« Il est temps que les chefs d’entreprise changent radicalement de paradigme »

« Il est temps que les chefs d’entreprise changent radicalement de paradigme »

Entrepreneur et militant associatif, Franck Renaudin accuse, dans une tribune au « Monde », les grandes sociétés de cacher sous le discours de la « responsabilité sociale » l’absence d’un véritable changement de modèle économique.

Publié aujourd’hui à 08h53 Temps de Lecture 4 min.

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« Pourquoi [les chefs d’entreprise] ne font-ils pas de la redistribution en interne, au profit des plus bas salaires, sans attendre que l’Etat le fasse pour eux ? »
« Pourquoi [les chefs d’entreprise] ne font-ils pas de la redistribution en interne, au profit des plus bas salaires, sans attendre que l’Etat le fasse pour eux ? » Charles Platiau / REUTERS

Tribune. Dans l’histoire de l’humanité, autant de responsabilités auront-elles jamais pesé sur les épaules de quelques hommes et femmes ? Ces épaules, ce sont celles des actionnaires et dirigeants de grandes entreprises : ils sont la courroie de transmission d’un système qui a atteint les limites de la biosphère terrestre. Mais ils ne donnent pas le sentiment d’avoir compris l’urgence de le réformer en profondeur.

Quand on les interroge sur leur compréhension des menaces qui pèsent sur notre planète, leurs discours sont toujours rassurants. Bien sûr, ils agissent pour un meilleur respect de l’environnement ! Bien sûr, leur entreprise est socialement responsable, et ils peuvent nous en donner maintes illustrations. Leurs pratiques sont plus transparentes, leurs fournisseurs sont passés au crible d’un cahier des charges exigeant, ils recrutent des personnes en situation de handicap ou en réinsertion, ils pratiquent la compensation carbone.

Pillage

Mais, rarement, ils remettent en cause leur cœur de métier et leur modèle économique, quand bien même ceux-ci contribuent au pillage des ressources de notre planète.

Sur la question des approvisionnements, les entreprises s’abritent derrière des certifications dites responsables, qui n’ont de responsable que le nom ! Elles donnent bonne conscience aux acteurs qui disposent des moyens d’en financer le surcoût, et ne règlent en rien le problème majeur : cette pression croissante sur des écosystèmes à bout de souffle.

L’heure n’est plus à la conquête de parts de marché

Que d’industriels ou de start-up font l’éloge d’avancées technologiques qui permettent de proposer, à moindre coût, des produits plus performants et accessibles à tous. Quitte à générer ainsi une demande exponentielle impactant négativement ces écosystèmes !

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On continue à nous vendre du rêve, du superflu, de l’obsolescence programmée. Ces acteurs de l’économie ont-ils compris qu’il n’y a qu’un seul combat qui vaille : celui de la survie de l’humanité tout entière, unie contre la destruction d’une grande partie des espèces vivantes ? L’heure n’est plus à la conquête de parts de marché. Elle est à la remise en cause profonde et immédiate de notre modèle économique !

Un premier pas, trop isolé

Si ces dirigeants et actionnaires étaient conscients de l’urgence de sortir de cette boulimie prédatrice, et sincères dans cette quête d’un monde durable, ils seraient les premiers à incarner une meilleure répartition des richesses. Or en 2018, les patrons du CAC 40 ont gagné en moyenne 306 fois le smic, triste record…

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LJD

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