Relocalisation : Des retours d’usine profitant à l’emploi… et aux robots

Relocalisation : Des retours d’usine profitant à l’emploi… et aux robots

Le président de la République,  Emmanuel Macron, lors de la visite d’une usine de l’équipementier automobile Valéo à  Etaples (Pas-de-Calais) le 26 mai.
Le président de la République,  Emmanuel Macron, lors de la visite d’une usine de l’équipementier automobile Valéo à  Etaples (Pas-de-Calais) le 26 mai. LUDOVIC MARIN / AFP

C’est l’un des grands maux de l’économie tricolore. Une hémorragie qui, à chaque nouvelle fermeture d’usine, revient sur le devant de la scène politique et sociale. Depuis 2008, la part des emplois industriels dans l’emploi total a fondu de 14,4 % à 11,8 %, selon Eurostat. Elle est désormais inférieure au niveau observé en Espagne (12,6 %), dans la zone euro (15,4 %), en Italie (18,5 %), ou encore en Allemagne (18,9 %).

« Un tel projet se heurte rapidement à une question centrale : celle des coûts de production », Stefano Scarpetta, OCDE

Et comme à chaque crise, la même musique résonne du côté du gouvernement : il y a urgence à réindustrialiser la France, notamment en favorisant les relocalisations. « Mais un tel projet se heurte rapidement à une question centrale : celle des coûts de production », explique Stefano Scarpetta, spécialiste de l’emploi à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Et notamment, celui de la main-d’œuvre, relativement élevé au regard du niveau de gamme de notre industrie, moins haut que celui de l’Allemagne.

Selon l’institut Rexecode, celui-ci s’élevait en effet à 38,68 euros l’heure en moyenne au troisième trimestre 2019, contre 34,30 euros en moyenne en zone euro, 23,61 euros en Espagne, 9,74 euros en Pologne ou encore, 6,63 euros en Roumanie… « Dès lors, les activités parties à l’étranger pour des raisons de coût risqueraient fort, si elles revenaient, de privilégier l’automatisation », estime Vincent Vicard, du Centre d’Etudes prospectives et d’informations internationales (Cepii).

Est-ce à dire que les relocalisations profiteraient aux robots plus qu’à nos emplois ? Le sujet est plus complexe qu’il n’y paraît. Ces dernières années, les études plus ou moins alarmistes pointant du doigt l’automatisation comme responsable de la destruction des postes industriels se sont multipliées. Selon une récente note du National Bureau of Economic Research, un organisme de recherche installé à Cambridge, elle aurait ainsi détruit près de 670 000 emplois dans l’industrie américaine entre 1990 et 2007. De son côté, l’OCDE estime que l’automatisation devrait engendrer la disparition de 16,4 % des emplois en France au cours des vingt prochaines années, tandis que 32,8 % des postes seraient profondément transformés par le phénomène.

Une partie de la solution

Lorsque l’on parle de relocalisations, l’équation se pose néanmoins différemment : les robots pourraient en effet être une partie de la solution. « Ce n’est sûrement pas ce que le gouvernement a envie d’entendre, mais mieux vaut faire revenir des usines qui créent peu de jobs – mais des jobs qualifiés, liés à l’automatisation – que pas du tout », résume prosaïquement un industriel, s’interrogeant sur la stratégie à suivre pour les années à venir. L’OCDE ne dit pas autre chose : « Les affirmations qui prédisent que la relocalisation créera de nombreux de postes supplémentaires ne sont pas fondées, affirme-t-elle, dans un rapport sobrement nommé « La relocalisation : mythe ou réalité ? ». Compte tenu des investissements nécessaires, notamment dans la robotique, la production relocalisée ne créera sans doute qu’un nombre limité d’emplois supplémentaires et ils seront de plus en plus qualifiés. »

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