Coronavirus : « Le passage du télétravail occasionnel au télétravail généralisé en fait apparaître les limites »

Coronavirus : « Le passage du télétravail occasionnel au télétravail généralisé en fait apparaître les limites »

Tribune. Le Covid-19 n’est sans doute pas une épidémie majeure, comparée au choléra (100 000 morts par an) ou au sida (un million de morts par an). Mais elle est exceptionnelle par les mesures de prévention qu’elle suscite, tel le confinement de plusieurs milliards de personnes, qui illustre cette formidable capacité de l’être humain – Homo technologicus depuis 3,3 millions d’années – à s’adapter rapidement à une situation nouvelle.

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En ce temps de confinement, les objets informatiques sont ainsi, à nouveau, à la fois la pire et la meilleure des choses. La pire, quand ils permettent de surveiller les mouvements des malades à travers ceux de leurs téléphones mobiles. La meilleure, quand ils nous permettent de rester en contact avec nos familles, nos amis et nos environnements professionnels. Se confiner sans aucune communication avec les autres serait inhumain et sans doute impossible.

Un enseignant peut corriger ses copies au café, une avocate y rédiger sa plaidoirie, alors que le mineur ne peut travailler que dans une mine

Ainsi le confinement n’est pas, pour la plupart d’entre nous, un moment où, miraculeusement libérés de toute obligation, nous pourrions retrouver « le sens de l’essentiel ». C’est un moment où nous cherchons à faire face à nos responsabilités professionnelles d’une manière nouvelle, notamment par le télétravail. Ce télétravail n’est certes pas nouveau, mais le confinement actuel nous mène à l’expérimenter, pour la première fois, à grande échelle et nous permet d’évaluer la robustesse de nos discours à son propos, quand ils sont confrontés à la réalité.

Matériel et immatériel

Ces discours reposent sur l’observation que nous brassons désormais beaucoup plus d’information que de matière : il y a aujourd’hui beaucoup plus d’avocats ou d’enseignants que de paysans ou de mineurs. Or ce travail de l’information peut s’effectuer n’importe où. Un enseignant peut corriger ses copies au café, une avocate y rédiger sa plaidoirie, alors que le mineur ne peut travailler que dans une mine. Ainsi, le travail de l’information remplaçant peu à peu celui de la matière, le lien historique entre les concepts de travail et d’espace se défait : nous n’avons plus besoin d’espace de travail.

Pour l’essentiel, ce discours semble résister à l’épreuve de la réalité : depuis deux semaines, des millions de personnes rendent des services, produisent des contenus, organisent des réunions, des cours, etc. depuis chez elles. Mais ce passage du télétravail occasionnel au télétravail généralisé en fait apparaître certaines limites.

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LJD

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