Pourquoi des entreprises convoitent les seniors

Tandis que certaines entreprises incitent les salariés les plus âgés à envisager une retraite anticipée, d’autres multiplient les efforts pour les fidéliser.

Par Publié aujourd’hui à 07h00

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« Baptisée les « Space Cowboys », l’équipe regroupe des seniors (à partir de 45 ans), parlant plusieurs langues, mobiles, ayant peu de contraintes familiales et un fort niveau d’expertise » (Photo: « Space Cowboys », film  de Clint Eastwood, avec James Garner, Tommy Lee Jones, Donald Sutherland, Clint Eastwood, 2000).
« Baptisée les « Space Cowboys », l’équipe regroupe des seniors (à partir de 45 ans), parlant plusieurs langues, mobiles, ayant peu de contraintes familiales et un fort niveau d’expertise » (Photo: « Space Cowboys », film  de Clint Eastwood, avec James Garner, Tommy Lee Jones, Donald Sutherland, Clint Eastwood, 2000). Ronald Grant Archive/The Ronald Grant Archive / Photononstop

Quand Catherine Englebert a été contactée pour créer le poste de DRH d’Amazon en France, elle a rappelé son âge à son interlocuteur : « J’avais 56 ans, presque le double de la moyenne d’âge chez Amazon », précise-t-elle. La réponse a été claire : « Nous recherchons une compétence, pas un âge ! » Son expérience des multinationales technologiques en forte croissance et sa maturité seraient bienvenues dans cet environnement plutôt jeune.

Après quatre ans à ce poste, elle a quitté l’entreprise pour faire le point et dresser la liste des projets qu’elle souhaitait encore mener. Aujourd’hui âgée de 63 ans, elle travaille à peine moins qu’avant et refuse les emplois salariés à plein temps qu’on lui propose encore…

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Les seniors ne sont pas tous égaux en matière d’employabilité. Celle-ci dépend de leur santé, de leur métier et de leur secteur d’activité. Toutefois, les entreprises semblent être plus nombreuses à prendre conscience de l’importance du vivier de compétences qu’ils représentent.

Compréhension et curiosité

Lorsque le groupe d’ingénierie Assystem a décidé de se développer à l’international, il a constitué une équipe d’experts dans ses métiers. Baptisée les « Space Cowboys », l’équipe regroupe des seniors (à partir de 45 ans), parlant plusieurs langues, mobiles, ayant peu de contraintes familiales et un fort niveau d’expertise. Ils sont aujourd’hui vingt et un Space Cowboys en CDI. Quelques indépendants les rejoignent de façon ponctuelle. « C’est un réservoir de compétences au service du développement de l’entreprise, affirme Hubert Labourdette, directeur des opérations stratégiques d’Assystem. Longtemps, quand quelqu’un avait une forte expertise, il devenait manager. Ce n’est pas toujours la meilleure solution, certains préfèrent faire que diriger. De même, on a longtemps vu les seniors comme des “gros salaires” ; aujourd’hui, ils incarnent plutôt la “richesse” de l’entreprise, qui a pris conscience de leur valeur ajoutée. »

Les start-up s’intéressent, elles aussi, à ces profils. « Dans le numérique, tout le monde recherche les mêmes compétences. Les entreprises élargissent leur champ de recherches aux seniors pour leur expérience technologique ou leur capacité à encadrer des métiers différents », constate Aude Barral, cofondatrice et directrice marketing de CodinGame, une plate-forme de recrutement de programmeurs par le jeu. Dans ces métiers, les seniors se différencient par une compréhension rapide des projets et des enjeux commerciaux. Ils ont une grande curiosité technologique et pratiquent plus la veille que les « juniors ».

Comprendre le mal-être au travail

L’essai de Catherine Meig, clinicienne du travail, psychanalyste et consultante en management, rend accessibles quelques concepts et réflexions pour mieux comprendre et accompagner la souffrance au travail.

Par Publié aujourd’hui à 06h45

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« J’ai mal au travail. Parcours en quête de sens », de Catherine Mieg. François Bourin, 320 pages, 22 euros.
« J’ai mal au travail. Parcours en quête de sens », de Catherine Mieg. François Bourin, 320 pages, 22 euros.

Le livre. A 46 ans, Maelisse a acquis, après dix-huit ans passés dans une compagnie d’assurances multinationale, une expertise très pointue de gestion des sinistres dans la marine : elle coordonne toute l’indemnisation au niveau mondial. Un jour, elle s’écroule. Impossible de se lever pour aller travailler.

Agée seulement d’une trentaine d’années, Sophie est quant à elle responsable « risques » dans la filiale d’une grosse banque, une autre compagnie d’assurances. Lors d’une visite médicale pour son petit garçon, elle fond en larmes quand le médecin lui demande comment cela va de son côté.

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Ingénieur aéronautique dans une importante entreprise industrielle, à 41 ans, David pilote simultanément six gros projets d’informatique embarquée et manage une équipe de dix ingénieurs, plus des prestataires. Lorsqu’il arrive en consultation, il est en arrêt-maladie pour un burn-out depuis un mois et est encore très choqué par ce qu’il vit – « J’ai la mémoire comme une passoire », explique-t-il.

Ces récits de prise en charge sont au cœur de J’ai mal au travail, le dernier essai, publié chez François Bourin, de Catherine Meig, clinicienne du travail, psychanalyste et consultante en management. « C’est une manière de rendre aux patients ce que j’ai appris d’eux et de les remercier de la confiance qu’ils m’ont accordée à un moment difficile de leur vie. »

« Esclaves » du travail

L’ouvrage se propose de rendre accessibles quelques concepts et réflexions pour mieux comprendre et accompagner la souffrance au travail et ses effets sur la santé, mentale et physique. La première partie se concentre la question du travail à travers différents cas de burn-out. Après leur récit, ces situations sont interprétées et complétées dans une seconde partie qui se veut plus théorique : un chapitre pose les principaux concepts à l’œuvre dans cette clinique du travail, à savoir la psychanalyse et la psychodynamique du travail ; un autre met en débat la spécificité de la clinique du travail.

Si elle n’a pas vocation à prendre parti, la clinique du travail flirte avec le politique, « puisqu’elle sera au premier rang pour analyser les incidences du système néolibéral sur les subjectivités et ses vicissitudes », estime la membre de l’équipe de recherche de l’Institut de psychodynamique du travail.

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« L’inflation des processus, des normes et des reportings a alourdi le travail en appauvrissant le cœur du métier et en occultant le travail réel. Dans le même temps, l’évaluation individualisée de la performance a abandonné toute la responsabilité au seul travailleur. » Dès lors, la souffrance au travail explose, avec un nombre impressionnant de pathologies mentales ou somatiques.

Pierre-Yves Gomez : « Les salariés ignorent l’activité de leurs collègues »

Echanger sur son travail permet de redécouvrir ce que des activités très individualisées et en mutation perpétuelle font souvent oublier : le respect pour le travail des autres, explique le professeur Pierre-Yves Gomez dans sa chronique.

Publié aujourd’hui à 06h15 Temps de Lecture 2 min.

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« En exposant régulièrement ce qu’ils font, les salariés se découvrent mutuellement, ils mettent au jour les environnements qui favorisent ou contraignent leurs tâches, les habilités et les expertises déployées. »
« En exposant régulièrement ce qu’ils font, les salariés se découvrent mutuellement, ils mettent au jour les environnements qui favorisent ou contraignent leurs tâches, les habilités et les expertises déployées. » Guido Rosa/Ikon Images / Photononstop

Gouvernance. Lors d’un récent séminaire, un jeune dirigeant expliquait qu’il avait établi la règle suivante dans sa start-up de dix-sept collaborateurs : chaque lundi matin, tout le personnel se retrouve autour d’un café et chacun doit dire en deux minutes quelles seront ses principales activités de la semaine. Cet exercice de communication s’est imposé parce que, du fait de l’activité tourbillonnante de l’entreprise, les collaborateurs étaient devenus incapables de comprendre le travail de leurs collègues.

Si une telle méconnaissance existe déjà dans de très petites entreprises, on peut imaginer combien elle est étendue dans les grandes organisations. Dans bien des cas, la plupart des employés n’ont aucune idée du contenu du travail des autres salariés, quand bien même ils les côtoient.

Cette ignorance généralisée est préjudiciable à ce que l’économiste américain Harvey Leibenstein (1922-1994) a appelé l’X-efficience, c’est-à-dire la création de valeur spontanée, qui naît du croisement (c’est le sens du X) des compétences et des activités dans une communauté de travail (Inside the Firm : The Inefficiency of Hierarchy, Harvard University Press, 1987).

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Or, la multiplication de fonctions nouvelles et parfois énigmatiques liées à la financiarisation puis à la transformation numérique des entreprises, mais aussi les réorganisations à répétition, l’intensification des processus de production, la course à la performance individuelle, la mobilité et l’extrême division technique des tâches ont contribué à cloisonner les représentations au point que des salariés ignorent l’activité de leurs collègues, à l’exception de la partie, souvent étroite, avec laquelle on est en contact pour assurer ses propres activités.

« Intelligence collective »

Le métissage « naturel » des idées ou des compétences est devenu si difficile, que les entreprises doivent mettre en œuvre des politiques pour inciter à la collaboration et pour faire naître de « l’intelligence collective » au bénéfice de projets communs. Pour utiles qu’elles soient, ces politiques ne prennent pas toute la mesure de la situation : les collaborateurs ne travaillent pas ensemble « naturellement » parce qu’ils n’ont simplement plus le temps de s’intéresser au contenu du travail des autres.

Dans le récent ouvrage qu’il a coordonné (L’Entreprise délibérée. Refonder le management par le dialogue, Nouvelle cité, 290 pages), le professeur de gestion Mathieu Detchessahar rappelle l’importance des espaces « gratuits » d’expression et de discussion sur le contenu du travail, sans leur assigner des objectifs de résultats immédiats.

Gare aux turbulences de la rentrée !

Le chercheur en sciences cognitives Mehdi Moussaïd identifie dans les mouvements de foule des phénomènes propres à la mécanique des fluides, aux lois de Newton et aux sciences comportementales qui pourraient bien intéresser les manageurs, explique dans sa chronique la journaliste du « Monde » Anne Rodier.

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« Dépasser une densité de 6 à 7 personnes au mètre carré provoque des tremblements, des turbulences, voire des bousculades meurtrières » (Photo: réunion autour d’une machine à café).
« Dépasser une densité de 6 à 7 personnes au mètre carré provoque des tremblements, des turbulences, voire des bousculades meurtrières » (Photo: réunion autour d’une machine à café). Massimo Rossi / Photononstop

Carte postale du bureau. La foule des salariés est de retour dans les entreprises après le grand vide des congés d’été. Embouteillage de demandes aux manageurs eux aussi revenus, attroupement aux machines à café pour s’informer et reprendre le cours de la vie professionnelle. Des nouveaux projets ? Un changement d’actionnaire ? Quoi de neuf dans l’organigramme ? Entre deux souvenirs de vacances, le « couloir processing » bat son plein au retour des périodes estivales.

L’organisation du travail par projet et le management un peu plus « horizontal », qui demandent davantage d’échanges entre salariés, ont renforcé l’enjeu de la communication informelle, avec des risques et des opportunités parfois insoupçonnés : du phénomène viral produit par une simple rumeur, à la genèse d’une collaboration interservices souhaitée de longue date.

Mais la dynamique des foules est délicate à maîtriser. Elle avait jusqu’alors été peu étudiée. C’est le sujet de thèse du chercheur en sciences cognitives Mehdi Moussaïd. L’éthologue, en s’inscrivant dans les pas du physicien allemand Dirk Helbing, son maître de thèse, a identifié dans les mouvements de foule des phénomènes propres à la mécanique des fluides, aux lois de Newton avec ses forces de répulsion, et aux sciences comportementales qui pourraient bien intéresser les manageurs (Fouloscopie. Ce que la foule dit de nous, Humensciences, 228 pages, 19 euros).

Rumeurs et informations

Attention aux turbulences. Quand la foule se densifie, « laissez vous porter par le flot (…) sauf au voisinage d’un obstacle solide », prévient le chercheur. Dépasser une densité de 6 à 7 personnes au mètre carré provoque en effet des tremblements, des turbulences, voire des bousculades meurtrières. Ce seuil a été mis en évidence, très sérieusement, à partir de l’étude de la circulation des foules lors des pèlerinages à La Mecque ou d’un gigantesque concert de Jean-Michel Jarre, qui avait réuni plus de 3 millions de personnes à Moscou en 1997. A priori, pas de risque à la machine à café, sauf dans les organisations du travail qui ne respecteraient pas un minimum raisonnable de mètres carrés par salarié.

En revanche, bien plus bas que le seuil de turbulence, le non-respect de la « zone d’intimité » provoque une répulsion quasi animale mise en évidence dans les années 1950 par le biologiste suisse Heini Hediger (1908-1992). En dessous d’une certaine densité, Mehdi Moussaïd a établi que ce sont les sciences comportementales qui guident la foule, avec l’émergence de leaders, les mouvements d’évitement et l’adaptabilité du groupe. Il y voit une certaine forme d’intelligence collective.

Laurent Berger : « Tant mieux si nous sommes écoutés »

Le secrétaire général de la CFDT se félicite, dans une interview au « Monde », de « l’ouverture » que constitue, selon lui, le changement de pied d’Emmanuel Macron sur la réforme des retraites.

Propos recueillis par et Publié aujourd’hui à 04h19

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Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, arrive à l’Elysée, le 10 décembre 2018.
Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, arrive à l’Elysée, le 10 décembre 2018. LUDOVIC MARIN / AFP

Dans une interview au Monde, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, se félicite de « l’ouverture » que constitue, selon lui, le changement de pied d’Emmanuel Macron sur la réforme des retraites. Lundi 26 août, sur France 2, le chef de l’Etat s’est éloigné de la proposition du haut-commissaire chargé du dossier, Jean-Paul Delevoye, d’instaurer un âge pivot dans le futur système. Et indiqué qu’il préférerait qu’il y ait « un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l’âge » pour bénéficier d’une retraite à taux plein.

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Vous qui souhaitiez mettre l’accent sur la durée de cotisation et non sur l’âge de départ à la retraite, estimez-vous avoir été entendu par Emmanuel Macron ?

Nous disions depuis le début que cet âge pivot était une profonde erreur et une injustice. Le président de la République explique désormais, lui aussi, que ce n’est pas la bonne solution. Tant mieux si nous sommes écoutés. L’autre élément très important annoncé par le chef de l’Etat, c’est le fait que cette réforme ne se ferait pas avant une politique de revalorisation salariale et de revalorisation des métiers de la fonction publique hospitalière et des enseignants. C’est aussi un engagement très fort que nous demandions.

Avez-vous été informé en amont ?

Non. Pas du tout.

A quoi peut ressembler « un accord sur la durée de cotisation » comme l’a indiqué M. Macron ?

Au sens légal du terme, un accord sur une réforme des retraites, ça n’existe pas. Il y a une concertation et les partenaires sociaux s’expriment après sur le texte. Un calendrier sur l’allongement de la durée de cotisation a été fixé en 2014 par la loi Touraine. Il faut s’y tenir.

En indiquant qu’il souhaitait que le système soit à l’équilibre en 2025, le chef de l’Etat a laissé entendre que des mesures paramétriques, c’est-à-dire permettant des économies à court terme, seraient prises avant pour y parvenir…

Depuis le début, nous disons que rien ne justifie d’accélérer cette trajectoire. C’est la raison pour laquelle nous nous sommes opposés à une mesure paramétrique dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2020. Nous ne voulons pas de mesures paramétriques. Nous voulons un système plus juste, plus solidaire, avec des droits nouveaux (pénibilité, retraite progressive, augmentation des basses pensions…).

Retraites : Macron « préfère » un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l’âge de départ

Le chef de l’Etat a fait, lundi soir sur France 2, un geste d’ouverture aux syndicats opposés à la mise en place d’un âge pivot à 64 ans.

Par Publié aujourd’hui à 10h49

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« Je préfère qu’on trouve un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l’âge. » Interrogé lundi 26 août au JT de France 2 sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron a créé la surprise sur le sujet. « Si vous avez un accord sur la durée, si vous commencez plus tard, vous finissez plus tard, et quand vous commencez plus tôt vous partez plus tôt », a-t-il développé, décrivant un fonctionnement proche de ce qui existe aujourd’hui. Avec ces quelques mots, le chef de l’Etat a semblé prendre ses distances avec l’une des principales – mais aussi l’une des plus controversées – recommandations formulées par le haut-commissaire chargé du dossier, Jean-Paul Delevoye, dans un rapport publié le 18 juillet.

Ce dernier avait en effet indiqué que, conformément à la promesse de campagne de M. Macron en 2017, l’âge légal de départ en retraite serait maintenu à 62 ans. Mais pour éviter que les assurés ne partent avec une trop faible pension et afin d’équilibrer budgétairement le système, il avait proposé qu’un âge pivot, également appelé « âge du taux plein » ou « âge d’équilibre », soit créé à 64 ans. Ceux qui décideraient de liquider leurs droits à 62 ans le pourraient toujours mais seraient pénalisés par une décote financière afin de les inciter à travailler plus longtemps. Tous les syndicats ont dit leur opposition à un tel mécanisme, y compris la CFDT, qui refuse l’idée que cet âge soit le même pour tous. « S’il reste tel quel, ce sera niet pour la CFDT », confiait encore récemment son secrétaire général, Laurent Berger, au Monde.

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« Beaucoup d’inquiétudes »

M. Macron a assuré lundi que « rien n’est décidé » – tout en affirmant sa volonté de voir le système à l’équilibre d’ici à 2025 lorsqu’il entrera en vigueur. « Sur [cette] réforme, je veux que l’on incarne le changement de méthode que j’ai souhaité », a-t-il précisé, reconnaissant qu’« il y a beaucoup d’inquiétudes » autour de ce projet qui vise à fusionner les 42 régimes actuels en un système universel. Et d’ajouter : « On va la construire tous ensemble cette réforme. »

« Le wwoofing connaît de plus en plus d’adeptes, jeunes ou moins jeunes »

Travailler à la ferme contre le gîte et le couvert : ce système de « vacances actives » est en plein essor, explique David Marie, cofondateur de l’association Wwoof France.

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Lola Crowet, hôtesse et ancienne wwoofeuse.
Lola Crowet, hôtesse et ancienne wwoofeuse. Eric Nunès / Le Monde

Des « vacances actives » à la ferme où l’on apprend à faire les foins, planter des semis ou construire des barrières d’irrigation. Le tout pendant une durée limitée, nourri et logé : le wwoofing est en plein essor en France, notamment auprès des jeunes étudiants, explique David Marie, cofondateur de l’association Wwoof France.

Mesurez-vous un attrait croissant parmi les jeunes pour le wwoofing ?

Ce type de vacances actives connaît en effet de plus en plus d’adeptes, qu’ils soient jeunes ou moins jeunes. Les citadins ont un réel besoin de se retrouver face à la nature, de toucher la terre, de s’occuper des animaux, de comprendre comment est produit ce qu’ils ont dans leur assiette. Les étrangers aiment découvrir un pays auprès des locaux, comprendre et vivre la culture et les habitudes françaises, loin des sentiers battus.

Alors oui, il y a de plus en plus de personnes qui tentent cette aventure humaine. A Wwoof France, à la création de l’association française en 2007, nous comptions 1 000 wwoofeurs ; aujourd’hui, ils sont 13 000, et les « jeunes », les 18-35 ans, représentent 60 % d’entre eux. Mais, il y a aussi des retraités, des actifs, des personnes qui se posent des questions sur leur vie professionnelle et qui se disent qu’ils vont partir faire du wwoofing pour voir si la vie dans une ferme leur conviendrait. Et, phénomène intéressant par rapport aux autres pays, en France, la majorité de nos adhérents sont des Français.

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Est-ce que le wwoofing est une étape pédagogique visant à s’armer intellectuellement afin d’être en mesure d’expliquer la nécessité d’un changement de société ?

Définitivement oui ! En tout cas, c’est notre expérience de wwoofeur et de ceux que nous rencontrons : on revient en général de ces expériences avec une réelle connaissance du monde de l’agriculture biologique, des circuits courts, de l’autosuffisance (des choses simples comme faire sa propre lessive, par exemple). Souvent, les wwoofeurs découvrent un mode de vie économe en eau, en énergie, et la vraie valeur des choses : on ne jette plus de légumes quand on a sué pour les faire pousser et à les ramasser – l’éveil à la conscience écologique pour ceux qui seraient là un peu plus par hasard… A tous les coups on gagne !

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Demander aux wwoofeurs d’effectuer des tâches contre un hébergement et le couvert ne s’apparente-t-il pas à du travail dissimulé ?

En effet, le travail contre logement et couvert s’apparente à du travail dissimulé. Chacun de nos adhérents signe une charte dans laquelle nous dénonçons cette pratique. Pour faire court, le wwoofing est une possibilité d’aller rendre visite à une personne pour l’aider à la ferme, il n’est pas accueilli contre un service mais de façon gracieuse, comme un ami qui vient donner un coup de main. C’est une forme de vacances solidaires, et pas de vacances pas chères, qui s’apparente à de l’entraide agricole.

Les entreprises ne proposent que « des actions caritatives visant à corriger les inégalités sans s’attaquer à leurs sources »

Les engagements des entreprises en matière sociale et environnementale visent d’abord à éviter l’intervention de l’Etat dans leur modèle économique, observe l’économiste Jean-Luc Gaffard, dans une tribune au « Monde »

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 4 min.

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« S’il appartient bien aux entreprises de réaliser des profits et d’investir, la vraie question est de savoir si elles entendent privilégier des profits à long terme au lieu de gains immédiats pour satisfaire un certain type d’actionnaires. »
« S’il appartient bien aux entreprises de réaliser des profits et d’investir, la vraie question est de savoir si elles entendent privilégier des profits à long terme au lieu de gains immédiats pour satisfaire un certain type d’actionnaires. » usage worldwide/DPA / Photononstop

Tribune. Les grands patrons s’inquiètent. Ils veulent endiguer la montée de la protestation sociale. Ils craignent aussi que l’emporte un nationalisme destructeur. Ils ne renoncent pas pour autant au modèle qu’ils ont tant vanté. Ils proposent d’en corriger les effets sans s’attaquer aux causes. Il faudrait pour cela qu’ils reconnaissent de nouveau la fonction régulatrice des Etats, qu’ils abandonnent la mise en concurrence des normes fiscales et juridiques, et qu’ils révisent leur mode de gouvernance. Au lieu de cela, ils préfèrent tenir un discours sur « la responsabilité sociale des entreprises » qui viendrait se substituer à celle d’Etats devenus défaillants.

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Le Business Round Table (BRT), qui réunit la plupart des grandes entreprises américaines, propose ainsi de réviser les buts que celles-ci doivent s’assigner : mieux répondre aux attentes des clients, mieux payer les travailleurs et mieux leur permettre d’acquérir de nouvelles qualifications et compétences, traiter de manière équitable et éthique leurs fournisseurs, soutenir les communautés et pays au sein desquels elles exercent leur activité, créer de la valeur à long terme pour leurs actionnaires.

Double crainte

Ce discours témoigne d’une double crainte : celle de voir se développer les guerres commerciales annonciatrices d’un recul de l’activité à l’échelle mondiale ; celle de voir se développer les mesures étatiques de régulation, que ce soit de la part de Donald Trump ou de ses éventuels concurrents démocrates, Bernie Sanders ou Elizabeth Warren.

Les questions à se poser sont de savoir si ces grands patrons sont prêts à renoncer à l’optimisation fiscale et à accepter d’être taxés dans les pays où sont leurs marchés, à renoncer aux bonus extravagants des hauts dirigeants

Dans un cas comme dans l’autre, ce qui est en jeu est d’éviter un retour du politique sur le devant de la scène, que ce soit un autoritarisme et un nationalisme destructeur d’un côté, ou un socialisme libéral de l’autre.

Le dilemme était celui déjà énoncé en 1944 par [l’économiste hongrois] Karl Polanyi (1886-1964), qui évoquait La Grande Transformation (Gallimard, 1983) survenue à la suite de la crise du libéralisme associé au laisser-faire à partir des années 1880. Les grands patrons voudraient échapper à l’un comme à l’autre, et persister dans cette chimère qu’est la neutralité de l’Etat en voulant substituer à sa responsabilité sociale celle des entreprises.

Roux de Bézieux (Medef) : « Nous ne sommes pas à l’abri d’une récession »

S’il salue l’action globale du gouvernement, le président de l’organisation patronale qui organise mercredi l’université d’été de son mouvement, estime que la crise sociale soulevée par les « gilets jaunes » persiste « en profondeur ».

Propos recueillis par et Publié aujourd’hui à 05h31, mis à jour à 09h48

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Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, à Paris en octobre 2018.
Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef, à Paris en octobre 2018. BRUNO LEVY

A la tête du Medef depuis un an, Geoffroy Roux de Bézieux fait sa rentrée, mercredi 28 août, lors de l’université d’été de l’organisation patronale. Rebaptisé « La rencontre des entrepreneurs de France » (La REF), l’événement se tient cette année à l’hippodrome Paris-Longchamp sur deux jours et réunira, entre autres, la ministre du travail Muriel Pénicaud, l’ex-président de la République Nicolas Sarkozy, la fondatrice du magazine Causeur Elisabeth Lévy ou encore Jacline Mouraud, l’une des initiatrices des « gilets jaunes ».

Pourquoi un casting aussi hétéroclite ?

L’idée est de se préoccuper de sujets qui, certes, ne forment pas le quotidien de tous les patrons, mais qui un jour ou l’autre affecteront leur activité, comme la démographie, l’immigration, l’alimentation ou la pauvreté… La REF est le symbole d’un Medef plus ouvert aux débats de société et à la société elle-même. Notre volonté a été de renouer avec le débat démocratique en invitant des politiques, des artistes, des intellectuels qui ne pensent pas comme nous.

Regrettez-vous l’invitation, finalement annulée en juin, faite à Marion Maréchal ?

Non, cela s’inscrivait dans cette idée de débattre avec des gens avec lesquels nous ne sommes pas d’accord. Mais à partir du moment où elle a été vue comme une tribune offerte à Marion Maréchal, comme si c’était sa rentrée politique, ce n’était plus possible. Elle n’était qu’une invitée qui devait débattre avec d’autres du populisme.

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Quel est votre état d’esprit en cette rentrée ?

Il est positif, même si les signaux économiques s’avèrent contradictoires, entre des indicateurs corrects en France et une inquiétude sur le plan international. Sur ce dernier point, je suis convaincu qu’une défaite de Donald Trump en 2020 ne changerait en rien la trajectoire de confrontation entre les Etats-Unis et la Chine pour le leadership mondial. Nous sommes entrés pour plusieurs années au cœur d’une guerre froide économique où le consensus pour soutenir la croissance mondiale a volé en éclats. L’Amérique pense qu’elle peut se suffire à elle-même grâce à une forte croissance domestique, tirée par des incitations fiscales. L’Europe est l’espace qui a le plus à souffrir de ce nouvel ordre mondial car elle reste la plus dépendante aux exportations, au moment où elle est déjà confrontée à la sortie du Royaume-Uni.

Pourtant la croissance française tient…

A court terme, oui. La France est moins exportatrice que l’Allemagne, par exemple, et nous bénéficions des efforts réalisés ces dernières années, entre le pacte de responsabilité de 2015 et les réformes du marché du travail en 2017. Le climat des affaires reste favorable, le gouvernement faisant globalement confiance aux chefs d’entreprise, même s’il a parfois des injonctions contradictoires. L’objectif de 7 % de taux de chômage apparaît désormais crédible. Certes, cela n’empêche pas les problèmes. Même si les inégalités réelles sont moindres en France qu’ailleurs à cause du système redistributif, le sentiment d’inégalité se révèle élevé, comme l’a prouvé le mouvement des « gilets jaunes ». La bonne nouvelle pour nous, c’est qu’il n’a pas remis en cause l’agenda de réformes du gouvernement.

« Il est temps que les chefs d’entreprise changent radicalement de paradigme »

Entrepreneur et militant associatif, Franck Renaudin accuse, dans une tribune au « Monde », les grandes sociétés de cacher sous le discours de la « responsabilité sociale » l’absence d’un véritable changement de modèle économique.

Publié aujourd’hui à 08h53 Temps de Lecture 4 min.

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« Pourquoi [les chefs d’entreprise] ne font-ils pas de la redistribution en interne, au profit des plus bas salaires, sans attendre que l’Etat le fasse pour eux ? »
« Pourquoi [les chefs d’entreprise] ne font-ils pas de la redistribution en interne, au profit des plus bas salaires, sans attendre que l’Etat le fasse pour eux ? » Charles Platiau / REUTERS

Tribune. Dans l’histoire de l’humanité, autant de responsabilités auront-elles jamais pesé sur les épaules de quelques hommes et femmes ? Ces épaules, ce sont celles des actionnaires et dirigeants de grandes entreprises : ils sont la courroie de transmission d’un système qui a atteint les limites de la biosphère terrestre. Mais ils ne donnent pas le sentiment d’avoir compris l’urgence de le réformer en profondeur.

Quand on les interroge sur leur compréhension des menaces qui pèsent sur notre planète, leurs discours sont toujours rassurants. Bien sûr, ils agissent pour un meilleur respect de l’environnement ! Bien sûr, leur entreprise est socialement responsable, et ils peuvent nous en donner maintes illustrations. Leurs pratiques sont plus transparentes, leurs fournisseurs sont passés au crible d’un cahier des charges exigeant, ils recrutent des personnes en situation de handicap ou en réinsertion, ils pratiquent la compensation carbone.

Pillage

Mais, rarement, ils remettent en cause leur cœur de métier et leur modèle économique, quand bien même ceux-ci contribuent au pillage des ressources de notre planète.

Sur la question des approvisionnements, les entreprises s’abritent derrière des certifications dites responsables, qui n’ont de responsable que le nom ! Elles donnent bonne conscience aux acteurs qui disposent des moyens d’en financer le surcoût, et ne règlent en rien le problème majeur : cette pression croissante sur des écosystèmes à bout de souffle.

L’heure n’est plus à la conquête de parts de marché

Que d’industriels ou de start-up font l’éloge d’avancées technologiques qui permettent de proposer, à moindre coût, des produits plus performants et accessibles à tous. Quitte à générer ainsi une demande exponentielle impactant négativement ces écosystèmes !

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On continue à nous vendre du rêve, du superflu, de l’obsolescence programmée. Ces acteurs de l’économie ont-ils compris qu’il n’y a qu’un seul combat qui vaille : celui de la survie de l’humanité tout entière, unie contre la destruction d’une grande partie des espèces vivantes ? L’heure n’est plus à la conquête de parts de marché. Elle est à la remise en cause profonde et immédiate de notre modèle économique !

Un premier pas, trop isolé

Si ces dirigeants et actionnaires étaient conscients de l’urgence de sortir de cette boulimie prédatrice, et sincères dans cette quête d’un monde durable, ils seraient les premiers à incarner une meilleure répartition des richesses. Or en 2018, les patrons du CAC 40 ont gagné en moyenne 306 fois le smic, triste record…