unédic – l’association paritaire qui gère l’assurance-chômage. Autant d’initiatives qui n’impressionneront guère le gouvernement, celui-ci étant persuadé d’avoir l’opinion avec lui sur un dossier où les premiers concernés sont peu organisés.