Archive dans 2018

Un ras-le-bol managérial qui règne en France

Un consensus semble exister aujourd’hui, et pas seulement en France, sur l’accumulation nocive, dans nombre d’entreprises et d’organisations, de dysfonctionnements managériaux : manque de considération, rémunérations peu stimulantes, sexisme, absence de dialogue professionnel, risques psychosociologiques, formation professionnelle inadéquate, etc., dysfonctionnements qui minent la qualité de vie au travail. L’écho rencontré par le livre de l’anthropologue David Graeber (Bullshit Jobs, Les liens qui libèrent, 416 pages, 25 euros) en est probablement le signe. Les efforts accomplis ces dernières années pour humaniser le capitalisme et son incarnation dans le management des organisations, au travers des lois et des normes de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), sont certes louables. Mais ils ne semblent pas avoir eu d’effets satisfaisants dans les grandes entreprises, et sont restés lettre morte dans nombre de petites et moyennes entreprises. En conséquence, il règne en France et dans d’autres pays un « ras-le-bol managérial », ferment de contestations sociales radicales comme celle des « gilets jaunes », et exploité par des mouvements politiques qui amalgament mal-être au travail et rejet du capitalisme mondialisé.

Une transition managériale vers un capitalisme plus humain, pratiqué au quotidien à tous les niveaux des organisations, est donc à l’ordre du jour pour ceux qui pensent qu’un capitalisme bien régulé est un système à même de répondre aux inépuisables et immenses besoins humains.

Les conséquences coûteuses

D’une part, en mesurant les coûts des dysfonctionnements managériaux pour que responsables politiques, actionnaires, dirigeants et citoyens prennent conscience des ravages d’un management toxique. Les recherches de l’Institut de socio-économie des entreprises et des organisations (Iseor) montrent que les coûts « cachés » des dysfonctionnements managériaux – « cachés » parce qu’ils ne sont pas, ou très mal, comptabilisés – représentent une perte de valeur financière gigantesque, de l’ordre de 20 000 à 70 000 euros par personne et par an. En effet, ces dysfonctionnements ont des conséquences très coûteuses en matière d’absentéisme, de maladies professionnelles, de défauts de qualité, de démotivation et de sous-efficacité chez les salariés. Une étude réalisée pour l’Institut Sapiens sur l’absentéisme dû aux dysfonctionnements managériaux montre qu’il coûterait en France près de 108 milliards d’euros par an (soit 4,7 % du PIB), qui viennent à manquer aux entreprises, à l’Etat, à la croissance et au pouvoir d’achat. La faiblesse des gains de productivité dans les pays développés, sur laquelle le débat fait rage entre économistes, s’expliquerait aussi par les destructions de productivité dues à ces dysfonctionnements.

La bureaucratisation n’est pas obligatoire

L’arbitrage entre l’autonomie et le contrôle des activités des salariés est un enjeu récurent pour les organisations. Ce dilemme paradoxal s’est singulièrement accru ces dernières années avec la pénétration massive des technologies numériques.

Du côté de l’autonomie, ces technologies contribuent à la favoriser dans des registres différents, qu’il s’agisse des possibilités de télétravail ou de l’usage d’applications comme les « kits de survie » (accès à la domotique, aux services de conciergerie, possibilité de réserver une salle, etc.). L’aplatissement de la hiérarchie y concourt également lorsqu’elle conduit à une réelle responsabilisation.

Pour autant, le contrôle, notamment organisationnel et technologique, apparaît encore plus incontournable. Comment en effet imaginer le pilotage de mastodontes complexes à enjeux forts pour leurs usagers, par exemple un grand établissement hospitalier, des grandes gares ferroviaires parisiennes, ou plus généralement l’ensemble du réseau transilien. En l’absence de processus structurants assurant la coordination, voire l’uniformisation, ils deviendraient évidemment ingérables. Evidence d’ailleurs encore fréquemment sous-estimée par les tenants de l’autonomie à tous crins. Il n’en reste pas moins vrai que ces processus sont consommateurs de temps, d’argent, et potentiellement générateurs de stress et de méfiance. Ils tendent naturellement à limiter l’autonomie des salariés.

Déployer de manière extrême l’innovation collaborative

Afin de tenter de résoudre ce dilemme paradoxal, nombre de dirigeants éclairés de grandes firmes ont promu ces dernières années de profondes transformations, de manière à favoriser et déployer de manière intensive l’innovation collaborative jugée nécessaire pour parvenir à construire une croissance durable, dans un contexte de guerre économique mondiale exacerbée.

Parallèlement aux pratiques d’innovations ouvertes et coopératives, souvent en coopération avec des acteurs extérieurs (start-up, clients, utilisateurs, universités, concurrents, etc.), des politiques internes promeuvent ce que la novlange managériale nomme « the new way of working ». Les « espaces collaboratifs », avec leurs différents quartiers, en constituent l’illustration la plus visible. Ils contribuent à autonomiser leurs collaborateurs en les incitant à développer des pratiques coopératives clairement orientées vers l’innovation. Ces nouvelles configurations répondent aussi au risque de se faire « ubériser » ou de ne plus pouvoir séduire les fameux « millennials », dont les prétendues caractéristiques ne laissent pas d’interroger ceux qui ont procédé à des recherches étayées (François Pichault et Mathieu Pleyers, « Pour en finir avec la génération Y… enquête sur une représentation managériale », Gérer et comprendre, n° 108, 2012). Elles peuvent ainsi attirer plus largement celles et ceux qui souhaitent s’impliquer, agir et se responsabiliser dans le cadre de contraintes allégées avec de réelles marges de manœuvre, au-delà d’un seul effet d’âge.

De Cicéron aux « gilets jaunes » : la longue défaillance de la « bonne gestion »

 

Le bien-fondé des revendications des « gilets jaunes » a été reconnu par les plus hauts responsables de l’Etat de la république. Face à la colère exprimée, Macron Déclare: « Je la ressens comme juste à bien des égards. » Peu avant, le premier ministre avait affirmé « qu’aucune taxe ne mérite de mettre en danger l’unité de la nation ». Aurait-il manqué à la gestion publique un engagement réel pour la justice et l’équité entre les citoyens ? Quant au ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, il a fustigé la déloyauté sociale des dirigeants de Ford refusant tout repreneur pour l’usine de Blanquefort.

« Justice », « équité », « bienveillance », « écoute » : par temps de crise, ces termes reprennent soudain toute leur valeur. Mais ils pèsent peu dans les doctrines dominantes de la gestion publique et privée, où l’efficacité est réduite à la performance économique et le marché sert de justice sociale, y compris pour les salaires. On est alors bien loin de la « bonne gestion ».

Une théorie reprise par Auguste :

Une historienne de la Rome antique, Moïra Crété, vient de montrer que lorsque les Romains inventent la « bene gesta », ils ne séparent pas efficacité et responsabilité citoyenne (« La “gestion” à l’époque romaine : naissance d’une catégorie de l’action collective », Entreprises et histoire n° 90, 2018). C’est à Cicéron que l’on doit la construction théorique de la « bonne gestion », la « bene gesta res publicae ». En pleine crise de la République romaine, iI s’agissait de concevoir une action publique qui s’éloigne autant du diktat des élites que d’un populisme aveugle. Cicéron ne met pas seulement en avant les valeurs de l’esprit et de la connaissance dans l’action, il insiste surtout sur la justice, l’humanité, l’équité, l’intégrité et la bienveillance.

Cette théorie de la « bonne gestion » serait restée lettre morte si elle n’avait pas été reprise par Auguste, le premier empereur romain, qui choisit de décrire dans son testament les « Res gestae », une liste des actes en faveur des citoyens qui illustrent la « bonne gestion » publique. L’auteur montre aussi que, pendant trois siècles, la « bene gesta » cicéronienne a constitué l’idéal d’une action publique et privée qui se veut aussi efficace économiquement qu’intègre et citoyenne. La bonne gestion n’était donc pas, comme on le pense aujourd’hui, le degré zéro du politique. Elle constituait au contraire son champ d’exercice, ce sur quoi tout pouvoir doit rendre des comptes et que chaque citoyen peut discuter.

Qui travaille pendant les fêtes?

« Pompiers, restaurateurs, conducteurs de bus… certaines professions ne lèvent pas le pied pendant les fêtes, y compris le 25 décembre et le 1er janvier. »

 

 

Nombreux sont les salariés qui profitent de quelques jours de congés afin de réveillonner en famille, A l’approche des fêtes de fin d’année. Toutefois, ils sont encore plus nombreux à travailler pendant cette période : selon les chiffres du ministère du travail, près d’un salarié sur deux seulement était en congé pendant les vacances de Noël.

Les jours fériés ne sont pas toujours chômés. Pompiers, restaurateurs, conducteurs de bus… certaines professions ne lèvent pas le pied pendant les fêtes, y compris le 25 décembre et le 1er janvier. Mais pas seulement, tout un chacun peut être amené à travailler pendant ces deux journées : « Aucune obligation légale n’impose que les fêtes de fin d’année soient des jours chômés », indique Maître Béatrice Pola, avocate associée du département de droit social du cabinet Proskauer.

Seule exception en Alsace-Moselle, où en vertu du concordat (sous Bismarck), les habitants de cette région bénéficient même de deux jours fériés chômés à l’occasion de Noël (le 25 et le 26 décembre), en plus du Nouvel An. La loi protège aussi les salariés mineurs qui exercent des « petits boulots » pendant les vacances de Noël en France et qui bénéficient obligatoirement du 25 décembre et du 1er janvier chômés, sauf dans les établissements industriels fonctionnant en continu et dans les secteurs pour lesquels l’activité le justifie (hôtellerie, restauration…).

Protection diminué par les décisions Macron

Des accords de branche ont pu définir des jours fériés chômés, ou bien prévoir des compensations financières pour les salariés travaillant ces jours-là. L’accord de branche s’imposait à l’entreprise jusqu’à la loi travail et les ordonnances Macron qui ont changé la donne.

Désormais, un accord d’entreprise « peut réduire la liste des jours fériés chômés définie par une convention collective de branche », explique Me Béatrice Pola. A défaut de stipulations conventionnelles, l’employeur peut demander à ses salariés de travailler les jours fériés ». Il est aussi libre de fermer son établissement pendant les fêtes après avoir, toutefois, consulté les représentants du personnel. L’employeur peut alors imposer à ses salariés de poser leurs congés les jours de fermeture de l’établissement.

Au-delà de Noël et du Nouvel An, qu’en est-il des jours de congés que souhaitent poser les salariés pendant la trêve des confiseurs ? « C’est l’employeur qui organise, selon certaines règles, les départs en congés », rappelle Me Béatrice Pola. A défaut de stipulation conventionnelle, l’article L.3141-16 du code du travail permet à l’employeur de définir cet ordre de départ après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ou du comité économique et social ». Il est donc libre de refuser les dates de congé que souhaite poser le salarié.

L’Assemblée vote la défiscalisation des heures supplémentaires

L’Assemblée nationale a donné son feu vert dans la nuit de jeudi 20 à vendredi 21 décembre pour avancer la défiscalisation des heures supplémentaires au 1er janvier au lieu du 1er septembre 2019, lors de l’examen en urgence du projet de loi « gilets jaunes ». La mesure a été approuvée par 140 voix contre 8 et 46 abstentions.

Tous les salariés, y compris les fonctionnaires, pourront bénéficier de ce dispositif, qui coûtera à l’État et à la Sécurité sociale 2,4 milliards d’euros de plus que prévu. Les sommes perçues seront en outre exonérées d’impôt sur le revenu jusqu’à 5 000 euros nets par an et par conséquent exclues du calcul du prélèvement à la source.

L’entrée en vigueur anticipée de l’exonération de cotisations salariales des heures supplémentaires doit permettre d’améliorer le pouvoir d’achat des salariés travaillant plus.

L’an prochain, le gain sera, pour « un nombre moyen de 109 heures supplémentaires effectuées, de 155 euros pour un salarié au Smic, contre 39 euros avec une entrée en vigueur au 1er septembre 2019 », précise le texte.

Instaurée par Sarkozy

Le retour de la défiscalisation des heures supplémentaires, « nous savons que c’est une bonne chose depuis Nicolas Sarkozy en 2007 », a salué Éric Woerth (LR), ministre, notamment du Budget, lors du quinquennat Sarkozy.

L’ancien président de la République en avait fait un thème phare de sa campagne avant de mettre cette mesure en œuvre à son arrivée à l’Élysée. La défiscalisation des heures sup avait ensuite été supprimée par François Hollande en 2012.

Les Insoumis et les communistes ont demandé sans succès le retrait du dispositif, qui risque « d’accroître la précarité » et les « faibles revenus, notamment pour les femmes ». « C’est le retour en force dix ans après du travailler plus pour gagner plus de Nicolas Sarkozy », a raillé Jean-Paul Dufrègne (PCF).

Les Républicains ont demandé en vain d’exonérer ces heures supplémentaires de cotisations patronales, la majorité ne souhaitant pas que les entreprises recourent à ce moyen au lieu d’embaucher de nouveaux salariés.

Des cours pour apprendre à mémoriser

 A l’université d’Evry, des étudiants de première année de licence suivent des ateliers spécifiques pour être plus efficaces dans leurs révisions.

 

Ces élèves  présents ce jeudi approuvent d’un mouvement de tête. Alexandre, étudiant en première année d’administration économique et sociale (AES), prépare ses examens, qui s’étalent jusqu’en janvier. Proposé par l’université d’Evry depuis la rentrée, le module de mémorisation est un des six choix possibles pour les étudiants de première année admis en parcours « oui, si » (l’élève est admis en première année de licence à condition qu’il suive certains modules de méthodologie et de mise à niveau).

Après avoir regardé une vidéo qui explique la méthode Feynman, du nom du physicien américain lauréat du prix Nobel en 1965, Ces élèves choisissent un concept d’un de leurs cours pour s’entraîner à appliquer la méthode. Ce sera le déficit et la dette publique pour Guillaume, et l’économie de l’Antiquité au Moyen Age pour Alexandre.

Outre des techniques comme celle-ci, Eric Marbeau répète et fait continuellement répéter à ses élèves ce qu’il estime être les clés de la mémorisation : l’attention, l’association, la structuration, la répétition, l’émotion et la production.

Comprendre pour retenir

Sur le tableau, on peut lire cette phrase : « On ne le répétera jamais assez : être assidu et attentif en cours, c’est déjà mémoriser la majeure partie du contenu. » M. Marbeau explique que pour retenir une information, il faut la comprendre, et que pour cela, le plus simple est de faire des liens entre les différentes notions. D’où l’importance de structurer l’information avec une notion centrale, et d’autres qui gravitent autour.

« Autre méthode qui peut vous aider : imaginez dans quel contexte vous allez utiliser l’information, explique le coach. C’est lié à la notion d’émotion : si vous vous voyez en train de vous servir de ce que vous apprenez, vous comprendrez en quoi il est utile de l’apprendre. La mémoire est sensible à ce genre de pensée, tout comme au stress. Alors si vous avez prévisualisé votre réussite, par exemple, que vous arrivez à gérer votre stress, vous arriverez plus facilement à vous souvenir des informations. »

Des notions évoquées par enseignante-chercheuse en psychologie cognitive à l’université de Caen-Normandie Sandrine Rossi, qui travaille sur la mémoire de travail. « Cette mémoire de travail fait le lien entre la mémoire à court terme, qui ne permet pas de stocker des souvenirs ou des connaissances, et la mémoire à long terme, qui se définit au contraire par un encodage plus profond, grâce à laquelle une information peut être maintenue trois minutes, des années, voire tout une vie. » C’est donc cette mémoire de travail qu’il faut souvent réactiver pour emmagasiner des connaissances. « Mais elle est très gourmande en énergie, et mobilise beaucoup de capacités attentionnelles », souligne l’enseignante-chercheuse.

Conseils et techniques utiles

Alexandre, qui n’est pas allé au bout de sa première année de droit l’an dernier, estime que les conseils et les techniques délivrés dans ce module lui sont utiles : « Je savais que j’avais une bonne mémoire visuelle. J’ai appris à développer ma mémoire auditive, en me mettant plus près du prof en cours, pour être attentif. Je m’enregistre en train de dire mes cours, cela m’aide à les retenir. »

Pour Guillaume, l’une des principales difficultés qu’il a jusqu’à présent rencontrée est d’apprendre régulièrement. « Au lycée, on avait souvent des contrôles, alors qu’ici on est plutôt livrés à nous-mêmes », constate le jeune homme. Sandrine Rossi confirme que les méthodes d’apprentissage changent entre le lycée et l’université, ce qui peut être déroutant. « Au lycée, l’objectif est de faire assimiler aux jeunes des connaissances que l’on évalue régulièrement, alors qu’à l’université, pendant les cours magistraux, les professeurs donnent des connaissances, mais c’est à l’étudiant de se les approprier grâce à des recherches et une prise de recul sur le thème abordé. »

Autre exercice du jour : noter ses points forts, ses ressources et les obstacles à la réussite. Guillaume inscrit dans cette dernière case les distractions qui l’empêchent de travailler : sorties avec les amis, les jeux vidéo, etc. Sandrine Rossi remarque que les écrans, en général, génèrent un besoin important d’attention, et requièrent donc beaucoup d’énergie. L’enseignante-chercheuse conseille de limiter leur pratique dans le temps.

 

Au Final, Alexandre range quelques fiches bristol bleues dans son trieur. Guillaume, lui, dit vouloir se mettre à en faire ce week-end. « Les étudiants n’ont pas forcément encore le réflexe d’appliquer les méthodes qu’ils apprennent, constate Eric Marbeau. On sème, ça poussera en temps voulu. »

Printemps 2019: Vivarte se cherche un nouveau boss

Au siège de La Halle, à Paris, en septembre 2017.

Patrick Puy a fini sa « mission » chez Vivarte. Le spécialiste de la restructuration d’entreprises, PDG du groupe d’habillement depuis fin 2016, a annoncé, jeudi 20 décembre, l’arrivée d’un directeur général au printemps 2019 pour prendre la direction opérationnelle de Vivarte dont il conserverait la présidence.

Ce futur patron aurait un pedigree « retail » (comprendre, issu du secteur de la distribution), à en croire M. Puy. De fait, d’après nos informations, depuis plusieurs mois, à la demande des actionnaires du groupe français, les cabinets parisiens de chasseurs de tête sont en quête d’un nouveau patron pour Vivarte. Et M. Puy aurait déjà fort à faire ailleurs, à Marseille, précisément. Celui qui s’est associé à Raymond Soubie, ancien conseiller social de Nicolas Sarkozy, au sein de la société Alixio, pour des missions de restructuration, confirme épauler Bourbon pour trouver de nouveaux partenaires financiers au groupe parapétrolier, dont la dette atteint 1,34 milliard d’euros.

Mais, rue de Flandres, à Paris, au siège du groupe Vivarte, qui emploie 10 000 salariés, la perle rare n’est pas facile à trouver. Car tout le secteur sait que « Vivarte partira à la découpe jusqu’au dernier bouclard », rapporte un dirigeant récemment approché. Dès lors, rares seraient les cadres prêts à prendre la direction d’un groupe racheté plusieurs fois en leveraged buy-out (« rachat avec effet de levier »), et dont les actionnaires créanciers, parmi lesquels le fonds Oaktree, mènent le démantèlement à la hâte.

Une cessions de 300M d’euros

Vivarte compte aujourd’hui six enseignes. A l’arrivée de M. Puy, en octobre 2016, le groupe en fédérait seize. Ses deux années de présidence auront été marquées par une série de cessions menées pour réduire l’endettement de l’entreprise. Les chaussures Pataugas, le réseau Kookäi et l’espagnol Merkal sont vendus en 2017. Puis, l’enseigne André est cédée au site de vente en ligne Spartoo, en avril, et Naf Naf au chinois La Chapelle, en mai. Chevignon revient à Royer, en octobre, tandis que Besson Chaussures est repris par le fonds d’investissement Weinberg Capital Partners, associé à Philippe Ginestet, fondateur de Gifi. Le montant total des cessions aurait atteint « environ 300 millions d’euros », selon M. Puy. Près de 200 millions auraient été affectés au remboursement de la dette du groupe.

En novembre, Vivarte a annoncé vouloir aussi vendre ses enseignes de chaussures Minelli, San Marina et Cosmoparis. L’affaire devrait être conclue en « mai ou juin » 2019, prévoit le dirigeant. Vivarte, ancienne figure de la distribution européenne, qui a été côtée en Bourse et présidée par des stars de la distribution, dont Georges Plassat (ex-Carrefour), Richard Simonin (ex-La Redoute) Marc Lelandais (ex-Lancel) et Stéphane Maquaire (ex-Monoprix) pourrait alors se résumer à deux enseignes : La Halle et Caroll. Voire à la première, née de la fusion de La Halle aux vêtements et de La Halle aux chaussures, estime un élu. Car, selon des sources syndicales, le conseil d’administration travaillerait aussi sur la sortie de Caroll. L’enseigne n’est « pas à vendre », dément cependant M. Puy.

« Une nouvelle phase de développement »

Adapter des thérapies de choc s’emploie désormais surtout à rappeler le chemin parcouru depuis sa nomination. « Vivarte est maintenant un groupe normal », affirme-t-il. Le conglomérat a bouclé, fin août, son exercice 2017-2018, sur un chiffre d’affaires de 1,4 milliard d’euros et dégagé un résultat d’exploitation de 50,6 millions d’euros, d’après les données qu’il communique. Sa dette s’établirait à 302 millions d’euros, en septembre, contre 437 millions d’euros, à la même période en 2017 et 1,084 milliard, fin 2016.

Dès lors, le groupe serait en mesure « d’entrer dans une phase de développement », promet-il. Après une année marquée par un recul d’activité de 4,1 % au total, avec une chute des ventes de 9 % chez Caroll et une dégradation de 2,5 % chez La Halle, Vivarte devrait renouer avec « une croissance de 2 % » sur son exercice 2018-2019, déclare M. Puy, et dégager des résultats pour financer ces projets. A savoir, exporter ses enseignes jusqu’en Afrique, rénover ses entrepôts d’Issoudun et Châteauroux (65 000 m² au total), dans l’Indre, ou revoir l’approvisionnement pour acheter les collections La Halle en Europe.

Ce discours agace les représentants du personnel. Jean-Louis Alfred, délégué CFDT, dénonce « l’opacité » des chiffres communiqués jeudi. « Rien n’est vérifiable », s’étonne l’élu. L’avenir des salariés La Halle inquiète aussi M. Alfred. Après un premier plan social, en 2017, avec la suppression de 700 postes la fermeture de magasins déficitaires, les deux enseignes La Halle et La Halle aux chaussures fusionneront au 1er janvier 2019. Dès lors, une offre de chaussures et de vêtements sera vendue sous un même toit. Au prix de cette fusion, une vingtaine de magasins par an disparaîtront à moyen terme. Les deux réseaux comptent aujourd’hui 870 magasins. « Philippe Thirache [président de La Halle] estime que l’enseigne ne peut être rentable qu’aux alentours de 500 à 600 points de vente », rapporte M. Alfred. Mais M. Puy assure ne pas avoir besoin de recourir un nouveau plan social.

 

Prime insolite de fin d’année

Beaucoup d’entreprises ont répondu à l’appel du président de la république en décidant de verser une prime exceptionnelle de fin d’année à leurs salariés. Les députés ont examiné jeudi 20 décembre le texte de loi encadrant cette mesure. Qui pourra enfin en bénéficier ?

« Seuls les salariés gagnant moins de 4 500 euros bruts par mois environ – l’équivalent de trois salaires minimum – et seuls les montants inférieurs à 1 000 euros pourront bénéficier d’une exonération totale de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu. »

Pour calmer la rage des « gilets jaunes » sans trop mettre à contribution les finances publiques, Le président de la république a décidé d’en appeler à la générosité des employeurs. Beaucoup d’entreprises ont déjà répondu à l’appel, en annonçant qu’elles offriraient une prime exceptionnelle de fin d’année défiscalisée à leurs salariés. Le versement de cette prime est toutefois encadré par le projet de loi portant mesures d’urgences économiques et sociales, examiné cette semaine en accéléré par les parlementaires pour une adoption d’ici la fin de l’année.

Rappelons d’abord que cette prime n’a rien d’obligatoire : seuls les salariés des entreprises qui se seront portées volontaires pourront la percevoir. Toutefois, un amendement qui a été apporté au texte de loi précise que le versement de cette prime peut être décidé par un accord de groupe : celui-ci s’impose alors à ses filiales.

Le montant est libre

En revanche, seuls les salariés gagnant moins de 4 500 euros bruts par mois environ – l’équivalent de trois salaires minimum – et seuls les montants inférieurs à 1 000 euros pourront bénéficier d’une exonération totale de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu. L’idée est d’utiliser la « carotte » de la défiscalisation pour inciter les employeurs à mettre en place cette prime au niveau des bas salaires.

Le groupe de protection sociale Klesia (3 500 salariés) offre un bon exemple de la manière dont cette prime exceptionnelle peut être distribuée. L’entreprise a décidé d’en faire bénéficier une partie de ses salariés, selon une grille variable en fonction du salaire annuel brut perçu : les collaborateurs qui touchent entre 30 000 et 35 000 euros percevront 300 euros, tandis que la prime pourra s’élever jusqu’à 900 euros pour les rémunérations inférieures à 25 000 euros.

Le SMIC mensuel passera à 1 521,22 euros au début de l’année 2019

 

Le smic passera à 10,03 euros de l’heure brut à compter du 1er janvier 2019, en hausse de 1,5 %, selon le décret n° 2018-1173 , publié au Journal officiel. Le brut mensuel est donc relevé à 1 521,22 euros mensuels sur la base de la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires. Le smic horaire brut s’élevait en 2018 à 9,88 euros, et à 8,82 euros il y a dix ans, en 2009.

Ces montants s’appliquent en métropole, en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon. En revanche, à Mayotte, le montant du smic brut horaire également augmenté de 1,5 % sera à 7,57 euros à partir du 1er janvier 2019, soit 1 148,12 euros mensuels. Enfin, le minimum garanti s’établit à 3,62 euros, précise le décret.

« Prime Macron » : le retour du revenu universel

Pour notre journaliste Antoine Reverchon, la prime proposée par le président démontre que la simple rémunération du travail ne représente parfois pas un revenu suffisant pour vivre.

 

Assemblée générale des « gilets jaunes » de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire),  le 18 décembre.

Descendre de l’Olympe de la théorie économique est sans doute tout aussi délicat et douloureux que déchoir de l’Olympe de la pratique du pouvoir politique. Les économistes – du moins un grand nombre d’entre eux – s’étaient réjouis de voir depuis dix-huit mois régner à Bercy, à Matignon et à l’Elysée des politiques qui avaient enfin intégré « les lois de l’économie » : seules les entreprises créent de la richesse ; c’est cette richesse qui, une fois répartie, crée les profits des investisseurs, les salaires des travailleurs – et des fonctionnaires par l’impôt, les prestations des assurances sociales et des aides publiques – par les cotisations et l’impôt ; le niveau de ces prestations et de ces aides doit donc être indexé sur la capacité des entreprises à les financer.

Pour cela, il faut d’une part augmenter la capacité de financement des entreprises, et donc réduire les impôts qui pèsent sur leurs bénéfices et sur la rémunération de ceux qui y investissent ou qui les dirigent, les fameux « premiers de cordée » ; d’autre part réduire la dépense publique et respecter les règles budgétaires des traités européens, les prestations sociales étant revues à la baisse selon une logique assurancielle – pallier l’absence momentanée d’un revenu d’activité – et non plus selon une logique de droit à la solidarité. Le tout résumé d’une belle formule dont la multiplicité sémantique laisse rêveur : « Le travail doit payer. »

A cette aune, augmenter le revenu des Français en puisant dans l’argent public comme vient de l’annoncer le président de la République apparaît comme une double hérésie, et l’on comprend que les « technocrates de Bercy » et leurs ministres aient eu un haut-le-cœur. C’est accorder un revenu supplémentaire qui n’est basé sur aucun gain de productivité ni aucune nouvelle activité créatrice de richesse ; c’est augmenter – de 10 milliards d’euros – la dépense publique qui, tôt ou tard, pèsera sur l’activité économique malgré les dénégations empressées d’économistes girouettes du « story-telling ».

Prime d’activité et coup de pouce au smic

Ce sont pourtant exactement les reproches que ces mêmes économistes adressaient à l’idée d’un revenu universel versé à tous les citoyens, idée défendue par quelques intellectuels, de nombreuses associations et un certain Benoît Hamon, qui fut candidat du Parti socialiste à l’élection présidentielle de 2017 et obtint au premier tour le score calamiteux de 6,35 %.