Une fraude très organisée au chômage partiel grâce à une usurpation de l’identité des entreprises

Les milliards d’euros débloqués par les pouvoirs publics pour soutenir l’économie ont ouvert l’appétit d’aigrefins. Vendredi 10 juillet, le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, a annoncé, dans un communiqué de presse, que ses services enquêtaient sur des fraudes à l’activité partielle (ou chômage partiel). Ce dispositif, mis en place à très grande échelle depuis la mi-mars pour prévenir les licenciements en cascade, s’est traduit par l’octroi d’aides financières massives, dont une partie – semble-t-il infime, à ce stade – a été détournée.
Les incriminations retenues par le parquet portent sur des chefs « d’escroqueries en bande organisée » et « de blanchiment en bande organisée de ces escroqueries ». Précision importante : ces infractions ne concernent pas des employeurs qui auraient touché des subsides tout en faisant travailler leurs salariés, théoriquement placés en chômage partiel. Elles renvoient, en l’espèce, à des « demandes frauduleuses de versement d’indemnités », qui ont été déposées en usurpant « la raison sociale et le numéro d’identification » d’entreprises existantes – alors même que celles-ci n’avaient jamais effectué une telle démarche.
Ces pratiques avaient été détectées, récemment, de deux façons différentes. En Occitanie, ce sont les services déconcentrés du ministère du travail et de l’emploi qui les avaient mises au jour : dans cette région, quelque 160 sociétés, au moins, ont été victimes d’une usurpation de leur raison sociale. Parallèlement, l’Agence de services et de paiement (ASP), qui octroie l’argent aux employeurs, avait constaté l’existence d’« une fraude massive au versement des indemnités » dans treize régions, selon le communiqué de M. Heitz.
Les agissements, similaires dans les deux cas, avaient été signalés aux procureurs de la République de Toulouse, le chef-lieu de l’Occitanie, et de Limoges – la ville où se situe le siège de l’ASP. Deux enquêtes distinctes avaient été ouvertes.
« Plus de 1 740 opérations frauduleuses » recensées
Le parquet de Paris a finalement décidé de se saisir de ces procédures, « au titre de sa compétence nationale en matière de la lutte contre la criminalité organisée de très grande complexité » (Junalco). Un choix motivé par le fait que les escroqueries ont été commises sur la quasi-totalité du territoire, selon un mode opératoire qui va nécessiter « une forte coopération internationale », une partie des fonds indûment captés s’étant évaporée au-delà de nos frontières.
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