Archive dans janvier 2022

Compte personnel de formation : des députés s’opposent à l’idée d’une régulation budgétaire

La députée LRM Catherine Fabre, à l’Assemblée nationale, à Paris, le 18 janvier 2022.

Le succès du compte personnel de formation (CPF) coûte cher aux finances publiques, mais il ne faut surtout pas enrayer la dynamique en cours. Des députés de la majorité et de l’opposition ont exprimé cette position, mercredi 19 janvier, dans le rapport d’évaluation qu’ils ont réalisé au sujet de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel promulguée en septembre 2018. L’intervention de ces parlementaires retient l’attention, car des questions se posent, depuis des mois, sur la « soutenabilité » budgétaire du dispositif et sur les éventuelles mesures correctives à prendre.

Mis en place en 2015, le CPF connaît un emballement spectaculaire depuis quelques années. La loi « avenir professionnel » a simplifié le mécanisme et en a facilité l’accès, notamment par le biais de la « monétisation » : il est désormais décompté en euros, et non plus en heures. En novembre 2019, une nouvelle étape a été franchie avec le lancement d’une application mobile et du « parcours d’achat direct » : grâce à ces instruments, les travailleurs et les chômeurs peuvent se payer en quelques clics la formation de leur choix, sans avoir à passer par un intermédiaire, comme c’était le cas auparavant.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés CPF : l’essor du compte personnel de formation se confirme

Ces changements ont provoqué un essor du nombre de stages. En 2020, quelque 984 000 d’entre eux ont été suivis dans le cadre du CPF, « soit un quasi-doublement » comparé à 2019, d’après le rapport parlementaire. La tendance s’est maintenue, puisque, de début janvier à fin juin 2021, le nombre de dossiers était équivalent à celui de l’ensemble de l’année précédente.

Inflation des dépenses

Un tel emballement a des répercussions financières sur France compétences, l’instance nationale de pilotage, qui répartit les fonds en faveur de la formation continue et de l’apprentissage. Pour 2021, cet établissement public estime à 2,3 milliards d’euros le budget consacré au CPF – un chiffre en hausse de 857 millions par rapport aux prévisions initiales. S’agissant de 2022, une enveloppe encore plus épaisse est envisagée : 2,6 milliards d’euros, selon l’évaluation rendue publique mercredi.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Le CPF, terrain de chasse des escrocs

Cette inflation des dépenses a fait l’objet, dès 2020, d’un rapport conjoint de l’inspection générale des finances (IGF) et de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS). Pour maîtriser le montant de la facture, les deux corps de contrôle avaient formulé plusieurs recommandations : par exemple, « plafonner le montant pris en charge » ou « instaurer un ticket modérateur » sur l’utilisation du dispositif, ce qui aurait laissé un reste à charge pour les personnes. L’IGF et l’IGAS reconnaissaient toutefois que de telles solutions n’étaient pas « en phase avec l’esprit de la réforme », celle-ci se plaçant délibérément dans une logique de « guichet ouvert » (dans la limite des droits accumulés par les individus).

Il vous reste 38.28% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Un rapport parlementaire propose 76 solutions contre la désindustrialisation en France

A l’usine Sanofi de Marcy-l’Etoile (Rhône), le 16 juin 2020.

Après l’audition de plus de 135 interlocuteurs, ministres, anciens ministres, experts, représentants de l’industrie et responsables syndicaux, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la désindustrialisation a rendu son rapport, mercredi 19 janvier. Une sorte de « feuille de route » pour la réindustrialisation de la France, dont le rapporteur, le député socialiste Gérard Leseul, souhaiterait que les candidats à la présidentielle se saisissent.

Créée en juillet 2021, après que la pandémie et ses pénuries de masques ou de composants électroniques ont mis en évidence des pertes préjudiciables de capacité de production ou de savoir-faire en France, la commission était chargée « d’identifier les facteurs ayant conduit à la chute de la part de l’industrie dans le produit intérieur brut [PIB] et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l’industrie, et notamment celle du médicament ».

Lire l’entretien : Article réservé à nos abonnés « La désindustrialisation a des conséquences économiques, sociales et politiques profondes »

Le nombre d’emplois industriels comme la part de la valeur ajoutée industrielle dans le PIB ont été divisés par deux en cinquante ans, faisant de la France l’économie la plus désindustrialisée du G7, avec celle du Royaume-Uni.

Mondialisation, financiarisation, manque de compétitivité

Les causes ont déjà été identifiées ces dernières années par nombre de travaux cités par la commission, des rapports de France Stratégie à ceux du Conseil d’analyse économique ou de la Cour des comptes : des « évolutions structurelles » et « des choix rétrospectivement discutables », à l’image du concept d’entreprise sans usine ou fabless, popularisé en 2001 par Serge Tchuruk, PDG d’Alcatel, « une utopie coûteuse en termes de perte d’emplois et de souveraineté ». Elle a conduit à des délocalisations massives de la production dans des pays censés être les « ateliers du monde », lesquels sont, depuis, montés en gamme et rivalisent avec la France, y compris en termes de recherche et développement (R&D).

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Réindustrialisation : Macron veut célébrer « l’attractivité dans les territoires »

La mondialisation, le manque de compétitivité de l’industrie française (coût du travail et fiscalité), mais aussi sa financiarisation, le choix de la rentabilité à court terme plutôt que d’investir dans la R&D, ou le positionnement dans le milieu de gamme sont autant de facteurs qui ont conduit à la désindustrialisation. Tout comme « l’écosystème » industriel français, fait de TPE, de PME et de grands groupes. Il manque ces entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui font la force du tissu industriel allemand, au capitalisme familial plus soucieux de maintenir des emplois sur son territoire que les multinationales.

Il vous reste 52.5% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Le gouvernement veut reproduire le succès de start-up industrielles telles qu’Exotec

Devant le site Exotec de Croix (Nord), le 13 avril 2021.

Jamais Exotec, le fabricant français de robots pour les entrepôts, n’avait connu une telle exposition médiatique. Lundi 17 janvier, à peine sa levée de fonds de 335 millions de dollars (295 millions d’euros) annoncée, qui lui a permis d’atteindre une valorisation de 2 milliards de dollars, et donc le statut prestigieux de licorne – jeune pousse valorisée à plus de 1 milliard de dollars –, le président de la République, Emmanuel Macron, se fendait d’une vidéo en ligne pour saluer cette étape. L’exécutif avait parié que la France ne se doterait de sa 25e licorne qu’en 2025 ; avec Exotec, elle a franchi ce cap avec trois années d’avance.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Après une année 2021 de tous les records pour les start-up françaises, 2022 s’annonce prometteuse

Mercredi 19 janvier, c’étaient aux membres du gouvernement Cédric O (numérique) et Agnès Pannier-Runacher (industrie) de se déplacer dans l’usine d’Exotec, à Croix (Nord), pour saluer cette start-up prometteuse, qui remplit tous les objectifs que se fixe l’exécutif pour le futur de la French Tech. Après avoir réussi à développer des entreprises numériques à succès (Doctolib, Back Market, ManoMano, parmi les plus connues du grand public), le gouvernement voit en Exotec le « symbole », selon Cédric O, de jeunes pousses capables de se lancer dans l’industrie et de créer des emplois dans les territoires.

Avec sa dernière levée de fonds, l’entreprise fondée en 2015 entend embaucher 500 ingénieurs en plus des 360 salariés qu’elle compte aujourd’hui, et au moins autant sur les autres fonctions (support, vente, production). Elle a réussi à se développer à l’étranger, notamment au Japon, où Uniqlo représente son plus grand client à ce jour. Elle a également attiré de grands fonds d’investissement internationaux, comme Goldman Sachs Asset Management et 83North. Surtout, elle constitue la première licorne industrielle sur la scène française, avec un chiffre d’affaires de 126 millions d’euros en 2021, et un objectif de 1,2 milliard en 2025.

Difficulté de financement, lourdeur administrative

Pour le gouvernement, ce succès incarne une forme de consécration, et la réussite du virage pris en mars 2019, lorsqu’il a lancé le plan Deep Tech. Pourvu de 2,5 milliards d’euros, celui-ci visait à promouvoir la création d’entreprises issues de la recherche, avec la perspective, pour une partie d’entre elles, de créer des outils industriels sur le territoire. De premiers succès sont nés avec des entreprises telles qu’InnovaFeed, spécialisé dans les protéines alimentaires, ou Tissium, expert de la réparation des tissus humains. Tous deux étaient également présents, mercredi, à Croix, afin de témoigner de la complexité de faire émerger de tels projets : difficulté de financement, lourdeur administrative pour créer des sites industriels, etc.

Il vous reste 39.34% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Télétravail : la règle prévoyant trois jours au minimum prolongée pour deux semaines

La ministre du travail, Elisabeth Borne, a annoncé, mercredi 19 janvier, aux représentants des organisations syndicales patronales et de salariés que le gouvernement proposait de prolonger « pour encore deux semaines » la règle prévoyant trois jours de télétravail au minimum par semaine pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, a-t-on appris auprès du ministère.

La ministre a précisé aux organisations syndicales que « la situation sanitaire, même si elle sembl[ait] s’acheminer vers un plateau, ne parai[ssait] pas à date permettre une levée ou un relâchement immédiat des mesures en matière de télétravail », a-t-on ajouté de même source. Ces mesures avaient été renforcées le 3 janvier, initialement pour trois semaines.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Télétravail : trois jours au minimum par semaine à compter du 3 janvier

Freiner la poussée du variant Omicron

Le premier ministre, Jean Castex, avait appelé dès décembre à favoriser le télétravail, à raison de deux à trois jours par semaine. Juste avant Noël, sur Europe 1, Mme Borne avait invité les entreprises « à se préparer à renforcer le télétravail dès le 3 janvier ». Les organisations syndicales patronales et de salariés elles-mêmes, lors d’une réunion le 20 décembre avec la ministre, avaient cité l’élargissement du télétravail comme l’un des « leviers » possibles pour freiner la poussée du variant Omicron.

Si le télétravail relève bien d’un accord d’entreprise, l’exécutif peut imposer une règle minimale au titre des mesures de protection des travailleurs. A l’automne 2020, le protocole sanitaire en entreprise avait ainsi imposé pendant plusieurs mois le télétravail comme une règle, précisant même qu’il devait être « porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance », avant d’être assoupli par étapes.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Le 100 % télétravail oblige l’entreprise à s’organiser autour du salarié

En novembre 2021, environ 25 % des salariés pratiquaient régulièrement le télétravail, selon les chiffres de la Dares, la direction des statistiques du ministère du travail, publiés le 23 décembre. Au plus fort de la crise, au printemps 2020, ce chiffre était monté à 40 % – ce qui signifie qu’il existe bien une marge de manœuvre sur cette question.

Le Monde avec AFP

Plus intenses et plus longues, les vagues de chaleurs entraînent la perte de centaines de milliards d’heures de travail

Un ouvrier se repose à l’intérieur d’un tube de béton en se protégeant du soleil sur un chantier de construction du mégaprojet de la « nouvelle capitale administrative » de l’Egypte, à 45 kilomètres à l’est du Caire, le 3 août 2021.

La pandémie de Covid-19 n’est pas seule à mettre à mal l’économie et l’emploi dans le monde. Le réchauffement climatique, avec la survenue de plus en plus fréquente de vagues de chaleur intenses, coûte cher. Selon une étude publiée, le 13 janvier, dans la revue Environmental Research Letters, près de 650 milliards d’heures de travail annuelles seraient perdues en raison de chaleurs intenses. Soit 400 milliards d’heures supplémentaires par rapport aux estimations précédentes, antérieures à 2017.

On savait que le changement climatique affectait la population de la planète, menaçant sa santé et son bien-être, mais ses conséquences sont aussi importantes s’agissant de la productivité des travailleurs, expliquent les auteurs de cette étude universitaire, réalisée sous la direction du chercheur en sciences du climat, Luke A. Parsons (Duke University, Etats-Unis). Durant les quatre dernières décennies, le nombre d’heures non travaillées, à cause des chaleurs et des taux d’humidité excessifs, aurait augmenté d’au moins 9 %, dans les secteurs des activités agricoles, forestières, de la pêche ou encore de la construction.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Les salariés, victimes collatérales du réchauffement climatique

Les pertes de main-d’œuvre, proportionnelles à la part de la population en âge d’exercer un emploi en extérieur, sont les plus élevées en Asie du Sud, de l’Est et du Sud-Est, où vivent un grand nombre de personnes travaillant dans l’agriculture. « Plus précisément, les pertes de main-d’œuvre sont les plus prononcées en Inde, qui représente près de la moitié des pertes totales mondiales et a subi plus de quatre fois les pertes de main-d’œuvre du deuxième pays le plus touché, la Chine », écrivent les auteurs de l’étude. Ce déficit est aussi corrélé aux types de travaux effectués en plein air, à leur intensité, comme au nombre d’heures travaillées effectivement par jour. Ainsi, les travailleurs du secteur agricole ont effectué 10 à 90 fois moins d’heures de travail que ceux qui effectuent des travaux légers, par exemple dans les secteurs des services, et modérés, comme dans l’industrie manufacturière, précisent les universitaires.

Disparition de 155 millions d’emplois dans le monde par an

La « chaleur humide » élevée – les auteurs englobent dans ce terme « des conditions qui sont soit chaudes (et sèches), soit suffisamment chaudes et humides pour entraîner une baisse de la productivité du travail » – devrait, en augmentant la perte de main-d’œuvre, réduire le produit intérieur brut (PIB) mondial jusqu’à 4,0 % d’ici 2100, estiment-ils.

Cette perte de productivité affecte à nouveau différemment les économies nationales, avec moins 7 % pour le PIB de l’Inde, moins 5 % pour le Vietnam, mais moins 1,3 % en Chine, moins 0,5 % aux Etats-Unis ou encore moins 0,1 % en France. Les auteurs anticipent la disparition de 155 millions d’emplois dans le monde par an, l’Inde représentant près de la moitié de cette perte, avec 62 millions d’emplois. « Ces pertes annuelles sont comparables aux pertes de travail temporaires pendant les fermetures mondiales liées à la pandémie de Covid-19, qui auraient causé des pertes équivalant à environ 130 millions d’emplois à temps plein au cours du premier trimestre de la pandémie selon l’Organisation internationale du travail », écrivent-ils.

Il vous reste 42.21% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Le licenciement de la responsable des documentaires de Public Sénat suscite l’émoi

L’information n’est pas encore officielle, mais elle fait déjà grand bruit parmi les producteurs de documentaires : la responsable de ces programmes pour la chaîne parlementaire Public Sénat, Hélène Risser, est licenciée. La journaliste, arrivée sur la chaîne en février 2006, a reçu sa lettre le 6 janvier, après un entretien préalable avec le président, Christopher Baldelli, trois jours plus tôt. Motif principal invoqué : de graves manquements à ses obligations professionnelles dans le cadre de la préparation d’un documentaire produit par la société Tournez s’il vous plaît (TSVP). Le directeur de l’antenne et des programmes, Jean-Philippe Lefèvre, le plus ancien salarié de la chaîne (il est arrivé en février 2000), est lui aussi sur le départ.

Lire aussi Christopher Baldelli prend la tête de Public Sénat, Bertrand Delais conserve celle de LCP

A l’origine du litige qui oppose la journaliste et le président depuis le 1er juin 2021, une séquence du film René Carmille, un hacker sous l’Occupation, diffusé le 6 novembre. Ce premier documentaire de Youssr Youssef se présente comme l’enquête d’une étudiante, fraîchement diplômée de l’Ensae (l’Ecole nationale de la statistique et de l’administration économique) sur le fondateur de son école, créateur sous l’Occupation du Service national des statistiques, futur Insee.

Adoptant un ton résolument candide, voire naïf, la jeune femme lance son récit autour de cette interrogation : à l’été 1940, soit entre la signature de l’armistice et le début de la collaboration, Philippe Pétain savait-il que René Carmille mettait ses compétences au service d’un projet ultra-secret de remobilisation de combattants contre l’occupant nazi ? Et lui, le collaborationniste frappé d’indignité nationale en 1945, l’aurait-il laissé faire en connaissance de cause ?

La réponse, évidemment négative et sans équivoque, est apportée plusieurs fois au cours du film par différents historiens. Mais cette séquence introductive choque Christopher Baldelli au point que, trois jours avant la diffusion du documentaire, il demande que soient supprimées les deux minutes du film qui, à ses yeux, posent « un problème majeur », susceptible d’exposer la chaîne à une accusation de « complicité de révisionnisme ». En total désaccord avec cette lecture, Hélène Risser conteste toute ambiguïté, mais se tourne tout de même vers le producteur pour qu’il remanie ce passage.

« Volonté de réorganiser la ligne éditoriale »

« A l’époque, Eric Zemmour venait de faire polémique en prétendant que Pétain avait sauvé des juifs français, justifie Christophe Brûlé, rédacteur en chef à TSVP. Nous avons modifié le film à la demande de Christopher Baldelli parce que le contexte était sensible. Pas du tout parce qu’il était entaché du moindre soupçon de révisionnisme. Dans cette affaire, nous prenons une balle perdue. » Fin octobre 2021, le film avait été projeté en avant-première à 200 personnes, dont des historiens, mais aussi envoyé à la presse (Historia, Le Monde, L’Obs, Télérama, etc). « Il n’avait reçu que des bonnes critiques », souligne un salarié de la chaîne.

Il vous reste 36.64% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Croissance : la difficile évaluation du plan de relance gouvernemental

L’interminable crise sanitaire l’a presque fait oublier, mais il est toujours là. Le plan France Relance, lancé en septembre 2020 pour doper l’économie à un moment où le gouvernement espérait pouvoir sortir rapidement de la pandémie de Covid-19, continue à être mis en œuvre. Sur les 100 milliards d’euros prévus d’ici 2022, 72 milliards ont été « engagés », c’est-à-dire fléchés vers des projets spécifiques, dont 42 milliards effectivement versés, a indiqué Matignon, mardi 18 janvier.

Cela correspond à l’horizon que s’était fixé le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, pour ce vaste plan. Conçu autour de trois piliers – écologie, compétitivité des entreprises, emploi et cohésion sociale –, il regroupe des mesures hétéroclites : outre la baisse des impôts de production, le dispositif MaPrimeRénov’pour la rénovation des logements y côtoie le plan hydrogène, la prime à l’apprentissage, le Ségur de la santé ou encore le bonus-malus automobile.

Lire la tribune : Article réservé à nos abonnés France 2030 : « Une large coupure subsiste entre économie et écologie »

« Les résultats sont là », s’est félicité le locataire de Bercy, selon qui « France Relance renforce les politiques menées depuis cinq ans pour l’attractivité, la compétitivité et la réindustrialisation. » Son entourage abonde : « Le déploiement soutenu de France Relance se traduit sur le plan économique : les deux objectifs de court terme, fixés à l’été 2020, sont largement atteints. » A l’époque, il s’agissait d’une part de remettre la France sur les rails de la croissance en renouant, à fin 2022, avec le niveau d’activité qui était celui d’avant-crise, et de l’autre, de créer 160 000 emplois supplémentaires en 2021 et de revenir sous les 10 % de taux de chômage.

Force est de le constater : tous ces indicateurs sont au vert en ce début d’année. Prévue à 6,25 %, la croissance devrait finalement atteindre 6,7 % en 2021. Le pays a renoué dès l’automne avec son niveau d’activité d’avant-crise. Le taux de chômage approche les 8 % et l’économie a créé plus de 500 000 emplois en 2021.

Lire aussi Croissance de la France : l’OCDE relève sa prévision à 6,8 % en 2021 et 4,2 % en 2022

Mais est-ce grâce à France Relance ? C’est tout le sujet. « Il faut être prudent sur l’impact spécifique du plan sur ces bons résultats », reconnaît-on à Matignon, tout en assurant qu’il « s’inscrit dans une politique économique globale, avec des réformes pérennes, comme la fiscalité du capital, celle du marché du travail, la loi de simplification pour les entreprises… ». C’est en substance ce qu’indiquait, en octobre, le rapport intermédiaire du comité d’évaluation de France Relance : mandaté par le gouvernement et présidé par l’économiste Benoît Cœuré, l’instance jugeait « difficile d’établir un lien direct entre ce rétablissement rapide de la situation et la mise en œuvre de France Relance ».

Il vous reste 45.1% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Les salariés des entreprises en difficulté désabusés face aux visites des candidats à la présidentielle

L’image avait fait la une des « 20 heures ». Le 24 février 2012, le candidat à la présidentielle François Hollande, debout sur un camion, haranguait la foule des ouvriers l’acclamant sur le site de Florange, en Moselle, pour rappeler les « promesses qui n’avaient pas été honorées » de son adversaire Nicolas Sarkozy. Quelques mois plus tard, le candidat PS était élu président de la République. Et les hauts-fourneaux de Florange n’ont jamais redémarré. « Sarkozy nous avait promis monts et merveilles, dénonce Walter Broccoli, ex-syndicaliste FO de Florange. Hollande nous a aussi promis monts et merveilles et, quelques mois après, nous a laissé tomber. »

A chaque élection, des sites industriels menacés de fermeture voient défiler leur lot de postulants à l’Elysée. Alors que le chômage demeure une des principales craintes des Français, les visites d’usines sont devenues un passage obligé pour les candidats. Tous gardent en tête cette réalité : le vote ouvrier, qui représente encore 5,3 millions de bulletins en France, a porté les candidatures de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon lors de la dernière élection présidentielle.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés A l’approche de la présidentielle, le gouvernement renforce sa vigilance sur les restructurations industrielles

Il y a les « bons clients », les élus habitués à aller au contact de la population : « Ceux qui aiment bien se mettre en tête de cortège lors des manifs », ironise Walter Broccoli. Et il y a les politiques peu rompus à l’exercice, à leurs risques et périls. « Si, à chaque fois qu’il y a un plan social, on doit nationaliser… » Cette réplique d’un Lionel Jospin mal à l’aise face à un ouvrier qui l’interpellait sur le sort des salariés de Lu à Evry (Essonne), en mars 2002, reste encore en travers de la gorge de Philippe Aoune. « Il nous a pris pour des imbéciles », fulmine cet ex-cariste et délégué FO à l’usine Lu de Ris-Orangis. Filmée, l’altercation fut suivie de la chute de l’ex-premier ministre dans les sondages et par sa défaite lors du premier tour de l’élection présidentielle, un mois plus tard.

Séquence nostalgie

En 2017, c’est l’affrontement, par caméras interposées, des candidats Emmanuel Macron et Marine Le Pen sur le sort de l’usine Whirlpool, à Amiens, qui a marqué les esprits. « Seule la presse locale a été prévenue de la venue d’Emmanuel Macron, affirme Cécile Delpirou, députée LRM de la Somme et ancienne déléguée syndicale CFE-CGC de l’usine amiénoise. Mais comme “Envoyé spécial” consacrait une de ses enquêtes à Whirlpool, il y avait énormément de journalistes sur place. » Dans une « séquence nostalgie » très calculée, le chef de l’Etat est d’ailleurs retourné à la rencontre d’anciens salariés de Whirlpool, à Amiens, en novembre 2021.

Il vous reste 57.65% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Rencontres RH : répondre à la détresse des manageurs après deux ans de Covid-19

Comment résoudre le malaise et l’épuisement chez les manageurs ? A l’occasion des Rencontres RH, le rendez-vous mensuel de l’actualité du management créé par Le Monde en partenariat avec ManpowerGroup, une douzaine d’acteurs des ressources humaines ont partagé en visioconférence, mardi 11 janvier, leurs inquiétudes et solutions vis-à-vis de la santé des manageurs, mise à rude épreuve depuis près de deux ans.

En effet, ces salariés ont fait l’expérience des nombreuses recompositions du travail : « Les cadres de proximité sont en première ligne, dans une position d’interface très conflictuelle, introduit Yves Clot, professeur émérite en psychologie du travail au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). Ils sont chargés d’incarner des critères d’efficacité, mais en même temps sont confrontés avec leurs équipes à une forme d’attachement. » L’instabilité des organisations de travail a été coûteuse en énergie : « Les manageurs se sont beaucoup mobilisés pendant les confinements successifs, notamment sur le bien-être de leurs équipes, et ils se sont peut-être un peu oubliés », juge Juliette Couaillier, chief talent officer d’Havas.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Covid-19 : le retour total au bureau s’éloigne encore

L’absentéisme est l’expression de ce mal-être : il a augmenté fin 2021 à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) pour atteindre 4,9 %. « Des gens veulent s’échapper de la fonction pour retrouver du souffle », décrit Jérôme Friteau, DRH de la Caisse nationale d’assurance vieillesse. « On observe énormément de fatigue, d’épuisement. Selon un sondage OpinionWay pour Empreinte humaine, le taux de détresse psychologique est de 48 % chez les manageurs, et de 44 % pour les non-manageurs, relève Laurence Breton-Kueny, DRH de l’Association française de normalisation (Afnor) et vice-présidente de l’Association nationale des DRH (ANDRH). Pour les manageurs, les signaux faibles ne sont pas toujours remontés, c’est difficile pour eux de dire qu’ils ont mal. » « J’ai envie de garder une pointe d’optimisme, ajoute de son côté Amélie Watelet, DRH d’Axa France. Bien entendu la santé est au cœur, avec la prévention de risques psychosociaux en augmentation, mais on n’observe pas chez Axa une particulière augmentation du turnover. »

Un mode hybride complexe

Si les fonctions d’encadrement se sont plutôt bien adaptées face à l’urgence du premier confinement de mars 2020, c’est la répétition des déconfinements et reconfinements qui a épuisé les troupes. « Il y a eu plusieurs phases pour les manageurs, explique Jérôme Friteau. Une première phase de sidération et d’adaptation comme ils ont pu, un apprentissage tout au long de la crise, et maintenant une phase d’épuisement. Il y a un contraste entre septembre 2021, où l’on retrouvait du présentiel et du collectif, et octobre, où l’on a basculé dans l’épuisement. »

Il vous reste 51.33% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Jean Castex annonce un soutien renforcé dans l’hôtellerie, la restauration et l’événementiel

Au Petit Riche, restaurant du 9e arrondissement de Paris, le 9 juin 2021.

Le climat est morose depuis la rentrée de janvier dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, affectés par les restrictions liées à la crise sanitaire. Le premier ministre, Jean Castex, a annoncé, mardi 18 janvier, un soutien renforcé pendant deux mois pour les entreprises de moins de 250 salariés dans l’hôtellerie, la restauration, les traiteurs, l’événementiel et les agences de voyages.

« En décembre et janvier », les entreprises de moins de 250 salariés perdant au moins 30 % de leur chiffre d’affaires en raison des restrictions prises à la fin de 2021 pour contenir la cinquième vague de Covid-19 auront droit à une « aide exceptionnelle au paiement des cotisations salariales », d’un montant égal à 20 % de leur masse salariale, a déclaré M. Castex, lors d’un déplacement dans une brasserie parisienne.

Les entreprises concernées sont celles des secteurs de « l’hôtellerie, de la restauration, des traiteurs, de l’événementiel et des agences de voyages », a-t-il précisé, qui « continuent d’être très fortement impactés par la crise sanitaire », a souligné M. Castex, au côté de la ministre du travail, Elisabeth Borne, et du ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises (PME) et du tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne, au terme d’une rencontre avec les représentants des organisations patronales du secteur des hôtels, cafés et restaurants.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Les hôtels français ont mieux résisté que leurs voisins en 2021

Perte de plus de 65 % de leur chiffre d’affaires

Quant aux entreprises de moins de 250 salariés des mêmes secteurs qui perdront plus de 65 % de leur chiffre d’affaires, elles recevront, en décembre et en janvier, cette même aide au paiement des cotisations salariales de 20 %, mais elles « seront également exonérées de charges patronales », a annoncé le premier ministre.

A l’heure actuelle, toutes les entreprises perdant 65 % de leur chiffre d’affaires en raison des restrictions sanitaires ont accès au remboursement de l’activité partielle à 100 % sans reste à charge, a-t-il rappelé. Celles du tourisme qui perdent au moins 50 % de leur chiffre d’affaires voient l’intégralité de leurs coûts fixes pris en charge.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés Covid-19 : le gouvernement renforce les aides aux entreprises pour faire face à Omicron

Pour l’heure, le nombre d’entreprises concernées ou le coût de ces nouvelles mesures, qui « restera modéré au regard de celles engagées par le passé », ne sont pas encore évalués, ont expliqué les services de Matignon.

Le Monde avec AFP