Archive dans novembre 2021

Rebond rassurant de l’emploi aux Etats-Unis en octobre

A New York (Etats-Unis), le 5 novembre 2021.

Les Etats-Unis ont connu en octobre un rebond rassurant du marché du travail : le pays a créé ce mois-ci 531 000 emplois tandis que le taux de chômage est retombé de 4,8 à 4,6 %, selon les chiffres publiés vendredi 5 novembre par le ministère du travail. Le président Joe Biden s’en est immédiatement réjoui, alors que le Congrès doit voter sur ses plans d’infrastructures et sociaux dans l’après-midi : « Il s’agit d’une amélioration significative par rapport à mon entrée en fonction et un signe que nous sommes sur la bonne voie », a twitté le président.

Surtout, le ministère du travail a revu à la hausse les chiffres des deux mois précédents, qui avaient valu à M. Biden de forts reproches sur sa politique économique. Les mois d’août et septembre, marqués par une anémie de la reprise en raison du variant Delta et des goulets d’étranglement économiques, n’ont pas été aussi terribles qu’on le pensait : les créations d’emplois ont été revues à la hausse pour septembre et août, se situant à 312 000 et 483 000 au lieu des 194 000 et 366 000 annoncés, soit 235 000 de mieux que prévu.

Un retour tortueux

Le pays reste en deça des 640 000 emplois créés chaque mois jusqu’entre janvier et juillet mais il est dans une dynamique compatible avec l’analyse de la Réserve fédérale (Fed) : la banque centrale estime que la reprise a été cassée en août par le variant delta et les goulets d’étranglement, que les deux se résorberont progressivement mais seulement dans le courant de l’année 2022 et que l’inflation reculera dans la foulée. Le taux de télétravail pour cause de covid a reculé sensiblement de 1,6 point, pour passer à 11,6 % des effectifs. Les salaires, eux, ont progressé fortement de 4,9 % sur un an, s’approchant du niveau de l’inflation (5,4 % en septembre).

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Au total, 154 millions d’Américains ont un emploi, soit 4,7 millions de moins qu’en février 2020. Le chômage qui avait bondi au-delà de 14 % au printemps 2020 reste supérieur à celui qui prévalait avant crise (3,8 %).

Cette baisse de la participation à l’emploi s’explique selon le Peterson Institute à 27 % par le vieillissement de la population, 23 % par le niveau élevé du chômage et pour moitié par d’autres raisons, non expliquées scientifiquement

Le retour des Américains sur le chemin de l’emploi reste tortueux. L’ancien secrétaire au Trésor de Bill Clinton, Robert Reich, estimait récemment que les travailleurs américains s’étaient engagés dans une « grève générale officieuse » en refusant d’accepter les 11 millions d’offres d’emplois ouvertes. La réalité est un peu plus complexe. La population active est stabilisée à 61,6 % contre 63,4 % avant la pandémie.

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A Bonneuil-sur-Marne, le maire « décidé à résister » à l’application des 35 heures

Sur le bureau de monsieur le maire, il y a un petit portrait de Lénine et, juste à côté, une figurine représentant Abraracourcix, le chef des célèbres irréductibles Gaulois. « Nous sommes réputés pour être le village qui résiste », plaisante Denis Oztorun, avant de reprendre un ton grave : « Je suis décidé à résister. J’ai été le premier à m’opposer à cette loi. J’espère que je ne serai pas le dernier… » Le maire communiste de Bonneuil-sur Marne (Val-de-Marne) n’appliquera pas la loi d’août 2019 sur la fonction publique. Celle-ci, en effet, impose à toutes les collectivités locales de mettre leurs agents aux 35 heures le 1er janvier 2022, soit 1 607 heures par an.

Or, du fait des congés dont ils jouissent, les fonctionnaires de la commune n’y sont pas. Les hommes travaillent 1 551 heures et les femmes, qui bénéficient d’un jour de congé supplémentaire (le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes), 1 544 heures. L’application de la loi se traduirait par une perte de huit jours de congés pour les premiers et de neuf jours pour les secondes. « On ne peut pas me demander ça, tranche Denis Oztorun. Je suis un maire communiste. Les fonctionnaires de la ville utilisent leur force de travail pour gagner un salaire et ils ont raison de penser que les congés font partie de la rémunération. »

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D’autant, assure l’élu, que les agents sont engagés. Il prend l’exemple du service chargé de la propreté. Il reconnaît que confier cette mission à Veolia coûterait 1,5 million d’euros par an, soit la moitié moins de ce que représente la paie de ses vingt-trois agents. « Mais je ne le fais pas, dit-il. Je préfère un service public de proximité, dont la valeur ne peut se calculer. Mes agents veulent garder leur ville propre, ils sont au service de la population, pas d’une entreprise. Nous avons eu une tempête en juin. Des arbres sont tombés dans une école, des toitures se sont envolées. Trente-cinq agents sont restés sur le terrain toute la nuit. Là, personne ne leur a demandé s’ils étaient bien aux 35 heures… »

Baisse des dotations

Cela dit, ce combat, c’est celui des fonctionnaires. « Les salariés doivent s’organiser pour se défendre, rappelle le maire. Ce n’est pas à moi de prendre le drapeau rouge. Mais je les soutiens. » Et réciproquement. Fin mai, les syndicats ont organisé un rassemblement devant la mairie pour protester contre l’application de la loi de 2019. « Le maire nous a expliqué sa position, relate Kevin Marguerite, secrétaire général de la CGT des agents territoriaux de la ville. Il nous a dit qu’il n’appliquerait pas la loi. On l’a remercié. On sera à ses côtés au tribunal. »

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Le marché du travail affiche une étonnante vitalité

Offres d'emploi  sur le stand d'une entreprise de travail temporaire lors d'un forum pour l'emploi à Saint-Herblain (Loire-Atlantique).

Des offres d’emploi record, des CDI qui augmentent plus vite que les CDD, des salariés qui changent de poste, des villes moyennes qui recréent des emplois… Même si le dynamisme de la reprise entraîne des pénuries et des goulots d’étranglement, celui-ci a un effet dopant sur le marché du travail, qui affiche une insolente santé au regard de l’ampleur de la crise liée au Covid-19. Avec 96 100 créations nettes d’emplois au 3e trimestre, selon l’estimation publiée, vendredi 5 novembre, par l’Insee, l’emploi salarié a poursuivi sa lancée. Il s’agit de la troisième hausse d’affilée, après + 0,8 % et + 1,4 % aux 1er et 2e trimestres. Fin septembre, l’emploi salarié privé dépasse de 0,9 % (soit de 185 600 emplois) son niveau d’avant-crise, et ce, dans tous les secteurs, sauf l’industrie, qui reste un peu en retrait et accuse un déficit de 45 100 emplois. En lien avec ce retard, l’emploi intérimaire demeure lui aussi légèrement en recul par rapport à fin 2019.

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Cette forte reprise du marché du travail est confirmée par les spécialistes du recrutement. « Avec près de 1 million d’offres d’emplois diffusées au troisième trimestre sur nos platesformes, les volumes de recrutement sont très élevés, et on ne voit pas de ralentissement à court terme, confirme David Beaurepaire, directeur délégué de HelloWork, qui détient les plates-formes RegionsJob, ParisJob et Cadreo. Le nombre de candidatures bat aussi des records, mais cellesci augmentent moins vite que les offres d’emplois, ce qui explique les difficultés de recrutement que rencontrent certaines entreprises. »

Avec 520 000 travailleurs concernés, le chômage partiel est retombé, en septembre, à un niveau très bas

« Les mesures de soutien et le plan de relance dopent l’activité, explique Bruno Ducoudré, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). De plus, les enquêtes semblent indiquer que les mesures sanitaires entraînent des pertes de productivité, les entreprises ont donc besoin d’embaucher à court terme pour compenser. Les créations d’emplois ralentiront sans doute quand les mesures sanitaires s’allégeront, et que l’on retrouvera des niveaux de productivité plus élevés. » Avec 520 000 travailleurs concernés, soit 3 % des salariés du privé, le chômage partiel est retombé, en septembre, à un niveau très bas, indiquent, vendredi, les chiffres de la direction statistique du ministère du travail (Dares). L’activité partielle de longue durée s’est, elle aussi, repliée, avec 180 000 salariés concernés, contre 220 000 en juin, soit une baisse de 18 %. Les embauches en CDI (+ 13,9 % au 2trimestre), elles, progressent plus vite que celles en CDD (+ 3,9 %).

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Le télétravail, mal aimé du travailleur japonais

Chronique. Le Japon ne fait pas exception à la montée du recours au télétravail observée depuis le début de la pandémie. Au printemps 2020, le télétravail a ainsi concerné jusqu’à 25 % des salariés japonais contre 6 % avant la crise. Cependant, dans le même temps, leur productivité a baissé d’environ 20 % en moyenne. Ce sont les deux résultats principaux d’une étude réalisée par l’économiste Toshihiro Okubo et ses collègues (« Teleworker Performance in the COVID-19 Era in Japan », Asian Economic Papers n°20/2, 2020).

Ces résultats sont doublement surprenants. Tout d’abord, le télétravail était très peu répandu au Japon avant la pandémie (notamment par comparaison avec l’Europe, où il concernait environ 20 % des salariés). Le gouvernement avait bien engagé depuis 2016 une politique de promotion du télétravail, sans obtenir de résultat ; ce qu’il n’a pas réussi à faire en quatre ans, la pandémie l’a réalisé en quelques semaines !

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Ensuite, on aurait pu penser que le télétravail permettrait d’augmenter la productivité de façon uniforme, notamment grâce à la réduction des temps de transport entre le domicile et le travail, qui sont au Japon parmi les plus élevés au monde ! Or, il n’en est rien : les mécanismes à l’œuvre sont plus complexes et se révèlent source d’inégalités entre les travailleurs japonais.

Le télétravail pas adapté aux entreprises

Pourquoi le télétravail n’était-il qu’une option si peu prisée au Japon ? D’une part, la politique de mobilisation des salariés implique, dans la conception managériale des entreprises, de longues heures de travail au bureau ou à l’atelier (même si elles sont en diminution depuis les années 1990).

D’autre part, la productivité repose principalement sur le travail en équipe et les échanges informels, qui rendent moins pertinent le travail à distance. C’est pourquoi la réforme initiée en 2016 par le gouvernement Abe, qui visait principalement à augmenter la productivité du travail par une réduction du temps de travail et le recours au télétravail, a échoué.

La baisse apparemment paradoxale de la productivité associée au recours accru au télétravail vient a posteriori confirmer que le télétravail n’est pas forcément adapté au mode d’organisation dominant des entreprises japonaises. Le mettre en œuvre de façon efficiente implique donc des changements organisationnels.

La taille de l’habitation et du foyer déterminante

Les chercheurs japonais ont analysé l’évolution de la productivité sur la base d’un indicateur dit « d’efficience productive », qui est mesurée de façon subjective par les travailleurs eux-mêmes. Cela permet ainsi d’avoir une indication sur la satisfaction des travailleurs, qui connaît également une forte baisse en moyenne. Derrière cette baisse moyenne de la productivité perçue se cache en fait une grande disparité : près de 30 % des travailleurs disent avoir maintenu leur efficience ou même l’avoir légèrement augmenté, tandis que plus de 50 % ont observé une baisse de cette efficience.

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Logistique, fournisseurs, sous-traitants… Les nombreux emplois cachés de l’industrie

« Au début, on a tout fait faire en externe », se souvient Jennifer Maumont. Lorsqu’elle a l’idée de fonder en 2016, avec son compagnon, une marque d’accessoires « slow fashion », la cofondatrice de Jules & Jenn se retrouve vite confrontée à ce problème : elle ne dispose d’aucun atelier de production pour fabriquer ses modèles.

Forte de ses années d’expérience en tant que directrice marketing chez Christian Dior, l’entrepreneuse se tourne vers la solution largement déployée dans l’industrie de la mode : déléguer la fabrication à des ateliers de sous-traitance. « Dès le début, on a voulu travailler avec des partenaires pour toute la partie production, mais aussi la logistique pour l’envoi et la réception des produits, jusqu’à la conception de notre site », se souvient la créatrice.

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Aujourd’hui, la marque a internalisé certaines de ses activités et envisage de mettre sur pied sa propre manufacture. Mais l’entreprise de mode continue de déléguer : Jules & Jenn est à l’origine de 56 équivalents temps plein chez ses partenaires, dont presque 90 % liés à la production des modèles, contre 6 emplois en propre.

Externalisation dans les services

L’exemple de Jules & Jenn l’illustre, l’industrie fait vivre indirectement des millions d’employés et des intermédiaires codépendants les uns des autres : logistique, R & D, fournisseurs, sous-traitants… Si la désindustrialisation est une réalité en France, la baisse statistique de l’emploi industriel cache une réalité beaucoup plus complexe. « Les estimations des économistes évaluent entre 0,6 et 1,2 le nombre d’emplois indirects pour 1 emploi direct créé dans l’industrie », indique Vincent Charlet, délégué général du think tank La Fabrique de l’industrie.

Chez Coca-Cola France, pour un emploi direct créé, douze emplois indirects en découleraient en amont et en aval de la chaîne de valeur, selon une étude de l’institut Xerfi réalisée en 2018 pour la marque de boissons. Les statistiques avancées par les industriels sont parfois sujettes à de vastes débats. Une chose est sûre : « l’externalisation des emplois industriels, notamment dans le tertiaire, est une des raisons qui expliquent le phénomène de désindustrialisation », fait valoir Vincent Charlet.

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Quand, par exemple, Renault confie à Sodexo l’activité de restauration de ses salariés, les emplois ne disparaissent pas : ils sont « déplacés » vers ce sous-traitant. « Entre 1980 et 2007, un quart des pertes d’emplois industriels s’expliquent par l’externalisation dans le secteur des services », ajoute Vincent Charlet. Si l’emploi industriel à proprement parler a dégringolé en France, passant de 5,5 millions en 1970 à un peu plus de 3 millions d’emplois directs aujourd’hui (hors construction), les emplois tertiaires, eux, ont explosé, passant de 5,3 millions à 12,6 millions dans le secteur marchand sur la même période.

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Le dossier des 35 heures tend les relations entre les mairies et l’exécutif

Un agent de la propreté de la Ville de Paris, place d’Italie, le 31 mai 2019.

Le temps se resserre et le débat se tend. A moins de six mois de la présidentielle, la question du temps de travail des fonctionnaires territoriaux provoque un regain de nervosité entre le gouvernement et ses opposants. La loi sur la fonction publique d’août 2019, qui met un terme à tous les régimes dérogatoires, ordonne, en effet, aux communes d’imposer trente-cinq heures de travail hebdomadaire à leurs agents « au plus tard » le 1er janvier 2022. Les autres collectivités, départements et régions, ont un an supplémentaire.

Beaucoup de villes y sont déjà. « A peu près la moitié » des collectivités respectent les 35 heures, a déclaré la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, jeudi 4 novembre, sur Europe 1. Les « trois quarts » de celles qui n’y sont pas « vont l’appliquer », a-t-elle poursuivi. Il reste donc une minorité qui paraît décidée à défier le gouvernement sur cette question.

Hidalgo « joue la montre »

Paris est le cas le plus emblématique. La maire, Anne Hidalgo, a concocté un plan avec les syndicats qui prévoit d’appliquer la loi, tout en accordant à tous les fonctionnaires municipaux trois jours de RTT justifiés par la « sursollicitation » des agents parisiens et les niveaux de bruit et de pollution atmosphérique auxquels ils sont exposés. Ce plan, dont le tribunal administratif de Paris a suspendu en référé, lundi 25 octobre, deux dispositions clés, a provoqué une nouvelle passe d’armes entre la candidate du Parti socialiste (PS) à l’élection présidentielle et la ministre.

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Paris, a fustigé Mme de Montchalin, jeudi, est « la seule commune qui, hier, m’a fait parvenir une lettre m’expliquant que, tribunal ou pas, ils ne changeraient rien ». Trois jours après la décision du tribunal, la mairie de Paris a, en effet, indiqué au préfet de Paris que « la programmation des prochaines séances du Conseil de Paris d’ici la fin de l’année ne permettra pas de mener le travail sur le sujet dans des conditions satisfaisantes ». Ces arguments, a rétorqué le préfet, Marc Guillaume, le 3 novembre, « ne sont pas de nature à respecter cette décision du juge des référés », rappelant que la ville doit « respecter cette décision à compter du 1er janvier 2022 ».

« Je pense qu’Anne Hidalgo se fourvoie sur une ligne dangereuse et qui n’est pas républicaine quand on se présente aux plus hautes responsabilités du pays », a commenté la ministre : « Il y a un principe en République, c’est la loi qui doit s’appliquer tant qu’elle n’est pas modifiée. » La candidate du PS « joue la montre, a-t-elle déploré. Elle pense manifestement que le calendrier de l’élection présidentielle va lui permettre de repousser un dialogue social qui est nécessaire. » Réfutant les accusations de « justice politique », elle a en outre évoqué « une justice qui sanctionne une mauvaise gestion ».

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L’Assemblée nationale vote le contrat engagement jeune

Lors d’un déplacement de Jean Castex, le 2 novembre 2021, à VItry-sur-Seine.

Annoncé mardi, il a été adopté deux jours plus tard. L’Assemblée nationale a approuvé, jeudi 4 novembre, la création du contrat engagement jeune (CEJ), dispositif destiné à prendre le relais, à partir de mars 2022, de la garantie jeunes pour ramener vers l’emploi ceux qui en sont le plus éloignés.

Les députés ont voté un amendement du gouvernement qui accorde 550 millions d’euros supplémentaires à la mission « travail et emploi » pour le financer, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances 2022. Le dispositif mobilisera par ailleurs 2,05 milliards d’euros des 5,4 milliards d’euros de budget affecté au plan 1 jeune, 1 solution. L’exécutif avait levé le voile mardi sur les détails de cette mesure, esquissée par le président de la République le 12 juillet et dont la présentation se faisait attendre depuis la rentrée.

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Le CEJ, qui pourra être proposé par Pôle emploi, les missions locales et d’autres acteurs publics et privés, doit permettre d’harmoniser les dispositifs existants d’aide aux jeunes NEET (ni en emploi ni en formation ni en études) et d’intensifier et personnaliser l’accompagnement qui leur est offert, en échange d’une allocation d’un maximum de 500 euros.

Dans le détail, 268 millions d’euros serviront à « renforcer le service public de l’emploi pour intensifier le suivi des jeunes placés » en CEJ, et 140 millions seront affectés au versement de l’allocation.

Le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, le député Bernard Perrut (Les Républicains), s’est interrogé sur la « plus-value réelle » de ce nouveau dispositif par rapport à la garantie jeunes, et sur le « caractère réaliste » de l’objectif annoncé par le gouvernement mardi : 400 000 jeunes aidés en 2022, le double des 200 000 jeunes devant bénéficier de la garantie jeunes en 2021. « Nous ne voulons ni promouvoir l’assistanat à travers un RSA jeunes et encore moins soutenir des promesses qui ne respecteraient pas les jeunes qui doivent trouver confiance en l’avenir », a-t-il dit.

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Critiques du PS et de LFI

Mais les critiques les plus virulentes sont venues de la gauche de l’Hémicycle. « Le compte n’y est pas », a affirmé le député Boris Vallaud (Parti socialiste), reprenant la formule du secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger. Il a fustigé une réponse « tardive » et « insuffisante », alors que le nombre de NEET est estimé à un million.

François Ruffin (La France insoumise) a dénoncé un « rafistolage », un « bricolage de dernière minute » et une « forme de renoncement ». Il a souligné que dès 2021 il est prévu d’aider plus de 400 000 jeunes, via la garantie jeunes, gérée par les missions locales, mais aussi via l’accompagnement intensif jeunes (AIJ), piloté par Pôle emploi (objectif de 240 000 jeunes aidés en 2021).

La ministre du travail, Elisabeth Borne, a dit ne pas vouloir entrer dans la bataille des chiffres, soulignant l’amélioration de la situation économique depuis le début de l’année, et rappelant que le CEJ est un « droit ouvert » – d’autres jeunes au-delà des 400 000 pourront être accompagnés s’ils le souhaitent.

Pôle emploi proposera 100 000 CEJ en 2022, selon le ministère du travail, ce qui n’exclut pas que d’autres jeunes continuent de bénéficier de l’AIJ.

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Le Monde avec AFP

« On se projette dans le futur » : dans le Sud-Ouest, la sous-traitance aéronautique se réorganise

A l’usine Mecachrome de Sablé-Sur-Sarthe (Sarthe), en avril 2014.

« On est câblés de la même manière. » Avec son franc-parler, Gérard Russo, cofondateur et président de Ventana, une PME fondée à Narcastet (Pyrénées-Atlantiques), explique les raisons qui le poussent à se « marier » à Nexteam Group, un usineur situé à Marmande (Lot-et-Garonne). « Nos deux sociétés sont gérées de la même façon, et on partage des valeurs communes, comme l’attachement à nos collaborateurs », vante le dirigeant de cette entreprise spécialisée dans la mécano soudure, la mécanique et la fonderie de pièces moteurs et de structures pour le britannique Rolls-Royce et l’américain Pratt & Whitney.

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Autre point commun : affectés par la crise liée au Covid-19, qui a cloué au sol les avions, les deux fournisseurs ont subi une baisse de plus de 30 % de leur chiffre d’affaires. Cette fusion capitalistique, soumise à l’approbation de l’Autorité de la concurrence, devrait donner naissance à un important sous-traitant. Cette nouvelle entité totalisera 2 400 salariés et sera présente dans huit pays avec vingt-deux sites industriels. « C’est pas mal, ça commence à faire », se félicite Frédéric Gentilin, directeur général délégué de Nexteam Group, qui compte deux principaux clients, Airbus et Safran.

Cette union de raison est surtout économique : les clients seront plus nombreux, et l’éventail des métiers étendu. « Nous serons en capacité de répondre à des appels d’offres et d’investir », affirme M. Russo. L’Occitanie vit au rythme des réacteurs. Et c’est le moteur Airbus qui lui donne le tempo. Dès juillet, le constructeur montre des signes prometteurs de rebond, relevant les cadences de production de son best-seller A320 : de 45 exemplaires par mois à partir du dernier trimestre, elle passera à 64 avions mensuels dès juin 2023. Avec ces prévisions, c’est toute une filière qui respire. Car, en 2019, l’aéronautique faisait vivre 700 entreprises et 110 000 salariés.

« On relance la machine industrielle »

Pour anticiper cette reprise, Mecachrome, fabricant de pièces de structures et de moteurs d’avion, dont le siège social est désormais à Blagnac (Haute-Garonne), à proximité des donneurs d’ordre, a racheté Hitim, une PME qui produit pour Safran des axes de trains d’atterrissage et des arbres de moteurs d’avion à Annecy (Haute-Savoie) et à Roanne (Loire). « Son positionnement marché était intéressant pour nous, car nous n’étions pas sur ce secteur », commente Christian Cornille, le président, qui examine des « cibles » pour les racheter. « La reprise de sociétés est une façon de remonter en puissance et de concentrer nos forces. On relance la machine industrielle et on se projette dans le futur. »

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Un nouveau conflit chez Volkswagen affaiblit le patron, Herbert Diess

Le PDG de Volkswagen, Herbert Diess, à Zwickau, en Allemagne, le 23 juin 2021.

Un nouveau conflit violent a éclaté chez Volkswagen (VW), entre le patron du groupe, Herbert Diess, et les représentants des salariés, et nul ne sait comment il s’achèvera. En Bourse, la querelle a déjà fait dévisser de 4 % le cours dans la journée de mercredi 3 novembre. Face à leur dirigeant, les salariés ont apparemment dégainé l’arme la plus puissante dont ils disposent chez VW, le vote de défiance, assure le quotidien Handelsblatt. La phase qui s’ouvre, si aucun compromis n’est trouvé, pourrait aboutir à l’éviction d’Herbert Diess, qui dirige VW depuis avril 2018 et mène, depuis, une des plus grandes transformations jamais effectuées par le deuxième constructeur automobile mondial.

A Wolfsburg, au siège du groupe, la tension montait depuis plusieurs semaines. Le premier choc est survenu le 24 septembre, lorsque Herbert Diess a laissé entendre, lors d’une session du conseil de surveillance, que 30 000 emplois étaient menacés chez VW. Face à l’émotion suscitée par ce commentaire, il avait finalement précisé qu’il ne s’agissait que d’un « scénario extrême », dans le cas où l’entreprise ne parvenait pas à améliorer considérablement son efficacité et poursuivre sa transformation vers l’électrique et le numérique.

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Un second conflit a éclaté quelques jours plus tard, quand Herbert Diess a décliné sa participation à une assemblée du personnel prévue pour jeudi 4 novembre, pour pouvoir se rendre à une conférence d’investisseurs aux Etats-Unis. Daniela Cavallo, la nouvelle présidente du comité des salariés, le « Betriebsrat », traditionnellement très puissant chez VW, avait pris l’annonce comme un affront personnel et sévèrement critiqué cette décision, reprochant au patron de ne pas s’intéresser aux préoccupations des travailleurs, dans une situation où la pénurie de composants électroniques affecte la production. Finalement, M. Diess a changé d’avis. Il participera, jeudi, à cette réunion à haut risque.

Moderniser le groupe et baisser les coûts

Ce n’est pas la première fois qu’Herbert Diess est à deux doigts de la mise à pied. A l’été 2020, il n’avait sauvé son poste que d’extrême justesse, après des excuses officielles pour des propos accusatoires envers certains membres du conseil de surveillance. Quelques mois plus tard, une nouvelle querelle s’était installée sur la question de la prolongation de son contrat, qu’il exigeait avec deux ans d’avance. Cela avait été très mal perçu, renforçant son image de patron solitaire, peu enclin à se plier aux usages du groupe. Dans l’univers VW, les décisions importantes sont le fruit d’un compromis entre deux camps aux intérêts opposés : le comité des salariés et le land de Basse-Saxe, qui détient 11,8 % du capital du groupe et 20 % des droits de vote, alliés pour garder les emplois sur place, et la famille Porsche-Piëch, actionnaire à 31,3 % (53,3 % des droits de vote), plus soucieuse de la rentabilité et des résultats.

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« L’impasse. Comment Macron nous mène dans le mur » : réquisitoire contre « une aristocratie d’Etat endogamique »

Le livre. Voilà bientôt un demi-siècle que Guillaume Duval est engagé au sein de ce que l’on appelle la gauche de gouvernement. Après François Mitterrand en 1974 et 1981, l’ancien rédacteur en chef d’Alternatives économiques a soutenu activement Lionel Jospin en 1997 et appuyé François Hollande en 2012. « La politique que mène Emmanuel Macron depuis 2017, avec l’aide de beaucoup d’ex-socialistes, se situe aux antipodes de tout ce pour quoi je me suis battu depuis cinquante ans », affirme l’auteur de L’impasse. L’ouvrage décrypte les raisons de cet échec.

D’après l’ancien membre du Conseil économique, social et environnemental, une aristocratie d’Etat endogamique domine tout le spectre des partis de gouvernement. Elle s’est emparée en particulier du Parti socialiste, « devenu progressivement un parti de cadres animé quasi exclusivement par des hauts fonctionnaires issus de l’Ecole nationale d’administration. La présidence de François Hollande, avec la fameuse promotion Voltaire et dans son entourage direct un certain Emmanuel Macron, a été l’aboutissement, le sommet de cette évolution ».

La gauche sociale-libérale et la droite de gouvernement, dominées toutes deux par cette aristocratie d’Etat, mènent des politiques de plus en plus convergentes en matière économique et sociale, et partagent le même mépris pour les classes populaires. « Toutes deux considèrent que c’est la paresse supposée, le coût du travail trop élevé, les droits sociaux trop importants et la protection sociale trop étendue des salariés ordinaires qui sont à l’origine de nos difficultés économiques persistantes. » Emmanuel Macron incarne cette convergence, devenue une seule force politique, juge l’auteur.

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Face à l’autoritarisme d’Emmanuel Macron, Guillaume Duval appelle les syndicalistes français à se rapprocher tout en se renforçant : « Il faut un chèque syndical que chaque employeur doit verser à chaque salarié ; il faut renforcer les règles concernant les accords collectifs en portant le seuil de représentativité pour les valider au-delà de 50 %. »

Congés sabbatiques rémunérés

L’auteur milite aussi pour l’introduction de la codétermination à l’allemande pour introduire la démocratie dans l’entreprise. Ensuite, au lieu de vouloir faire travailler plus longtemps celles et ceux qui ont déjà un emploi dans un pays qui compte 6,4 millions d’inscrits à Pôle emploi, il invite à relancer la dynamique de réduction du temps de travail.

Proposer six mois de congés sabbatiques rémunérés tous les cinq ans, ou un an tous les dix ans, représenterait une réduction de 10 % du temps de travail tout en répondant à une demande sociale de temps de respiration supplémentaires, au cours d’une vie professionnelle devenue plus longue. Enfin, l’auteur souhaite le rétablissement d’un impôt sur la fortune et l’accroissement de la progressivité de l’impôt sur le revenu tout en relevant les minima sociaux.

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