Quasiment stoppé par la crise, le secteur du recrutement retient son souffle
Les opérateurs traditionnels du recrutement n’avaient perdu que 30 % de leur chiffre d’affaires en 2009, au creux de la vague numérique qui a déferlé sur les années 2000. Confrontés au coronavirus, les pertes attendues en avril-mai par l’ensemble des entreprises du secteur sont bien plus élevées : de 50 % à 75 %. Le baromètre hebdomadaire de Syntec Conseil finalisé mardi 7 avril indique une chute de 70 % pour une quarantaine d’entreprises. 87% d’entre elles ont fait une demande de chômage partiel.
« Une crise aussi violente dans la réaction des entreprises, c’est une première. L’impact immédiat a été très soudain, avec un arrêt de 50 % des missions pour les non-cadres et les cadres de premier niveau », explique Isabelle Bastide, présidente de Pagegroup France, une major du secteur. Ses 700 consultants salariés recrutent, du technicien au cadre dirigeant. Toutes les semaines ne se ressemblent pas, mais, « en avril-mai, le temps ne sera pas au recrutement. La majorité des sociétés risquent de reporter jusqu’en juin. L’impact devrait être supérieur à 50 % pour tout le secteur ». Certains cabinets, comme Hays ou Korn Ferry, ont d’ailleurs refusé de s’exprimer sur le sujet, estimant qu’ils n’avaient pas assez de recul sur la situation.
Nouvelles missions
Pour les postes de cadres supérieurs, les conséquences du confinement sont moins radicales. L’attentisme prévaut. « Même dans l’agroalimentaire, la logistique et la santé, il y a un petit ralentissement sur les postes de cadres les moins urgents à pourvoir et dans le high-tech, l’interruption du travail en mode projet a réduit le nombre de missions. Seuls les cadres dirigeants ont été épargnés par le coup d’arrêt. Certains de nos clients préparent déjà le coup d’après », précise Mme Bastide.
L’indicateur de santé économique, c’est l’entrée de nouvelles missions. Au Groupe Fed, dont les 380 salariés recrutent quelque 7 000 cadres par an, le président et cofondateur Alexandre Tamagnaud se veut résolument optimiste. « J’aborde cette crise comme une occasion pour l’entreprise d’être un peu plus présente que nos concurrents. Depuis le 16 mars, les placements évoluent. Nos entreprises clientes sont à l’aise avec la visioconférence. Même si certains candidats sont réticents à valider leur embauche sans connaître leur futur environnement de travail, seule l’intégration [des nouvelles recrues] dans l’entreprise est réellement décalée. » Mais les chiffres sont têtus : « La dernière semaine de mars, on a eu 130 nouvelles missions, soit 35 % de ce que nous faisons d’habitude », reconnaît-il.