GE prêt à améliorer son plan social à Belfort

Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a sollicité au conglomérat américain d’« améliorer très significativement » un plan décidant 1 050 suppressions d’emplois.

L’usine General Electric de Belfort, le 5 février.
L’usine General Electric de Belfort, le 5 février. Vincent Kessler / REUTERS

Les menaces du gouvernement, la stratégie de la chaise vide des syndicats et la mobilisation des élus locaux sont peut-être en train de payer : le géant américain est prêt à revoir son plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) prévoyant le bannissement  de 1 050 emplois, dont 792 sur les 1 900 travailleurs de l’activité turbines à gaz de Belfort (Territoire-de-Belfort). Mais jusqu’à quel point ?

Après le comité de suivi des engagements pris en 2014 par GE lors du rachat d’Alstom Energie, réuni le 11 septembre, le ministre de l’économie et des finances s’est fait pressant. Le conglomérat américain doit « améliorer très significativement » son plan d’aménagement, a prévenu Bruno Le Maire. Car, en l’état, souligne-t-il dans un communiqué, il « entraînerait la rupture des engagements pris par GE ».

Dans la foulée, GE a déclaré qu’il « [travaillait] sur les mesures possibles pour adapter le projet de réorganisation en cours, tout en permettant de recouvrer durablement la compétitivité de l’activité gaz du site de Belfort dans un marché très dégradé ». Donc, les commandes de ces gros équipements pour centrales électriques se sont effondrées ces dernières années.

Si GE n’a pas tenu son engagement de créer 1 000 emplois nets en France, il a payé l’amende de 50 millions d’euros prévue dans l’accord de 2014. Par contre, M. Le Maire et l’intersyndicale (CGT, CFE-CGC, SUD) jugent que le plan actuel risque de vider Belfort de certains centres de décisions sur l’activité des turbines à gaz de 50 hertz, rompant ainsi ses engagements.

Négociation et pression

Le mouvement aurait déjà initié dans des activités clés (supervision des activités commerciales, stratégie de chaînes d’approvisionnement, activités de recherche et développement), touchées par le départ de certains cadres, alertent un responsable syndical.

Tout en écartant de négocier avec la direction de GE France, l’intersyndicale de Belfort menace aussi l’Etat de poursuites judiciaires pour carence à ses obligations de faire respecter l’accord de 2014. « Nous sommes satisfaits qu’il ait constaté le non-respect de l’accord et qu’il mette la pression sur GE, a réagi Philippe Petitcolin, délégué CFE-CGC. Mais si le projet évolue à la marge, on n’ira pas le négocier. » Or la procédure du PSE arrive à échéance le 21 octobre.

De sa part, le gouvernement ne prévoie pas de saisir la justice contre GE. A Bercy, on privilégie les armes de la négociation et de la pression. M. Le Maire doit s’entretenir « prochainement » avec Larry Culp, le PDG du groupe, pour lui demander d’amender le plan social et de favoriser la reconversion d’activités sur le site belfortain, qui conservera environ 3 500 salariés.

Chez GE, on indique travailler activement sur la piste de la modification d’une partie des salariés dans la fabrication de pièces pour moteurs d’avion, l’une des principales activités du conglomérat de Boston avec l’énergie et les équipements médicaux. L’usine existe à Belfort ; ouvriers et techniciens peuvent être requalifiés. Reste la question de la compétitivité du site par rapport à d’autres usines de GE Aviation dans le monde.

La réapparition du chômage partiel dans l’industrie en Allemagne

Les entreprises réduisent temporairement la durée du travail ainsi que les salaires pour faire face à la baisse de la production. Le secteur automobile est particulièrement touché.

Des voitures sont stockées au port de Bremerhaven, au nord-ouest de l’Allemagne, le 16 mai.
Des voitures sont stockées au port de Bremerhaven, au nord-ouest de l’Allemagne, le 16 mai. Martin Meissner / AP

C’est une véritable problème qui se propage. Et depuis début septembre, le phénomène s’accentue. Chaque jour qui passe apporte son lot d’entreprises industrielles qui mettent leurs travailleurs en chômage partiel. Des PME régionales aux multinationales bien placées en Bourse, aucune société du secteur industriel ne semble exemptée contre ce mal.

L’industrie automobile, est en première ligne. L’équipementier Continental, l’une des trente sociétés qui composent l’indice DAX à la Bourse de Francfort, a déjà diminué le temps de travail dans trois de ses usines en Allemagne. Entre 500 et 1 000 salariés, sur les 240 000 qu’emploie le groupe, sont touchées, selon un porte-parole. Et cela pourrait continuer : des discussions sont en cours avec les représentants du personnel avant de « prendre des décisions dans les semaines à venir », déclarait, dimanche 8 septembre, Elmar Degenhart, le patron de « Conti », à l’édition dominicale du quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung.

En Allemagne, le chômage partiel est très bien encadré. Lorsqu’une société fait face à un « imprévu », comme une baisse des commandes, elle peut faire une demande de compensation pour ses travailleurs, pour une durée allant jusqu’à douze mois. Durant cette période, l’agence fédérale pour l’emploi prend en charge jusqu’à 67 % de la perte de salaire subie par les employés en activité réduite.

Gros coup de déprime

Depuis début septembre, c’est la situation dans laquelle se trouvent plusieurs travailleurs de l’équipementier bavarois Schaeffler, principal actionnaire de Continental. « Nous avons fait une demande de chômage partiel pour six mois », déclare Jörg Schütze, président du comité d’entreprise de l’usine de Steinhagen, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, où la totalité des 420 travailleurs ne travailleront plus que trente-cinq heures maximum par semaine, contre quarante en temps normal. Leurs 250 collègues du site d’Erlangen, en Bavière, non loin du siège social de Schaeffler, sont logés à la même enseigne.

Le phénomène ne s’arrête plus. Dans la grande usine Opel, à Rüsselsheim, dans la région Rhin-Main, l’activité partielle devrait entrer en vigueur début octobre, pour une durée d’au moins trois mois, selon des documents internes qui ont fuité dans les médias allemands à la fin août. Quelque 2 600 personnes travaillent là-bas, en banlieue de Francfort. Et chez  FEV, constructeurs de moteurs de voitures et de motos, basé à Aix-la-Chapelle, au moins une partie des 2 100 salariés travailleront en horaires réduits à partir du mois prochain. Laconique, la direction assure qu’il n’y a « pas lieu de paniquer » et qu’il n’y aura pas de licenciements.

La finance a amplement bénéficié du pacte de responsabilité, malgré la chute de l’emploi

Selon la CFDT, les allégements d’impôts et de cotisations ont permis aux banques et aux assureurs d’économiser 14 milliards d’euros entre 2014 et 2018.

La CFDT Banques et assurances souligne que le montant des dividendes versés par BNP Paribas, Société générale, Crédit agricole SA et Natixis a presque doublé entre 2014 et 2018.
La CFDT Banques et assurances souligne que le montant des dividendes versés par BNP Paribas, Société générale, Crédit agricole SA et Natixis a presque doublé entre 2014 et 2018. DAMIEN MEYER / AFP

Ce fut une mesure importante de la période de François Hollande. A l’occasion de ses vœux télévisés, le 31 décembre 2013, le président de la République avait présenté un donnant-donnant aux entreprises pour inverser la courbe du chômage : le pacte de responsabilité. C’est-à-dire une diminution des participations et de la fiscalité des sociétés, en contrepartie d’efforts sur l’emploi et le dialogue social.

Cinq ans après la mise en œuvre de ce pacte, la CFDT, qui l’avait soutenu, en a dressé un bilan strict dans le secteur financier. Les banques, surtout, « ont réalisé beaucoup plus d’économies que ce que nous avions anticipé, estime le secrétaire général de la fédération banques et assurances cédétiste. En contrepartie, elles avaient pris des engagements “petits bras”, qui n’ont même pas été respectés ».

Pour éclaircir ce que ces mesures ont rapporté au secteur, le syndicat s’est tourné vers trois cabinets d’expertise comptable – Syndex, Ethix et Sextant – travaillant régulièrement pour les représentants des travailleurs dans les banques et les compagnies d’assurance. Ces experts ont constitué un panel en utilisant les chiffres réels des entreprises, puis ils les ont extrapolés à l’ensemble du secteur.

Selon leurs calculs, les différentes mesures pour des entreprises se sont traduites par des économies amassées de 9,7 milliards d’euros pour les banques, et de 3,9 milliards pour les assureurs et les mutuelles, entre 2014 et 2018. Soit un total de près de 14 milliards d’euros en cinq ans. Ces diminutions de charges proviennent du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), du pacte de responsabilité stricto sensu (allégement de cotisations sociales, baisse du taux de l’impôt sur les sociétés…), mais aussi de mesures plus récentes comme la suppression de la taxe de 3 % sur les dividendes.

Le secteur financier n’a pas joué le jeu

Et ce n’est pas fini : les économies entassées de 2019 à 2022 devraient atteindre près de 17 milliards d’euros (9,7 milliards pour les banques, 7,2 milliards pour l’assurance), compte tenu le changement du CICE en allégement de cotisation, du maintien de certaines diminution de charges et de la nouvelle trajectoire de l’impôt sur les sociétés

En retour, le secteur financier n’a pas joué le jeu, regrette la CFDT. Les effectifs sont restés fondamentalement stables ces dernières années dans les entreprises de l’assurance, mais l’industrie bancaire perd des emplois depuis 2011. La profession embauche et offre des emplois stables, mais les recrutements ne compensent pas les départs.

La clôture de huit magasins de Gap en France

La marque américaine d’habillement s’apprête à quitter sa palce phare de l’avenue des Champs-Elysées.

Gap diminue sa présence en France. La marque américaine d’habillement est en train de clôturer 8 de ses 28 points de vente en France. Après avoir fermé son magasin de Créteil-Soleil fin août, la chaîne va faire de même avec trois adresses parisiennes, rue de Rivoli, dans le centre commercial du passage du Havre, près de la gare Saint-Lazare, et boulevard Saint-Michel à proximité de la Sorbonne, fin septembre. Puis, ce sera au tour du point de vente du centre commercial des 4-Temps, à La Défense, de tirer le rideau, fin octobre.

Début de l’année prochaine, les magasins parisiens de la rue Saint-Denis, du boulevard des Capucines et de l’avenue des Champs-Elysées clôturant à leur tour, selon le calendrier fourni aux instances représentatives du personnel. L’enseigne abandonnera alors un cadre- clé qu’elle avait obtenu à grands frais et ouvert en grande pompe il y a vingt ans, au 36, de l’avenue, sur 1 700 m², à la place de l’ancien magasin de tissus Rodin.

Ce programme des clôtures relève d’un plan de restructuration annoncé en février, déclare la direction de l’enseigne. Art Peck, son PDG, avait alors déclaré vouloir scinder le groupe, Gap Inc., en deux unités, en distinguant The Old Navy, son magasin d’habillement bon marché, de ses chaînes Gap, Banana Republic, Athleta et Hill City. Ce projet de scission, dont les détails doivent être présentés, jeudi 12 septembre à New York, s’accompagne de mesures drastiques de réduction de coûts comprenant la fermeture de 230 magasins dans partout dans le monde dans les deux ans. L’opération doit, à terme, générer 90 millions de dollars (82 millions d’euros) d’économies par an.

Le groupe de San Francisco veut ainsi se relancer et optimiser sa rentabilité. En 2018, dans ses 3 666 magasins, les ventes ont stagné, arrivant à 16,6 milliards de dollars sur l’exercice clos en février 2019. Celles de son enseigne historique se sont repliées de 5 %. Et l’année a fort mal débuté : le chiffre d’affaires a baissé de respectivement 10 % et 7 %, au cours des deux premiers trimestres de l’exercice 2019.

Concurrence des prix

Les problèmes du groupe, fondé en 1969 par Doris et Don Fischer, n’existent pas d’hier. Dans les années 2000, l’enseigne, connue pour ses jeans et ses sweat-shirts, n’est pas arriver à résister à la concurrence des prix du suédois H&M et de l’espagnol Inditex connu pour ses magasins Zara. Puis, plus récemment, Primark, gros fabricant de jeans, lui a fait du tort. La vente en ligne de mode, surtout par Amazon, lui a aussi compliqué la tâche partout dans le monde.

La Cour de cassation augmente l’espace du préjudice inquiétude à toute substance toxique

Tout travailleurs est face à une substance dangereuse ou toxique pourra demander réparation à son employeur, du fait des obligations de sécurité de ce dernier.

Un ouvrier du bâtiment retire un revêtement d’amiante.
Un ouvrier du bâtiment retire un revêtement d’amiante. Alain Le Bot / Photononstop / Alain Le Bot / Photononstop

La Cour de cassation a barré, le 11 septembre, les arrêts de la cour d’appel de Metz qui avait refusé en juillet 2017 plus de 700 mineurs des Charbonnages de France (ex-Houillères du bassin de Lorraine). Ils sollicitaient des dommages et intérêts au titre du préjudice d’anxiété et au carence de l’employeur à son obligation de sécurité. Le préjudice d’anxiété permet l’indemnisation de personnes qui ne sont pas malades, mais s’inquiètent de le devenir. Les hauts magistrats ont étendu la jurisprudence sur le préjudice d’anxiété à d’autres substances que l’amiante.

L’avant-goût à ce changement avait eu lieu le 5 avril. L’assemblée plénière de la Cour de cassation avait ouvert droit à la compensation du préjudice d’anxiété des travailleurs exposés à l’amiante sur le fondement des règles de droit commun de la responsabilité civile. Dès lors, tout travailleurs qui justifiait d’une exposition à l’amiante générant un risque élevé de développer une pathologie grave était en droit de se retourner contre son employeur pour manquement à son obligation de sécurité.

« Décision magnifique »

Le 11 septembre, la Cour de cassation s’est également appuyée sur les « règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur » (art. L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail), en les adaptant cette fois à tout « salarié qui justifie d’une exposition à une substance nocive ou toxique générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’une telle exposition ».

L’Association des victimes de l’amiante et autres polluants (AVA) s’est félicitée mercredi de cette mesure, mais s’inquiète des pénuries à prouver le préjudice subi. « C’est une décision magnifique. Des centaines d’anciens ouvriers des mines de Lorraine vont pouvoir prétendre à une indemnisation, du fait de leur exposition à l’amiante comme à d’autres substances toxiques », a déclaré à l’AFP Me Manuela Grévy, l’avocate des mineurs.

Les mineurs lorrains, sont face à des substances cancérogènes, faisaient surtout valoir une exposition à la poussière de silice et aux hydrocarbures polycycliques, dont ils étaient mal protégés. Les témoignages rapportés dans l’arrêt de la Cour de cassation sont accablants : « Pour nous protéger de toute cette poussière, il nous fallait des masques de protection, lorsqu’on avait la chance d’en avoir, ce qui était rare, ils étaient rapidement inutilisables ou hors service », déclare l’un d’eux.

A la décharge de l’employeur, plusieurs rapports de représentants du personnel font apparaître que lorsque des observations étaient faites sur la sécurité, l’exploitant y apportait une réponse. La cour d’appel de Metz avait jugé que « l’employeur avait pris toutes mesures nécessaires de protection ». Ceci sans donner de « base légale à sa décision », a déclaré la Cour de cassation. L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Douai.

L’Etat de la Californie veut assujettir Uber à salarier ses conducteurs

La loi approuvée mardi par le sénat de l’Etat américain veut améliorer la définition du salariat pour y inclure les travailleurs indépendants « ubérisés ». 

L’élue démocrate de la chambre de Californie Lorena Gonzalez lors d’une manifestation pour sa proposition de loi, le 28 août au capitole californien, à Sacramento.
L’élue démocrate de la chambre de Californie Lorena Gonzalez lors d’une manifestation pour sa proposition de loi, le 28 août au capitole californien, à Sacramento. Rich Pedroncelli / AP

Le sénat de Californie a adopté, le 10 septembre, une proposition de loi démocrate qui vise à requalifier les travailleurs indépendants de l’économie « ubérisée » en salariés, afin qu’ils soient mieux protégés et qu’ils puissent avoir un salaire minimal. Le texte doit encore être voté à l’assemblée de Californie afin d’être après soumis à la signature du gouverneur, qui a promis de le faire. Le texte entrerait alors en application le 1er janvier 2020.

Uber et Lyft, les deux entreprises de transport à la demande surtout visées par ce texte, disent qu’une telle obligation améliorerait leurs tarifs et, particulièrement, priverait ses conducteurs de la liberté dont ils disposent comme travailleurs indépendants, payés à la course. Ces entreprises envisagent de soumettre la question au scrutin dans les prochaines élections, en 2020. Ce texte vise également, par exemple, les livreurs de repas à vélo.

En première ligne des débats de régulation de cette nouvelle économie, la Californie, qui a vu apparaître ces géants sur ses terres, pourrait armer des idées ailleurs. Selon le journal américain Nex York Times d’autres Etats américains, comme celui de Washington ou l’Oregon, pourraient s’inspirer d’une telle disposition pour leurs propres législations. Une telle mesure bouleverserait le fonctionnement de ces récentes entreprises, qui s’appuient sur une armada de travailleurs payés à la tâche et disposant d’une faible protection sociale.

En France, une décision définitive se fait encore attendre

L’élue démocrate Lorena Gonzalez à l’origine de cette idée, « en tant que législateurs, nous ne permettrons pas aux entreprises qui se jouent du système en toute bonne conscience de continuer à faire des économies sur le dos des contribuables et des travailleurs. C’est notre travail de nous préoccuper du sort des hommes et des femmes qui travaillent, plutôt que de Wall Street et de leurs juteuses introductions en Bourse ». Une réinsertion pourrait leur ouvrir de nombreux droits : retraite, chômage, temps de travail,  maladie et salaires minimums…

Cette proposition, préentée en décembre, est la suite d’une décision  de la cour suprême de l’Etat californien. En avril de l’année dernière, elle avait déjà restreint la définition d’un travailleur indépendant afin d’en qualifier davantage en salariés, qui peuvent donc bénéficier de multiples avantages sociaux.

« Une personne qui fournit un travail ou un service contre rémunération doit être considérée comme un salarié et non pas comme un travailleur indépendant, à moins que l’entreprise démontre que cette personne n’est pas sous le contrôle ou la direction de ce donneur d’ordre lors de l’exécution du travail, qu’elle exécute un travail qui ne fait pas partie de l’activité habituelle du donneur d’ordre, et que la personne est effectivement installée comme indépendant. » D’après le texte californien « AB5 »

En France, les prud’hommes n’ont pas encore tranché définitivement un conflit entre Uber et neuf de ses chauffeurs VTC qui demandent à être requalifiés comme salariés. Nombre de tribunaux français ont cependant estimé que la liberté horaire dont ces prestataires disposaient faisait « obstacle à une reconnaissance d’un contrat de travail ».

La crise interminable des papetiers

La firme finlandaise  UPM, numéro un mondial du papier « graphique », menace de fermer son ultime usine française qui emploie 236 salariés, à Grand-Couronne, en Seine-Maritime.

A l'usine UPM Chapelle Darblay, à Grand-Couronne, en Seine-Maritime, en 2012.
A l’usine UPM Chapelle Darblay, à Grand-Couronne, en Seine-Maritime, en 2012. Raphael de Bengy I hanslucas.com / Raphael de Bengy I hanslucas.com

L’hécatombe va-t-elle se poursuivre ? Après la clôture, au printemps, faute de repreneur, de l’usine d’Arjowiggins de Bessé-sur-Braye (Sarthe) et l’expulsion de ses 568 salariés, la papeterie historique Chapelle Darblay, à Grand-Couronne, en Seine-Maritime, risque de subir le même sort. Le 10 septembre, UPM a prie la décision de mettre en vente sa dernière usine française de production de papier. Faute de repreneur d’ici à janvier 2020, le site du numéro un mondial du papier dit « graphique », qui emploie 236 salariés, clôturera.

Les syndicats de l’une des deux dernières usines de papier journal disent n’avoir rien vu venir. « Nous étions en train d’évoquer avec la direction le renouvellement de la chaudière, déclarait sur France 3, mardi, une heure à peine après l’annonce de la cession, le secrétaire général (CGT) du comité social et économique du site. Nous savons que la conjoncture est difficile, mais nous ne nous attendions pas à un tel projet. En 2014, nous avions déjà connu l’arrêt traumatisant d’une machine et le départ de 196 collègues. Aujourd’hui, c’est la cession. Nous sommes dégoûtés. »

Chapelle Darblay, passé, un temps, entre les mains du milliardaire François Pinault à la fin des années 1980, est en grande pénurie, comme tout le secteur du papier graphique en Europe. Dans un message, UPM assure que l’usine est l’une des moins compétitives du Vieux Continent, d’où son choix de la sacrifier, une assertion que rejette la CGT. D’ailleurs, depuis plusieurs années, le géant finlandais n’a pas fait mystère de sa stratégie dans l’Hexagone : il s’en retire définitivement. Sur la période, il a vendu ou fermé l’ensemble de ses sites. En 2014, lors de la cession de son usine de Docelles (Vosges), UPM n’avait pas hésité à abîmer ses machines, afin qu’elles ne tombent pas entre les mains d’un concurrent.

Des effectifs passés de 15 000 à 11 000 en cinq ans

Cette dernière annonce n’étonne pas les observateurs. Avec le passage numérique de la presse, le marché de ce produit a été divisé par deux en dix ans, selon les données de la Copacel, la fédération des fabricants de cellulose. Et, entre 2013 et 2018, pas moins de quinze papeteries ont mis la clé sous la porte en France, tandis que d’autres réduisent leur capacité de production. En cinq ans, la filière a ainsi vu ses emplois aller de 15 000 à un peu plus de 11 000, début de cette année.

face aux protagonistes de l’insertion, Macron affronte sa politique

Critiqué pour avoir génériquement diminuer les emplois aidés, Macron mise sur l’accompagnement et l’embauche dans des entreprises de droit commun.

Emmanuel Macron et quelque 200 acteurs de l’insertion réunis dans un hangar d’Ateliers sans frontières, à Bonneuil-sur-Marne (Val-de-Marne), le 10 septembre.
Emmanuel Macron et quelque 200 acteurs de l’insertion réunis dans un hangar d’Ateliers sans frontières, à Bonneuil-sur-Marne (Val-de-Marne), le 10 septembre. LUDOVIC MARIN / AFP

Dans la récente scénographie de l’acte II du quinquennat, c’est un signe qui ne trompe pas. Le 10 septembre, le Président de la République s’est rendu dans un atelier d’insertion situé à Bonneuil-sur-Marne (Val-de-Marne). Une visite de quatre heures destinée à « appuyer » la présentation du « pacte d’ambition » pour l’insertion par l’activité économique (IAE), consommé le matin même par la ministre du travail.

L’objectif de ce plan ? « Faire bénéficier les plus pauvres de la relance économique », déclarent les proches du chef de l’Etat, alors que le chômage de longue durée montre des signes de résistance. « On est en train d’avancer sur la bataille de la réduction du chômage (…) mais à mesure qu’on réduit le chômage, c’est encore plus dur pour ceux qui restent », a déclaré M. Macron devant quelque 200 acteurs de l’insertion assemblés dans un hangar d’Ateliers sans frontières, où sont notamment conditionnées les baskets de la marque Veja.

Accusé par les associations pour avoir taillé à la hache dans les emplois aidés, M. Macron a admis que ce choix a « créé des difficultés pour les publics les plus fragilisés ». Mais pas question de modifier de cap. Pour le chef de l’Etat, mieux vaut développer de nouveaux postes dans le domaine de l’IAE, plus à même, selon lui, de garantir des « emplois pérennes » à l’issue du parcours d’insertion. Le dispositif s’apparente à un vaste archipel de quelque 3 700 structures avec des formes juridiques diverses (chantiers d’insertion, etc.). « Les personnes les plus abîmées par la vie » sont prises en charge dans le but de les préparer à une embauche dans des « entreprises de droit commun », ajoute-t-on au ministère du travail.

Une trentaine de mesures très techniques

Mardi, l’exécutif a déclaré que 20 000 nouveaux postes seront créés dans ce secteur l’année prochaine et que le budget consacré à ce dispositif sera porté à un peu plus de 1 milliard d’euros (1,3 milliard à l’horizon 2022), contre 920 millions cette année. Il s’agit, en l’occurrence, d’une confirmation puisque ces orientations avaient été déclarés, il y a presque un an jour pour jour, dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté.

A l’époque, l’exécutif s’était engagé à « accueillir 100 000 salariés supplémentaires » dans le monde de l’IAE, pour aller de 140 000 à 240 000 en 2022 ; un « investissement exceptionnel de 450 millions d’euros » avait aussi été annoncé.

Devant le manque de coiffeurs, L’Oréal mise sur l’apprentissage

La marque française de produits cosmétiques a annoncé la création, à Paris, de l’école Real Campus by L’Oréal. Objectif : susciter des vocations et faire face à la crise que traverse la profession.

Real Campus by L’Oréal espère former 10 000 jeunes en dix ans.
Real Campus by L’Oréal espère former 10 000 jeunes en dix ans. Charles Platiau / Reuters

L’Oréal ouvre un centre de formation en apprentissage (CFA). Après  Korian et Sodexo, qui ont lancé un CFA aux métiers de la cuisine,  le fabricant français de produits cosmétiques a annoncé, le 10 septembre, la création de l’école Real Campus by L’Oréal à Paris, pour former des coiffeurs. L’établissement, qui s’installera début 2020 au sein des anciens locaux de l’association de la Croix-Rouge, dans le 14arrondissement de la capitale, enseignera en alternance un bachelor de coiffure et un diplôme de niveau bac + 3.

Les étudiants s’y formeront « à la coupe, à la coloration et au coiffage », déclare Nathalie Roos, directrice générale de la division produits professionnels de L’Oréal, mais aussi « au management à la gestion ». D’autre part, le programme pédagogique initiera les étudiants au rôle de l’économie numérique dans la gestion quotidienne d’un salon de coiffure. Real Campus espère former 10 000 jeunes en dix ans.

Cette création est faite pour contribuer à enrayer la crise que traverse la profession. Car « le métier n’attire plus », déclare Franck Provost. Le fondateur du groupe Provalliance, mastodonte qui exploite les enseignes Franck Provost, Jean-Louis David, Maniatis ou Saint Algue, s’inquiète de voir combien le secteur peine à recruter des apprentis. Bien que cette filière emploie 184 000 personnes en France, dans 86 000 établissements, elle ne parvient pas à pourvoir les 10 000 offres de postes d’apprentis qu’elle propose chaque année.

Relancer l’activité dans les salons

Ce programme pédagogique estampillé L’Oréal pourrait intéressé  des bacheliers, des titulaires de brevets professionnels ou de jeunes salariés en cours de reconversion professionnelle, estime M. Provost. D’autant que les étudiants apprendront à gérer et à diriger un salon de coiffure. Un enseignement qu’il juge primordiale, alors que, « en CAP [certificat d’aptitude professionnelle], on en est encore à apprendre à enrouler des permanentes ».

A terme, ce bachelor pourrait aussi contribuer à relancer l’activité dans les salons en formant des coiffeurs aux techniques numériques propres à attirer la clientèle et à la conserver. C’est un impératif pour L’Oréal. Depuis des années, le groupe, qui effectue 12 % de ses 27 milliards d’euros de chiffre d’affaires grâce aux produits capillaires destinés aux professionnels, est face à la crise du secteur. Les jeunes fréquentent moins les salons que leurs aînés. Et, faute de rentabilité ou de repreneurs, 7 000 établissements ferment chaque année dans l’Hexagone.

Les salariés affaiblis par l’instantanéité

Les messageries instantanées dictent un nouveau tempo aux échanges internes et sollicite une disponibilité parfois irréaliste aux collaborateurs.

« Nombre de salariés reconnaissent les atouts des messageries instantanées, grâce auxquelles l’essentiel peut être dit en quelques mots. Mais la médaille a, pour certains, son revers. »
« Nombre de salariés reconnaissent les atouts des messageries instantanées, grâce auxquelles l’essentiel peut être dit en quelques mots. Mais la médaille a, pour certains, son revers. » Jamie Jones/Ikon Images / Photononstop

C’est l’ultime endroit où l’on cause. Un endroit tendance,  où les discussions professionnelles en croisent d’autres plus personnelles, où l’on se demande sur le rétroplanning du nouveau projet de son service, avant de débattre du lieu où l’on se retrouvera pour déjeuner. Loin de la machine à café, les messageries instantanées comme Slack ou Microsoft Teams admettant aux équipes d’échanger le futile et l’essentiel en temps réel, tout en restant à leur poste de travail. Le succès est au rendez-vous : plusieurs dizaines de millions de salariés les utilisent à travers le monde.

C’est le cas dans le cabinet de recrutement Altaïde, où les équipes distantes (situées à Paris, à Bordeaux, en Suède, et plus tard à Barcelone) peuvent communiquer tout le temps. Comme dans beaucoup de sociétés, l’outil numérique (Slack, en l’occurrence) a d’abord été fait par les salariés, avant d’être adoubé par les dirigeants. « C’est une solution qui participe à la vie de la société, elle apporte de la cohésion et permet un travail collaboratif efficace », déclare Jacques Froissant, le fondateur de l’entreprise.

Outils chronophages et anxiogènes

« Conviviale », « pratique », « rapide »… Plusieurs salariés reconnaissent les avantages des messageries instantanées, grâce auxquelles l’essentiel peut être dit en quelques mots. Mais la médaille a, pour certains, son revers. Lorsqu’elle entend le signal sonore l’avertissant qu’elle a reçu un message, Nadia, cadre dans un grand groupe de la distribution, ressent souvent une légère tension l’envahir. « Je peux avoir dix conversations instantanées activées en même temps avec autant de demandes à traiter dans l’heure », déclare-t-elle.

Ce à quoi s’ajoutent les nombreux courriels qui arrivent durant la journée et les notifications qui les accompagnent sur son portable. « C’est très stressant, le flot est continu et le temps n’est pas extensible. » Tout le risque des échanges instantanés est là : leur praticité et leur efficacité pour obtenir rapidement une information peuvent amener un nombre croissant d’interlocuteurs à contacter un même salarié, le « noyant » sous un flot de demandes. De quoi transformer ces plates-formes souvent jugées « conviviales » en de redoutables outils chronophages et anxiogènes.

Pour Yanita Andonova, maître de conférences à l’université Paris-XIII, la question ne se limite pas aux messageries instantanées : « Les salariés sont aujourd’hui sollicités non-stop. Ils peuvent avoir deux écrans, un téléphone fixe, un portable, recevoir des pop-up les avertissant de l’arrivée d’un nouveau mail, devoir répondre à des chats instantanés… ». Une démonstration d’outils numériques qui a fait évoluer la temporalité au cœur de l’entreprise : « La réactivité immédiate est devenue une nouvelle norme (…). Même en réunion, des salariés vont répondre immédiatement aux demandes qui leur sont faites par chat, parfois au détriment de leur implication ». Ce changement de rythme a son corollaire : « Il y a, dans l’entreprise, une présomption de disponibilité permanente », déclare Mme Andonova.