Archive dans avril 2020

Un chien qui aboie, un enfant qui interrompt la conversation : le télétravail fait gagner en bienveillance

Pierre le Police pour M Le magazine du Monde

Qui est déjà parti en week-end avec des amis sait qu’un nouveau cap d’intimité est franchi quand on se croise en pyjama au petit-déjeuner. Depuis le 16 mars, c’est comme si une bonne partie des Français s’étaient vus, justement, en pyjama. Sur France Inter, l’animatrice Marie-Pierre Planchon laisse tomber une assiette pendant la météo. Les enfants des musiciens Matthieu Chedid et Raphael traînent dans leurs pattes pendant que leurs papas chanteurs sont en live sur les réseaux sociaux. Nous sommes à l’ère de la distanciation sociale, mais nous n’avons jamais été autant les uns chez les autres. Depuis que les bureaux, gares, écoles, cafés, et autres terrains de rencontres neutres ont disparu, tout se joue à domicile, et débarquent chez nous des gens qui n’y auraient jamais mis les pieds en temps normal.

Prenons Frédéric Vela, directeur du collège privé Saint-Joseph de Wattrelos, dans le Nord, en pleine période d’inscriptions pour les entrées en sixième de septembre. Il lui a fallu dix jours afin de se convaincre qu’il pouvait organiser ses rendez-vous avec les familles en visioconférence. « Les rôles se sont inversés : ce n’est plus l’élève qui est accueilli au collège, mais le chef d’établissement qui entre chez les personnes, dans leur lieu de vie. » Il a déjà vu un doberman traverser l’écran, entendu un bébé interrompre la discussion, parlé à toute une famille serrée sur un canapé. « Parfois, on est tellement bien qu’on sent qu’on pourrait passer l’après-midi ensemble. » Pas exactement une pensée qui lui venait à l’esprit quand il les recevait dans son bureau.

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« Plus on met de distance physique et de représentation, plus on peut escalader dans la violence. » Jean-Édouard Gresy, anthropologue spécialiste de la médiation

Adressez-vous à n’importe qui chez lui et le monde gagne en humanité. Au téléphone avec son conseiller Pôle emploi, Charlotte râlait parce qu’elle trouvait ses réponses sur les ruptures conventionnelles trop imprécises. Elle a entendu un gamin jouer derrière. Elle s’est calmée instantanément. C’était donc bien à un être humain qu’elle parlait. Dans son livre Le Singe nu, l’éthologue Desmond Morris montre que l’intelligence de l’être humain lui permet de désubjectiver son adversaire. « Plus on met de distance physique et de représentation, plus on peut escalader dans la violence. Le rappeur Akhenaton pouvait chanter Éclater un type des Assedic. À distance, on peut très facilement le voir comme un guichet… », commente Jean-Édouard Gresy, anthropologue spécialiste de la médiation. « Si l’on ne voit rien de qui est la personne, il est plus facile de la défoncer sur les réseaux sociaux. Dès qu’il y a resubjectivation, le partage d’humanité nous bloque dans notre agressivité. L’irruption d’un enfant, et je suis obligé de réagir autrement. »

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Air France va lancer un plan de départs volontaires

Des avions Air France sur le tarmac de l’aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle, en mai 2019.
Des avions Air France sur le tarmac de l’aéroport Roissy – Charles-de-Gaulle, en mai 2019. CHRISTOPHE ENA / AP

Air France va engager un plan de départs volontaires dans le cadre de la restructuration de la compagnie franco-néerlandaise, frappée comme l’ensemble du secteur par la crise liée à la pandémie de Covid-19, déclare le directeur général du groupe, Ben Smith, dans un entretien publié samedi par Les Echos.

Air France-KLM a annoncé vendredi avoir obtenu une aide de 7 milliards d’euros de la part de la France, le gouvernement néerlandais prévoyant pour sa part lui fournir une aide d’urgence de 2 à 4 milliards d’euros.

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« Certains personnels d’Air France sont probablement prêts à partir volontairement, si on leur donne la possibilité. La première étape consisterait donc à proposer des plans de départs volontaires », a déclaré Ben Smith aux Echos.

Pas de retour à la normale avant deux ans

Il a ajouté qu’il n’attendait pas à un retour à la normale avant au moins deux ans pour la compagnie, en fonction « de la réouverture des frontières, mais aussi du temps qu’il faudra à nos clients pour revenir dans les avions ». Concernant la flotte de très gros porteurs d’Airbus A380, Ben Smith a affirmé qu’il étudiait la possibilité de les sortir de la flotte du groupe avant la date initialement prévue de 2022.

« Concernant les A380, nous avions déjà pris la décision d’avancer leur sortie à 2022. Compte tenu de la situation, cela a-t-il du sens de les remettre en service d’ici là ? Nous prendrons la décision prochainement », a-t-il dit. Le remplacement de ces avions « par des appareils qui transportent moins de passagers » sur certaines liaisons fait également partie des pistes envisagées pour maintenir des vols réguliers vers certaines destinations très demandées comme Tokyo, Los Angeles ou New York, estime M. Smith.

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Le Monde

Coronavirus : Comment Uber prépare le déconfinement

Un livreur Uber Eats , le 24 avril, dans une rue de Paris.
Un livreur Uber Eats , le 24 avril, dans une rue de Paris. PHILIPPE LOPEZ / AFP

Comme tous les acteurs du transport dans l’Hexagone, Uber et ses filiales (les vélos Jump, la livraison de repas Uber Eats) préparent le déconfinement. La célèbre plateforme de VTC a informé, vendredi 24 avril, ses chauffeurs, livreurs et prestataires français des mesures mises en place dans l’optique de l’allègement des restrictions de circulation dues au Covid-19 prévues à partir du 11 mai.

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D’ici cette date, la compagnie américaine s’apprête à livrer près de 600 000 masques chirurgicaux à ses travailleurs en France : 350 000 pour les chauffeurs, 225 000 pour les livreurs d’Uber Eats et 20 000 pour le personnel assurant la maintenance des vélos électriques en libre-service Jump. Ces masques sont distribués gracieusement aux chauffeurs et livreurs, soit dans des espaces d’accueil pour chauffeurs (en région parisienne), soit dans des restaurants partenaires.

Dix masques par chauffeur ou livreur

Ces 600 000 masques sont la part française d’une commande mondiale de 10 millions d’unités réalisée par la maison-mère californienne. Ils permettent en théorie de donner une dizaine de masques à chaque chauffeur VTC, sous réserve que les 30 000 chauffeurs qui se connectaient habituellement chaque jour dans 24 agglomérations et métropoles françaises retournent travailler mi-mai. Uber indique que depuis le début du confinement le nombre de chauffeurs connectés a chuté mais sans en donner la proportion.

Dix masques par chauffeur ou livreur, cela peut sembler un peu court… Mais Uber affirme que « d’autres vagues de distribution sont prévues ». « Notre capacité à commander des volumes importants nous permet de sécuriser l’approvisionnement », explique une porte-parole. La plateforme ne rend toutefois pas obligatoire le port du masque pour ses chauffeurs et livreurs. « Ce sont des travailleurs indépendants, souligne-t-on chez Uber. Nous nous contentons de leur suggérer le port du masque. Les seules obligations sont celles édictées par les autorités locales et nationales. » Quant aux clients, aucune « suggestion » n’est pour l’heure prévue et Uber indique qu’une communication à l’endroit des usagers est programmée dans quelques jours.

La compagnie rembourse 50 euros
sur le prix de l’achat et de l’installation d’une paroi

Toutefois, l’entreprise propose à ses chauffeurs d’améliorer les conditions sanitaires du voyage en aidant financièrement à l’installation d’une paroi de séparation translucide en plastique dur (polycarbonate ou PVC). La compagnie rembourse 50 euros sur le prix de l’achat et de l’installation de la paroi et a mis en place des partenariats avec les sociétés Unipanel et Norauto permettant aux chauffeurs de bénéficier d’une réduction de 10 %.

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Presstalis : « Il est temps que l’Etat montre la voie »

Cédric Dugardin, président de Presstalis, le 13 juillet  2019, alors PDG de Conforama.
Cédric Dugardin, président de Presstalis, le 13 juillet  2019, alors PDG de Conforama. Lewis JOLY / JDD/SIPA / Lewis JOLY / JDD/SIPA

Lundi 20 avril, Cédric Dugardin, président de Presstalis, a déposé une déclaration de cessation de paiement de l’entreprise, prélude à un redressement judiciaire, et signe de la gravité de la situation du premier distributeur de la presse française. Pour sortir de la crise, les éditeurs de presse doivent s’entendre sur un plan de continuation de l’activité. Mais alors que la situation ne cesse de se dégrader sous l’effet du confinement, presse magazine et presse quotidienne continuent de se déchirer.

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Vous avez déclaré Presstalis en cessation de paiement. Que va-t-il se passer maintenant ?

Cette déclaration est un acte juridique. Il faut maintenant une audience au tribunal, qui peut décider d’un redressement judiciaire, ou dans le pire des cas, d’une liquidation. Cette audience devait avoir lieu ce vendredi 24 avril, elle se tiendra finalement le 12 mai. J’ai demandé son report car je considère qu’il y a eu des avancées significatives avec l’Etat et les partenaires sociaux. Ce délai doit nous permettre d’arriver devant le tribunal avec un plan abouti et d’éviter à Presstalis de rester longtemps en redressement judiciaire.

Quelle est la situation de Presstalis ?

Quatre cents marchands de journaux ont rouvert depuis le début du confinement. Il en reste donc 2 800 fermés, soit 16 % du chiffre d’affaires de Presstalis, contre 20 % au départ.

Deux plans de poursuite de l’activité sont sur la table. Que proposent-ils ?

Le plan proposé par les magazines prévoit de faire des Messageries lyonnaises de presse [MLP], concurrent de Presstalis, une messagerie unique. Presstalis deviendrait un centre de prestations de services, assurant certaines fonctions supports (informatique, réglage des « fournis »…). En face, le plan que nous proposons est un plan intermédiaire, qui intègre MLP dans le système, et prévoit un début de mutualisation des outils. Cela permet d’ouvrir la voie à une messagerie unique à terme. Dans tous les cas, la restructuration va coûter aux alentours de 150 millions d’euros. Le plan des magazines prévoit la reprise de 300 personnes sur 910. Celui de Presstalis, 360. C’est une réduction significative des effectifs.

Quelle est la réaction des syndicats face à cette perspective ?

Il n’y a pas eu de grève, les équipes poursuivent leur mission, et elles n’ont pas l’intention de l’interrompre. Les organisations syndicales continuent de discuter. Pour elles, le plan de Presstalis est un point de départ. En revanche, elles ont présenté un refus très clair au plan des magazines, qui transforme Presstalis en sous-traitant. Depuis le membre du comité de direction jusqu’au responsable syndical, tous souhaitent préserver leur messagerie car c’est la garantie d’avoir les clés de leur avenir. Dans un mariage, il faut être deux. Et les forcer à une alliance avec les MLP dont ils ne veulent pas serait suicidaire. D’ailleurs, MLP ne propose pas d’investir dans la nouvelle structure, mais simplement d’apporter son « savoir-faire ». L’entreprise veut prendre le meilleur et laisser le reste.

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Coronavirus : Jeff Bezos, sujet incontournable en temps de crise

Jeff Bezos, le 6 juin 2019 à Las Vegas.
Jeff Bezos, le 6 juin 2019 à Las Vegas. John Locher / AP

L’épidémie de coronavirus est survenue, et Amazon était là. Plus puissante que jamais. Dans une Amérique confinée, l’entreprise fondée par Jeff Bezos a changé de nature. L’ancienne librairie Internet de Seattle est presque devenue un service public recentré sur la livraison de produits alimentaires et médicaux de première nécessité. C’est ainsi que le leader américain du commerce par le Net se présente. « Les employés d’Amazon travaillent 24 heures sur 24 pour livrer les produits de première nécessité, à la porte des gens qui en ont besoin », écrivait mi-avril Jeff Bezos, dans sa lettre aux actionnaires. Le propos n’est pas complètement faux, comme le reconnaît le New York Times, dans une enquête pourtant très critique. « Plus le monde se dégrade rapidement, plus l’entreprise est attrayante. L’arrivée du coronavirus, qui a fait du déplacement au supermarché un risque et un supplice, n’a fait qu’accélérer le processus ».

Dans un monde où tout s’écroule, où l’Etat fédéral et la Fed impriment les dollars sans compter pour sauver l’économie, Amazon affiche une santé insolente. Son action a touché mi-avril un plus haut historique de 2 461 dollars (2 282 euros), en hausse d’un tiers depuis le début de l’année. L’entreprise vaut 1 200 milliards de dollars, plus de cent fois ses bénéfices, et la fortune personnelle de son fondateur, qui détient 11,2 % des actions, atteint désormais 145 milliards de dollars. L’homme le plus riche du monde devance largement Bill Gates et Bernard Arnault qui tournent autour de 100 milliards, selon le magazine Forbes : en moins d’un an, Bezos a presque effacé l’accord douloureux de divorce conclu avec son ancienne épouse MacKenzie Bezos, qui avait amputé sa fortune de 38 milliards de dollars.

Dans un pays qui admire les entrepreneurs, Bezos n’est que le huitième patron le plus populaire des Etats-Unis avec 26 % d’avis favorables selon la société YouGov

Dans un pays qui admire les entrepreneurs, Bezos n’est que le huitième patron le plus populaire des Etats-Unis avec 26 % d’avis favorables selon la société YouGov (loin derrière les 58 % de Bill Gates). Sans doute parce qu’il a la réussite brutale des titans du XIXsiècle, John Davison Rockefeller dans le pétrole et Andrew Carnegie dans l’acier. Comme eux, parti de rien, Jeff Bezos a multiplié les coups de génie pour transformer en empire sa librairie Internet fondée en 1994.

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Dans les années 2000, il ouvre sa plate-forme à tous les fabricants de la planète, pour devenir un supermarché mondial, et fidélise ses clients en leur promettant une livraison en deux jours au prix de 119 dollars par an. Puis, après la grande récession, il construit des entrepôts gigantesques dans la plupart des Etats américains, alliant robots et ouvriers, pour fournir tous les ménages américains. Mais comme Rockefeller et Carnegie, il a aussi maltraité ses salariés, combattu les syndicats, usé de sa position dominante et laminé ses fournisseurs, en pratiquant ce qui a été qualifié en interne de stratégie du léopard contre la gazelle : épuiser ses proies en commençant par les plus faibles. Dans un curieux aveu, semi-inconscient, Bezos avait rédigé au début de la décennie un mémo baptisé Amazon. love, dans lequel il décrivait ses valeurs et ce qui était « cool ». Un antiportrait des pratiques d’Amazon. Dix ans plus tard, il a une opportunité de changer son image. Sauveur ou profiteur de crise, l’Amérique frappée par le Covid-19 se déchire plus que jamais sur Amazon et son fondateur si controversé.

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« Le lien numérique, qui connectait au lointain mais déconnectait du prochain, semble désormais capable de les articuler »

Tribune. Tandis que la pandémie de Covid-19 fragilise jour après jour l’économie mondiale, les analyses se multiplient pour projeter le « monde d’après ». On évoque une économie plus écologique et plus indépendante, mais aussi plus numérique.

En effet, la numérisation forcée du travail pour des millions d’entreprises et pour leurs collaborateurs pourrait constituer une faille temporelle dans le rythme ordinaire de la diffusion de l’innovation.

Le sociologue Victor Scardigli a ainsi distingué trois temps dans l’insertion sociale des techniques. Le premier, rapide, est celui des discours prophétiques. Le deuxième, plus lent, celui de la diffusion de l’innovation, voit se développer les premiers usages… et les premières désillusions. Long et incertain, le dernier temps est celui de l’appropriation socioculturelle de l’innovation. L’« impératif numérique » généré par le Covid-19 pourrait l’accélérer.

Un « taylorisme 4.0 »

Une promesse fondatrice de la révolution numérique est l’établissement, par Internet, d’une intelligence sociale et collaborative. Elle privilégie le pouvoir latéral à l’autorité centrale et les interactions sociales à la division du travail. Mais, à l’usage, ces idéaux se heurtent encore à la permanence de représentations et de normes sociales solidement établies.

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Au lieu du pouvoir latéral s’est répandu un « taylorisme 4.0 », une emprise croissante des processus avec les algorithmes. Ceux-ci préconisent, ordonnent et font, en retour, remonter des indicateurs abstraits sur lesquels sont bâties les décisions. La numérisation des relations hiérarchiques souffre toujours d’un manque de confiance, forgé dans la croyance en la « propension naturelle du travailleur au farniente » autrefois théorisée par Taylor.

Sur le plan horizontal, les conséquences sociales de la numérisation sont plus diffuses. Quand certaines réunions utilisent habilement la visioconférence, d’autres sont peuplées de participants dont l’attention se divise entre l’animateur, l’ordinateur personnel et le smartphone.

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Les mails entre collègues se multiplient, bien souvent inutilement, au détriment de la productivité et de la créativité, qui se nourrit d’informel. L’ensemble explique le fameux paradoxe de Solow [Prix Nobel d’économie en 1987] – « on voit des ordinateurs partout sauf dans les statistiques de productivité » – qui démontre que la libération d’un potentiel technologique découle, en réalité, d’une cohérence entre un système technique et un système social.

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Coronavirus : en France, Amazon poursuit son bras de fer avec les syndicats et la justice

Le site d’Amazon à Lauwin-Planque dans le Nord.
Le site d’Amazon à Lauwin-Planque dans le Nord. DENIS CHARLET / AFP

C’est un moment symbolique dans le conflit entre la multinationale Amazon et les syndicats français, devenu affaire nationale et suivi de près au siège américain de Seattle (Etat de Washington) : vendredi 24 avril, la cour d’appel de Versailles a confirmé, tout en l’adoucissant un peu, la décision qui avait ordonné dix jours plus tôt à Amazon de mieux protéger ses salariés du coronavirus et de restreindre d’ici là ses activités aux produits jugés essentiels.

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C’est à la suite de ce revers que la société de Jeff Bezos avait décidé de fermer ses entrepôts français. Vendredi, les juges ont de nouveau intimé à l’entreprise de « procéder, en y associant les représentants du personnel, à l’évaluation des risques professionnels inhérents à l’épidémie de Covid-19 ».

La réaction d’Amazon ne s’est pas fait attendre : le groupe américain a décidé de ne rien changer et de ne pas rouvrir ses entrepôts. Dans un communiqué très vindicatif, il n’hésite pas critiquer vertement la décision de la justice française. « Elle nous conforte dans l’idée que l’enjeu principal n’est pas tant la sécurité, que la volonté de certaines organisations syndicales de tirer parti d’un processus de consultation complexe avec les comités sociaux et économiques », écrit l’entreprise de Jeff Bezos. « Nous ne pensons pas que cette décision soit dans le meilleur intérêt des Français, de nos collaborateurs et des milliers de TPE et de PME françaises qui comptent sur Amazon pour développer leurs activités », ajoute la direction.

Amazon souligne que « ses entrepôts sont sûrs ». Et que les comités sociaux et économiques (CSE) ont été « impliqués » dans la mise en place des mesures anti-coronavirus. Les syndicats dénoncent, eux, une approche « unilatérale », menée seulement au niveau de chaque entrepôt. La cour leur donne raison en demandant une consultation du CSE central.

Culture américaine rétive au syndicalisme

« Amazon, plutôt que de négocier, choisit de poursuivre son bras de fer. La direction joue l’opinion contre la force du droit. Ce n’est plus un problème économique, c’est un problème psychologique. “Je suis l’employeur, je décide”. On est dans le dogme », déplore Laurent Degousée de la fédération Sud-Commerce, auteur de la plainte en première instance et rejoint en appel par la CFDT, la CGT et FO. L’entreprise de Jeff Bezos est connue pour sa culture américaine rétive au syndicalisme.

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Pourtant, la décision judiciaire permet à Amazon d’écouler « 50 % de son catalogue », souligne le syndicaliste. La cour d’appel ne donne aucun chiffre mais elle est en effet allée dans le sens du géant américain sur certains points : elle a élargi et précisé les catégories de produits autorisées à la vente, en se référant au catalogue de la plate-forme : « high-tech », « informatique », « bureau », « tout pour les animaux », « santé et soins du corps », « homme », « nutrition », « parapharmacie », « épicerie », « boissons » et « entretien ». Cet éventail large dépasse celui fixé par le tribunal judiciaire de Nanterre, restreint aux seuls produits « alimentaires », « médicaux » et « hygiène ».

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Le paiement par titres-restaurant va être déplafonné à 95 euros dans les supermarchés

A la caisse d’un supermarché de Saint-Pol-de-Léon (Finistère), le 22 avril.
A la caisse d’un supermarché de Saint-Pol-de-Léon (Finistère), le 22 avril. STÉPHANE MAHÉ / REUTERS

Le plafond de l’utilisation des titres-restaurant pour des achats alimentaires a été modifié à 95 euros, une fois par semaine, contre 19 euros par jour actuellement, a annoncé jeudi 23 avril le ministère du travail.

Un décret conjoint avec le ministère de l’économie sera pris « d’ici à la fin de la semaine prochaine » pour permettre ces paiements dans les supermarchés et les commerces de proximité. La radio RTL avait révélé l’information en début de journée, jeudi.

Possible dans les restaurants dès leur réouverture

« Concrètement, cela veut dire qu’il sera possible de payer en une seule fois ses courses alimentaires avec ses titres-restaurant », précise le ministère du travail, ajoutant que ce dispositif restera en vigueur jusqu’à la réouverture des restaurants. Ensuite, « une mesure similaire sera prise pour le paiement dans les restaurants », ajoute le ministère.

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Les titres périmés pourraient alimenter un fonds de soutien pour la restauration, a ajouté le ministère, sans plus de précision. Quelque 4 millions de salariés utilisent des titres-restaurant, un secteur qui représente plus de 6 milliards d’euros par an.

Plan de soutien spécial pour la restauration

Emmanuel Macron doit par ailleurs tenir, vendredi, une visioconférence avec des représentants du secteur de l’hôtellerie et de la restauration sur un plan d’aide promis par le gouvernement. Ce plan spécial doit comprendre des aides complémentaires aux dispositifs déjà mis en œuvre par le gouvernement, afin d’aider ce secteur que le chef de l’Etat a décidé de rouvrir plus tard que les autres commerces, sans date annoncée.

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La fermeture des cafés, hôtels et restaurants pour endiguer la pandémie de Covid-19 pourrait aussi entraîner une baisse de 35 % des ventes de vin en volume en Europe, et de 50 % en valeur, selon une estimation, jeudi, du directeur général de l’Organisation internationale du vin (OIV), Pau Roca.

Si l’OIV évoque une augmentation des ventes dans les épiceries et supermarchés, « ces bonnes nouvelles ne compensent cependant pas toutes les pertes causées » par la réduction des ventes dans les hôtels, cafés et restaurants, a souligné M. Roca. Les productions annuelles de l’Italie, de la France et de l’Espagne représentaient à elles seules 25 % de la consommation mondiale en 2019.

Le Monde avec AFP

« Dérapages » avec Eric Cantona : un jeu de rôle en entreprise tourne à la manipulation sociale

Eric Cantona (Alain Delambre) dans la série « Dérapages »,  de Ziad Doueiri.
Eric Cantona (Alain Delambre) dans la série « Dérapages »,  de Ziad Doueiri. STÉPHANIE BRANCHU/ARTE

ARTE – JEUDI 23 AVRIL À 20 H 55 – MINISÉRIE

Alain Delambre (Eric Cantona) a « plus de 50 ans, moins de 60 », âge critique pour retrouver du boulot, surtout quand on répond par un coup de boule aux humiliations d’un contremaître… Mais la boule, Delambre va la perdre vraiment alors qu’il est invité à intervenir dans le cadre d’un jeu de rôle organisé par une grande entreprise.

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Une prise d’otages est simulée afin de tester la fiabilité de certains hauts cadres et la capacité de Delambre à faire office d’éventuel « bad cop » dans un vaste plan de licenciements à venir. Delambre s’est endetté et décrédibilisé auprès de sa famille pour se former à cette prise de rôle armé. Aussi, quand il prend conscience que la machination le concerne également, Delambre retourne la situation de telle sorte qu’elle va susciter de palpitants – mais rocambolesques – rebondissements.

L’ennui est que Dérapages n’est pas une série mais un téléfilm gonflé en six parties : combien longuettes et répétitives sont, par exemple, les scènes tournées dans la prison où Delambre attend son procès entouré de sales gueules parmi les plus improbables (à vouloir faire trop vrai, on finit par faire faux)…

Platitudes parfois confondantes

La scène gigogne de la vraie-fausse prise d’otages mérite son temps à l’écran mais le procès qui occupe le dernier épisode est soporifique. Au moins a-t-on évité la plaidoirie d’un avocat vedette, Me Durand Perretti (il fallait oser…), finalement refusé par Delambre.

Par ailleurs, le principe de la confession rétrospective du taulard face caméra pratique trop souvent la tautologie (répétant ce qu’une scène vient de dire clairement) et fait entendre des platitudes parfois confondantes (« Le monde de l’entreprise c’est comme le Far West : il faut être armé. ») De sorte qu’on a souvent l’impression d’être dans un épisode de ces séries de fausse téléréalité criminelle…

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Adaptés par Pierre Lemaître (Prix Goncourt 2013) de son roman Cadres noirs (Calmann-Lévy, 2010), les dialogues sonnent souvent faux et plat en dépit de leur incarnation par Eric Cantona, à la force intranquille assez impressionnante, et par la fine actrice canadienne Suzanne Clément dans le rôle de son épouse.

Dérapages, série écrite par Pierre Lemaître et réalisée par Ziad Doueiri. Avec Eric Cantona, Suzanne Clément, Alex Lutz, Gustave Kervern (FR, 2019, 6 x 48-58 min.) Trois épisodes le jeudi à partir de 20 h 55 et en intégralité sur Arte Tv jusqu’au 13 mai.

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