« La meilleure connaissance des paramètres de l’assurance-chômage exerce bien un effet d’enfermement dans le chômage »

« La meilleure connaissance des paramètres de l’assurance-chômage exerce bien un effet d’enfermement dans le chômage »

Tribune Dans une tribune, Emploi : « Aucune étude n’a jamais établi de lien de causalité entre assurance-chômage et explosion des contrats courts », publiée dans Le Monde le 25 mai, Mathien Grégoire critique la logique qui sous-tend la réforme de l’assurance-chômage en affirmant qu’aucune étude n’a établi de lien de causalité entre l’accroissement des contrats courts et les paramètres qui déterminent le montant et la durée d’indemnisation.

Cette affirmation nous étonne de la part d’un chercheur dont les compétences lui ont valu d’être sollicité par la CGT pour rédiger une volumineuse étude sur l’assurance-chômage. En effet, il existe de nombreux articles de recherche mettant en évidence, depuis fort longtemps, le lien entre assurance-chômage et contrats courts, et il nous semble utile de la porter à la connaissance des lecteurs du Monde.

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Tout d’abord, les contributions de Martin Feldstein ont souligné, dès les années 1970 aux Etats-Unis, la tendance des entreprises à utiliser l’assurance-chômage pour proposer des périodes d’emploi de courte durée entrecoupées de périodes d’inactivité. Ces travaux ont été confirmés par de nombreuses études ultérieures, comme celle de Louis Christofides et Christopher McKenna en 1995, ou celle de Michael Baker et Samuel Rea en 1998, qui ont montré qu’au Canada, les entreprises offrent très souvent des contrats justes assez longs pour ouvrir des droits à l’assurance-chômage.

L’exemple des Etats-Unis

C’est pour éviter le développement de ces périodes de « chômage temporaire » que les Etats-Unis ont institué un système de bonus-malus sur les cotisations des employeurs en fonction de la durée des contrats qu’ils offrent. Et de fait, grâce à ce système, les Etats-Unis ne sont pas confrontés à un accroissement du chômage temporaire, contrairement à ce qui se passe en France. La mobilisation d’une partie du patronat français qui bénéficie du développement des CDD de courte durée a bloqué la mise en place d’un tel système en France.

La réforme de l’assurance-chômage ne prévoit en effet de l’instituer de façon embryonnaire que dans un nombre limité de secteurs. ‬‬‬‬ De même, en France, plusieurs travaux récents de Laura Khouri documentent comment les entreprises et les salariés prennent en compte les paramètres de l’assurance-chômage pour déterminer les durées d’emplois. Laura Khouri et ses coauteurs montrent notamment que la baisse du seuil d’éligibilité de 6 à 4 mois de travail pour ouvrir des droits à l’indemnisation instituée en 2009 a diminué la durée des contrats de travail et accru les transitions dans le chômage.

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LJD

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