Sur les compensations chômage pour les cadres, une exceptionnelle union entre la CFE-CGC et la CGT
Une alliance exceptionnelle a vu le jour pour s’objecter au sort attentif aux cadres dans la réforme de l’assurance-chômage que devait exposer, mardi 18 juin, Edouard Philippe, Muriel Pénicaud. La CFE-CGC, la confédération de l’encadrement, et l’UGICT, l’Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT, ont initié, le 11 juin, une requête nommée « non à la dégressivité des allocations-chômage ». Celle-ci avait concentré, mardi matin, plus de 7 000 signatures sur la plate-forme Change.org.
Dans son exposé de politique générale, le 12 juin, à l’Assemblée nationale, M. Philippe a affirmé que l’allocation des chômeurs qui apercevaient une rétribution élevée lorsqu’ils étaient en activité serait dégressive. L’exécutif se justifie en faisant valoir que le taux de chômage pour ces personnes est très faible et qu’il leur est plus facile d’avoir un emploi. Un raisonnement qui ne passe ni pour l’UGICT ni pour la CFE-CGC, qui le jugent « populiste ».
C’est la première qui est à l’origine de cette décision commune, et la seconde n’a pas souhaité à embrayer. Les autres confédérations n’ont pas été souhaitées. Dans le texte qui accompagne la pétition, ses auteurs jugent qu’« une fois expérimentée, n’en supposons pas, la dégressivité sera étendue à tous les autres travailleurs au prétexte de l’équité » et que « stigmatiser les cadres alors qu’on refuse de rétablir l’impôt sur la fortune, la ficelle est un peu grosse ».
Si ces discours sont dans la droite ligne de ce que défend la CGT, elles sont plus étonnantes pour la CFE-CGC. « Ce n’est pas forcément raccord avec ce que les cadres attendent », se demande un haut gradé d’une autre organisation syndicale.
« Particulièrement indigne »
François Homméril, président de la CFE-CGC, les assume entièrement. « Le gouvernement en a plein la bouche de son argument de “justice sociale”, dénonce-t-il. C’est principalement révoltant quand on sait qu’il s’agit de s’attaquer au principe même du régime assurantiel et contributif. Sans les plus hauts revenus, il n’y a pas d’équilibre ni de solidarité du système. » Même si sa centrale n’est pas allée jusqu’à appeler à défiler aux côtés de la CGT contre les ordonnances enlevant le droit du travail en 2017, M. Homméril a multiplié les critiques envers l’exécutif depuis le début du quinquennat.
Le ton est encore élevé d’un cran depuis qu’il sait que les droits de la catégorie socioprofessionnelle engendrant l’essentiel de l’électorat de son syndicat vont être rognés. « Dire, comme le fait le gouvernent, qu’il y a une corrélation entre le niveau d’indemnisation et le nombre de jours passés à Pôle emploi est une interprétation fausse d’une courbe qui est réelle, c’est un viol des faits et des chiffres, s’emporte-t-il. Pour les cadres expérimentés, il est difficile de retrouver le même niveau d’emploi, c’est beaucoup plus dur de rebondir. »
Le président de la CFE-CGC ne se fait néanmoins guère d’illusions sur le succès de la pétition dont le nombre de signataires, reconnaît-il, est « relativement faible » à l’heure actuelle. Mais initier cette action avec la CGT forme pour lui « un message politique fort ». Quant à ceux qui ridiculisent depuis plusieurs mois sur la « CFE-CGT », il n’en a cure : « Cela fait trente ans que je milite et trente ans qu’on me fait le coup, rien de nouveau sous le soleil. »