Le Covid n’accélère que les innovations d’un futur désirable

Le Covid n’accélère que les innovations d’un futur désirable

Entreprises. Comme les grandes guerres et les catastrophes naturelles, la pandémie de Covid-19 constitue un accélérateur puissant pour de nombreuses innovations. Elle a banalisé le télétravail, suscité l’invention de socialités « distanciées » et forcé à largement transgresser les règles réputées inviolables de la rigueur budgétaire. Mais comment les grandes crises stimulent-elles la créativité collective ? Pour le sens commun, « nécessité fait loi » et « l’urgence commande ».

Mais il ne s’agit là que d’une partie de la réponse : ni la nécessité ni l’urgence ne suffisent, en général, à nous rendre inventifs. La recherche sur les entreprises innovantes a ainsi confirmé que le processus créatif exige deux mécanismes distincts et complémentaires que l’on retrouve dans les crises : d’une part, de rompre avec le connu et, d’autre part, de consentir à des efforts collectifs inédits pour la conception de solutions techniques et sociales inconnues (Pascal Le Masson, « Innovation de rupture : une question de méthode », The Conversation, 15 mars 2018).

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En effet, la grande crise impose, d’abord, l’abandon des techniques, des habitudes et des lois les plus familières. Se produit ainsi une « défixation » : ce que l’on croyait vrai ou indispensable devient faux ou inaccessible. Avec le Covid-19, ce sont les socialités les plus humaines qui sont brutalement à rejeter.

Les solutions à une grande crise

La nécessité force donc surtout à défaire la loi ! Et c’est ce grand vide qui ouvre une voie inespérée à des innovations qui existaient de façon latente ou marginale, et qui peuvent désormais pallier les ruptures de la vie commune. La visioconférence, le télétravail, le commerce en ligne sont ainsi entrés dans la norme.

Reste que les solutions qui mettent fin à une grande crise relèvent en général de l’inconnu. L’inconcevable et l’utopie deviennent alors désirables, acceptables et même impératifs ! Il apparaît rationnel et légitime de consacrer d’énormes efforts humains et matériels à des projets très risqués à la fois dans leurs résultats et dans leurs méthodes. La seconde guerre mondiale a favorisé les recherches les plus « folles » : la bombe atomique, la technique du radar et la production massive de pénicilline.

Cet engagement stimule aussi des actions collectives novatrices et jusque-là impensables : en 1914, les célèbres taxis de la Marne ont pallié le manque de transports militaires. En 1944, le programme du Conseil national de la Résistance (CNR) annonce l’Etat-providence. Face au Covid-19, une course au vaccin s’est engagée, avec une vitesse et des moyens financiers jamais vus et sans certitude d’aboutir. Et il nous faut impérativement inventer des formes inédites de la solidarité et de la dette, puisque les « lois » économiques habituelles ont été rompues au-delà de tout précèdent.

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LJD

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