Archive dans juin 2025

La hausse des salaires est-elle une réponse à la pénurie de compétences ?

La publication récente par le ministère du travail de la liste des métiers en tension rappelle que les DRH y sont toujours confrontés, en 2025, alors qu’ils sont en pleine réflexion sur les politiques salariales, avant la mise en œuvre de la transparence des salaires d’ici à juin 2026.

Les DRH réunis le 3 juin à Paris pour les Rencontres RH, le rendez-vous de l’actualité du management créé par Le Monde en partenariat avec l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), ont échangé sur leurs pratiques pour identifier les liens potentiels entre pénurie d’emploi et rémunération.

En préambule, l’économiste et chercheur de l’Institut de recherches économiques et sociales, François-Xavier Devetter, après avoir indiqué que le sujet était difficile à objectiver, en a présenté trois dimensions : « La première, ce sont les emplois vacants, passés de 200 000 en 2013 à 450 000 en 2025 (la moitié dans l’hôtellerie-restauration et le commerce de détail) ; la deuxième concerne les métiers en tension [le nombre d’offres d’emploi est plus élevé que celui des candidats], soit 68 % des métiers (BTP, secteur de la santé). Avec deux situations : d’une part, le manque de formation adéquate pour l’ingénieur informatique ou le médecin, et d’autre part la faiblesse des rémunérations qui expliquent l’insuffisance d’aides à domicile, d’agents d’entretien, d’assistantes maternelles et d’aides-soignantes. » En quantité, l’essentiel de ces métiers est perçu comme non qualifiés.

La troisième dimension, ce sont les difficultés de recrutement : des métiers désignés en 2020 comme « très détendus » par le ministère du travail ne le sont plus aujourd’hui. C’est le cas, par exemple, des agents d’entretien ou des aides à domicile. A chaque fois, à cause des salaires.

« D’abord l’intérêt du poste »

Pour ces métiers, les liens avec les rémunérations sont de trois ordres, selon l’économiste : ce sont tous des métiers à bas salaire horaire, car il y a un problème de reconnaissance des compétences, mais surtout de bas salaire mensuel, car ces métiers sont majoritairement à temps partiel. Enfin, il s’agit de métiers pour lesquels la concurrence entre employeurs ne passe pas par les salaires. C’est la branche professionnelle qui fixe les salaires. Le lien est ainsi établi entre rémunération et pénurie de main-d’œuvre.

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Pourquoi les entreprises soutiennent leurs salariés réservistes dans l’armée

Un soldat d’une patrouille Vigipirate, à Paris, le 14 janvier 2015.

Vingt jours par an, dont dix-sept pris en charge par son employeur, Benoît (qui ne souhaite pas donner son nom pour des raisons de sécurité) quitte les équipes numériques de Decathlon et revêt l’uniforme de l’armée de terre, où il est capitaine en cyberdéfense. Jérémy Le Mevel, chef de projet travaux et aménagement chez Carrefour, enfile sa tenue de policier de dix à quinze jours par an – l’entreprise prend en charge jusqu’à vingt jours – pour intervenir en réponse aux appels d’urgence du 17. Tous deux font partie des quelque 84 000 réservistes opérationnels des forces armées et de sécurité intérieure de la garde nationale. L’objectif fixé par Emmanuel Macron est d’atteindre les 160 000 d’ici à 2030.

Et l’intérêt est bien présent. « Nous avons enregistré une progression de 25 % sur un an du nombre de nos réservistes, qui sont actuellement 315, explique Laurent de La Burgade, cadre dirigeant de Thales et président du club des réservistes militaires français du groupe de hautes technologies, une hausse liée, bien sûr, au contexte géopolitique, mais aussi à une recherche de sens. Notre soutien à la réserve est un choix sociétal. »

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Les reconversions professionnelles se banalisent

Le changement, c’est maintenant : les actifs, comme les DRH, ont déjà intégré ce fait à leur vision des parcours professionnels. Telle pourrait être la conclusion de l’enquête « Réussir les reconversions professionnelles », publiée mardi 10 juin par l’IFOP, qui a sondé deux populations pour la Fondation The Adecco Group : un échantillon représentatif de 997 actifs d’une part, 94 directeurs des ressources humaines (DRH) ou responsables RH d’autre part.

Les premiers se montrent conscients des bouleversements à venir : 82 % des actifs anticipent qu’au moins un élément de leur vie professionnelle va connaître une évolution, les catégories socioprofessionnelles supérieures anticipant nettement plus de changements que les catégories populaires. Ces dernières ont en effet déjà connu de profondes mutations (automatisation de l’agriculture et des industries, délocalisations), quand « les nouvelles technologies, notamment l’intelligence artificielle générative, concernent plus directement les cadres », observent Flora Baumlin et Jérôme Fourquet, respectivement directrice d’expertise et directeur du département Opinion de l’IFOP.

Bonne nouvelle, 83 % des actifs sondés se disent confiants face aux mutations du monde du travail, en particulier les moins de 35 ans et les personnes qui disposent de compétences particulièrement demandées (cadres, métiers scientifiques et techniques, hôtellerie-restauration, santé et action sociale). Interrogés sur leurs motivations, les actifs invoquent d’abord l’envie de gagner plus (40 %), puis le désintérêt pour leur métier actuel (32 %). Il n’empêche, 55 % de ceux satisfaits de leur situation professionnelle ont déjà envisagé une reconversion, et ils la perçoivent davantage comme un choix que comme une contrainte.

Conséquence : le phénomène se banalise. 86 % des actifs déclarent avoir déjà vécu des changements de métier, secteur, entreprise ou de statut. 80 % considèrent la reconversion comme une étape normale dans le parcours professionnel. Le maintien dans le même emploi à vie dans la même organisation tend à décliner dans la France contemporaine et cette tendance devrait se renforcer. « La reconversion est perçue positivement, elle correspond aux aspirations de nombreux actifs », poursuit Flora Baumlin.

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Les actifs précaires ou à faible revenu en panne de mobilité

Durant la crise sanitaire, Katia Bovis perd son emploi de conductrice de bus et éprouve des difficultés financières. Pour s’en sortir, elle sollicite la Banque de France, qui lui accorde un rééchelonnement de sa dette bancaire.

La Banque de France, à Paris, en 2020.

Revers de la médaille, elle ne peut plus contracter de nouvel emprunt, alors même qu’elle a mûri durant le confinement un projet d’entreprise d’auto-école écologique à Château-Salins (Moselle). Elle se tourne alors vers l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE), spécialiste du microcrédit, qui lui fournit 10 000 euros. « Cette somme a été un sacré coup de pouce puisqu’elle m’a permis d’acheter une voiture roulant au gaz », relate la cinquantenaire, qui a pu lancer son entreprise en septembre 2024.

Katia Bovis n’est pas la seule à affronter ce type d’obstacles : en 2023, l’ADIE a octroyé à des entrepreneurs 28 852 microcrédits professionnels, dont un quart a servi à l’achat d’un véhicule nécessaire à leur activité. A cela s’ajoutent les 7 505 microcrédits mobilité distribués en 2024 à des salariés pour les aider à se rendre sur leur lieu de travail. Ces quelques milliers de personnes ne constituent que la partie émergée de l’iceberg : l’ADIE ne peut financer que 10 % des demandes de crédits mobilité qui lui sont adressées.

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« Les nouvelles conditions de recrutement des enseignants ne garantissent plus un bagage scientifique suffisant »

Censé redonner de l’attractivité au capes, un décret discrètement publié l’ouvre aux étudiants en troisième année de licence. Un collectif d’universitaires, dans une tribune au « Monde », déplore l’absence de concertation et y voit un coup de rabot supplémentaire à la formation intellectuelle des enseignants du secondaire.

« L’Etat du management 2025 » : l’entreprise incitée à concilier impératifs économiques et sociétaux

Face à des « risques toujours plus pressants », alimentés par le contexte géopolitique et les enjeux climatiques, l’entreprise « doit se réinventer ». Une transformation qui apparaît comme « un impératif à l’heure de l’anthropocène », assurent les auteurs de L’Etat du management 2025 (La Découverte, 128 pages, 11 euros).

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L’ouvrage, placé sous la direction des universitaires Sarah Lasri, Céline Michaïlesco et Sébastien Damart, se penche sur les leviers de cette transition et s’interroge sur les « limites et inconsistances des systèmes classiques », pour mettre en lumière « l’exploration et l’expérimentation de nouvelles logiques ».

A travers une mise en perspective des travaux du laboratoire Dauphine recherches en management, les chercheurs prennent le pouls des organisations, détaillant les mutations à l’œuvre et soulignant les enjeux managériaux qu’elles impliquent.

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Les auteurs montrent, en particulier, toute la difficulté pour les entreprises à relever l’ensemble des défis simultanément : les visées économiques pouvant avoir de multiples impacts sociétaux. Sous la pression des marchés sont ainsi encouragés « des raisonnements et des pratiques tels que les licenciements et les restructurations dans une optique de performance à court terme où le salarié n’est vu que comme une charge comptable, privé d’humanité », détaille l’ouvrage.

« Injonctions contradictoires »

Les difficultés rencontrées par les cadres, confrontés à l’épuisement professionnel, sont également soulignées. Elles conduisent un nombre croissant d’entre eux à se syndiquer, alors que cette catégorie de salariés apparaît traditionnellement peu militante. De quoi introduire, dans les entreprises, une nouvelle complexité : reconsidérer leur management pour « conserver la capacité à mobiliser les femmes et les hommes et à susciter la motivation ».

Face à la difficile conciliation des « enjeux sociétaux pluriels » et de « la garantie de la pérennité économique », « l’hybridité est une voie pour répondre simultanément à ces injonctions contradictoires », expliquent les auteurs. Un chapitre consacré à cette approche fait des organisations souhaitant s’y engager « de véritables laboratoires d’expérimentation où sont testées et négociées de nouvelles règles organisationnelles, managériales et économiques ».

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Le défi de l’insertion des jeunes diplômés dans l’humanitaire : « Pour un poste, on peut recevoir 200 ou 300 candidatures »

Face à la multiplication des crises dans le monde et à la professionnalisation croissante du secteur, de plus en plus d’étudiants se tournent vers des formations spécialisées. Mais, entre la localisation de l’aide, qui privilégie l’embauche de personnels locaux, et les récentes coupes budgétaires, l’insertion n’est pas aisée.