Emploi : abandon de poste, la vraie-fausse démission ?

Emploi : abandon de poste, la vraie-fausse démission ?

Droit social. Le seul avantage d’une loi nouvelle serait-il de remplacer des inconvénients connus par des inconvénients inconnus ? La loi sur le « fonctionnement du marché du travail » du 21 décembre 2022 a voulu dissuader le salarié voulant rapidement quitter son entreprise, mais sans démissionner, d’abandonner délibérément son poste afin d’être licencié pour faute grave, ce qui lui ouvrait les droits à l’assurance-chômage.

Cette pratique banalisée (beaucoup des partants sont rapidement embauchés ailleurs, mais l’Unédic a enregistré 75 000 ouvertures de droits en 2022) laisse TPE et PME face à de lourds problèmes d’organisation et, souvent, des salariés en grande difficulté.

Depuis le décret du 17 avril 2023, le salarié parti volontairement sans justification est réputé démissionnaire, s’il ne reprend pas le travail dans les quinze jours qui suivent la réception de la mise en demeure envoyée par l’employeur, sans avoir de motif légitime. La privation d’emploi devenant alors volontaire, il perd ses droits aux allocations de chômage. Voulant renforcer la dissuasion, le décret invite l’employeur à rappeler au salarié qu’il est alors débiteur du préavis de démission.

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Des salariés ont donc renoncé à l’abandon de poste, au profit de fautes classiques (comme celle de « grave insubordination », par exemple) aboutissant au même résultat : un licenciement pour faute grave.

Eviter tout contentieux

Mais, côté employeur, la nouvelle procédure est-elle la seule qui soit possible ? Non. Comme aujourd’hui, il peut d’abord, en l’absence de travail, cesser de payer le collaborateur. Toujours lié par son contrat de travail, ce dernier ne peut (officiellement) pas travailler ailleurs. Et, au-delà du classique arrêt maladie, la situation est difficilement tenable à terme.

Est-il interdit de licencier « à l’ancienne », en qualifiant l’abandon de poste de faute grave ? D’un point de vue financier, l’un des buts était de soulager l’Unédic, qui évalue à plus de 530 millions d’euros par an les « moindres dépenses » en régime de croisière. Et le principe « les règles spéciales dérogent aux règles générales » milite également en ce sens.

Mais rien dans la loi ni dans le décret ne répond à la question. En revanche, le questions-réponses mis en ligne le 18 avril par le ministère du travail précise : « Si l’employeur désire mettre fin à la relation de travail (…), il n’a plus vocation à engager une procédure de licenciement pour faute. » La valeur d’un tel questions-réponses est fort importante pour les praticiens, mais elle est proche de zéro devant un juge.

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LJD

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