Le plafonnement des indemnités prud’homales de nouveau questionné en justice

Le plafonnement des indemnités prud’homales de nouveau questionné en justice

La Cour de cassation s’apprête à arbitrer une longue querelle déclenchée par Emmanuel Macron. Jeudi 31 mars, elle doit se pencher sur quatre litiges relatifs à l’une des réformes emblématiques portées par le chef de l’Etat au début de son quinquennat : le plafonnement des dommages-intérêts octroyés par la justice à un salarié victime d’un licenciement « sans cause réelle et sérieuse ». Depuis son adoption en septembre 2017 dans le cadre des ordonnances qui ont réécrit le code du travail, cette mesure est combattue parce qu’elle contreviendrait aux engagements internationaux de la France. L’un des principaux enjeux de l’audience de jeudi est de savoir si les magistrats peuvent, dans certaines circonstances spécifiques, s’affranchir des règles fixées par le législateur et se montrer plus généreux que celles-ci.

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Le dispositif à l’origine du différend se présente sous la forme d’un barème, avec des montants minimaux et maximaux de dédommagements en fonction de l’ancienneté du salarié. Le but est d’offrir de la « prévisibilité » aux employeurs et de « lever la peur de l’embauche ».

Guérilla des cours d’appel

Sitôt entré en vigueur, ce référentiel a provoqué une fronde. A partir de la fin 2018, plusieurs conseils de prud’hommes ont refusé de s’y conformer, au motif qu’il violerait des traités signés par la France, dont la convention no 158 de l’Organisation internationale du travail (OIT). Ce texte prévoit que le tribunal d’un pays doit pouvoir attribuer une indemnité « adéquate » au salarié abusivement renvoyé par son patron. Or, des juridictions ont estimé que la grille mise en place en 2017 ne permettait pas de garantir le respect de ce droit. Elles se sont donc soustraites au barème – du fait de son ­ « inconventionnalité » – et ont accordé des montants supérieurs aux plafonds.

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Cette situation a engendré une belle pagaille car, dans le même temps, de nombreux conseils de prud’hommes ont appliqué les maxima instaurés par le législateur. Pour démêler l’imbroglio, la Cour de cassation a été saisie afin de donner son avis. Ce qu’elle a fait, en juillet 2019, en indiquant que le cadre délimité dans les ordonnances de 2017 était compatible avec la convention de l’OIT. Ses appréciations n’avaient pas de pouvoir contraignant, mais le gouvernement s’était réjoui de cette clarification, qui permettait de clore un « court épisode judiciaire », selon la formule de Muriel Pénicaud, alors ministre du travail.

Tel ne fut pas le cas puisque la guérilla a continué. Plusieurs cours d’appel ont considéré qu’elles avaient la faculté de vérifier si la grille d’indemnités offre une réparation financière suffisante, au regard du dommage subi par le salarié et de sa situation particulière (âge, état de santé, handicap éventuel, etc.). Dans la langue des juristes, on parle d’un contrôle concret – ou in concreto – de l’application de la loi.

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