« Dix concepts pour penser le nouveau monde du travail »
Nous vivons un changement en profondeur des anciens rapports de production hérités du modèle de développement fordiste, relate « Dix concepts pour penser le nouveau monde du travail », livre publié sous la direction de Daniel Mercure et Mircea Vultur.
« Dix concepts pour penser le nouveau monde du travail », sous la direction de Daniel Mercure et Mircea Vultur (Hermann, 248 pages, 24 euros).Plus cultivée, plus féminisée, plus soucieuse d’assurer sa subjectivité et de revendiquer le droit à l’épanouissement personnel, la population salariée connaît des changement culturelles. Nous assistons à une transformation en profondeur des anciens rapports de production hérités du modèle de croissance fordiste.
C’est l’idée relaté par Daniel Mercure et Mircea Vultur dans l’essai Dix concepts pour penser le nouveau monde du travail. « Des changements de cette ampleur ont inévitablement des conséquences sur les modes d’analyse sociologique du monde du travail et sur les concepts que ceux-ci mobilisent, de même que sur l’étendue du champ couvert par l’objet “travail”, fort différent aujourd’hui de celui qui caractérisait la société salariale de type fordiste », déclarent les auteurs.
Le livre dirigé Daniel Mercure, professeur au département de sociologie de l’université Laval (Canada), et par Mircea Vultur, professeur au centre Urbanisation Culture Société de l’Institut national de la recherche scientifique (Québec), part d’un constat simple. En raison d’un Changement du monde du travail, la sociologie du travail se trouve face à des défis de recadrage et d’affinement de ses concepts d’analyse, amplement forgés durant la période des « trente glorieuses » et, de surcroît, dans des cadres nationaux et culturels précis. « Ils sont donc ancrés empiriquement et théoriquement, et dans certains cas idéologiquement, dans un contexte historique très marqué, en l’occurrence celui du fordisme des années de croissance d’après-guerre. »
Histoire de l’émergence du salariat
Une vérification voire une redéfinition de quelques concepts s’impose alors : que signifient actuellement , par exemple, « conflit », « compétence » ou « rapport au travail » ? Quelles dimensions doivent être ajoutées ou soustraites aux concepts bien fait afin pour comprendre de manière plus adéquate la nouvelle réalité du monde du travail ?
Le livre nous montre à la fois des concepts classiques revisités et d’autres qui revêtent une pertinence grandissante pour monter les nouvelles réalités du monde du travail. C’est le cas par exemple de la précarité. Les auteurs observent la pertinence analytique, les atouts et les faiblesses de dix concepts-clés : du salariat à l’informalité en passant par le conflit, le rapport au travail et l’insertion professionnelle.
Le directeur de recherche au CNRS Claude Didry montre une analyse historique de l’émergence du salariat. Le directeur de la revue Sociologie du travail, Didier Demazière, explore le concept de parcours professionnel, dont la pertinence a été substituer par la forte progression de l’instabilité des formes d’emploi, la diversification des ruptures professionnelles, et l’allongement des périodes d’incertitude. Le dernier chapitre de livre, effectué par Paul Bouffartigue, directeur de recherche au CNRS, porte sur le temps et ses nouvelles articulations avec le travail.
Liron Ben-Shlush et Menashe Noy dans « Working Woman », de Michal Aviad. KMBO
Tournant dans la vague #metoo, l’Israélienne Michal Aviad accomplit un film d’une sécheresse et d’une médiocrité bienvenues qui enseigne, au quotidien, comment la vie d’une jeune femme peut être affectée par une conduite de prédation sexuelle montant méchamment en puissance sous les dehors d’une requête d’efficience et de complicité professionnelles.
Interprété par Liron Ben-Shlush – qu’on avait déjà pénétrée très convaincante dans Chelli (2014), d’Asaf Corman – le personnage d’Orna trouve, au début du film, un travail exceptionnel comme assistante dans une agence immobilière spécialisée dans les produits de luxe. Une aubaine, alors que son mari, Ofer, qui se lance au même moment dans la restauration à son propre compte, peine à découvrir ses marques et que la famille tire le diable par la queue.
Devant Orna parade Benny (Menashe Noy), le patron de la société immobilière qui vient de la recruter. Père de famille, mais homme de pouvoir et séducteur irrépressible, le quinquagénaire utilise une gamme de comportements assez subtile pour parvenir à ses fins. Autoritaire et serviable. Amical et prédateur. Il ne régresse que pour mieux revenir à la charge. Et fait feu de tout bois. Promotion rapide, prolongement des journées de travail, voyages à l’étranger, tête-à-tête de plus en plus fréquents, coup de main donné à l’occasion au mari dans sa carrière naissante… Autant d’éléments qui, tant en vertu de la reconnaissance que du témoignage de loyauté professionnelle qu’ils engagent, œuvrent à un approche insidieux entre le patron et son employée.
Mutisme stoïque
Bientôt appelée directrice des ventes pour la clientèle française, Orna, seul pôle de stabilité financière du foyer, résiste en silence. Le mutisme stoïque dans lequel elle s’emmure, tour à tour flattée et choquée, va l’empêcher de prédire et de freiner la montée en puissance du désir de son patron, qui le conduira à transgresser toutes les règles.
Centré sur le couple, filmé en longs plans-séquences, le film laisse en jachère, par la force des choses, les autres personnages, comme le mari ou la mère d’Orna, qui ignorent de quoi il rentre. Encore que l’aveuglement auquel est cantonné le mari, et sa réaction de machiste obtus sur le tard, puisse être aperçu comme une sorte de connivence involontaire, et donc être mis au débit du genre masculin dans son ensemble, qui sort du film en très piteux état. Working Woman installé en revanche une liaison plus subtile entre le libéralisme destructeur qui vend à l’encan le littoral du pays à de riches étrangers et l’outrage à la libre disposition de leur corps dont sont victimes les femmes.
Film israélien de Michal Aviad. Avec Liron Ben-Shlush, Menashe Noy, Oshri Cohen (1 h 33). Sur le Web : www.kmbofilms.com/working-woman