« Si l’Etat contrôle le temps de la grève et ses modalités, alors la grève n’est plus »
Matraquage antiblocage, service minimum, menaces contre les actions militantes de la CGT-Energie : depuis le 19 janvier, les attaques de l’exécutif contre le droit de grève s’intensifient. Face à la mobilisation massive contre une réforme des retraites très impopulaire, le danger de nouvelles attaques contre ce qui a toujours été un droit à la contestation devrait être une préoccupation majeure de toutes celles et ceux qui se battent pour la défense de nos conquêtes démocratiques.
Le droit de grève, un droit au « blocage »
En droit français, la protection de la grève a une valeur constitutionnelle, consacrée par l’article 7 du préambule de la Constitution de 1946. Conquête fondamentale, la grève consiste en la suspension du contrat de travail et donc du lien de subordination auquel le salarié est soumis. Le droit de grève constitue un véritable droit à l’insubordination et à la révolte. Et, en cette matière, les contours de la légalité évoluent constamment.
Selon Philippe Waquet, ancien doyen de la chambre sociale de la Cour de cassation, « le droit du travail s’est construit, en grande partie, grâce aux grèves. Et la difficulté de réglementer la grève tient précisément à ce caractère irréductible du phénomène, qui échappe aux catégories classiques d’un droit construit autour de l’image du bon père de famille, prudent et diligent ». Ainsi, des fêtes à Renault-Billancourt, en 1936, à la grève des salariés de Lip, en 1973, le droit de grève a toujours entraîné bien plus que le « blocage » de l’économie : piquets de grève, barrages routiers, occupations d’usine sont autant de modalités d’expression de cette liberté fondamentalement politique.
Au nom du « devoir de travailler »
Face à cela, les attaques contre le droit de grève ont jalonné l’histoire du mouvement social. On peut bien sûr penser aux milliers de mineurs licenciés pour avoir participé à la grande grève de 1948, marquée par la brutalité de la répression policière. Plus tard, c’est par l’instauration de dispositifs législatifs pérennes que les gouvernements successifs ont cherché à dompter ce droit à la contestation. En ce sens, la loi du 31 juillet 1963 instaurait un préavis obligatoire dans les services publics. Adoptée quelques mois après la victoire des mineurs malgré leur réquisition, elle visait à empêcher toute grève sans intervention syndicale et à réparer l’affront fait au président de Gaulle.
Depuis lors, à chaque grève d’ampleur, le débat sur l’instauration d’un service minimum et le durcissement des sanctions disciplinaires à l’encontre des grévistes refait surface au nom du « devoir de travailler » ou de la « continuité des services publics ».
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