« L’inquiétude de du constructeur américain Ford n’est plus tant le rendement de ses travailleurs que celle de ses responsables »

« L’inquiétude de du constructeur américain Ford n’est plus tant le rendement de ses travailleurs que celle de ses responsables »

Jim Hackett, le PDG de Ford, à Dearborn (Michigan), en août 2018.
Jim Hackett, le PDG de Ford, à Dearborn (Michigan), en août 2018. JEFF KOWALSKY / AFP

Pour faire face aux vents opposés qui vivent sur l’industrie automobile, la célèbre société de Detroit a avisé qu’elle allait annuler 7 000 postes, surtout chez ses managers. Une stratégie d’économies qui n’est pas démunie de risques.

Jim Hackett le PDG de Ford, qui vient de présenter un plan de cession de 7 000 postes dans son entreprise, a fait une concession de taille. Désormais, les employés licenciés auront quelques jours pour amalgamer leurs affaires et dire au revoir à leurs collègues de travail. « Ford est une entreprise familiale. Dire au revoir est difficile et émouvant », a-t-il déclaré. Toute familiale qu’elle est, la célèbre société de Detroit a continuellement entretenu des relations ambivalentes avec ses employés.

L’entreprise a popularisé, au début du XXe siècle, l’aménagement scientifique du travail, condition souveraine de la production de masse, de la baisse des prix et de la démocratisation de la consommation. En 1908, la première Ford T a été construite en 12 h 30. Douze ans plus tard, en 1920, la société en faisait une par minute et, en 1925, une toutes les cinq secondes.

Victoire du travail à la chaîne et de l’accroissement des cadences, au prix d’un découragement des employés tel que la société a dû doublé les salaires pour garder ses meilleurs ouvriers. Victoire aussi du management, qui a autorisé de maîtriser une telle organisation, mais échec en termes de relations sociales. L’histoire de l’entreprise est émaillée de conflits sociaux d’une rare brutalité.

Changement de conjoncture

Qu’importe, le groupe entend rester à la pointe de la productivité. Et son inquiétude n’est plus tant celle de ses ouvriers que celle de ses cadres. Les 7 000 abandons de postes annoncées toucheront essentiellement les manageurs. La firme veut passer de quatorze échelons hiérarchiques à neuf. Un manageur disposera en moyenne de sept personnes sous ses ordres au lieu de cinq actuellement. Finance, Ingénierie,  logistique, développement produit, informatique: tous les services y passeront. Le but ? Dégager 600 millions de dollars (537 millions d’euros) d’économies par an.

Malgré cela, l’entreprise n’est pas au bord du dépôt de bilan. Sur les trois premiers mois de 2019, elle a engrangé 2,4 milliards de dollars de profit opérationnel. Mais c’est à ses yeux insuffisants pour opposer les vents contraires qui se lèvent de toutes parts dans l’industrie automobile. D’abord la situation qui se retourne, aussi bien en Amérique, qu’en Europe ou en Chine. Ultérieurement, Ford souffre particulièrement en Europe. Sa part de marché, qui était de 11 % en 2006, est tombée à 6 % en 2018. Enfin, et c’est le plus sérieux, il faut dégager des ressources financières immenses pour faire face au défi du passage à la voiture électrique et autonome. Objectif : 25 milliards d’économies d’ici à 2022.

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LJD

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