Sur LinkedIn, les nouvelles pratiques des utilisatrices pour contrer le harcèlement : « Les femmes passent du temps à décrypter le message et le profil de la personne »
Lorsqu’elle ouvre sa messagerie LinkedIn en octobre 2023, Gaëlle Etienne est prise d’un haut-le-cœur. Elle découvre avec stupeur une dick pic (« photo de pénis ») sur l’écran de son ordinateur. « Je venais de la recevoir de la part d’un homme que j’avais accepté juste avant. Quelqu’un de très haut placé dans une grosse entreprise. Il me demandait si son pénis était beau », se souvient-elle. A 22 ans, cette sexologue spécialisée dans le sport a l’habitude de recevoir des messages déplacés à propos de sa profession sur Instagram et Facebook. « Mais pas LinkedIn. Je pensais être à l’abri de tout ça sur ce réseau. J’étais horrifiée et dégoûtée », déplore celle qui a rejoint le réseau en 2022 pour faire connaître son entreprise.
Avec plus de 30 millions d’utilisateurs en France, le réseau social professionnel LinkedIn est devenu un incontournable dans la recherche d’emploi. Ce CV digital permet de mettre en relation entreprises, salariés ou étudiants en recherche de stage, d’emploi ou d’alternance. Pour de nombreux utilisateurs, il est essentiel pour recruter, chercher des collaborations ou de nouveaux clients.
Or, d’après une enquête menée par Ipsos pour le collectif Féministes contre le cyberharcèlement en 2021, quatre Français sur dix ont déjà été victimes de cyberharcèlement sur les réseaux sociaux. Parmi eux, 84 % sont des femmes. L’étude révèle que LinkedIn n’est pas en reste : près de 53 % des victimes affirment avoir expérimenté le cyberharcèlement sur le réseau social professionnel.
« Sur LinkedIn, la prédation, la surveillance, le harcèlement et les menaces sont des phénomènes banalisés », estime Johanna-Soraya Benamrouche, membre du collectif Féministes contre le cyberharcèlement. Les sollicitations non consenties à caractère sexuel et sexiste concernent une grande partie des utilisatrices ayant une messagerie privée ouverte, où tous les messages sont reçus et non filtrés. Or sur le réseau acquis par Microsoft en 2016, la grande majorité des utilisateurs laisse sa messagerie ouverte, à l’affût des opportunités professionnelles. Pour Johanna-Soraya Benamrouche, c’est une « brèche pour les harceleurs qui vont cibler des femmes en quête de nouvelles opportunités professionnelles ».
« Avances romantiques »
Interrogé, LinkedIn l’assure : « Les avances romantiques et le harcèlement sont une violation de nos politiques et n’ont pas leur place sur notre plate-forme. » La plate-forme certifie qu’elle développe des outils pour aider les utilisateurs à avoir une expérience sûre de recherche d’emploi. Par exemple, une fonctionnalité optionnelle de sécurité avancée qui, lorsqu’elle est activée, prévient lorsqu’un contenu qui s’apparente à du harcèlement est détecté dans la messagerie privée. LinkedIn rappelle également qu’une campagne de prévention avait été lancée en 2023 pour « aider nos membres à mieux comprendre nos politiques ».
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