« Le droit des affaires américain et sa jurisprudence devront évoluer pour permettre ce changement »

« Le droit des affaires américain et sa jurisprudence devront évoluer pour permettre ce changement »

« Le droit des affaires américain et sa jurisprudence devront évoluer pour permettre ce changement » (Photo: Jamie Dimon, le PDG de JPMorgan Chase & Co, en avril).
« Le droit des affaires américain et sa jurisprudence devront évoluer pour permettre ce changement » (Photo: Jamie Dimon, le PDG de JPMorgan Chase & Co, en avril). Patrick Semansky / AP

Professeure titulaire de la chaire de gestion Joseph C. Wilson à la Harvard Business School et de la chaire d’innovation sociale Alan L. Gleitsman à la Harvard Kennedy School

La professeure Joseph C. Wilson de Harvard salue le « changement de discours » des patrons américains après la tribune publiée le 19 août dans le « New York Times » déclrant l’abandon de la priorité donnée aux actionnaires, mais compte les conditions d’une mise en pratique de ce discours dans la réalité.

Il aura donc fallu espérer plus de dix ans après la crise de 2007 pour que les chefs d’entreprises américains remettent en cause le principe de la poursuite de la maximisation de la valeur pour les seuls actionnaires, et saisissent emplacement en faveur d’une transformation de paradigme.

Les responsables membres de la puissante Business Roundtable, qui rassemble 193 des plus grandes entreprises américaines, utilisant à elles seules plus de 15 millions de personnes, ont cosigné un nouveau texte sur le rôle et la mission des entreprises, publié dans le New York Times du 19 août, témoignant que ces dernières doivent servir non uniquement les intérêts de leurs actionnaires sur le long terme, mais aussi ceux de leurs employés, de leurs fournisseurs, et plus entièrement de la société (« Statement on the Purpose of a Corporation », voir lien PDF). Les 181 PDG signataires déclarent partager un « engagement fort auprès de toutes les parties prenantes de leurs entreprises », assurant ainsi la rupture par rapport au système jusqu’ici dominant.

Voilà en effet actuellement près d’un demi-siècle que le monde des affaires américain est arrangé autour du principe de maximisation de la valeur pour les actionnaires. L’un des nombreux porte-drapeaux de cette approche, l’économiste Milton Friedman, avait participé à justifier l’inéluctabilité de cette logique en clamant que la responsabilité sociale des entreprises était de maximiser leurs profits. Mais les économistes adeptes de Friedman sont loin d’être les seuls à avoir favorisé l’avènement de ce principe : les membres de la Business Roundtable ont eux aussi par le passé joué un rôle important dans son maintien.

L’annonce a eu l’effet d’un coup de tonnerre et suscité deux types de réactions très opposées.

Les uns fêtent déjà l’avènement d’un nouveau système économique plus juste, humain, et respectueux de l’environnement, tandis que d’autres fustigent une nouvelle tentative de perfectionnement de l’image des grandes entreprises, qui aspirent vouloir changer leur approche, mais continuent de poursuivre au quotidien leur quête effrénée du profit.

Pas de plan d’action tangible

Un tel dualisme est stérile au moment où se joue l’avenir de notre système économique et social. S’il faut se réjouir de ce transformation de discours, qui ouvre la porte à une possible refonte du modèle capitaliste et du rôle des entreprises dans la société, deux questions doivent néanmoins être posées : pourquoi une telle transformation maintenant ? Et sera-t-il suivi d’actions ?

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LJD

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