Face aux crises multiples, « nos décideurs sont dans une véritable machine à laver »

Face aux crises multiples, « nos décideurs sont dans une véritable machine à laver »

Tribune. Les crises qu’affrontent aujourd’hui la société et les autorités publiques semblent être de natures si variées qu’il devient difficile d’identifier des invariants entre toutes ces situations.

Celles-ci ont pourtant tout d’abord en commun d’obliger à revoir la manière de piloter l’organisation, lorsqu’il devient difficile de répondre aux questions simples comme « que se passe-t-il ? » ou « Que dois-je faire ? ».

Car il ne faut pas confondre crise et urgence. Il existe en effet des procédures d’urgence qui permettent de mener des actions construites pour répondre sans délai à un évènement prévisible (attentat, incendie, accident). Ces procédures sont souvent confondues avec la gestion de crise, alors qu’il est pourtant impossible de répondre complètement à une situation de crise avec des procédures.

La complexité d’une crise provient en effet d’un savant dosage entre une pression du temps qui donne un sentiment d’urgence à agir, des enjeux souvent forts ou perçus comme tels, et une information parcellaire au moment où agir devient nécessaire. L’action – chercher des informations, mettre en œuvre des mesures, communiquer – doit se réaliser dans l’incertitude sur les futurs possibles.

Un fonctionnement collectif

L’ajustement devient donc perpétuel entre une action en cours et destinée à produire un effet plus ou moins rapidement et plus ou moins longtemps, et la nécessité de continuer à donner du sens aux décisions en anticipant des scénarios et des actions possibles.

Or, nul être humain n’est capable, seul, de faire face à une situation d’un tel niveau de complexité : la prise en compte de ces temps si différents dans un environnement sous pression surexpose le décideur à différents biais cognitifs et perceptifs, biais très connus des spécialistes. Un pilotage en situation de crise impose donc une méthode de travail et un fonctionnement collectif.

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Contrairement aux idées reçues, le décideur n’a pas à être le « pilote » d’une équipe de crise. Conscient des enjeux, de sa responsabilité, mais aussi de ses propres limites, il doit à la fois favoriser un fonctionnement collectif, formaliser sa vision et ses attentes, et enfin arbitrer entre les actions qui lui sont proposées. Le fonctionnement collectif doit permettre au décideur d’assumer ses décisions.

Un décideur « serein » mobilise une équipe, qui doit disposer des caractéristiques suivantes.

Tout d’abord, elle doit offrir une variété de regards et d’analyses. Rien n’est plus dangereux que la gestion de crise par l’expertise. Elle ampute généralement la réflexion d’un pan entier de compréhension de ce qui se passe ou pourrait se passer. Elle occulte les interactions qui peuvent exister entre les domaines impactés par la situation.

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