« Une gestion plus humaine de l’entreprise n’est ni idéaliste ni accessoire »

« Une gestion plus humaine de l’entreprise n’est ni idéaliste ni accessoire »

Ces trois dernières décennies ont été marquées par l’émergence d’une critique étayée des modes de gestion traditionnels des entreprises, qui sont aujourd’hui reconnus comme producteurs de maladies de longue durée, de comportements de retrait ou de désengagement, de démissions et de satisfaction en berne.

En cause : le management « froid », autoritaire, déshumanisé (le management désincarné des indicateurs, au sens de Pierre-Yves Gomez et d’Yves Clot), autant que trop… humanisé : le salarié est éternellement remis en question, sa personnalité et ses valeurs sont surexposées (en suivant cette fois les observations de Danièle Linhart).

Dans une enquête menée au plus fort de la crise du marché de l’emploi, 1 155 salariés ayant changé d’employeur en 2022 énonçaient les critères d’attractivité qui ont été déterminants dans leur choix : la bienveillance, l’équilibre vie privée-vie professionnelle, l’ambiance de travail, le contenu du travail, la qualité du management et la reconnaissance (« L’attractivité employeur », de Louise Patesson, Jean Pralong, Laurent Taskin, rapport de recherche, chaire labor-H, Université catholique de Louvain, 2023).

Considération et reconnaissance

Ainsi réapparaît une demande d’humanisation du management. C’est une demande qui considère qu’au-delà du profit l’organisation peut promettre plus : la dignité de la personne, la reconnaissance et la bienveillance. Comment s’étonner qu’il y ait plus d’attentes que le salaire à la fin du mois pour qui passe une bonne partie de sa vie au travail ? Comment s’étonner que des travailleurs veuillent être considérés et reconnus dans leur travail ?

Cette demande n’est ni idéaliste ni accessoire : elle constitue une nouvelle exigence pour la gestion. Elle n’est pas idéaliste car l’humanisation du management n’est pas affaire de bons sentiments : elle est affaire de structures, de processus, d’incitations, de pratiques permettant de transformer en profondeur le management. Elle n’est pas accessoire car l’humanisation du management est une nécessité, tant morale que pratique.

Ethiquement, elle suppose de réels engagements : renoncer à la facilité du pouvoir vertical et des décisions unilatérales, consacrer du temps supplémentaire à réfléchir à la manière de « bien » gérer, de manière soutenable et respectueuse.

Concrètement, elle doit s’incarner dans des pratiques autant que dans des comportements et des discours. Parmi ces pratiques, mentionnons la valorisation du collectif (par exemple un management participatif, une démocratisation de la gouvernance de l’entreprise…) ; l’instauration de règles éthiques claires et contraignantes, depuis la raison d’être de l’entreprise jusqu’aux critères d’évaluation des salariés de l’entreprise ; ou encore la mise en place d’un management qui concentre les pratiques de gestion sur le travail réel, génère la reconnaissance et met en exergue la réflexivité de tous les membres de l’organisation.

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LJD

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