La plate-forme lilloise Clic and Walk condamnée pour travail dissimulé

La plate-forme lilloise Clic and Walk condamnée pour travail dissimulé

Clic and Walk, qui devra payer une amende de 50 000 euros, recourt à une communauté de « contributeurs » pour récolter des données, notamment dans les supermarchés.
Clic and Walk, qui devra payer une amende de 50 000 euros, recourt à une communauté de « contributeurs » pour récolter des données, notamment dans les supermarchés. DENIS CHARLET / AFP

Après les condamnations des spécialistes de la livraison à domicile Take Eat Easy et Deliveroo, ou de Heetch, une application de chauffeurs VTC, est-ce le coup de grâce pour les acteurs de l’ubérisation ? Dans un arrêt du 10 février 2020, la cour d’appel de Douai (Nord) a condamné la société Clic and Walk, une plate-forme de webmarketing collaborative, à 50 000 euros d’amende pour « travail dissimulé ».

Cette société recourt à une communauté de « contributeurs » pour récolter des données, notamment dans les supermarchés. Celles-ci sont ensuite revendues à ses clients. Pour ce faire, les « ClicWalkers » doivent accéder à une application, prendre la photo d’un produit, vérifier sa disponibilité en rayon, puis répondre à des questionnaires.

Ces « missions » sont rémunérées de 20 centimes à quelques euros, mais, en moyenne, les ClicWalkers, qui sont au nombre de 700 000, récoltent environ 6 euros par an, selon l’entreprise. De grands groupes comme L’Oréal, Auchan ou Decathlon ont déjà eu recours aux services de cette start-up lilloise, distinguée par l’Unesco en 2014.

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L’Office central de lutte contre le travail illégal a estimé que la plate-forme était dans l’illégalité, car ses contributeurs ne sont pas déclarés comme des salariés, alors qu’ils font un travail similaire à celui des enquêteurs des instituts de sondages. Ce motif a incité le ministère public à se porter partie civile contre Clic and Walk. En 2018, la jeune pousse a d’abord été relaxée par le tribunal correctionnel de Lille au motif du caractère très limité des « missions » qui sont proposées aux contributeurs et de l’absence d’un lien de subordination.

La cour d’appel de Douai n’a pas suivi cette position, considérant que ce lien de subordination existait bel et bien. Consulté par Le Monde, l’arrêt du 10 février fait valoir que « les missions données sont parfois très précises ». Par exemple, le contributeur doit se rendre dans un magasin à certains horaires s’il veut voir sa mission validée.

« Zone grise »

La cour d’appel relève aussi la motivation que constitue la rétribution financière, même si elle est dérisoire : « Pour nombre de contributeurs, c’est la rémunération qui les a incités à devenir ClicWalkers. » « Sous le couvert de faire appel à des consommateurs de la vraie vie, [il s’agit] d’utiliser un personnel très faiblement rémunéré pour recueillir quasi gratuitement des données importantes, revendues ensuite à un prix relativement conséquent [une mission est revendue entre 10 000 et 15 000 euros] aux clients », est-il écrit dans l’arrêt.

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LJD

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