« Xerox, le roi de la photocopie, vient de demander en mariage Hewlett-Packard, l’inventeur de la Silicon Valley »

« Xerox, le roi de la photocopie, vient de demander en mariage Hewlett-Packard, l’inventeur de la Silicon Valley »

Le roi de la photocopie a demandé en mariage l’inventeur de la Silicon Valley. Tous les deux sont victimes de la malédiction de la fin du papier, raconte Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde », en évoquant le destin de ces deux anciennes gloires de la high-tech américaine.

Publié aujourd’hui à 11h05, mis à jour à 11h11 Temps de Lecture 2 min.

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Chronique. Ce sont deux vieilles stars mondiales, perclues de rhumatismes qui pourraient bientôt se présenter devant monsieur le maire. Xerox, le roi de la photocopie, vient officiellement de demander en mariage Hewlett-Packard, l’inventeur de la Silicon Valley. Feront-elles une union heureuse ? Elles auront en tout cas beaucoup de vieux souvenirs à se raconter. Des victoires éclatantes et des rendez-vous ratés.

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Xerox a inventé l’imprimante et la photocopieuse. Elle a révolutionné la vie de bureau dans les années d’après guerre. On disait « to Xerox » au lieu de « photocopier ». Sa part de marché avoisinait les 100 %. Les autorités anti-concurrence de Washington ont dû intenter une longue action antitrust pour laisser de la place à la concurrence. Les Japonais sont arrivés, puis le numérique. La firme s’est réinventée un destin, celui de la « document company », spécialiste du passage du numérique au papier. Elle avait constaté qu’à l’âge de l’ordinateur, on n’avait jamais imprimé autant. Alors elle a creusé son sillon dans ces océans de papiers qu’étaient devenues les entreprises modernes.

Mais la conjonction d’Internet et du téléphone mobile, ajoutée à la mauvaise conscience écologique, a fini par endiguer ce flot. Que faire quand sa raison d’être s’évapore progressivement ? On restructure et on rachète la concurrence.

Hewlett-Packard est finalement victime de cette même malédiction de la fin du papier. Concurrencé de partout sur son métier de fabricant d’ordinateurs, le groupe californien, autrefois deuxième groupe mondial du secteur derrière IBM, a cru voir son salut dans les imprimantes pour particuliers. Avec un modèle économique en béton, le même que celui des rasoirs Gillette.

Préservation de sa vache à lait

On vend à prix coûtant le support de base et on se rattrape sur les consommables, en l’occurrence les cartouches d’encre qui représentent près des deux tiers des profits de la firme. Aujourd’hui, le marché baisse et les fournisseurs chinois de cartouches détruisent cette belle architecture. La société a annoncé la suppression de 16 % de ses effectifs d’ici deux ans. Trois fois plus grosse que Xerox, HP renâcle à se laisser passer la bague au doigt. Mais ses actionnaires pourraient l’y pousser.

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Il aurait pu en être autrement. En 1970, Xerox au fait de sa gloire, implante un extraordinaire laboratoire de recherche sur le campus de l’université de Stanford, au cœur de la Silicon Valley. En dix ans ses chercheurs sortiront l’imprimante laser, mais aussi les interfaces graphiques pour petits ordinateurs, la souris, le réseau local Ethernet, c’est-à-dire toutes les briques de base qui feront la révolution de l’informatique personnelle. Xerox n’en comprend pas le potentiel. En novembre 1979, un certain Steve Jobs pousse la porte du labo et est ébahi par ce qu’il découvre. Ce seront les briques de base du Macintosh, mais aussi celle du Windows de Microsoft.

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LJD

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