Chez Just Eat Takeaway, un premier plan social en vue
C’est la douche froide pour les livreurs salariés de la filiale française de Just Eat Takeaway. En janvier 2021, la société avait annoncé en fanfare l’embauche de 4 500 livreurs salariés, en vantant un « modèle de livraison plus responsable », quand ses concurrents recourent, eux, à des autoentrepreneurs. Quinze mois plus tard, alors que l’effectif n’est plus que de 800 salariés, Just Eat a, jeudi 21 avril, précisé son projet de plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) au cours de la première réunion du comité social et économique (CSE) de cette procédure.
La suppression de 269 postes de livreurs et d’une trentaine d’emplois dans les fonctions support est envisagée. Contactée, la direction justifie ce PSE par « le contexte ultraconcurrentiel [de son marché] et la recherche d’un équilibre financier, afin de garantir une croissance responsable et durable ». Dans sept villes (Paris, Lyon, Marseille, etc.), des salariés continueront à travailler. Dans les vingt autres, « des solutions alternatives » seront mises en place, non précisées par la direction, mais que les syndicats imaginent parfaitement, puisqu’elles coexistent déjà : les propres coursiers des restaurants et ceux de Stuart, la filiale de La Poste, qui recourt à des autoentrepreneurs. Les syndicats, qui avaient déjà dénoncé « les mauvaises conditions de travail et les bas salaires » des livreurs, qui entraînent un fort turnover, ne décolèrent pas.
« Mauvaise qualité de service » à tous les niveaux
Just Eat, qui s’est lancé, en France, fin 2020, aurait perdu « 350 millions d’euros en 2021 », selon Jérémy Graça, délégué syndical FO, première organisation devant la CGT. « Mi-2021, [elle a procédé à] une série de licenciements individuels. » Pour M. Graça, « Just Eat perdait beaucoup de clients à cause d’une mauvaise qualité de service » à tous les niveaux : algorithme non performant, retards dans les livraisons par manque de coursiers, etc.
De plus, pour M. Graça, Just Eat n’a pas pris en compte le caractère saisonnier de la livraison et la réouverture des restaurants en juin 2021. Et a voulu « aller trop vite en ouvrant en deux ou trois mois dans 27 villes ». « C’est une erreur stratégique », conclut-il.
Ludovic Rioux, délégué syndical CGT, estime qu’il « est facile d’afficher des pertes quand il y a eu des investissements énormes ». « Cela ne veut pas dire qu’on est au bord du gouffre. Le groupe a fait un chiffre d’affaires de 5,3 milliards d’euros en 2021, en hausse de 33 % ! On nous présente des pertes en France, mais on ne veut pas nous dire combien la filiale française a perçu du groupe, quelle somme elle a fait remonter au groupe, quelle est la rémunération des actionnaires… C’est se moquer des salariés. »
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