Thibaut Guilluy, un fidèle de Macron à la tête de France Travail
Pouvait-il vraiment en être autrement ? Le choix n’a en tout cas pas surpris grand monde. Architecte de la transformation du service public de l’emploi depuis dix-huit mois, Thibaut Guilluy a pris la tête de Pôle emploi, le 21 décembre 2023, devenu France Travail, lundi 1er janvier. Celui qui était jusque-là haut-commissaire à l’emploi a quitté le faste de l’hôtel du Chatelet, qui abrite le ministère du travail, dans lequel il occupait un bureau sans âme à la lumière blafarde, pour la moins clinquante porte des Lilas, dans le 20e arrondissement de Paris, où se situe le siège de l’opérateur public.
Sa nomination, annoncée en conseil des ministres le 12 décembre, relevait de l’évidence, tant le nom de Thibaut Guilluy est associé à la création de France Travail qu’il a dessinée et pilotée. La transformation du service public de l’emploi fait partie des leviers sur lesquels compte le gouvernement pour atteindre son objectif de plein-emploi – autour de 5 % de chômage, contre 7,4 % aujourd’hui – d’ici à 2027.
Son arrivée à la tête de France Travail vient concrétiser un parcours et un engagement qui ne se sont jamais éloignés du social. « J’ai le sentiment d’avoir les moyens de mieux servir la mission que je sers depuis vingt-cinq ans », confie le nouveau directeur général au Monde. Fondateur d’un grand nombre d’entreprises ou d’associations, toutes en lien avec le secteur social et celui de l’insertion, le quadragénaire a déjà derrière lui une carrière presque boulimique d’entrepreneur. « Cofondateur multirécidiviste », se présente-t-il sur LinkedIn, idiome « start-up nation » de rigueur.
« Sentiment de responsabilité »
« J’ai toujours monté plein de projets, je suis un créateur d’entreprises », revendique-t-il, façon homme pressé toujours paré d’un costume cravate soigné. Une soif d’entreprendre qu’il tient de son passage à l’Ecole supérieure de commerce de Paris, dont il sort diplômé en 1999. Mais dès ses études, il s’investit auprès d’Emmaüs ou des Apprentis d’Auteuil. Une attention pour les plus démunis qu’il considère détenir de son héritage familial. Issu de la bourgeoisie d’Etaples (Pas-de-Calais), dans une famille où l’on est médecin de campagne de père en fils, Thibaut Guilluy ne tire pas de cette ascendance confortable un « sentiment de culpabilité », mais plutôt un « sentiment de responsabilité ». « Le mérite ne fait pas tout », juge-t-il, il faut que « ceux avec qui la vie a été généreuse se mobilisent pour ceux avec qui elle l’a moins été ».
Reste que diriger France Travail, établissement de 55 000 agents à la dimension éminemment politique, est une mission d’une tout autre ampleur que ce qu’il a déjà connu. Plusieurs responsables du Medef, sans vouloir le dire officiellement, doutent de ses capacités à diriger un tel navire. Un scepticisme que ne partage pas le vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises, Eric Chevée : « Il a montré qu’il avait les qualités pour cette mission, on doute plus de la nouvelle machine que de l’homme. » Président de l’Assemblée des départements de France, François Sauvadet, loue son « pragmatisme », son « courage » et son « sens de l’écoute ». « C’est bien que celui qui a conçu France Travail en prenne la direction, c’est même un exemple de ce qu’il faut faire », complète le président de la Côte-d’Or.
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