Archive dans septembre 2021

Pour « une véritable convergence des protections sociales entre salariés et indépendants »

Tribune. La convergence des droits sociaux entre indépendants et salariés serait-elle enfin à l’ordre du jour ? Le « plan indépendants » présenté par Emmanuel Macron jeudi 16 septembre aux rencontres annuelles de l’Union des entreprises de proximité (U2P), semble prendre la mesure de l’évolution du monde du travail en articulant mesures à court terme et perspectives à long terme.

Nous étions jusque-là face à un paradoxe : alors que la croissance des autoentrepreneurs n’a jamais été aussi rapide, avec 2 700 inscriptions par jour à ce régime, leur sentiment était de ne jamais être considérés dans le paysage économique et social de notre pays.

Et pourtant, sur les 3 millions d’indépendants aujourd’hui inscrits, plus de 2,3 millions sont autoentrepreneurs. De janvier à mai 2021, près de 300 000 de nos concitoyens se sont inscrits comme autoentrepreneurs, soit 100 000 de plus que durant les cinq premiers mois de 2020.

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Ils représentent aujourd’hui plus de 10 % de la population active de notre pays, ont généré près de 200 milliards d’euros de chiffre d’affaires depuis dix ans, et ont versé environ 40 milliards de cotisations sociales.

Simplification administrative et fiscalité allégée

Le « plan indépendants » présenté par le président de la République apporte tout d’abord des réponses significatives en matière de protection du patrimoine personnel de l’entrepreneur, et permettra ainsi d’éviter l’addition désastreuse de l’échec familial à l’échec économique. Il apporte aussi des mesures de simplification administrative et une fiscalité allégée au moment de la transmission d’activité.

Autant de mesures qui sont les bienvenues, mais qui s’adressent à des entreprises dans des secteurs souvent privilégiés ou réglementés, et restent assez éloignées des problématiques du « nouveau monde » des indépendants né en 2009 avec le régime de l’autoentrepreneur.

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Ces « nouveaux indépendants » ne disposent pour la plupart d’aucun patrimoine. Leur principal actif, sinon leur actif exclusif, est leur force de travail. Ils ont par conséquent moins besoin aujourd’hui d’une protection patrimoniale, et davantage d’une protection de leur capacité à conserver cette précieuse aptitude à la création de richesse.

Sur ce volet, le président de la République a invité toutes les parties à une large négociation pour que s’ouvre enfin le chantier d’une véritable convergence des protections sociales de tous les travailleurs, qu’ils soient salariés ou indépendants.

Eviter un troisième statut

Alors qu’une réforme de l’assurance-chômage, qui exclut pour l’instant les autoentrepreneurs, est en marche, la grande faille de leur protection sociale reste la prévoyance des accidents du travail et de la maladie, qu’elle soit professionnelle ou non, mais aussi leur retraite.

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L’épineuse question du télétravail transnational

Droit social. L’exercice du droit fondamental du salarié à choisir librement son domicile peut le conduire à s’installer à l’étranger, en télétravail total ou partiel. Le travail peut alors être encadré par plusieurs ordres juridiques. Il convient de déterminer lesquels. Pour résoudre d’éventuels conflits entre le droit français et le droit de l’Etat où le travail est effectivement exercé, ce qu’on appelle « la loi du lieu d’emploi », des règles permettent de désigner la loi (française ou étrangère, ou les deux) applicable.

Ces règles ne sont pas les mêmes en matière de droit du travail et en matière de sécurité sociale de base. Un ordre juridique national ne pouvant pas s’imposer à un autre, elles ne peuvent qu’être le fruit d’accords interétatiques. L’Union européenne a ainsi développé nombre de règles en application du principe de libre circulation des travailleurs. Mais c’était bien avant la mise en œuvre massive du télétravail. Il n’existe donc, à ce jour, aucun cadre réglementaire qui ne rende compte du « caractère virtuel » du télétravail transnational.

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Lorsque le travail se déroule à l’étranger, même si l’employeur est français, même si le contrat de travail initial est soumis au droit français, même si une clause contractuelle désigne explicitement le droit français pour un travail à l’étranger, le droit français peut n’être applicable que partiellement ou pas du tout. Il en résulte que les règles de droit social applicables sont nécessairement très différentes d’une situation à l’autre et supposent des connaissances précises du droit étranger qu’il convient, le cas échéant, d’appliquer.

Règles du pays d’accueil

A titre d’exemple, le télétravail à partir de Luxembourg-ville ou de Dubaï sera soumis aux dispositions du règlement européen 593/2008 à vocation universelle : l’employeur et le salarié peuvent choisir la loi qu’ils souhaitent appliquer au contrat de travail. Mais le droit français sera logiquement retenu, lorsque le contrat de travail était en cours d’exécution avant le déménagement.

Cependant, concernant les règles dites « d’ordre public » telles que celles sur la durée du travail, le salaire minimum, la santé et la sécurité des travailleurs, ce sont celles du pays d’accueil qui doivent être respectées. Pour reprendre l’exemple du télétravailleur installé à Luxembourg, l’employeur lui devra au moins le salaire minimum local de 2 141,99 euros.

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Pour Dubaï, le droit émirati prévoit notamment, de son côté, une réduction de la durée journalière du travail de deux heures sur une durée maximale de huit heures pendant la période du ramadan.

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Télétravail « total » chez Boursorama : les salariés commencent à quitter Paris pour la province

Il a acheté une carte de France et avec un compas a tracé un cercle des destinations à moins de trois heures de Paris. Puis, avec sa famille, ils se sont demandé s’ils voulaient plutôt vivre à la mer, à la montagne, à la campagne… Finalement ils ont choisi le Morbihan. Jérémie Lallich, conseiller clientèle en crédit immobilier chez Boursorama, rêvait de quitter la région parisienne depuis plusieurs années. « On me l’a servi sur un plateau », commente-t-il.

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En novembre 2020, la banque en ligne, filiale du groupe Société générale, a proposé aux collaborateurs affectés à des fonctions de production (traitement des opérations bancaires, relations téléphoniques avec les clients, etc.), soit la moitié de ses 820 salariés, un régime de télétravail atypique : le « 90/10 ». Les salariés travaillent tous les jours de chez eux, à l’exception de deux journées par mois, qu’ils doivent passer dans les locaux de Boursorama, à Boulogne-Billancourt. Ils peuvent donc s’installer où ils veulent en France métropolitaine – « même en Corse », note Benoît Grisoni, le directeur général de la banque. L’entreprise prend en charge les frais de transport et les nuits d’hôtel pour les journées de travail effectuées au siège. Et 97 % des équipes ont accepté.

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Jérémie Lallich habitait à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne) et passait trois heures par jour dans les transports en commun. « Lors du premier confinement, j’ai compris ce que voulait dire ce temps gagné, dit-il. C’était prendre le petit-déjeuner avec les enfants, les accompagner à l’école, faire les devoirs le soir avec eux. » En juillet, il a quitté son appartement de 76 m2 à 1 400 euros par mois, pour une grande maison avec jardin, à quinze minutes de la mer, qui lui coûte un tiers de moins.

« Nous avons pu élargir notre bassin de recrutement »

« Le 16 mars 2020, à la veille du confinement, j’étais contre le télétravail. Le 31 mars, je me suis dit que les salariés n’allaient jamais revenir », déclare Benoît Grisoni. Les collaborateurs concernés par le « 90/10 », en bas de la grille des salaires, totalisaient en moyenne deux heures et vingt minutes de trajet par jour. « La direction a choisi d’y aller plein pot, et tant qu’à faire du télétravail, de maximiser les effets positifs », commente Philippe Clouzeau, délégué syndical CFDT chez Boursorama. « Nous voulions un accord gagnant-gagnant », affirme Aurore Gaspar, directrice générale adjointe de Boursorama.

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L’entreprise, en effet, s’y retrouve. « Nous avons pu élargir notre bassin de recrutement, alors qu’il y a une véritable tension sur le bassin parisien pour trouver des chargés de clientèle à distance, explique-t-elle. Ce sont des métiers difficiles, avec beaucoup de turnover, et nous avions du mal à pourvoir tous les postes. »

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D’anciens cadres expatriés de Méridien obtiennent des indemnités pour leur retraite

La bataille n’est toujours pas terminée pour ces anciens cadres expatriés employés par des hôtels Méridien, privés d’une juste retraite après leurs années de travail en Asie, aux Etats-Unis ou au Moyen-Orient. L’ancienne filiale d’Air France, aujourd’hui propriété du groupe Marriott, n’avait pas ou pas assez cotisé pour eux aux caisses de retraite en France durant six, ou plus, années d’expatriation, à partir des années 1970 pour certains. Le jeudi 23 septembre, la cour d’appel de Paris, à laquelle ces cadres, aujourd’hui âgés de 65 à 84 ans, demandaient de condamner la chaîne hôtelière à les indemniser, a débouté vingt-quatre plaignants et a donné raison à onze autres pour un montant total de 2,8 millions d’euros.

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Un premier groupe de 50 autres ex-directeurs expatriés avaient pourtant, sur cette même question, obtenu gain de cause en 2008, une décision confirmée par la Cour de cassation, le 14 avril 2010 : Méridien avait l’obligation de cotiser en France pour la retraite de ses cadres expatriés. Mais, pour ces autres anciens salariés, tout le chemin a dû être refait. Cinq d’entre eux sont morts entre-temps.

Un rejet « injuste »

Pour certains des vingt-quatre dossiers rejetés, la cour d’appel a appliqué la prescription quinquennale à leur action : ce sont tous ceux qui, ayant liquidé leur retraite avant 2008, ont saisi le conseil de prud’hommes en 2013. Ce rejet est, aux yeux de leur avocat, Nicolas Sauvage, « injuste ». D’une part, ils n’ont su avec certitude que le groupe Méridien avait l’obligation de cotiser pour eux seulement lors de l’arrêt de la Cour de cassation, en 2010, « date à partir de laquelle le délai de prescription de cinq ans aurait dû commencer à courir », selon l’avocat. En outre, ajoute-t-il, « le préjudice d’une retraite réduite ou nulle, il renaît chaque mois et ils le subiront jusqu’à leur mort, puis leur épouse après eux au titre de la réversion ». Selon lui, la cour aurait dû leur attribuer « des indemnités pour le futur » afin de compenser le préjudice dont ils sont victimes.

La cour a rejeté d’autres dossiers, non prescrits mais dans lesquels elle constate une insuffisance de preuves du lien de subordination entre ces ex-directeurs et la chaîne Méridien. Cette dernière plaidait que, si c’était bien elle qui recrutait les cadres, leur contrat de travail était ensuite suspendu durant leur période d’expatriation. L’entreprise considérait donc que ces personnels n’étaient pas ses propres salariés mais ceux des compagnies propriétaires des hôtels avec lesquelles un contrat de gestion et de conseil avait été signé.

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Emmanuel Macron annonce la défiscalisation des pourboires par carte bancaire

Une serveuse le 12 mai 2021, avant la réouverture des restaurants et des terrasses de café, le 19 mai.

Les pourboires payés par carte bancaire dans les cafés et restaurants seront défiscalisés. Emmanuel Macron a fait cette annonce lundi 27 septembre à Lyon, aux professionnels réunis au Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation (Sirha), qui s’est ouvert à Lyon. « Nous avons décidé que les pourboires payés par carte bleue seraient sans charge pour les employeurs et sans impôts pour les salariés », avec une mise en œuvre « dans les prochains mois », a-t-il affirmé.

Aujourd’hui, contrairement aux pourboires versés en espèces, les transactions par carte sont automatiquement déclarées et imposées. Mais grâce à cette annonce, un employé dans la restauration ou l’hôtellerie qui recevra un pourboire par carte bancaire n’aura plus besoin de le déclarer aux impôts. Ces transactions échapperont donc à l’impôt sur le revenu, ainsi qu’aux cotisations.

« Cela va permettre d’ajouter au pouvoir d’achat » des salariés du secteur, a argumenté le président. Accusé par l’opposition de sortir le carnet de chèque à sept mois de la présidentielle, l’entourage d’Emmanuel Macron se défend de tout électoralisme en disant que la mesure n’a pas de coût supplémentaire pour l’Etat : les pourboires versés en liquide sont actuellement très peu déclarés, et donc imposés. Cette mesure « ne coûte rien, car aujourd’hui ça ne marche pas », a-il ajouté, « parce qu’on l’a vu en sortie de crise, nos compatriotes utilisent de moins en moins de liquide ».

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Une mesure saluée par la profession

Cette mesure a été applaudie par la profession lundi matin. « C’est une excellente nouvelle, car le pourboire fait partie de l’attractivité de nos métiers. Mais maintenant que tout le monde paie par carte bleue ou via des applications, très souvent on n’a plus de monnaie pour rajouter 3 à 5 euros pour le service. Quand on aura la possibilité de laisser un pourboire sur la note, ce sera beaucoup plus facile », s’est félicité par avance lundi matin Didier Chenet, président du GNI, syndicat des indépendants de l’hôtellerie-restauration.

Le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, s’était lui aussi prononcé lundi matin en faveur de cette mesure, afin que les pourboires puissent être ajoutés directement sur l’addition payée par carte bancaire sans être taxés.

Cette mesure se veut un coup de pouce donné aux employés, mais aussi aux patrons qui ont du mal à recruter. « Cela va vous permettre d’attirer plus de jeunes et de moins jeunes pour leur dire : tu peux gagner plus que le salaire et le bonus que je te verse », a conclu le chef de l’Etat.

Emmanuel Macron avait souhaité en juin une reprise des embauches, disant que 110 000 emplois sont à pourvoir dans la restauration, un secteur qui a été frappé de plein fouet par la crise sanitaire du Covid-19 et les différents confinements. Le marché de la restauration commerciale a vu son chiffre d’affaires presque divisé par deux sur les sept premiers mois de l’année, comparativement à 2019, selon une étude de NPD Group. De janvier à juillet, par rapport à l’activité d’avant le Covid-19, le chiffre d’affaires a reculé de 45 %, et la fréquentation, de 39 %, explique le spécialiste des études de marché, dans un point sur l’activité d’un secteur qui en 2019 représentait 57 milliards d’euros en France.

La restauration commerciale « hors domicile » inclut la restauration avec service à table (cafés, bars, brasseries, cafétérias), la restauration rapide (fast-foods, ventes à emporter ou livrées, sandwicheries, boulangeries, traiteurs), la restauration dans les transports et les lieux de loisirs (musées), dans les entreprises et par distributeurs automatiques.

C’est la restauration à table qui a le plus souffert : avec « cinq mois de fermeture dus au Covid-19, elle a perdu les deux tiers de son chiffre d’affaires, soit − 68 % » à la fin juillet, contre « − 17 % pour la restauration rapide », estime Maria Bertoch, experte du secteur pour NPD Group, qui table sur un « retour à la normale d’ici deux ans ». En 2022 « le marché global reprendra sa croissance », avec une hausse du chiffre d’affaires de 21 % par rapport à 2021, anticipe le spécialiste des études de marché, tandis que le niveau de 2019 devrait être retrouvé en 2023.

Le Monde avec AFP

Le plan de l’exécutif contre la pénurie de main-d’œuvre

Le gouvernement s’attaque aux pénuries de main-d’œuvre, qui grippent la chaîne de production dans un nombre croissant d’entreprises. Lundi 27 septembre, Jean Castex devait se rendre à Châtellerault (Vienne) pour dévoiler un « plan de réduction des tensions de recrutement ». Au cœur des annonces du premier ministre, il y a un nouvel effort des pouvoirs publics pour former des salariés et des chômeurs. Cette démarche comporte un volet spécifique en faveur des « demandeurs d’emploi de longue durée », dont les détails devaient être donnés par la ministre du travail, Elisabeth Borne, à l’occasion d’un déplacement à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne).

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Avec le rebond de la croissance, de plus en plus de patrons se plaignent de ne pas trouver le personnel dont ils ont besoin, en particulier dans le bâtiment, l’hôtellerie-restauration, le transport routier de marchandises et les services d’aide à domicile. Une telle situation préoccupe l’exécutif, car elle risque d’entraver le redémarrage de l’activité, tout en mettant – à nouveau – en exergue un cruel paradoxe : d’un côté, des postes vacants – de l’ordre de 300 000, selon la Banque de France – ; de l’autre, des demandeurs d’emploi dont les effectifs, au deuxième trimestre, restent supérieurs à ceux des trois derniers mois de 2019.

M. Castex entend remédier à ce problème qui a pris une « dimension exacerbée », affirme-t-il dans un entretien au quotidien Les Echos de lundi. Le premier ministre cherche également à répondre aux attentes des industriels qui vivent des transformations majeures, sous l’effet de la transition écologique et de la digitalisation de l’économie (automobile, aéronautique…). Il veut, enfin, relancer des individus éloignés du monde du travail et prévenir le risque de déclassement chez des salariés dont les savoir-faire seront bientôt obsolètes.

Stimuler le dispositif « transitions collectives »

Sur 2021 et 2022, quelque « 1,4 milliard d’euros supplémentaires » vont être « mobilisés » pour adapter le niveau de qualification de personnes en activité et de chômeurs, indique M. Castex dans Les Echos, en précisant qu’il s’agit d’un redéploiement de « crédits d’urgence (…) budgétés pour la gestion de la crise ».

D’après le chef du gouvernement, près de 43 % de cette enveloppe (soit 600 millions d’euros) sera allouée à la formation d’environ 350 000 travailleurs supplémentaires, le but étant de leur apprendre de nouvelles techniques de production. Au passage, l’exécutif en profite pour stimuler le dispositif « transitions collectives », qui peine à décoller depuis son lancement en début d’année : ciblé sur la reconversion de salariés dont le métier est menacé, cet outil va être simplifié et pourra être utilisé dans le cadre de ruptures conventionnelles collectives – une procédure qui permet à un chef d’entreprise de se séparer de collaborateurs sur la base du volontariat.

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Sciences : « Le recours aux métriques et aux nombres présente des revers souvent ignorés ou sous-estimés »

Tribune. Les chiffres, nombres, mesures et métriques de toutes sortes envahissent nos vies, au point que certains ont le sentiment de vivre en « numéricratie ». Tout cela joue un rôle prépondérant dans nos existences, en permettant de quantifier, d’évaluer, d’organiser, de comparer, de réguler, de justifier et de réaliser une multitude d’opérations et de décisions.

Le processus de numérisation de nombreuses interactions humaines, le big data ou l’intelligence artificielle ont encore accru cette tendance : les individus, les entreprises, les universités, les hôpitaux, les sites sont notés, classés, comparés. Même l’amitié ou l’activité physique sont mesurées via les réseaux sociaux ou autres applications, avec des effets potentiellement néfastes sur la santé psychologique, quand la reconnaissance attendue n’est pas au rendez-vous ou l’objectif fixé n’est pas atteint.

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De parfaits inconnus accèdent parfois en quelques heures au rang de stars grâce au nombre de vues sur YouTube d’une vidéo devenue virale. Dix millions de vues atteintes ouvrent dorénavant les portes de l’Elysée pour un concours d’anecdotes, et permettent aux auteurs de voler avec la Patrouille de France ou d’être mis à l’honneur lors d’un discours présidentiel.

Les chiffres, une présomption de scientificité

On prête souvent des vertus d’objectivité, de persuasion aux métriques et aux nombres, au point qu’il est convenu d’admettre que ces derniers parlent d’eux-mêmes… Les chiffres bénéficieraient en quelque sorte d’une présomption de scientificité. Il n’est pas question de remettre en question les avantages indéniables du recours aux métriques et aux nombres.

Néanmoins, soulignons tout de même que ces avantages ont des revers, souvent ignorés ou sous-estimés. La volonté de rendre quasiment tout chiffrable se fait souvent aux dépens de dimensions fondamentales qui ne se prêtent pas aisément à la mesure ou à la quantification. Comment mesurer le bonheur d’une rencontre, l’émotion ressentie face à la nature, la souffrance, l’agacement ou l’énervement qui résultent d’un retard ou d’une injustice, etc.

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Heureusement on ne le peut pas. Sauf que ces dimensions au cœur de nos vies risquent en conséquence d’être simplement écartées, négligées, minimisées au profit d’aspects beaucoup plus réducteurs, simplificateurs, appauvrissants… mais quantifiables.

Les aspects non couverts par l’indicateur

Par exemple, combien d’entreprises, d’organisations continuent de contrôler avec précision les horaires exacts ou le temps passé par un individu sur son lieu de travail ou devant son ordinateur, sans considération pour son degré de satisfaction, de motivation et d’engagement, alors qu’il est parfaitement établi que ces derniers aspects sont beaucoup plus déterminants pour la performance individuelle et collective ?

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L’argot de bureau : le « cowalking » réinvente la réunion en extérieur

Seulement 52% des salariés trouvent efficaces les réunions traditionnelles.

Il est 15 heures à Central Park (New York). Sans surprise, on y retrouve tous les clichés possibles : des parents avec leurs poussettes, des retraités sur des bancs, le gazouillis des oiseaux et… une meute de promeneurs en costard et tailleur. Ce ne sont pas des touristes, ils n’ont pas d’audioguide sur les oreilles. Ce ne sont pas non plus des joggeurs, malgré leur montre connectée bipant pour indiquer qu’ils ont dépassé le seuil des 10 000 pas aujourd’hui. Non, ce sont des salariés en réunion, en « cowalking » ou « walk and talk ».

Le cowalking, que l’on pourrait traduire par « réunion-promenade », se définit comme une alternative aux réunions traditionnelles, que seulement 52 % des salariés trouvent efficaces, selon une étude OpinionWay de 2017. Qu’elle s’éternise pour cause de monologue de Bernard, qui aime donner son avis sur tout, ou qu’elle devienne une sieste collective devant les 873 diapositives du dernier business plan, la réunion à l’ancienne est celle où l’on perd du temps. Le walk and talk est né aux Etats-Unis lors des conférences de Steve Jobs, le fondateur d’Apple.

L’objectif le plus clair est de rattraper le temps perdu : un cowalking digne de ce nom dure une demi-heure tout au plus, s’établit sur un circuit prédéfini et doit aboutir à une décision. La prise de notes étant périlleuse en mouvement, il faut garder l’essentiel, débattu en un ou deux kilomètres. Il ne s’agit pas de faire du « corandonning » , ni même du « comarathoning », au risque de perdre quelques salariés en route… selon leur condition physique. Le cowalking n’est pas non plus une pause-café qui s’éterniserait, avec une équipe qui accompagnerait à l’extérieur Stéphanie, cette manageuse qui fume toutes les deux heures.

Des vertus vantées par Aristote et Rousseau

Ce type de réunion se distingue souvent par la taille : son petit comité (entre deux et quatre personnes) est censé faciliter la discussion franche et effacer les liens hiérarchiques. Cela permet aussi de s’affranchir du manque de confidentialité de l’open space, où souvent les oreilles traînent. Pour des raisons logistiques, il est par ailleurs difficile d’envisager vingt personnes marchant au même niveau sur un trottoir, à moins de piétonniser le quartier.

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Bien avant Steve Jobs, les philosophes de toutes les époques ont vanté les vertus de la déambulation. Aristote enseignait au lycée d’Athènes en marchant avec ses élèves, dans l’école « péripatéticienne », littéralement « qui aime se promener ». Plus tard, Jean-Jacques Rousseau découpait sa dernière œuvre, Les Rêveries du promeneur solitaire, en dix « promenades ». « La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées : je ne puis presque penser quand je reste en place, développe-t-il à ce sujet dans Les Confessions. Il faut que mon corps soit en branle pour y mettre mon esprit. »

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Les aides au recrutement d’alternants étendues à 2022, annonce Jean Castex

Jean Castex, lors de l’université de rentrée du MoDem, le 26 septembre 2021.

L’annonce intervient la veille de la présentation des modalités d’un nouveau « plan d’investissement dans les compétences ». Dimanche 26 septembre, Jean Castex a déclaré dans un entretien publié sur le site des Echos qu’il se fixait l’objectif de faire « former 1,4 million de demandeurs d’emploi en 2022 ». Le premier ministre a également annoncé l’extension « sur toute l’année 2022 » des aides au recrutement d’alternants.

Evoquant les difficultés de recrutement qui tendent « à se généraliser », Jean Castex a fait savoir que le gouvernement entend « mobiliser 1,4 milliard d’euros supplémentaires sur 2021 et 2022, dont 900 millions dès cette année » pour la formation professionnelle, en précisant qu’il s’agit de redéployer des crédits d’urgence qui avaient été « budgétés pour la gestion de la crise ». Les PME de 51 à 300 salariés « bénéficieront de 600 millions pour former leurs salariés », ajoute M. Castex.

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Un accent mis sur la formation des chômeurs

« Pour les chômeurs, nous assumons le parti pris de privilégier au maximum les formations en entreprise, directement opérationnelles », poursuit le premier ministre. Il a annoncé que l’Etat va signer « de nouvelles conventions avec les régions et avec Pôle emploi, à hauteur de 560 millions, et ouvrir les nouvelles formations à l’ensemble des demandeurs d’emploi quel que soit leur niveau de qualification. Objectif : former 1,4 million de demandeurs d’emploi en 2022 ».

Pour les demandeurs d’emploi de longue durée, qui comptent désormais pour plus d’un inscrit sur deux à Pôle emploi (50,3 %), il indique vouloir « rendre plus incitatif le bénéfice des contrats de professionnalisation pour les adultes ». Et ce « en étendant sur toute l’année 2022 l’aide à l’embauche des alternants, qui fonctionne très bien pour les jeunes ». Cette aide de 5 000 euros pour un mineur, 8 000 euros pour un majeur, qui concerne aussi les contrats de professionnalisation, a été prolongée à plusieurs reprises, la dernière fois début septembre jusqu’au 30 juin 2022.

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La fin des tests de « confort »

Dans ce même entretien, Jean Castex a par ailleurs confirmé la fin de la gratuité des tests de « confort » de dépistage du Covid-19 au 15 octobre. « Il n’est plus légitime de payer des tests de “confort” à outrance aux frais des contribuables », a déclaré le premier ministre. « Mais les tests continueront d’être remboursés pour raison médicale, soit sans prescription pour les personnes déjà vaccinées, soit sur prescription pour les autres. Nous voulons également maintenir la gratuité pour les mineurs » ajoute-t-il.

Lors de son allocution du 12 juillet, Emmanuel Macron avait annoncé que les tests de « confort » deviendraient payants à l’automne. La mesure est censée encourager la vaccination, mais aussi alléger la facture du dépistage, qui a coûté 2,2 milliards d’euros en 2020 et pour lequel 4,9 milliards sont prévus cette année.

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Le Monde avec AFP

A Marseille, les éboueurs se mettent à nouveau en grève

Lors de la grève des éboueurs, à Marseille, en décembre 2020.

Les poubelles joncheront-elles Marseille lors de la prochaine visite présidentielle d’Emmanuel Macron, attendue à la mi-octobre ? La perspective est encore lointaine mais la menace d’un conflit social sévère au sein des services de la propreté et de la collecte des déchets plane sur la cité phocéenne et sur l’ensemble des 92 communes de la métropole Aix-Marseille Provence (AMP).

Le syndicat Force ouvrière (FO), leader en voix à AMP, a déposé un préavis de grève pour le lundi 27 septembre. La CGT, membre d’une intersyndicale réunissant FSU, UNSA et CFTC, l’avait précédé dès le 1er septembre. A son appel, une quinzaine d’agents ont cessé le travail en fin de semaine au dépôt de la Cabucelle, dans le nord de Marseille, d’où partent chaque soir vingt-sept bennes.

Les organisations syndicales réagissent ainsi au plan de modification du temps de travail des agents, qui leur a été annoncé par la collectivité présidée par Martine Vassal (Les Républicains). Une énième tentative de rendre plus conforme à la légalité une organisation régulièrement pointée par la chambre régionale des comptes, et qui devrait encore subir les foudres de l’instance dans un rapport rendu public en octobre. Officiellement, les agents effectuent près de trente heures par semaine. L’installation de GPS sur les bennes aurait démontré, selon des sources syndicales, que le total hebdomadaire était bien plus bas.

Lire notre éditorial : Fonction publique : une réforme trop comptable

Forcée de se conformer à la loi de transformation de la fonction publique qui prévoit le passage de tous les agents à 1 607 heures annuelles au 1er janvier 2022, Aix-Marseille Métropole a dévoilé oralement ses intentions lors de rencontres individuelles avec les syndicats. Selon ces derniers, elle propose un passage à 1 530 heures du temps de travail global, appliquant une réduction de 5 % de la durée légale pour prendre en compte la pénibilité des postes. Avec pour conséquences, l’abandon du « fini-parti » – cet aménagement qui permet toujours aux fonctionnaires d’arrêter leur journée une fois leur tournée achevée –, l’augmentation de près de deux heures du temps de travail quotidien mais aussi la perte de jours de congés et d’heures supplémentaires.

Dossier remisé

Jeudi 23 septembre, plus d’une centaine de chauffeurs, de ripeurs – les personnels qui travaillent à l’arrière des bennes – et de contrôleurs sont venus crier leur colère au pied de la tour La Marseillaise, qui abrite une partie des services d’AMP. « L’administration nous dit : vous allez perdre vingt-huit jours de congés, vos heures supplémentaires, et travailler plus longtemps. Cette proposition est une agression. Et un danger pour notre santé », explose Karim Yagoub, secrétaire du secteur collecte chez FO.

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