Archive dans août 2018

Pour que le grain de sable devienne diamant

« La Théorie du grain de sable, ou l’art de neutraliser les casse-pieds en entreprise », de Laurence Bourgeois (Diateino, 160 pages, 17 euros).

Livre. Un grain de sable est une particule d’importance en apparence négligeable. Il mesure entre 0,063 et 2 mm, et vit dans l’anonymat le plus total. Il peut être fin ou grossier, rond ou anguleux, blanc, rouge ou noir et si on l’observe de très près, on s’aperçoit qu’il est infiniment plus varié qu’on ne le croit, comme nous tous finalement. Matière mouvante, tantôt solide, tantôt liquide, le sable illustre parfaitement « le rôle de poil à gratter joué par l’individu dans l’entreprise, où il est tantôt perçu comme sa principale ressource, et tantôt comme sa pire difficulté » estime Laurence Bourgeois.

Geignard, Gétouvu, Girouette, Glandu, Grand chef, Grobêta, Grognon

Son ouvrage, La Théorie du grain de sable, creuse dans les bacs à sable, ces lieux de luttes de pouvoir où se nichent les specimen les plus représentatifs des salariés en entreprise : ceux qui vous gâchent la vie au bureau. Quels modes de fonctionnement caractérisent ces individus insupportables ? Comment composer avec leurs travers ? Comment s’en protéger ? Comment passer le moins de temps possible à les canaliser et à arbitrer les conflits ?

Geignard, Gétouvu, Girouette, Glandu, Grand chef, Grobêta, Grognon : en plus de vingt années d’expérience dans les métiers du marketing et des ressources humaines, la diplômée en sciences de gestion identifie sept profils de grains de sable retors. Dans son livre, elle donne les clés pour les identifier et, surtout, les astuces managériales pour les neutraliser efficacement.

Comportements délétères

Face à Grognon par exemple – ce collaborateur à l’affût de toute situation qui prête le flanc à la critique –, l’auteur propose d’adopter la stratégie de la toile cirée : l’écouter, tout en prenant la distance nécessaire, en appliquant la recommandation de l’écrivain et philosophe américain Elbert Hubbard : « Pour échapper à la critique, ne rien faire, ne rien dire, n’être rien. »

Les grains…

Le projet de loi « avenir professionnel » définitivement adopté par le Parlement

Après plus de deux mois de débats et plus de 2 500 amendements examinés, le controversé projet de loi sur « la liberté de choisir son avenir professionnel » est désormais sur les rails. Le Parlement a définitivement adopté, mercredi 1er août, par un ultime vote de l’Assemblée nationale, ce que l’exécutif entend être l’acte II de la « rénovation du modèle social ».

Le texte a été adopté par 137 voix contre 30. La majorité LRM-Modem a voté pour, la droite et la gauche contre.

Un an après la réforme du code du travail par ordonnances qui a donné plus de souplesse aux entreprises, et au dernier jour de la session extraordinaire, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a défendu un texte d’« émancipation sociale », qui réforme la formation professionnelle, l’assurance-chômage et l’apprentissage « dans un monde en profonde mutation ».

Parmi les mesures phares : extension de l’allocation chômage, sous conditions, à certains démissionnaires, mue du compte personnel de formation (CPF), nouvelles règles pour l’apprentissage. Tour d’horizon des principales mesures.

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Assurance-chômage

  • Démissionnaires : indemnisation, sous conditions, s’ils ont démissionné avec un projet de reconversion ou de création ou reprise d’entreprise. Il faudra en principe avoir travaillé cinq ans.

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  • Indépendants : allocation forfaitaire (800 euros par mois pendant six mois) en cas de liquidation judiciaire et de départ dans le cadre d’un redressement judiciaire.
  • Précarité : le gouvernement pourra instaurer un bonus-malus sur les cotisations patronales, avec un taux « minoré ou majoré » selon le « nombre de fins de contrat » donnant lieu à une inscription à Pôle emploi. Le bonus-malus pourra tenir compte du « secteur d’activité de l’entreprise ».
  • Nouvelle assurance-chômage : négociation à la rentrée par les partenaires sociaux d’une nouvelle convention, avec la possible création d’une allocation-chômage de longue durée pour les demandeurs d’emploi ayant épuisé leurs droits.
  • Indemnisation : règles négociées par les partenaires sociaux en respectant un « document de cadrage » gouvernemental fixant notamment une « trajectoire financière » et un « délai » de négociation.
  • Financement : suppression des cotisations salariales, compensées par des recettes fiscales. Les cotisations patronales subsistent.
  • Pendant dix-huit mois, à partir de juin 2019, à titre expérimental dans certaines régions, les demandeurs d’emploi devront, pour rester inscrits à Pôle emploi, renseigner chaque mois « l’état d’avancement de leur recherche d’emploi ».
  • L’offre raisonnable d’emploi, qu’un chômeur ne peut refuser qu’une fois, sera définie en concertation entre le demandeur d’emploi et son conseiller.

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Formation professionnelle

  • Compte personnel de formation (CPF) alimenté non plus en heures mais en euros, dans des conditions fixées par décret. Le gouvernement a annoncé 500 euros par an (800 pour les salariés non qualifiés), dans la limite de 5 000 euros (8 000). Les salariés à mi-temps auront les mêmes droits que ceux à temps plein.

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  • Elargissement de l’éventail de formations pouvant être suivies grâce au CPF et création d’un « service dématérialisé gratuit » pour accéder aux « informations sur les formations éligibles », s’inscrire et payer les formations.
  • Le CPF des travailleurs handicapés sera majoré (montant défini par décret).
  • Reconversions : suppression du congé individuel de formation (CIF), remplacé par un dispositif similaire intégré au CPF.
  • Mécanisme de certification des organismes de formation (critères de qualité définis par décret).
  • Les opérateurs paritaires collecteurs agréés (OPCA), rebaptisés « opérateurs de compétences », toujours gérés par les partenaires sociaux, ne collecteront plus les cotisations formation ; rôle qui sera assuré par l’Urssaf (conditions à venir dans une ordonnance).
  • « France compétences » : création d’une agence gérée par l’Etat, les régions et les partenaires sociaux fusionnant trois instances actuelles (Copanef, Cnefop et FPSPP), notamment chargée de réguler la qualité et le coût des formations.

Apprentissage

  • Limite d’âge portée de 25 ans à « 29 ans révolus ».
  • Apprentis mineurs : temps de travail maximal porté de 35 à 40 heures par semaine et de 8 à 10 heures par jour, pour certaines activités.
  • Création d’une nouvelle classe de troisième « prépa métiers » pour préparer l’orientation des collégiens, notamment vers l’apprentissage.
  • Suppression du passage obligatoire aux prud’hommes pour licencier un apprenti pour faute grave ou inaptitude.
  • Centres de formation d’apprentis : les centres de formation d’apprentis (CFA) seront financés au contrat, c’est-à-dire selon le nombre d’apprentis qu’ils accueillent. Obligation pour CFA et lycées professionnels de rendre publics chaque année leurs taux d’obtention des diplômes et d’insertion.
  • Création d’une aide unique, remplaçant trois aides et un crédit d’impôt, destinée aux entreprises de moins de 250 salariés employant des apprentis. Montant fixé par décret (6 000 euros la première année, 3 000 la seconde, selon la ministre).

Travail détaché

  • Sanctions financières portées de 2 000 à 4 000 euros par salarié détaché illégalement, de 4 000 à 8 000 euros en cas de récidive.
  • « Name and shame » (« Nommer et couvrir de honte ») : publication quasi systématique, pendant un an au maximum, des condamnations pour travail illégal sur un site dédié.

Handicap

  • L’obligation d’emploi de salariés handicapés, fixée à 6 % (qui reste un taux plancher), sera révisée tous les cinq ans selon la part de travailleurs handicapés dans la population active.

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Egalité salariale

Obligation de résultats en matière d’égalité salariale entre les sexes dans les entreprises d’au moins 50 salariés, assortie de possibles pénalités financières (au terme d’une période de trois ans pour se mettre en conformité).

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Fonctionnaires

  • Maintien des droits à l’avancement pendant cinq ans pour les fonctionnaires en disponibilité exerçant une activité dans le privé.
  • Embauche possible de contractuels sur quelque 10 000 postes de hauts fonctionnaires.

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CDD

  • Expérimentation de la possibilité de remplacer plusieurs salariés absents par un seul CDD.

Plates-formes

Possibilité, pour les plates-formes comme Uber et Deliveroo, d’établir une « charte » définissant droits et obligations à l’égard des travailleurs, et réciproquement.

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La tour Eiffel fermée pour cause de mouvement social

Vue aérienne de la file de visiteurs de la tour Eiffel.

L’accès à la tour Eiffel, un des sites les plus visités de Paris avec plus de six millions de visiteurs par an, a été fermé mercredi 1er août à partir de 16 heures en raison d’un mouvement social.

Selon la direction, cela fait suite à la suspension des négociations avec les syndicats en début d’après-midi. Les visiteurs déjà présents à l’intérieur de la tour ont cependant pu rester, le monument n’étant pas évacué.

Les syndicats CGT et FO dénoncent « des files d’attente parfois monstrueuses », générées selon eux par l’accueil des visiteurs munis de billets vendus en prévente, permettant d’accéder à la Tour à des créneaux horaires spécifiques.

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Ils ne contestent pas la décision de monter à 50 % la proportion de tickets ouverts à la réservation par créneau horaire (contre 20 % précédemment), mais déplorent que le choix de la direction de réserver l’un des deux piliers d’entrée à l’accueil de ces visiteurs engendre des files d’attente « souvent totalement déséquilibrées » : jusqu’à trois heures pour les billets classiques et une heure pour les billets horodatés à certains créneaux horaires, selon la CGT.

De son côté la Société d’exploitation de la tour Eiffel (SETE), revendique « 10 000 » billets horodatés vendus chaque jour et assure que « le temps d’attente est très faible ». « Pour les visiteurs sans billet, le temps d’attente aux caisses au pied de la tour Eiffel reste identique à l’année dernière alors que le nombre de visiteurs a augmenté », affirme-t-elle.

Les agents d’accueil « à bout »

« Ce dispositif a été accompagné d’un important renfort d’effectifs », selon la SETE, qui parle d’une « trentaine d’emplois » et assure avoir « impliqué ses collaborateurs » dans la mise en place du dispositif.

Les représentants du personnel ont, de leur côté, constaté que l’ascenseur « dédié » aux visiteurs munis de billets acquis en prévente montait presque à vide lors de certains créneaux – soirée et début d’après-midi – ou était, au contraire, incapable d’absorber le flux aux horaires les plus demandés.

« Au-delà du gâchis généré en termes d’efficacité, insatisfaction des visiteurs (…) les agents d’accueil sont à bout », fustige la CGT, qui propose de permettre à tous « d’accéder aux deux piliers », avec « une file prioritaire » pour les billets achetés en prévente.

La tour Eiffel a accueilli 6,2 millions de visiteurs en 2017. Elle a été à plusieurs reprises touchée par des grèves : en octobre dernier, elle avait été fermée au public en raison d’un arrêt de travail de ses salariés, et en septembre elle avait été partiellement fermée dans le cadre d’une manifestation nationale contre la réforme du code du travail.

Air France-KLM estime le coût des grèves du printemps à 335 millions d’euros

L’échec des discussions avec les représentants syndicaux avait amené le PDG d’Air France-KLM, Jean-Marc Janaillac, à mettre son poste dans la balance d’un référendum sur un accord salarial, finalement perdu par la direction le 4 mai.

Air France-KLM a été lourdement affectée par les grèves du printemps, dont elle évalue le coût à 335 millions d’euros, mais la compagnie franco-néerlandaise, qui se cherche un nouveau patron, a réussi à rester dans le vert au deuxième trimestre grâce à une demande soutenue du trafic passagers.

La compagnie franco-néerlandaise a publié un bénéfice net de 109 millions d’euros sur la période allant d’avril à juin, en très fort recul par rapport à la même période l’an dernier, a-t-elle annoncé mercredi. Au cours de ce seul trimestre, l’impact des grèves est évalué à environ 260 millions d’euros.

Augmentation inattendue du nombre de passagers

Le bénéfice net du premier semestre 2017 était de 593 millions d’euros, mais ce chiffre est gonflé à hauteur de 254 millions d’euros par un effet exceptionnel lié à l’entrée en vigueur d’une nouvelle norme comptable.

Air France-KLM a profité d’une hausse de 0,8 % à 26 millions du nombre de passagers transportés entre avril et juin. Elle a aussi tiré avantage d’une hausse de sa recette unitaire, ce qui a permis de maintenir son chiffre d’affaires stable, à 6,6 milliards d’euros.

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Le conflit chez Air France, quinze journées de grève de février à juin, a conduit à la démission en mai de Jean-Marc Janaillac, qui avait mis son poste dans la balance lors d’une consultation du personnel sur une proposition d’accord de revalorisation salariale, rejetée par les salariés.

Son successeur devrait être désigné à la rentrée. La direction a indiqué mi-juillet que le processus de recrutement de la nouvelle direction du groupe « devrait être finalisé dans les prochaines semaines » avec une « mise en place effective en septembre ».

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Interrogé sur ce processus lors d’une conférence téléphonique, le directeur financier Frédéric Gagey a déclaré qu’il « suit son cours », sans plus de détail. « Le management n’est pas directement impliqué, ce qui est normal », a-t-il souligné.