« Le Courage de renoncer » : face à l’urgence environnementale, le cas de conscience des élites

« Le Courage de renoncer » : face à l’urgence environnementale, le cas de conscience des élites

« Le Courage de renoncer. Le difficile chemin des élites pour bifurquer vers un monde durable », de Jean-Philippe Decka. Payot, 224 pages, 19 euros.

Le livre. Au Moyen Age, l’Eglise catholique avait mis en place un système permettant le pardon des péchés en échange d’une contribution pécuniaire : le commerce des indulgences. L’argent donnait la possibilité de se racheter après avoir commis un acte condamnable, mais aussi de se donner bonne conscience. Quelques siècles plus tard, les pollueurs à travers la planète peuvent obtenir des certificats en échange d’un paiement : en achetant, par exemple, un certificat pour compenser leurs émissions sur un vol en avion, en participant par exemple à un projet de reforestation.

Dans son ouvrage Le Courage de renoncer (Payot, 224 pages, 19 euros), Jean-Philippe Decka met en parallèle ces deux mécanismes. L’argent permet dans les deux cas de dissimuler la faute commise et, en quelque sorte, de s’en dédouaner. Mais il ne combat pas pour autant le mensonge ni ne s’attaque à la source de la pollution.

Au fil de son essai, l’auteur réalise une traque méthodique des illusions, demi-mesures et fausses promesses qui pullulent face à la crise environnementale. Il met au jour les travers de la compensation carbone comme du recyclage du plastique, de la finance verte ou de la voiture électrique. Cela pour mieux nous convaincre que ce n’est qu’avec un changement radical, loin de la politique des petits pas et des initiatives isolées, qu’il sera possible de faire face au défi écologique. « Il n’est plus suffisant de trier ses déchets et de réduire ses voyages en avion ; c’est la totalité du système qu’il faut revoir, c’est le capitalisme et son obsession pour la croissance auxquels il faut mettre un terme », explique M. Decka.

La voie d’un changement radical

Le projet collectif qu’il appelle de ses vœux implique un préalable : convaincre les élites de devenir la locomotive de ce cheminement vers un nouveau modèle de société. « En tant que privilégiés et détenteurs des clés du système économique et politique, c’est [à elles] de faire bouger les lignes », juge-t-il.

Problème : ces mêmes élites sont les grandes bénéficiaires du système en place. Adopter un mode de vie durable, c’est donc accepter de renoncer à nombre de privilèges. « Comment accepte-t-on de diviser son salaire par dix ? Comment accepte-t-on de renoncer à une carrière dont on nous a vanté les mérites pendant tant d’années ? Comment supporte-t-on le jugement des autres sur ce qui est souvent vécu comme un “déclassement choisi” ?  », s’interroge l’auteur.

M. Decka s’exprime là sur un sujet qu’il connaît bien. Il compte en effet parmi les « renonceurs », ces diplômés de grandes écoles (HEC pour l’auteur) qui ont décidé de changer de route après une prise de conscience de l’urgence climatique. Il mène aujourd’hui des actions de sensibilisation, notamment via le podcast Ozé, qui l’ont conduit à rencontrer de nombreux représentants de cette élite et à les interroger sur leur prise en compte de la question environnementale.

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LJD

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