Archive dans 2022

Entreprises : « L’augmentation des délais de paiement procède d’un comportement délibéré »

La priorité donnée à la réduction des coûts et à l’amélioration de la trésorerie, observée au sein de nombreuses entreprises depuis la crise du Covid-19, a amené la plupart des directions des achats à remettre en cause les évolutions observées ces dernières années, qui avaient jusqu’alors favorisé des relations plus équilibrées, collaboratives et partenariales avec les fournisseurs.

Si elles s’avèrent améliorer effectivement à court terme la situation financière des « donneurs d’ordre » – triste expression à la vie dure – , cet infléchissement, au-delà de son caractère éthique discutable, a toutes les chances de se révéler perdant à long terme.

Difficultés de trésorerie

De 2005 à 2018, les délais de paiement avaient connu, en France comme dans le reste de l’Europe, une diminution constante. Quelques mois avant la pandémie de Covid-19, toutefois, les entreprises françaises avaient commencé à creuser l’écart sur ce point avec leurs homologues européennes, car les retards de paiement avaient en effet commencé à y augmenter.

Ils ont littéralement explosé au moment du premier confinement, comme dans toute l’Europe, avant un retour assez rapide à la normale. Sauf en France, où une nouvelle « normalité » a vu les entreprises procéder à un retour en arrière d’une dizaine d’années, retrouvant les délais de paiement moyens des années 2010. C’est ce que révèle la dernière édition de l’Observatoire des délais de paiement de la Banque de France, qui souligne également des différences sectorielles marquées.

Par exemple, dans l’hôtellerie et la restauration, alors que les flux de clientèle se sont taris brusquement, les paiements des fournisseurs ont été massivement décalés en réponse aux difficultés de trésorerie rencontrées.

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A l’été 2020, les PME de moins de deux cents salariés décalaient leurs paiements de quatorze jours, tandis que les PME et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) de moins de mille salariés les décalaient de seize jours et les grandes entreprises, de plus de mille salariés, au-delà de dix-huit jours. L’écart se réduisait fin 2020, mais, dès 2019, donc avant le Covid-19, les grands groupes retardaient en moyenne leurs paiements de 1,3 jour par rapport à l’année précédente.

« La probabilité de défaillance des entreprises impactées augmente de 25 %, et même de 40 %, quand les retards de paiement dépassent un mois »

Les effets de la loi de modernisation de l’économie de 2009, qui visait entre autres la réduction des délais et des retards de paiement, avaient déjà commencé à se dissiper. Le Covid-19 les a réduits à néant. L’étude de la Banque de France souligne que l’augmentation des délais de paiement procède d’un comportement délibéré : les entreprises aux « pratiques les moins vertueuses » ne consacrent clairement pas les mêmes efforts à faire payer leurs clients qu’à payer leurs propres fournisseurs, cherchant à améliorer leur trésorerie au détriment de celle de leurs fournisseurs.

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Camaïeu : le soupçon des ex-salariés sur la gestion de leur entreprise

Les salariés de Camaïeu, mardi 4 octobre, réunis à l’appel de la CGT, devant le siège de l’enseigne à Roubaix (Nord).

A Roubaix (Nord), la colère monte. Une centaine de salariés de Camaïeu se sont rassemblés, mardi 4 octobre, à l’appel de la CGT, devant le siège de l’enseigne liquidée le 28 septembre. Deux ans après sa reprise par la Financière immobilière bordelaise (FIB), société de l’homme d’affaires bordelais, Michel Ohayon, l’ensemble des 511 magasins Camaïeu ont fermé leurs portes samedi 1er octobre. « Ce qu’on nous avait promis à la reprise en 2020, ce n’était que des beaux discours », enrage Thierry Siwik, délégué syndical CGT.

Le syndicat entend engager une procédure en responsabilité civile à l’encontre de M. Ohayon et de la direction de l’entreprise. Avec l’appui de l’avocat Fiodor Rilov, la CGT va d’abord tenter d’obtenir tous les documents comptables « de Camaïeu, comme des autres entités du groupe FIB », explique Me Rilov. Ce dernier admet qu’une procédure en responsabilité « ne permettra pas de retrouver votre emploi mais il faut aller en justice pour obtenir de vraies indemnités », a-t-il dit aux salariés. En fin de journée, une cinquantaine d’entre eux lui ont donné mandat, précise Me Rilov.

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Mobiliser les 2 126 salariés concernés par la liquidation, après le départ des employés en CDD, ne sera pas facile. La plupart ne résident pas dans le Nord. La CGT de Roubaix le sait. « Camaïeu, c’est chez vous ! Il faut squatter ! Il faut de la colère et pas des larmes ! », s’est emporté l’un de ses représentants, en haranguant les manifestants, peu avant qu’une cinquantaine d’entre eux n’arrache les grilles de l’établissement et l’occupe un temps.

De « zéro dette » au redressement judiciaire

L’opération de la CGT tient du coup de poing, à la veille de l’ouverture des négociations du plan social. Elle pourrait cependant gagner en ampleur. Car, partout en France, les salariés Camaïeu ne comprennent pas comment l’entreprise reprise par la FIB en août 2020 « avec zéro dette » s’est retrouvée en redressement judiciaire à l’été 2022 et liquidée le 27 septembre faute de trésorerie, entraînant le licenciement de 2 600 personnes.

Les explications avancées par Wilhelm Hubner, président d’Hermione People & Brands (HPB), division distribution de la FIB, ne « tiennent pas », avance un employé. Cet ancien patron d’Auchan en France a toujours évoqué le Covid-19, la crise et une cyberattaque qui lui aurait coûté 40 millions d’euros. Beaucoup estiment que « ça n’explique pas les 250 millions d’euros de dettes contractées en deux ans » et surtout les pertes de 146 millions d’euros à fin juin 2022. D’autant que l’enseigne aux 228 millions d’euros de chiffre d’affaires ne payait ni ses loyers ni ses marchandises.

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Climat social, partage de la valeur, énergie : les priorités de rentrée des DRH

« L’actualité RH est extrêmement dense, avec des sujets conjoncturels mais aussi structurels », résume Benoît Serre, vice-président délégué de l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH). Durant le mois de septembre, l’ANDRH a pris le pouls de ses quelque 5 000 adhérents, en menant une enquête de rentrée auprès de 462 DRH d’entreprises de tous les secteurs et de tailles différentes.

En cette rentrée, les pénuries de main-d’œuvre demeurent en tête des préoccupations : 88 % des entreprises sondées rencontrent des difficultés de recrutement. Pour limiter ces dernières, les trois quarts des DRH disent faire appel à un cabinet de recrutement, et 72 % affirment travailler sur leur « marque employeur » pour donner davantage envie aux candidats potentiels de les rejoindre.

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Pour ce qui est des salariés présents dans l’entreprise, les responsables des ressources humaines s’inquiètent du climat social, dans un contexte d’inflation, de réforme des retraites et de pérennisation du travail hybride. 39 % des répondants anticipent une dégradation des relations sociales dans leur entité, tout en sachant qu’un quart d’entre eux ne se prononce pas sur le sujet. « Il y a une grande incertitude sur le climat social, cela va dépendre de l’actualité chargée, juge Audrey Richard, la présidente de l’ANDRH. On est plutôt en veille. »

Succès de la prime exceptionnelle de partage de la valeur

L’actualité passe d’abord par la question des salaires : à ce sujet, les DRH interrogés alertent presque tous sur la difficulté de revaloriser les salaires au vu du contexte inflationniste. « La pression est montée en septembre, parfois avec des clauses de revoyure des accords signés, mais il n’y a pas d’avancement massif du calendrier des prochaines NAO (négociations annuelles obligatoires) », a indiqué Benoît Serre. Plus précisément, seuls 18 % des DRH indiquent avoir modifié leur calendrier cette année (par exemple de deux mois, en octobre plutôt qu’en décembre).

L’association a, en revanche, évoqué le succès de la prime exceptionnelle de partage de la valeur, « un outil apprécié qui permet de répondre aux attentes et compenser un sujet d’inflation, sans pour autant alourdir les charges », selon Benoît Serre. 43 % des employeurs l’ont versée en 2021, 40 % la versent en 2022.

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Les autres outils de rémunération connaissent un succès variable : 52 % des entreprises ont mis en place l’intéressement, mais 75 % n’envisagent pas de système d’actionnariat salarié. Sur le rachat des RTT, rendu possible cet été, le vice-président délégué invite à la prudence : « les DRH nous disent qu’il faut faire attention, car certains salariés vont les accumuler pour percevoir une somme importante… Il faut veiller à ne pas payer ça avec un déséquilibre entre vie professionnelle et vie privée. »

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« Les dirigeants de France Télécom se sont mépris sur ce que changer une organisation veut dire »

Vendredi 30 septembre, la cour d’appel de Paris a confirmé la notion de « harcèlement moral institutionnel » employée par la justice en première instance et a retenu la culpabilité de quatre ex-dirigeants de France Télécom, dont son ancien PDG Didier Lombard.

Des audiences et des jugements de ces procès hors norme résulte ainsi la première condamnation d’une stratégie d’entreprise. Une première qui doit inciter les dirigeants d’entreprise à s’interroger sur trois points cruciaux : sur le pouvoir des mots, le bon usage des objectifs et la notion de « prudence ».

Tout d’abord, l’arrêt de la cour mentionne une « politique industrielle de harcèlement moral ». Pour l’établir, les juges, notamment en première instance, se sont beaucoup appuyés sur les travaux des linguistes. Tout discours, ont-ils relevé, revêt une « valeur performative » : les mots créent une réalité. Des « départs par la fenêtre ou par la porte », « dégraissage » : ces mots, ont estimé les juges, véhiculent et engendrent la violence.

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Le procès a dévoilé un second levier managérial, plus insidieux encore : l’utilisation de discours ambigus. Cet usage « orwellien » du langage correspond, selon l’accusation, à un « mélange de novlangue et de langage corporate permettant de justifier n’importe quelle action délétère derrière des mots en apparence inoffensifs et bienveillants », comme le « time to move » ou le « projet personnel accompagné ».

Instrument stérile de contrôle et de domination

Les mots prononcés par les dirigeants ont le pouvoir de relever et d’élever, mais aussi de blesser et de tuer. Précise et méthodique, la cour d’appel a daté le virage sémantique opéré par les dirigeants : octobre 2006, lors d’un séminaire de motivation des cadres.

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Ensuite, dans les organisations, parole et action sont entremêlées. Les juges ont certes relevé l’« excellence des compétences » des prévenus, qui consiste à faire face à des situations complexes aux déterminants multiples. Mais ils se sont penchés sur la façon dont la direction de France Télécom a agencé des pyramides complexes d’indicateurs pour orienter les actions des cadres, y compris en indexant une partie de leur rémunération sur l’atteinte ou non d’objectifs de réduction des effectifs. Ils ont observé, en première instance, que le « pilotage de la ligne managériale au moyen d’indicateurs de performance basés sur les flux a mécaniquement provoqué l’utilisation de techniques managériales délétères ».

En fait, les dirigeants de France Télécom se sont probablement mépris sur ce que changer une organisation veut dire : non pas moderniser une machine, mais concevoir, en interaction et en collaboration avec d’autres acteurs de l’entreprise, une situation différente, résolvant certaines difficultés et satisfaisant mieux certains objectifs. Et, surtout, ils ont oublié que le management par objectifs, pour son fondateur Peter Drucker (1909-2005), repose sur l’autocontrôle et « fait du bien commun le but de tous les manageurs ».

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L’Assemblée nationale débute l’examen du projet de l’assurance-chômage dans une ambiance électrique

Un premier texte et, déjà, une soirée mouvementée. Pour l’ouverture de la session ordinaire, lundi 3 octobre, les députés ont débuté l’examen du projet de loi ouvrant la voie à une réforme de l’assurance-chômage dans une ambiance électrique, où chaque groupe s’est rendu coup pour coup. Une rentrée parlementaire d’emblée marquée par une motion de rejet sur ce premier texte du gouvernement. Déposée par les députés « insoumis », elle a été soutenue par les autres composantes de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) et par le Rassemblement national (RN).

Le député RN, Jean-Philippe Tanguy, discute avec la présidente du groupe Rassemblement national, Marine Le Pen, à l’Assemblée nationale, le 3 octobre 2022.

Sur la forme, les élus de La France insoumise (LFI), très mobilisés toute la soirée, ont régulièrement invectivé le ministre du travail, Olivier Dussopt, ou le rapporteur Renaissance du texte, Marc Ferracci, durant leur prise de parole à la tribune. Les élus de la majorité, qui souhaitent désormais répondre plus régulièrement aux attaques des oppositions, ont répliqué en évoquant le député « insoumis » du Nord, Adrien Quatennens, visé par une enquête pour violences conjugales contre son épouse.

Le ministre du travail, Olivier Dussopt, prend la parole lors du débat sur le projet de la réforme de l’assurance-chômage, à l’Assemblée nationale, le 3 octobre 2022.
Le député LFI (La France Insoumise), Francois Ruffin, discute avec le député GDR (Gauche Démocrate et républicaine), Sébastien Jumel, pendant la prise de parole du rapporteur de la commission des affaires sociales, Marc Ferracci, à l’Assemblée nationale, le 3 octobre 2022.

Sur le fond, le député LFI de Haute-Garonne, Hadrien Clouet, qui a défendu la motion de rejet pour son groupe, a déploré « une grande chasse aux chômeurs », une « grande braderie aux salaires » et une « méthode brutale » de la part de l’exécutif. Pour l’élu, ce texte « accorde les pleins pouvoirs au gouvernement pour fixer les règles de l’assurance-chômage sans jamais revenir devant nous ni les partenaires sociaux ». « Vous avez les idées claires sur rien du tout. Et vous voulez les pleins pouvoirs ? Ce sera sans nous », a-t-il lancé. Dans la foulée, le RN, par la voix de Kévin Mauvieux (Eure), a annoncé le soutien de son groupe à la motion de rejet en déplorant « une réforme injuste qui vise les chômeurs ». « Nous sommes d’accord sur le diagnostic » avec la gauche, a expliqué le député d’extrême droite, avant de préciser : « Mais nous ne sommes pas d’accord sur le remède. » Car, pour M. Mauvieux, les solutions sont la « priorité nationale » et le « patriotisme économique ».

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Moduler les indemnités selon la conjoncture

Avec ce projet de loi, le gouvernement souhaite, dans un premier temps, proroger les règles d’indemnisation mises en place par la réforme de 2019 et qui arrivent à échéance le 1er novembre. Mais il compte surtout les changer à nouveau, par décret, en installant une modulation des indemnités selon la conjoncture économique. « Le mécanisme de modulation des règles d’indemnisation en fonction de l’état du marché du travail sera examiné et sera concerté de manière approfondie avec les partenaires sociaux », a assuré le ministre du travail, alors que la concertation avec les organisations syndicales et le patronat, promise pour mi-septembre, n’a toujours pas débuté. « Il faut répondre à un certain nombre de questions sur la régionalisation, sur les paramètres de modulation, sur les indicateurs qui permettent de rendre compte du cycle économique. Il faut le faire en évitant de toucher au montant de l’indemnisation », a par ailleurs annoncé Olivier Dussopt.

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Assurance-chômage : un tiers des personnes éligibles n’y recourent pas

Voilà deux ans que les députés l’attendaient. Le gouvernement a enfin remis au Parlement son rapport sur le non-recours à l’assurance-chômage. Un texte qui devait initialement être rendu dans les deux ans suivant la promulgation, en 2018, de la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ». Les parlementaires de gauche avaient d’ailleurs soupçonné l’exécutif de censurer ce rapport en début d’année pour éviter sa publication avant l’élection présidentielle.

C’est donc au moment où commence l’examen en séance publique à l’Assemblée nationale du projet de loi ouvrant la voie à une nouvelle réforme de l’assurance-chômage que le gouvernement décide de présenter les conclusions de l’étude, qui s’est concentrée sur les fins de contrat ayant eu lieu entre le 1er novembre 2018 et le 31 octobre 2019. Elle ne prend donc pas en compte la précédente réforme de 2019 et s’appuie sur les critères d’éligibilité de la convention Unédic de 2017.

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Le résultat est édifiant : entre 390 000 et 690 000 personnes éligibles à l’assurance-chômage n’y recourent pas. « Selon les hypothèses centrales retenues dans le rapport, environ 30 % des personnes âgées de 25 à 60 ans qui connaissent une fin de contrat dans le secteur privé sans être inscrit préalablement à Pôle emploi et qui remplissent les critères d’éligibilité ne recourent pas à l’assurance-chômage », indique le rapport mené par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), rattachée au ministère du travail. Un taux proche de celui observé pour d’autres prestations sociales : 34 % pour le revenu de solidarité active et 32 % pour les retraites.

« Pas suffisamment informés »

« Selon le champ et les hypothèses retenus, l’estimation du taux de non-recours des personnes non inscrites à Pôle emploi dans l’année qui suit leur fin de contrat varie entre 25 % et 42 % », précisent les auteurs qui établissent également le profil de ces non-recourants. Ainsi, ce sont surtout des salariés en contrats courts (41 % des CDD et 36 % des intérims contre 16 % des CDI) et des personnes qui travaillent moins longtemps que les recourants, avec des droits potentiellement plus faibles donc – « 55 % des éligibles ayant travaillé entre quatre et six mois ne recourent pas à l’assurance-chômage, contre 19 % pour ceux ayant travaillé plus de deux ans ».

« Sans surprise les personnes en contrats courts sont les plus concernées, alors que ce sont ces mêmes personnes que visait la réforme de 2019 en durcissant les règles les concernant », note le député communiste des Bouches-du-Rhône Pierre Dharréville, qui avait profité de l’examen en commission des affaires sociales du projet de loi assurance-chômage, mercredi 28 septembre, pour déposer un amendement, adopté, réclamant au gouvernement la publication de ce rapport sous un mois.

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Le projet de loi assurance-chômage pourrait être durci à l’Assemblée nationale

C’est le premier des huit chantiers du gouvernement censés lui permettre d’atteindre l’objectif du plein-emploi. Le projet de loi ouvrant la voie à une réforme de l’assurance-chômage arrive à l’Assemblée nationale, lundi 3 octobre. Si les débats devraient être agités, notamment avec la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), qui a prévu de déposer une motion de rejet du texte, l’issue ne fait guère de doute. Que ce soit dans l’Hémicycle ou comme ça a été le cas durant l’examen en commission des affaires sociales, les mardi 27 et mercredi 28 septembre, la coalition présidentielle peut compter sur le groupe Les Républicains (LR) pour obtenir la majorité sur ce premier texte de la session ordinaire.

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L’interrogation concerne plutôt la volonté de la coalition Ensemble citoyens – Renaissance, le MoDem et Horizons – et de LR de durcir un peu plus ce court texte de cinq articles, dont le but premier est de proroger les règles actuelles d’indemnisation – elles arrivent à terme au 1er novembre –, jusqu’à la fin de 2023. Des amendements ont notamment été déposés par le MoDem pour contraindre plus fortement les personnes en CDD à qui l’on propose un CDI de même nature à l’accepter et par LR afin d’assimiler les abandons de poste à des démissions pour les rendre inéligibles à une indemnisation chômage. En les acceptant, le gouvernement pourrait s’assurer du vote des députés de droite tout en n’apparaissant pas comme responsable du durcissement du projet de loi.

« Une logique de dialogue »

« Il y a effectivement une faille dans la mesure où un salarié qui procède à un abandon de poste accède à des conditions d’indemnisation plus favorables qu’un démissionnaire », a déclaré Olivier Dussopt, lors de son audition en commission, mardi. Si le ministre du travail a montré des signes d’ouverture sur ce sujet, il a néanmoins averti : « Il faut prévoir une disposition qui permet à un salarié qui procède à un abandon de poste pour une question de sécurité de pouvoir le faire valoir très vite, de telle sorte à ne pas être pénalisé. »

« C’est une preuve de la volonté du gouvernement de travailler ensemble, explique Jean-Louis Thiériot, député LR de Seine-et-Marne et auteur de l’amendement sur les abandons de poste. C’est un changement par rapport à la précédente mandature. »

Retiré en commission, l’amendement a été reformulé et vise désormais à « présumer démissionnaire (…) le salarié qui a abandonné volontairement son poste ». Il sera défendu par LR et Ensemble. « On est dans une logique de dialogue, confirme la députée Renaissance du Nord Charlotte Parmentier-Lecocq. Mais la volonté de durcir les choses sur les abandons de poste correspond à une attente de terrain, des chefs d’entreprise mais aussi des citoyens. » Si les élus de droite regrettent que le texte manque d’ambition et ne porte pas une réforme plus profonde de l’assurance-chômage, leurs voix ne devraient, toutefois, pas manquer en fin de semaine pour l’adopter.

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L’argot de bureau : « Equicoaching », ou le cheval qui murmurait à l’oreille des manageurs

« Le cheval est un médiateur qui agit comme un révélateur. L’équicoaching permet d’explorer des ressources insoupçonnées individuelles et collectives pour imaginer demain dans l’organisation. » Vous venez de le vérifier, cette chronique n’est pas parue le 1er avril. Vous pouvez aussi vérifier que ces phrases ne sont pas fictives : que nenni, elles émanent de l’Académie équicoaching, un organisme de formation certifié Qualiopi, qui a accueilli trois mille deux cents personnes en dix ans, et dont Sanofi ou TotalEnergies sont des clients fidèles.

L’équicoaching, inventé dans les années 1990 pour des cadres américains de Volkswagen, et importé depuis vingt ans en France, est une méthode de développement personnel assistée par un cheval. En stage d’un ou deux jours dans un haras, façon classe verte, ou au cœur d’un ensemble façon « séminaire au calme », cette pratique, proposée par de nombreux organismes et lieux champêtres, consiste à organiser la rencontre entre des salariés – la plupart du temps, des manageurs – et des équidés.

Il ne suffit pas seulement de faire du cheval pour s’aérer la tête, loin de là ! A en croire les prestataires qui vendent ce concept, cette rencontre au potentiel quasi mystique peut résoudre tous les problèmes d’un cadre au profond mal-être et à court de solutions : améliorer son appartenance à l’équipe, développer ses « soft skills » (son comportement), son leadership, ou encore l’aider à gérer les crises et à mettre en place un management agile.

L’équidé devient un collaborateur

Bien entendu, tout cela est donc transposable au bureau : chassez le professionnel, il revient au galop. L’analogie, quelque peu maladroite, doit se faire naturellement avec les « N − 1 » du manageur.

En effet, le temps de la formation, qui comprend des moments théoriques sur les fondamentaux du management, l’équidé devient littéralement un collaborateur : le binôme sera plus ou moins productif, et des résultats seront attendus par votre responsable, ici incarné par le patron du haras (ou « équicoach »). Par exemple, attirer le cheval au centre d’une bâche bleue, les quatre pattes dessus. Pourtant, le cheval n’a pas envie, et n’aime généralement pas le bruit de ses fers sur cette surface inconfortable. Il faudra donc y aller avec doigté et petites incitations, façon « nudge ».

Archives : Article réservé à nos abonnés Le cheval, un bon moyen de se remettre en selle

Depuis 2021, l’équicoaching est une certification inscrite au répertoire spécifique de France compétences. Hors de l’entreprise, on trouve des occurrences de cette pratique dans le cadre des « vacances apprenantes »proposées par l’éducation nationale à l’école militaire d’équitation de Fontainebleau, ou en milieu carcéral à destination des détenus.

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