Souveraineté sanitaire : l’Etat met la main à la poche pour soutenir le seul projet de reprise de Carelide

Souveraineté sanitaire : l’Etat met la main à la poche pour soutenir le seul projet de reprise de Carelide

Opération sauvetage pour Carelide, unique fabricant français de poches de perfusion. Au nom de la souveraineté sanitaire, l’Etat, la région des Hauts-de-France et la métropole lilloise ont annoncé un soutien financier à l’offre de reprise de l’entreprise nordiste, examinée vendredi par la justice.

La seule offre pour cette entreprise en difficulté avait été présentée in extremis mi-janvier par les laboratoires pharmaceutiques français Aguettant et le groupe Delpharm. Le tribunal de commerce de Lille Métropole doit se prononcer dans la journée sur cette opération, après une audience dans la matinée, selon une source proche du dossier.

Si elle est validée, la reprise ne prévoit que neuf suppressions d’emplois, sur quelque quatre cents, selon plusieurs responsables syndicaux. L’Etat va « faire un prêt de 20 millions d’euros et [accorder] une subvention de cinq millions » pour soutenir les repreneurs, a annoncé le ministre de l’industrie Roland Lescure sur l’antenne d’Europe 1.

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« Si on veut assurer notre souveraineté industrielle, on a besoin de grands industriels. On en a un, qui est prêt à prendre Carelide. L’Etat, du coup, va l’accompagner », a mis en avant le ministre, soulignant que le repreneur allait lui « mettre 40 » millions. Carelide fournit principalement les hôpitaux, un marché sur lequel il est concurrencé par un groupe allemand et par l’américain Baxter.

La société avait été placée en redressement judiciaire le 24 octobre à cause d’une « impasse de trésorerie », estimée pour janvier février à près de 10 millions d’euros, avait indiqué en novembre le président du tribunal de commerce Eric Feldmann. La région Hauts-de-France et la métropole européenne de Lille ont de leur côté annoncé vendredi qu’ils soumettront aux votes de leur assemblée respective une subvention de 1 million d’euros chacune pour sauvegarder cette « entreprise stratégique » basée dans la périphérie de Lille.

« Bonne nouvelle » pour les syndicats, qui restent « vigilants »

Plusieurs dizaines de salariés étaient rassemblés, vendredi matin, au tribunal de commerce de Lille Métropole. Prévoyant initialement la reprise d’au moins trois cents salariés sur les quelque quatre cents que comptait l’entreprise, les candidats à la reprise devraient finalement en conserver 383, soit neuf suppressions d’emploi, ont fait savoir plusieurs responsables syndicaux sur place.

Meryam Djidel, déléguée syndicale CGT, a salué une « bonne nouvelle » après l’annonce ministérielle. « L’enjeu, c’est de rester vigilants pour ne pas qu’il y ait d’autres licenciements plus tard ». « L’Etat a pris la mesure de l’enjeu », a estimé Daniel Moreia, délégué SUD. « On est les seuls à faire des poches de perfusion et de paracétamol liquide en France, et on a vu, avec les pénuries de paracétamol et d’antibiotiques fabriqués en Chine, l’importance de garder certaines productions en France », a-t-il souligné.

M. Lescure a lui aussi souligné que Carelide était « une des trois dernières » sociétés à produire des poches à perfusion en Europe. « On avait un enjeu, les hôpitaux nous l’ont dit, de capacité à livrer, et c’est la seule société aujourd’hui qui fait des poches à perfusion de paracétamol, donc, vraiment on en avait besoin », a-t-il conclu.

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En octobre 2020, en pleine crise sanitaire, le gouvernement avait octroyé à Carelide une aide de 5 millions d’euros – sur un investissement total de 12,5 millions d’euros dans l’entreprise – pour lui permettre d’augmenter sa capacité de production. Le nouveau coup de pouce a été annoncé le jour d’une réunion à Bercy d’industriels de la santé, auxquels l’Etat entend soumettre une nouvelle « doctrine » pour favoriser l’emploi en France, dans ce secteur.

Sous-traitant dans la fabrication de médicaments, Delpharm affichait en juin 2022 un chiffre d’affaires annuel de 1 milliard d’euros. Le groupe de Boulogne-Billancourt compte 6 000 salariés et dix-sept usines, dont onze en France. Basé à Lyon, Aguettant est un spécialiste des produits injectables utilisés à l’hôpital qui emploient 500 salariés et a réalisé, en 2022, un chiffre d’affaires de 160 millions d’euros.

Le Monde avec AFP

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