Harcèlement moral à l’Assemblée : « Ici comme ailleurs ça existe, il ne faut pas se voiler la face »

Harcèlement moral à l’Assemblée : « Ici comme ailleurs ça existe, il ne faut pas se voiler la face »

Des collaborateurs parlementaires, véritables « couteaux suisses » des députés, témoignent. Deux députés viennent de rendre un rapport sur le sujet au président du Palais-Bourbon.

Par Publié le 29 juin 2019 à 04h51, mis à jour à 09h40

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Quand Caroline (les prénoms ont été modifiés) ne décroche pas immédiatement son téléphone, il peut sonner plusieurs fois sans discontinuer. Au bout du fil, son employeur, un député, qui l’appelle ou lui écrit pour régler, pêle-mêle, un problème de billet de train, d’écharpe tricolore qu’il ne trouve pas ou de vidéo à mettre en ligne sur son compte Facebook. Tard le soir comme le dimanche matin à 7 heures. « Si je ne réponds pas dans les cinq minutes, j’ai un SMS avec des points de suspension », relate-t-elle. Trois points d’impatience.

Caroline est collaboratrice parlementaire, l’un de ces 2 000 « couteaux suisses » employés par les locataires du Palais-Bourbon pour travailler sur les textes de loi comme pour assurer leur logistique quotidienne. « Dans n’importe quelle autre boîte, ce que l’on vit serait du harcèlement moral », souffle-t-elle. « Les risques psychosociaux et le harcèlement existent à l’Assemblée nationale ! Les ors de la République n’en sont malheureusement pas exempts », reconnaît Michel Larive, député La France insoumise (LFI, Ariège) dans un rapport écrit avec Jacqueline Maquet (La République en marche, LRM, Pas-de-Calais), remis mercredi 26 juin au bureau de l’Assemblée à la demande de son président, Richard Ferrand.

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« Ici, on fait la loi mais on ne la respecte pas »

Si le harcèlement sexuel au Palais-Bourbon a été médiatisé depuis quelques années, le harcèlement moral reste tabou. Les cas sont cependant plus fréquents, selon les syndicats de collaborateurs et la déontologue de l’Assemblée. « On sait que quelque chose ne va pas, mais on n’en mesure pas l’ampleur car il y a peu de cas avérés », explique M. Larive. « Ici comme ailleurs ça existe, il ne faut pas se voiler la face », abonde Mme Maquet.

En avril, L’Express révélait que la députée LRM des Yvelines Florence Granjus était poursuivie aux prud’hommes par deux anciens collaborateurs qui l’accusent de harcèlement. Le 21 juin, le journal Sud-Ouest faisait état des griefs d’ex-collaborateurs de la députée LRM de Charente Sandra Marsaud, décrite par l’un d’eux comme « hyper exigeante mais surtout oppressante et colérique ». « Elle oblige souvent à faire les dossiers plusieurs fois. Je me doutais qu’elle ne les lisait pas. Alors j’ai inséré du faux texte en latin. Le dossier m’est revenu en disant que ça n’allait pas. Mais elle ne l’avait pas lu », relate un autre. L’élue, contactée par Sud-Ouest, « réfute tout ce qui est dit » dans l’article.

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LJD

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